Jean-Paul II

264e pape ; de 1978 à 2005

18 mai 1998

Motu proprio Ad tuendam fidem

Sur des vérités tranchées de manière définitive et devant être tenues par tous

Donné à Rome, près de Saint-​Pierre, le 18 mai
1998, en la ving­tième année de mon Pontificat.

Lettre apos­to­lique en forme de Motu Proprio AD TUENDAM FIDEM
par laquelle sont insé­rées plu­sieurs normes dans le Code de Droit
cano­nique et dans le Code des Canons des Églises orientales

Pour défendre la foi de l’Église catho­lique contre les erreurs for­mu­lées par cer­tains fidèles, sur­tout ceux qui s’a­donnent aux dis­ci­plines de la théo­lo­gie, il m’a sem­blé abso­lu­ment néces­saire, à moi dont la fonc­tion pre­mière est de confir­mer mes frères dans la foi (cf. Lc 22, 32), que, dans les textes en vigueur du Code de Droit cano­nique et du Code des Canons des Églises orien­tales, soient ajou­tées des normes qui imposent expres­sé­ment le devoir d’adhé­rer aux véri­tés pro­po­sées de façon défi­ni­tive par le Magistère de l’Église, men­tion­nant aus­si les sanc­tions cano­niques concer­nant cette matière.

1. Depuis les pre­miers siècles jus­qu’à nos jours, l’Église pro­fesse les véri­tés sur la foi au Christ et sur le mys­tère de sa rédemp­tion, qui ont été par la suite regrou­pées dans les Symboles de la foi ; aujourd’­hui, en effet, les fidèles connaissent bien, et pro­clament dans la célé­bra­tion solen­nelle et fes­tive de la Messe, le Symbole des Apôtres ou le Symbole de Nicée-​Constantinople.

Ce Symbole de Nicée-​Constantinople est inclus dans la Profession de foi récem­ment éla­bo­rée par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi1, pro­fes­sion impo­sée expres­sé­ment à cer­tains fidèles qui doivent l’é­mettre en assu­mant une charge direc­te­ment ou indi­rec­te­ment liée à un tra­vail de recherche plus appro­fon­die sur les véri­tés rela­tives à la foi ou aux mœurs, ou bien asso­ciée à un pou­voir par­ti­cu­lier dans le gou­ver­ne­ment de l’Église2.

2. La Profession de foi, qui com­mence, comme il convient, par le Symbole de Nicée-​Constantinople, com­prend en outre trois pro­po­si­tions ou para­graphes qui entendent expli­ci­ter les véri­tés de la foi catho­lique que, au cours des siècles, l’Église, sous la conduite de l’Esprit Saint qui l”«introduira dans la véri­té tout entière » (Jn 16, 13), a scru­tées ou scru­te­ra plus pro­fon­dé­ment3.

Le pre­mier para­graphe, ain­si rédi­gé : « Je crois éga­le­ment d’une foi ferme tout ce qui est conte­nu dans la parole de Dieu écrite ou trans­mise et que l’Église, par un juge­ment solen­nel ou par le Magistère ordi­naire et uni­ver­sel, demande de croire comme divi­ne­ment révé­lé »4, pose cette affir­ma­tion à juste rai­son et se retrouve sous forme de pres­crip­tion dans la légis­la­tion uni­ver­selle de l’Église, aux canons 750 du Code de Droit cano­nique5 et 598 du Code des Canons des Églises orien­tales6.

Le troi­sième para­graphe, qui déclare : « De plus, avec une sou­mis­sion reli­gieuse de la volon­té et de l’in­tel­li­gence, j’adhère à l’en­sei­gne­ment pro­po­sé tant par le Pontife romain que par le Collège des évêques, lors­qu’ils exercent le Magistère authen­tique, même s’ils n’en­tendent pas le pro­cla­mer par un acte défi­ni­tif »7, se retrouve dans les canons 752 du Code de Droit cano­nique8 et 599 du Code des Canons des Églises orien­tales9.

3. Toutefois, le deuxième para­graphe, où il est affir­mé : « J’adopte fer­me­ment aus­si et je fais miennes toutes les véri­tés de la doc­trine concer­nant la foi ou les mœurs, et cha­cune d’entre elles, que l’Église pro­pose comme défi­ni­tives »10, n’a aucun canon qui lui cor­res­ponde dans les Codes de l’Église catho­lique. Ce para­graphe de la Profession de foi est d’une grande impor­tance, car il indique les véri­tés néces­sai­re­ment liées à la révé­la­tion divine. Ces véri­tés, qui, dans l’é­tude appro­fon­die de la doc­trine catho­lique, témoignent d’une ins­pi­ra­tion par­ti­cu­lière de l’Esprit divin pour que l’Église ait une meilleure intel­li­gence de telle ou telle véri­té rela­tive à la foi ou aux mœurs, sont liées entre elles, tant pour des rai­sons his­to­riques que par une cohé­rence logique.

