Une théologie de l’Histoire autour de l’Immaculée Conception

Conférence don­née par M. l’ab­bé Castelain lors du col­loque marial à Lyon les 27 et 28 novembre 2004.

Monsieur le Supérieur, chers confrères, mes révé­rends pères, mes très chers frères, chers fidèles et chers amis,

Dieu est maître de l’Histoire. L’Histoire, c’est ce par quoi Dieu atteint ses objec­tifs. Et pour cela, il a pla­cé au cœur, au centre de l’Histoire son Fils Jésus-​Christ : C’est lui qui est la clé de l’Histoire. Avant Lui, tout converge vers lui, après lui tout découle de Lui : tout s’ex­plique par lui et sans lui tout est inex­pli­cable. Sans Jésus-​Christ l’his­toire se trans­forme, ou plu­tôt se déforme en un his­to­ri­cisme maté­ria­liste, c’est-​à-​dire en un sys­tème phi­lo­so­phique qui ne per­çoit que des phé­no­mènes et qui masque la dimen­sion sur­na­tu­relle de l’Histoire. Témoin cette des­crip­tion de la messe par Sartre : un homme boit du vin devant des femmes age­nouillées à la lumière des bou­gies allu­mées. C’est absurde : sans le sur­na­tu­rel, l’his­toire devient absurde ! Il faut donc pour accé­der à la véri­table Histoire, y décou­vrir et l’élé­ment humain, et l’élé­ment divin. Et aujourd’­hui, toute la dif­fi­cul­té réside dans la mise en évi­dence de l’as­pect sur­na­tu­rel de l’Histoire. Et cette dif­fi­cul­té s’est trans­for­mée en men­ta­li­té. Un exemple. L’abbé Berto (+1968), dans sa cor­res­pon­dance, nous livre, au sujet de saint Louis-​Marie Grignion de Montfort, une réflexion de théo­lo­gien de l’his­toire : il s’é­tonne que ce saint soit moins connu que Louis XIV :

Figurez-​vous que j’ai trou­vé hier des enfants qui connais­saient mieux Louis XIV que le bien­heu­reux Grignion de Montfort. Si c’est votre cas, mettez-​vous vite au point juste. Les vraies vues sont les vues de Dieu. Or, au regard de Dieu, com­bien un saint qui ne fut qu’un pauvre mis­sion­naire, mais aimant la Sainte Vierge, compte plus qu’un roi qui ne fut pas un saint ! Nous nous croyons chré­tiens, et sou­vent nous ne sommes que des païens frot­tés de christianisme

Notre Dame de Joie, Correspondance de l’ab­bé V.-A. Berto, prêtre (1900–1968), NEL, Paris, 1974. Lettre du 12 mai 1936, p. 100. L’abbé Berto a été le théo­lo­gien pri­vé de Mgr Lefebvre au concile Vatican II, à par­tir de la 2° ses­sion, op. cit. p. 41–42.

Mais puisque Jésus et Marie sont insé­pa­rables et que « C’est par la Très Sainte Vierge Marie que Jésus-​Christ est venu au monde, et [que] c’est aus­si par elle qu’il doit régner dans le monde [1] » , nous pou­vons appli­quer à Marie, en matière d’Histoire, ce que nous venons de dire de Jésus : avec Lui, la Vierge Immaculée est bien au centre de l’Histoire : avant elle tout conver­ge­ra vers elle, et, après elle, tout décou­le­ra d’elle éga­le­ment. L’Annonciation et l’Incarnation, réa­li­sées dans la plé­ni­tude des temps sont des mys­tères situés au centre et au cœur de l’Histoire. Marie par son Fiat, va impri­mer, à l’ordre pro­vi­den­tiel divin, une moda­li­té mariale. Et cela, non seule­ment parce qu’elle est la Porte du ciel par laquelle Jésus-​Christ va entrer dans le monde, lui qui va modi­fier le cours des choses poli­tiques des nations ; mais aus­si parce que, Médiatrice de toutes grâces, elle va modi­fier le cours des choses dans la vie de cha­cun des pré­des­ti­nés. Car :

Une même mère ne met pas au monde la tête ou le chef sans les membres, ni les membres, sans la tête ; autre­ment ce serait un monstre de la nature ; de même, dans l’ordre de la grâce, le chef et les membres naissent d’une même mère ; et si un membre du corps mys­tique de Jésus-​Christ, c’est-​à-​dire un pré­des­ti­né, nais­sait d’une autre mère que Marie qui a pro­duit le chef, ce ne serait pas un pré­des­ti­né, ni un membre de Jésus-​Christ, mais un monstre dans l’ordre de la grâce

VD 32.

