Comment favoriser les vocations sacerdotales dans nos familles ?

Convaincues de la gran­deur du sacer­doce et de la voca­tion reli­gieuse, peut-​être cer­taines mères de famille s’adonnent avec assi­dui­té à la réci­ta­tion de la prière des mamans pour les voca­tions chaque pre­mier dimanche de mois ; quelle bonne réso­lu­tion certes que de vou­loir ain­si favo­ri­ser l’éclosion de nom­breuses voca­tions au sein de nos familles ; mais bien sûr, il ne fau­drait pas croire pour autant qu’alors une voca­tion sacer­do­tale est assu­rée dans le foyer d’ici quelques années… N’oublions pas qu’en plus de réci­ter cette petite prière, les mamans du vil­lage de Lu en Italie ont obte­nu un si grand nombre de voca­tions, peut-​être sur­tout par l’heure d’adoration devant le Saint-​Sacrement à laquelle elles s’étaient enga­gées les pre­miers jeu­dis de chaque mois ! Rappelons-​nous tou­jours qu’une voca­tion sacer­do­tale ou reli­gieuse res­sort de l’ordre sur­na­tu­rel, et qu’elle sera favo­ri­sée avant tout par une œuvre sur­na­tu­relle : c’est-à-dire par des œuvres accom­plies sous l’effet de la ver­tu de cha­ri­té, par des œuvres qui découlent d’une vie inté­rieure pro­fonde dans la famille.

Même si la voca­tion au sens strict et for­mel consiste dans l’appel de l’évêque au moment de la céré­mo­nie d’ordination pour répondre au besoin de prêtres pour l’Église, il faut recon­naître que dans bien des cas, dans l’histoire des voca­tions sacer­do­tales, la pre­mière pen­sée à cette grande et belle des­ti­née est entre­vue au cours des quelques années de la fin des classes du pri­maire ou du début des classes du secon­daire ; plu­sieurs prêtres d’aujourd’hui pour­raient vous témoi­gner de ce petit « appel » inté­rieur de Dieu alors qu’ils avaient entre 7 et 10 ans… Appel si impor­tant dans leur par­cours, sur­tout au moment de l’adolescence ou de la fin des études secon­daires où il sem­ble­rait que la vie entière s’offre à eux avec tous ses idéaux et ses pers­pec­tives (on rêve alors de toutes sortes de pro­fes­sions qui pour­raient aider à l’épanouissement per­son­nel…), en effet cette petite étin­celle divine d’il y a quelques années pour­ra peut-​être per­mettre à cet ado­les­cent de se repo­ser devant Dieu la ques­tion de la voca­tion sacer­do­tale cette fois-​ci de manière plus pro­chaine et concrète, mais aus­si de manière confiante et assu­rée, car cette ques­tion ne sera fina­le­ment pas nou­velle pour lui…

Mais encore une fois cette petite voix sera d’autant plus per­cep­tible par l’enfant que les parents auront eu à cœur de tout faire pour la favo­ri­ser. Aussi nous vou­drions par ces quelques lignes aider les parents à bien réa­li­ser que l’éclosion d’une voca­tion dans une famille (ce qui garde tou­jours un aspect mys­té­rieux car sur­na­tu­rel, qui nous dépasse) sera en par­tie due à l’atmosphère que les parents auront su ins­tal­ler dans leur foyer. Il y a véri­ta­ble­ment des habi­tudes de vie qui favo­risent l’éclosion des voca­tions, d’autres au contraire les en empêchent mal­heu­reu­se­ment, ou du moins les retardent ou les rendent fra­giles s’il y en a.

Mais com­ment en avoir une idée ? Pour cela, il est peut-​être oppor­tun de savoir ce que devrait faire (dans l’idéal) un enfant qui aurait déjà une cer­taine atti­rance pour la vie consa­crée, et com­ment donc favo­ri­ser ce che­mi­ne­ment (sans tom­ber tou­te­fois dans l’écueil d’avoir la voca­tion à sa place, ce qui pour­rait lui faire croire à tort qu’il a de manière cer­taine la vocation).