4. C’est pour­quoi, pous­sé par la néces­si­té dont j’ai par­lé ci-​dessus, j’ai déci­dé de com­bler comme il suit cette lacune de la légis­la­tion universelle :

A) Le canon 750 du Code de Droit cano­nique aura désor­mais deux para­graphes, le pre­mier com­pre­nant le texte du canon actuel­le­ment en vigueur, le second com­por­tant un nou­veau texte ; le texte com­plet de ce canon 750 sera donc le suivant :

Can. 750, § 1. On doit croire de foi divine et catho­lique tout ce qui est conte­nu dans la parole de Dieu écrite ou trans­mise par la tra­di­tion, c’est-​à-​dire dans l’u­nique dépôt de la foi confié à l’Église et qui est en même temps pro­po­sé comme divi­ne­ment révé­lé par le Magistère solen­nel de l’Église ou par son Magistère ordi­naire et uni­ver­sel, à savoir ce qui est mani­fes­té par la com­mune adhé­sion des fidèles sous la conduite du Magistère sacré ; tous sont donc tenus d’é­vi­ter toute doc­trine contraire.

§ 2. On doit aus­si adop­ter fer­me­ment et faire sien tous les points, et cha­cun d’eux, de la doc­trine concer­nant la foi ou les mœurs que le Magistère de l’Église pro­pose comme défi­ni­tifs, c’est-​à-​dire qui sont exi­gés pour conser­ver sain­te­ment et expo­ser fidè­le­ment le dépôt de la foi ; celui qui repousse ces points qui doivent être tenus pour défi­ni­tifs s’op­pose donc à la doc­trine de l’Église catholique.

Dans le canon 1371, n. 1, du Code de Droit cano­nique, il convient d’a­jou­ter une réfé­rence au canon 750, § 2 ; le texte de ce canon 1371 sera donc :

Can. 1371. Sera puni d’une juste peine :

1° qui, en dehors du cas dont il s’a­git au can. 1364, § 1, enseigne une doc­trine condam­née par le Pontife romain ou le Concile œcu­mé­nique, ou bien qui rejette avec opi­niâ­tre­té un ensei­gne­ment dont il s’a­git au can. 750, § 2, ou au can. 752, et qui, après avoir reçu une moni­tion du Siège apos­to­lique ou de l’Ordinaire, ne se rétracte pas ;

2° qui, d’une autre façon, n’o­béit pas au Siège apos­to­lique, à l’Ordinaire ou au Supérieur lorsque légi­ti­me­ment il donne un ordre ou porte une défense, et qui, après moni­tion, per­siste dans la désobéissance.

B) Le canon 598 du Code des Canons des Églises orien­tales aura désor­mais deux para­graphes, le pre­mier com­pre­nant le texte du canon actuel­le­ment en vigueur, le second com­por­tant un nou­veau texte ; le texte com­plet de ce canon 598 sera donc le suivant :

Can. 598, § 1. On doit croire de foi divine et catho­lique tout ce qui est conte­nu dans la parole de Dieu écrite ou trans­mise par la tra­di­tion, c’est-​à-​dire dans l’u­nique dépôt de la foi confié à l’Église, et qui est en même temps pro­po­sé comme divi­ne­ment révé­lé par le Magistère solen­nel de l’Église ou par son Magistère ordi­naire et uni­ver­sel, à savoir ce qui est mani­fes­té par la com­mune adhé­sion des fidèles chré­tiens sous la conduite du Magistère sacré ; tous les fidèles chré­tiens sont donc tenus d’é­vi­ter toute doc­trine contraire.

§ 2. On doit aus­si adop­ter fer­me­ment et faire sien tous les points, et cha­cun d’eux, de la doc­trine concer­nant la foi ou les mœurs que le Magistère de l’Église pro­pose comme défi­ni­tifs, c’est-​à-​dire qui sont exi­gés pour conser­ver sain­te­ment et expo­ser fidè­le­ment le dépôt de la foi ; celui qui repousse ces points qui doivent être tenus pour défi­ni­tifs s’op­pose donc à la doc­trine de l’Église catholique.

Dans le canon 1436, § 2 du Code des Canons des Églises orien­tales, il convient d’a­jou­ter quelques mots qui se réfèrent au canon 598, § 2 ; le texte com­plet de ce canon 1436 sera donc :

Can. 1436, § 1. Celui qui nie for­mel­le­ment une véri­té qui doit être crue de foi divine et catho­lique ou la met en doute, ou bien rejette tota­le­ment la foi chré­tienne et après avoir reçu une moni­tion légi­time ne se repent pas, sera puni, en tant qu’­hé­ré­tique ou apos­tat, de l’ex­com­mu­ni­ca­tion majeure ; un clerc peut en outre être puni d’autres peines, sans exclure la déposition.