Ainsi donc, il y a une théo­lo­gie mariale de l’Histoire. En effet, l’é­tude du cours de l’Histoire humaine reçoit son éclai­rage, non seule­ment de la chris­to­lo­gie, mais aus­si de la mario­lo­gie : Dieu a déci­dé qu’a­vec son divin Fils, la Très Sainte Vierge Marie aurait son mot à dire dans son gou­ver­ne­ment divin. Et si les hommes ne peuvent se posi­tion­ner dans l’Histoire que par le Pour ou contre le Jésus-​Christ, ils ne peuvent se posi­tion­ner éga­le­ment dans le cours des choses que par la réponse au Pour ou contre l’Immaculée. Car : « C’est par Marie que le salut du monde a com­men­cé, et c’est par Marie qu’il doit être consom­mé [2]» rap­pelle le père de Montfort. Cependant, pour bien nous pla­cer dans l’es­prit du père de Montfort : si nous éta­blis­sons une théo­lo­gie mariale de l’his­toire, ce n’est que pour mieux éta­blir la théo­lo­gie de l’Histoire par Jésus-​Christ [3] . Voyons donc immé­dia­te­ment, le fon­de­ment scrip­tu­raire de la théo­lo­gie mariale de l’Histoire.

I. Le Protévangile

Dieu avait pro­phé­ti­sé cette place his­to­rique de l’Immaculée dans l’Histoire dès le para­dis ter­restre, dans ce que l’on appelle le Protévangile :

« Je met­trai des ini­mi­tiés entre toi et la femme, entre ta pos­té­ri­té et sa pos­té­ri­té : elle te bri­se­ra la tête, et toi, tu lui ten­dras des embûches au talon . »

Pie IX et Pie XII l’ont solen­nel­le­ment rap­pe­lé en ces der­niers temps à l’oc­ca­sion de la défi­ni­tion des dogmes de l’Immaculée Conception et de l’Assomption. Au terme de toute la grande Tradition mariale, depuis le IIe siècle, ces papes nous livrent le fon­de­ment scrip­tu­raire le plus ancien chro­no­lo­gi­que­ment [4], le pre­mier bibli­que­ment, le plus éle­vé théo­lo­gi­que­ment, de cette théo­lo­gie mariale de l’Histoire. Trois papes impor­tants papes retien­drons notre atten­tion : Pie IX, saint Pie X et Pie XII.

A. Pie IX, dans Ineffabilis Deus du 8 déc. 1854

Il y parle plu­sieurs fois du Protévangile. Il s’ex­prime en ces termes :

Il conve­nait qu’elle res­plen­dît tou­jours de l’é­clat de la sain­te­té la plus par­faite, qu’elle fût entiè­re­ment pré­ser­vée, même de la tache du péché ori­gi­nel, et qu’elle rem­por­tât ain­si le plus com­plet triomphe sur l’an­cien serpent.

Les Enseignements Pontificaux, Notre-​Dame, [ND] Desclée, 1958. N° 32, p. 43.

Et de nou­veau, de manière plus pré­cise encore :