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Quand il s’agit d’affaire impor­tante, il ne faut pas se conten­ter de réflé­chir seul, mais il est bon de deman­der conseil. Car on ne voit pas tou­jours très clair sur soi-​même ; on manque par­fois d’objectivité…

Bien sûr la déci­sion n’est pas encore défi­ni­tive à cet âge, et de plus l’accomplissement d’un tel pro­jet dépen­dra de beau­coup d’autres fac­teurs qui ne sont pas encore pré­vi­sibles ; mais le fait de confier à un prêtre que l’enfant admire, ou à son confes­seur habi­tuel ce pro­jet entre­vu lors d’une prière devant le Saint-​Sacrement ou en assis­tant à la Messe ou autres encore… ne pour­ra être que béné­fique. Ce sera l’occasion de confier d’une cer­taine manière ce pro­jet à l’Église ; cela peut aider à bien com­prendre que ce ne sera pas un pro­jet pure­ment per­son­nel ; ce sera éga­le­ment une manière de ren­for­cer cet appel, de l” « objec­ti­vi­ser » en le sou­met­tant au juge­ment d’un prêtre qui connaît l’enfant, ses défauts et qua­li­tés ; cela peut aider aus­si à avoir un cer­tain déta­che­ment per­son­nel à ce pro­jet, de manière à être prêt à y renon­cer si un empê­che­ment majeur se présentait.

Seulement pour cela, il faut que l’enfant ait une bonne idée du prêtre : que celui-​ci ne soit donc pas sans cesse déni­gré dans les conver­sa­tions en famille ; il est néces­saire que l’enfant per­çoive qu’il y a une col­la­bo­ra­tion étroite entre ses parents et le prêtre réfé­rent ; que l’enfant ait ain­si confiance en son confes­seur, et qu’il puisse alors lui confier ses aspi­ra­tions les plus profondes.

Prière

Que l’enfant se fami­lia­rise dès que pos­sible à la prière, cet échange intime avec le Bon Dieu, notre Créateur et Maître, et notre Hôte. En effet consul­ter son confes­seur, c’est bien. Mais il y a aus­si tout un tra­vail de l’âme qui est néces­saire, et qui passe for­cé­ment par la prière. Il fau­drait que le jeune enfant trouve goût à la prière, et cela est faci­le­ment réa­li­sable si son âme est encore toute pure, mar­quée par la grâce du bap­tême qui a fait de lui un enfant de Dieu ; il a déjà reçu dans leur racine les ver­tus sur­na­tu­relles infuses, et spé­cia­le­ment les trois ver­tus théologales.

Un enfant qui se sen­ti­rait atti­ré par le sacer­doce devra recou­rir à la prière qui l’aidera à dépis­ter les dan­gers qu’il pour­rait ren­con­trer sur cette « route » et à s’en écar­ter, qui lui don­ne­ra la force de reje­ter les ten­ta­tions que le démon pour­ra sus­ci­ter en lui pour le détour­ner de son appel inté­rieur, pour qu’il puisse se main­te­nir dans ses saintes réso­lu­tions envers Dieu et son appel mal­gré les obs­tacles qu’il pour­ra rencontrer.

Apprendre à l’enfant que la prière n’est pas seule­ment une for­mule que ses lèvres récitent, mais qu’elle peut être encore l’offrande des épreuves, des ennuis, des souf­frances qui peuvent arri­ver… des sacri­fices qu’il pour­rait s’imposer… des actions qui rem­plissent ses jour­nées : en résu­mé, tout son devoir d’état accom­pli avec ardeur peut être une véri­table prière.
Qu’il com­prenne ain­si qu’il peut véri­ta­ble­ment sau­ver des âmes.

Pureté

Que l’enfant soit pré­pa­ré à avoir un cœur pur. La pure­té est bien une ver­tu néces­saire à tous, certes. Mais com­bien plus au prêtre qui doit gar­der la chas­te­té par­faite, pour ne s’occuper que de Dieu et des choses divines : célé­brer la Messe, appro­cher les âmes et soi­gner toutes leurs misères, dis­tri­buer les sacre­ments, tou­cher la divine Hostie…

Lui aus­si pour­ra être ten­té, le démon ne l’oubliera cer­tai­ne­ment pas ; ce sera alors impor­tant qu’il ait culti­vé aupa­ra­vant cette sainte crainte de Dieu, et en même temps une grande sagesse (qui fait goû­ter ces réa­li­tés célestes).

Ce serait véri­ta­ble­ment meur­trier que de lui lais­ser entre les mains l’instrument de la ten­ta­tion sans qu’il ne se soit aucu­ne­ment armé aupa­ra­vant : atten­tion donc aux smart­phones avec connec­tion à inter­net confiés aux enfants ; on n’en aura jamais assez mesu­ré les dégâts dans leur âme.

Que le jeune enfant déve­loppe une sainte pudeur, qui est la pro­tec­trice de sa pure­té : lui per­met­tant d’éviter les mau­vaises lec­tures, les mau­vais cama­rades. Une bonne habi­tude prise dans le jeune âge sera une force d’autant plus grande pour lut­ter lors des ten­ta­tions fré­quentes de l’adolescence.