§ 2. En dehors de ces cas, celui qui rejette avec opi­niâ­tre­té une doc­trine pro­po­sée comme devant être tenue pour défi­ni­tive par le Pontife romain ou le Collège des évêques exer­çant le Magistère authen­tique, ou qui sou­tient une doc­trine condam­née comme erro­née, et, après avoir reçu une moni­tion légi­time, ne se repent pas, sera puni d’une peine adéquate.

5. Tout ce que j’ai déci­dé par cette Lettre en forme de Motu pro­prio, j’or­donne que cela soit ferme et rati­fié, et je pres­cris que cela soit insé­ré dans la légis­la­tion uni­ver­selle de l’Église catho­lique, res­pec­ti­ve­ment dans le Code de Droit cano­nique et dans le Code des Canons des Églises orien­tales, comme indi­qué ci-​dessus, non­obs­tant toutes choses contraires.

Donné à Rome, près de Saint-​Pierre, le 18 mai 1998, en la ving­tième année de mon Pontificat.

Jean-​Paul II

  1. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Professio Fidei et Iusiurandum fide­li­ta­tis in sus­ci­pien­do offi­cio nomine Ecclesiæ exer­cen­do, 9 jan­vier 1989 : AAS 81 (1989), p. 105. []
  2. Cf. Code de Droit cano­nique, can. 833. []
  3. Cf. Code de Droit cano­nique, can. 747, § 1 ; Code des Canons des Églises orien­tales, can. 595, § 1. []
  4. Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. sur l’Église Lumen gen­tium (21 novembre 1964), n. 25 : AAS 57 (1965), pp. 29–31 ; Const. dogm. sur la Révélation divine Dei Verbum (18 novembre 1965), n. 5 : AAS 58 (1966), p. 819 ; Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Instruction sur la voca­tion ecclé­siale du théo­lo­gien Donum veri­ta­tis (24 mai 1990), n. 15 : AAS 82 (1990), p. 1556. []
  5. Code de Droit cano­nique, can. 750 : « On doit croire de foi divine et catho­lique tout ce qui est conte­nu dans la parole de Dieu écrite ou trans­mise par la tra­di­tion, c’est-​à-​dire dans l’u­nique dépôt de la foi confié à l’Église et qui est en même temps pro­po­sé comme divi­ne­ment révé­lé par le Magistère solen­nel de l’Église ou par son Magistère ordi­naire et uni­ver­sel, à savoir ce qui est mani­fes­té par la com­mune adhé­sion des fidèles sous la conduite du Magistère sacré ; tous sont donc tenus d’é­vi­ter toute doc­trine contraire. » []
  6. Code des Canons des Églises orien­tales, can. 598 : « On doit croire de foi divine et catho­lique tout ce qui est conte­nu dans la parole de Dieu écrite ou trans­mise par la tra­di­tion, c’est-​à-​dire dans l’u­nique dépôt de la foi confié à l’Église, et qui est en même temps pro­po­sé comme divi­ne­ment révé­lé par le Magistère solen­nel de l’Église ou par son Magistère ordi­naire et uni­ver­sel, à savoir ce qui est mani­fes­té par la com­mune adhé­sion des fidèles chré­tiens sous la conduite du Magistère sacré ; tous les fidèles chré­tiens sont donc tenus d’é­vi­ter toute doc­trine contraire. » []
  7. Cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Instruction sur la voca­tion ecclé­siale du théo­lo­gien Donum veri­ta­tis (24 mai 1990), n. 17 : AAS 82 (1990), p. 1557. []
  8. Code de Droit cano­nique, can. 752 : « Ce n’est pas vrai­ment un assen­ti­ment de foi, mais néan­moins une sou­mis­sion reli­gieuse de l’in­tel­li­gence et de la volon­té qu’il faut accor­der à une doc­trine que le Pontife suprême ou le Collège des évêques énonce en matière de foi ou de mœurs, lors­qu’ils exercent le Magistère authen­tique, même s’ils n’ont pas l’in­ten­tion de la pro­cla­mer par un acte défi­ni­tif ; les fidèles veille­ront donc à évi­ter ce qui ne concorde pas avec cette doc­trine. » []
  9. Code des Canons des Églises orien­tales, can. 599 : « Il faut accor­der non pas un assen­ti­ment de foi, mais une sou­mis­sion reli­gieuse de l’in­tel­li­gence et de la volon­té à une doc­trine que le Pontife romain ou le Collège des évêques énoncent en matière de foi ou de mœurs, lors­qu’ils exercent le Magistère authen­tique, même s’ils n’ont pas l’in­ten­tion de la pro­cla­mer par un acte défi­ni­tif ; les fidèles chré­tiens veille­ront donc à évi­ter ce qui ne concorde pas avec cette doc­trine. » []
  10. Cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Instruction sur la voca­tion ecclé­siale du théo­lo­gien Donum veri­ta­tis (24 mai 1990), n. 15 : AAS 82 (1990), p. 1557. []
21 janvier 2000
Discours pour l'inauguration de l'année judiciaire
  • Jean-Paul II