Les Pères et les écri­vains ecclé­sias­tiques, nour­ris des paroles célestes, n’ont rien eu plus à cœur, dans les livres qu’ils ont écrits pour expli­quer l’Écriture, pour défendre les dogmes et ins­truire les fidèles, que de louer et d’exal­ter à l’en­vie, de mille manières et dans les termes les plus magni­fiques, la par­faite sain­te­té de Marie, son excel­lente digni­té, sa pré­ser­va­tion de toute tache du péché et sa glo­rieuse vic­toire sur le cruel enne­mi du genre humain. C’est ce qu’ils ont fait en expli­quant les paroles par les­quelles Dieu, annon­çant dès les pre­miers jours du monde les remèdes pré­pa­rés par sa misé­ri­corde pour la régé­né­ra­tion et le salut des hommes, confon­dit l’au­dace du ser­pent trom­peur, et rele­va d’une façon si conso­lante l’es­pé­rance de notre race. Ils ont ensei­gné que par ce divin oracle : Je met­trai l’i­ni­mi­tié entre toi et la femme, entre ta pos­té­ri­té et la sienne [Gen. III, 15], Dieu avait clai­re­ment et ouver­te­ment mon­tré à l’a­vance le misé­ri­cor­dieux Rédempteur du genre humain, son Fils unique, Jésus-​Christ, dési­gné sa bien­heu­reuse Mère, la Vierge Marie, et net­te­ment expri­mé l’i­ni­mi­tié de l’un et de l’autre contre le démon. En sorte que, comme le Christ […] détrui­sit […] l’ar­rêt de condam­na­tion qui était contre nous et l’at­ta­cha triom­pha­le­ment à la croix ; ain­si la Très Sainte Vierge, unie étroi­te­ment, unie insé­pa­ra­ble­ment avec lui, fut, par lui et avec lui, l’é­ter­nelle enne­mi du ser­pent veni­meux, le vain­quit, le ter­ras­sa sous son pied vir­gi­nal et sans tache, et lui bri­sa la tête.

ND 46, p. 53–54.

Et, plus loin, il reprend le même thème :

Les Pères, ont en propres termes et d’une manière expresse, décla­ré que, lors­qu’il s’a­git de péché, il ne doit, en aucune façon, être ques­tion de la sainte Vierge Marie […]. Ils ont encore pro­fes­sé que la très glo­rieuse Vierge avait été la répa­ra­trice de ses ancêtres et qu’elle avait vivi­fié sa pos­té­ri­té ; que le Très-​Haut l’a­vait choi­sie et se l’é­tait réser­vée dès le com­men­ce­ment des siècles ; que Dieu l’a­vait pré­dite et annon­cée quand il dit au ser­pent : Je met­trai l’i­ni­mi­tié entre toi et la femme ; et que, sans aucun doute, elle a écra­sé la tête veni­meuse de ce même ser­pent ; et que pour cette rai­son, ils ont affir­mé que la même Vierge bien­heu­reuse avait été, par la grâce, exempte de toute tache du péché […].

ND 52, p. 58

Et enfin, il conclut :

Nous avons la plus ferme espé­rance et la confiance la plus assu­rée que la Vierge bien­heu­reuse […], toute belle et tout imma­cu­lée, a écra­sé la tête veni­meuse du cruel ser­pent et appor­té le salut au monde.

ND 64, p. 65.

Le grand théo­lo­gien Scheeben sou­li­gna que le Protévangile est le pre­mier et le plus impor­tant argu­ment allé­gué par Pie IX en faveur du dogme de l’Immaculée Conception [5]. Disons éga­le­ment que le Protévangile, datant des début de l’Histoire humaine, se pré­sente à nous, d’ores et déjà, comme le grand prin­cipe de la théo­lo­gie mariale de l’Histoire.

B. Saint Pie X aborde le Protévangile implicitement et explicitement

Implicitement, dans son ency­clique mariale de 1904, et direc­te­ment dans une prière publiée en 1903.

1. Saint Pie X reprend donc, impli­ci­te­ment, à son compte la grande tra­di­tion du Protévangile à l’oc­ca­sion de la rédac­tion de sa grande Lettre ency­clique mariale [6] Ad diem illum, publiée le 2 février 1904 – il y a juste 100 ans -. Saint Pie X a révé­lé le 27 décembre 1908 qu’il avait tenu à relire le Traité de la vraie dévo­tion à la Sainte Vierge de saint Louis-​Marie Grignion de Montfort qui repose tout entier sur le Protévangile [7] :

Admis en audience pri­vée le 27 décembre […], le R.P. Gebhard, Procureur géné­ral de la Compagnie de Marie et des Filles de la Sagesse, a fait hom­mage à Sa Sainteté d’un exem­plaire de la nou­velle tra­duc­tion ita­lienne du Traité de la Vraie Dévotion. Plein de confiance, le père Procureur pré­sente alors un exem­plaire ita­lien de la Vraie Dévotion, relié en soie blanche. : – Le révé­ren­dis­sime père Lepidi en a entre­te­nu Votre Sainteté qui, m’a-​t-​il dit, connaît depuis long­temps le trai­té du bien­heu­reux de Montfort. – E vero – c’est vrai, dit le pape ; et, s’il vous a tout dit, il a dû vous apprendre que j’ai tenu à le relire avant de com­po­ser mon ency­clique sur la sainte Vierge.