Dévouement

Aider le jeune enfant à être géné­reux et à deve­nir un « homme d’honneur » : à se don­ner pour une cause noble. En effet, le prêtre doit être un homme aux sen­ti­ments éle­vés, un homme franc, un homme fidèle à la parole don­née, un homme juste.

Pie XII nous adresse des conseils très utiles dans son exhor­ta­tion Menti Nostrae ; il parle des petits sémi­na­ristes d’alors, mais aux­quels on pour­rait très bien assi­mi­ler nos jeunes enfants d’aujourd’hui qui auraient cer­taines dis­po­si­tions à la voca­tion : « On veille­ra à déve­lop­per les qua­li­tés natives et per­son­nelles de chaque enfant, tout en aigui­sant en lui la conscience de sa res­pon­sa­bi­li­té en ses actes, le juge­ment qu’il doit por­ter sur les hommes et les évé­ne­ments, l’esprit d’initiative… Les jeunes seront for­més à l’honnêteté et à la loyau­té, et ils auront, pour eux-​mêmes et pour les autres, l’estime de la droi­ture et de la fer­me­té, en même temps que l’horreur de la dupli­ci­té et de toute sorte de mensonge. »

Mais cela s’apprend dès le jeune âge avec l’aide des parents par­ti­cu­liè­re­ment, qui veille­ront à ce que leur enfant évite de suivre les mau­vais exemples de son entou­rage notam­ment en ce qui concerne le lan­gage ; ce n’est peut-​être pas facile, mais l’effort sera bien récom­pen­sé ; en effet, en écar­tant les mots gros­siers de son lan­gage, l’enfant pren­dra l’habitude d’écarter aus­si de sa pen­sée les idées gros­sières, mal­propres, et ses sen­ti­ments pour­ront alors s’imprégner natu­rel­le­ment de noblesse, et de dignité.

Notons l’importance des mou­ve­ments de jeu­nesse catho­lique (scou­tisme, croi­sade eucha­ris­tique ou autres…) pour aider à déve­lop­per chez l’enfant ce sens de l’honneur et des res­pon­sa­bi­li­tés, ce sens du renon­ce­ment pour une noble cause.

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Bien sûr, ce qui amè­ne­ra un jeune homme à ren­trer au sémi­naire, c’est avant tout sa convic­tion que Notre Seigneur Jésus-​Christ est le plus grand don que Dieu nous ait fait : Il est véri­ta­ble­ment (comme Lui-​même l’a affir­mé et prou­vé) : « La Voie, la Vérité et la Vie » (st Jean XV, 5) ; ce qui déci­de­ra ce jeune homme à ren­trer au sémi­naire c’est cette intui­tion du véri­table moyen d’être heu­reux ici-​bas et sur­tout au Ciel : le « Mihi vivere Christus est, et mori lucrum : le Christ est ma vie, et mou­rir m’est un gain » de saint Paul (à Philémon I, 21) : mou­rir à soi-​même, ne plus se faire centre de ses pré­oc­cu­pa­tions, mais rame­ner tout à Dieu.

C’est là le fruit très pré­cieux de l’esprit de sacri­fice, qui fait mou­rir pro­gres­si­ve­ment en soi tout ce qu’il y a de déré­glé pour lais­ser la pre­mière place à l’amour de Dieu et des âmes.

Ainsi se réa­li­se­ra tou­jours plus cet autre cri de saint Paul : « Je vis, mais non, ce n’est plus moi qui vis, c’est Jésus-​Christ qui vit en moi » (Galates II, 20); alors pour­quoi ne pas se mettre à son ser­vice pour « pro­lon­ger » en quelque sorte son sacer­doce ? Nous rejoi­gnons là ce que disait Mgr Lefebvre, lors d’une retraite de pré­pa­ra­tion à l’ordination sacer­do­tale en 1979 : « Le sémi­naire est fait pour connaître Notre Seigneur Jésus-​Christ, pour L’aimer, L’imiter et vivre avec Lui. C’est cela le séminaire ».

Enfin, quel moyen plus effi­cace pour assu­rer cette vie d’union avec Notre Seigneur Jésus-​Christ que le contact que l’enfant peut avoir avec Lui dans la très sainte Eucharistie ! Que les parents aient donc le sou­ci que leurs enfants puissent autant que pos­sible assis­ter à la Messe ; et que très tôt les enfants en aient un véri­table amour.

Abbé François-​Régis de Bonnafos

Source : La Voix des clo­chers en Périgord n°60