Revue mont­for­taine Le Règne de Jésus par Marie, 15 jan­vier 1909, volume VIII, N° 1, p. 3 à 7.

C’est pour­quoi M. Rigault ose affir­mer dans son livre sur le mis­sion­naire marial :

Quand le pape Pie X com­po­sa en 1904, l’Encyclique pour le jubi­lé de l’Immaculée Conception, il relut le livre [8] du grand théo­lo­gien de la Vierge, et on a pu dire qu’il s’en impré­gna au point d’a­voir confé­ré aux pen­sées et aux paroles de Montfort la sou­ve­raine auto­ri­té de son magis­tère [9].

Il ne fai­sait, en cela, que suivre l’a­vis d’un théo­lo­gien célèbre :

Pie X sur­tout a mis, dans en relief sai­sis­sant, la doc­trine de la média­tion uni­ver­selle de Marie et de sa mater­ni­té spi­ri­tuelle dans sa belle ency­clique Ad diem illum, qui n’est en sub­stance qu’une trans­po­si­tion du livre de La vraie dévo­tion du bien­heu­reux de Montfort : le saint pon­tife était d’ailleurs un admi­ra­teur fervent du célèbre petit trai­té. Aussi bien, trouve-​t-​on, dans cette ency­clique mariale, non seule­ment les pen­sées les plus fami­lières du grand ser­vi­teur de Marie, mais sou­vent même ses expres­sions [10].

Saint Pie X assume encore indi­rec­te­ment la grande Tradition du Protévangile en bénis­sant les lec­teurs du Traité de la vraie dévo­tion à la Sainte Vierge, et en tran­chant la contro­verse à son égard. A l’oc­ca­sion de cette même audience pri­vée du 27 décembre 1908, le Procureur géné­ral des Montfortains adres­sa une sup­plique au pape Pie X en ces termes :

Très Saint Père, Moi, Hubert-​Marie Gebhard, Procureur géné­ral de la Compagnie de Marie. aux pieds de Votre Sainteté, lui pré­sente très hum­ble­ment la pre­mière ver­sion ita­lienne inté­grale, fidè­le­ment tra­duite d’a­près le texte ori­gi­nal, d’un petit ouvrage peu volu­mi­neux il est vrai, mais qu’on peut dire de la plus haute impor­tance. Il s’a­git de l’o­pus­cule inti­tu­lé : Traité de la Vraie Dévotion à la Très Sainte Vierge, ayant pour auteur le bien­heu­reux Louis-​Marie Grignion de Montfort. en quelque sorte une Somme Mariale dont la soli­di­té théo­lo­gique et la sua­vi­té mys­tique firent l’ad­mi­ra­tion de tous ceux qui en ont une fois goû­té. le sus­dit sup­pliant ose deman­der très ins­tam­ment, que Votre Sainteté ne dédaigne pas de recom­man­der la lec­ture du trai­té en ques­tion et de bénir ceux qui se dépensent pour sa plus grande expli­ca­tion et dif­fu­sion. Rome, le 27 décembre 1908.

Revue mont­for­taine Le Règne de Jésus par Marie, 15 mars 1909, volume VIII, N° 3, p. 69 à 71.

Saint Pie X répon­dit à la sup­plique, par écrit, durant l’au­dience même :

« Avant même que le Père ait le temps de dire un mot, Pie X, ache­vant de la lire, a déjà posé la sup­plique sur son bureau et sai­si sa plume. Lentement, de sa main si ferme il écrit : Accédant à vos prières, nous recom­man­dons for­te­ment le Traité de la Vraie Dévotion à la Sainte Vierge si admi­ra­ble­ment com­po­sé par le bien­heu­reux de Montfort et nous accor­dons avec amour à ses lec­teurs la béné­dic­tion apostolique. »

Revue mont­for­taine Le Règne de Jésus par Marie, 15 jan­vier 1909, volume VIII, N° 1, p. 6.

Au témoi­gnage des Montfortains [11], cette béné­dic­tion de saint Pie X est une appro­ba­tion défi­ni­tive qui met fin à toute controverse :

« Il n’est plus le temps où il fal­lait, à grands ren­forts d’é­ru­di­tion, défendre une pra­tique qui déplai­sait parce qu’elle était mécon­nue. Aujourd’hui, elle se montre au monde revê­tue d’une suprême appro­ba­tion, et elle peut conti­nuer sa trouée la tête haute et fière. Le pape a par­lé si clair que tout catho­lique comprendra. »

Texte de pré­sen­ta­tion de la réponse de Pie X à la Supplique du 27.XII.1908. Contient une repro­duc­tion de l’au­to­graphe de Pie X. Revue mont­for­taine Le Règne de Jésus par Marie, 15 mars 1909, volume VIII, N° 3, p. 69. Pour mémoire : « On a pu dire [que Pie X a] confé­ré aux pen­sées et aux paroles de Montfort la sou­ve­raine auto­ri­té de son magis­tère » affirme M. Rigault. Op. cit.

Notons tout de suite pour conclure, avant même de par­ler de Pie XII, que ce der­nier, à l’oc­ca­sion de la cano­ni­sa­tion de l’Apôtre marial, affir­me­ra que la dévo­tion du Traité n’est autre que la dévo­tion de l’Église catho­lique romaine :

« La vraie dévo­tion, celle de la Tradition, celle de l’Église, celle, dirons-​Nous, du bon sens chré­tien et catho­lique, tend essen­tiel­le­ment vers l’u­nion à Jésus, sous la conduite de Marie. Formes et pra­tiques de cette dévo­tion peuvent varier sui­vant les temps, les lieux, les incli­na­tions per­son­nelles. Dans les limites de la doc­trine saine et sûre, de l’or­tho­doxie et de la digni­té du culte, l’Église laisse à ses enfants une juste marge de liber­té. Elle a d’ailleurs conscience que la vraie et par­faite dévo­tion envers la sainte Vierge n’est point tel­le­ment liée à ces moda­li­tés qu’au­cune d’elles puisse en reven­di­quer le monopole. »

Allocution à la cano­ni­sa­tion du bien­heu­reux Père de Montfort, Rome, le 21 juillet 1947, ND, N° 434–435.

Or, que trouvons-​nous dans le Traité de la vraie dévo­tion à la sainte Vierge de saint Louis-​Marie Grignion de Montfort au sujet du Protévangile ? Nous trou­vons un grand com­men­taire tra­di­tion­nel du ver­set 15 du cha­pitre 3 de la Genèse, dans lequel il fait l’ap­pli­ca­tion his­to­rique de cette don­née scrip­tu­raire et dog­ma­tique mariale. C’est un peu long, mais c’est splendide :

« C’est prin­ci­pa­le­ment de ces der­nières et cruelles per­sé­cu­tions du diable qui aug­men­te­ront tous les jours jus­qu’au règne de l’Antéchrist, qu’on doit entendre cette pre­mière et célèbre pré­dic­tion et malé­dic­tion de Dieu, por­tée dans le para­dis ter­restre contre le ser­pent. Il est à pro­pos de l’ex­pli­quer ici pour la gloire de la très sainte Vierge, le salut de ses enfants et la confu­sion du diable. Je met­trai des ini­mi­tiés entre toi et la femme, et ta race et la sienne ; elle-​même t’é­cra­se­ra la tête, et tu met­tras des embûches à son talon. Jamais Dieu n’a fait et for­mé qu’une ini­mi­tié, mais irré­con­ci­liable, qui dure­ra et aug­men­te­ra même jusques à la fin : c’est entre Marie, sa digne Mère, et le diable, entre les enfants et ser­vi­teurs de la sainte Vierge, et les enfants et sup­pôts de Lucifer ; en sorte que la plus ter­rible des enne­mies que Dieu ait faite contre le diable est Marie, sa sainte Mère. Il lui a même don­né, dès le para­dis ter­restre, quoi­qu’elle ne fût encore que dans son idée, tant de haine contre ce mau­dit enne­mi de Dieu, tant d’in­dus­trie pour décou­vrir la malice de cet ancien ser­pent, tant de force pour vaincre, ter­ras­ser et écra­ser cet orgueilleux impie, qu’il l’ap­pré­hende plus, non seule­ment que tous les anges et les hommes, mais, en un sens, que Dieu même. Ce n’est pas que l’ire, la haine et la puis­sance de Dieu ne soient infi­ni­ment plus grandes que celles de la sainte Vierge, puisque les per­fec­tions de Marie sont limi­tées ; mais c’est pre­miè­re­ment parce que Satan, étant orgueilleux, souffre infi­ni­ment plus d’être vain­cu et puni par une petite et humble ser­vante de Dieu, et son humi­li­té l’hu­mi­lie plus que le pou­voir divin ; secon­de­ment parce que Dieu a don­né à Marie un si grand pou­voir contre les diables, qu’ils craignent plus, comme ils ont été sou­vent obli­gés d’a­vouer, mal­gré eux, par la bouche des pos­sé­dés, un seul de ses sou­pirs pour quelque âme, que les prières de tous les saints, et une seule de ses menaces contre eux que tous leurs autres tour­ments. Ce que Lucifer a per­du par orgueil, Marie l’a gagné par humi­li­té ; ce qu’Eve a dam­né et per­du par déso­béis­sance, Marie l’a sau­vé par obéis­sance. Eve, en obéis­sant au ser­pent, a per­du tous ses enfants avec elle, et les lui a livrés ; Marie, s’é­tant ren­due par­fai­te­ment fidèle à Dieu, a sau­vé tous ses enfants et ser­vi­teurs avec elle, et les a consa­crés à sa Majesté. »

Ici, au terme du com­men­taire sur l’i­ni­mi­tié divine entre l’Immaculée et le démon, je me per­mets un com­men­taire : le démon trouve nor­mal d’être humi­lié par la toute-​puissance divine ; c’est désa­gréable, mais il se fait une rai­son ! Mais être humi­lié par une femme dont la nature est infé­rieur à la sienne, c’est insup­por­table ! Voilà pour­quoi, le père de Montfort dit : « Satan, étant orgueilleux, souffre infi­ni­ment plus d’être vain­cu et puni par une petite et humble ser­vante de Dieu, et son humi­li­té l’hu­mi­lie plus que le pou­voir divin ». Reprenons la deuxième par­tie du com­men­taire qui traite main­te­nant des ini­mi­tiés entre les enfants de Marie et les sup­pôts de Satan :

« Non seule­ment Dieu a mis une ini­mi­tié, mais des ini­mi­tiés, non seule­ment entre Marie et le démon, mais entre la race de la sainte Vierge et la race du démon ; c’est-​à-​dire que Dieu a mis des ini­mi­tiés, des anti­pa­thies et haines secrètes entres les vrais enfants et ser­vi­teurs de la sainte Vierge et les enfants et esclaves du diable ; ils ne s’aiment point mutuel­le­ment, ils n’ont point de cor­res­pon­dance inté­rieure les uns avec les autres. Les enfants de Bélial, les esclaves de Satan, les amis du monde – car c’est la même chose – ont tou­jours per­sé­cu­té jus­qu’i­ci et per­sé­cu­te­ront plus que jamais ceux et celles qui appar­tiennent à la très sainte Vierge, comme autre­fois Caïn per­sé­cu­ta son frère Abel, et Esaü son frère Jacob, qui sont les figures des réprou­vés et des prédestinés. »

Une paren­thèse impor­tante : notez bien que le Père Grignion dit – ce n’est pas un com­men­taire de ma part – : « les esclaves de Satan, les amis du monde […] c’est la même chose ». Cette phrase est très impor­tante pour notre sujet, car l’es­sence du moder­nisme, c’est de vou­loir marier l’Église catho­lique et le monde, ce que l’on appelle l’ag­gior­na­men­to. Je conti­nue le com­men­taire du père de Montfort :

« Mais l’humble Marie aura tou­jours la vic­toire sur cet orgueilleux, et si grande qu’elle ira jus­qu’à lui écra­ser la tête où réside son orgueil ; elle décou­vri­ra tou­jours ses mines infer­nales, elle dis­si­pe­ra ses conseils dia­bo­liques, et garan­ti­ra jus­qu’à la fin des temps ses fidèles ser­vi­teurs de sa patte cruelle. Mais le pou­voir de Marie sur tous les diables écla­te­ra par­ti­cu­liè­re­ment dans les der­niers temps, où Satan met­tra des embûches à son talon, c’est-​à-​dire à ses humbles esclaves et à ses pauvres enfants qu’elle sus­ci­te­ra pour lui faire la guerre. Ils seront petits et pauvres selon le monde, et abais­sés devant tous comme le talon, fou­lés et per­sé­cu­tés comme le talon l’est à l’é­gard des autres membres du corps ; mais, en échange, ils seront riches en grâce de Dieu, que Marie leur dis­tri­bue­ra abon­dam­ment ; grands et rele­vés en sain­te­té devant Dieu, supé­rieurs à toute créa­ture par leur zèle ani­mé, et si for­te­ment appuyés du secours divin, qu’a­vec l’hu­mi­li­té de leur talon, en union de Marie, ils écra­se­ront la tête du diable et feront triom­pher Jésus-Christ. »

VD 51 à 54.

Il res­sort clai­re­ment de cette exé­gèse mont­for­taine tra­di­tion­nelle et mariale de Genèse III, 15 que Dieu a creu­sé un fos­sé entre Marie et le Diable, entre l’Église et le monde. C’est pour­quoi nous ne com­pre­nons pas com­ment le der­nier Concile ait pu croire que la récon­ci­lia­tion de l’Église avec le monde – c’est-​à-​dire l’Aggiornamento conci­liaire – était pos­sible.
Deux petites his­toires authen­tiques pour prou­ver, a pos­te­rio­ri, que l’ou­ver­ture au monde est une illu­sion, et que cela ne marche pas. C’est un pro­fes­seur de dogme d’un grand sémi­naire qui en a été le témoin [12]. La pre­mière se passe au moment du concile : il fait un cours sur le mot monde dans l’Écriture sainte à ses sémi­na­ristes. La liste des réfé­rences bibliques pour le mot pris en bonne part – le monde en tant que créa­ture de Dieu – est très courte ! Mais la liste des réfé­rences bibliques pour le mot pris en mau­vaise part – le monde en tant que royaume de Satan et foyer de péché – est inter­mi­nable… Que s’est-​il pas­sé ? Les élèves ont chan­gé de visage… et le pro­fes­seur de conclure : « Ce jour-​là, j’ai sen­ti, qu’entre eux et moi, se creu­sait un fos­sé infran­chis­sable ! ». Ces pauvres sémi­na­ristes étaient déjà imbi­bés de l’es­prit de l’Aggiornamento et ne pou­vait plus sup­por­ter la Parole divine révé­lée !
La deuxième his­toire – éga­le­ment vraie – est aus­si élo­quente sur l’illu­sion de cette ouver­ture au monde conci­liaire. Cela se pas­sait en été 1962, à la veille du Concile. A la fin de la pre­mière retraite sacer­do­tale – 220 prêtres du dio­cèse étaient pré­sents !- Monseigneur l’é­vêque trans­met timi­de­ment une consigne qu’il n’a­vait pas envie de trans­mettre : « si vrai­ment vous aviez une rai­son grave… si… si… si… vous pour­riez peut-​être vous mettre en cler­gy­man ou en civil… ». Éclats de rire de tous les curés ! Le len­de­main, au petit déjeu­ner, en arri­vant au réfec­toire, le pauvre pro­fes­seur se trouve devant un spec­tacle éton­nant : tous les curés sont en civil ! « Mais qu’est-​ce qui vous arrive ? » leur dit-​il. « Mon Père, on va conver­tir le monde ! » répond l’un d’eux. En juin 1963, à la fin de la nou­velle année sco­laire, on fer­mait le sémi­naire : plus de voca­tions ! Voilà qui en dit long sur la véri­table valeur de l’Aggiornamento conciliaire.

Si seule­ment les Pères conci­liaires avaient relu le Protévangile… ils auraient pu évi­ter ce genre de catas­trophe. Mais grâce au père Grignion nous voyons mieux com­ment l’Immaculée Conception brise de son pied vir­gi­nal cet Aggiornamento conci­liaire illu­soire qui n’a pas de place dans le plan divin. Et de même que l’a­pôtre Saint Jacques a écrit « Quiconque donc veut être ami de ce monde se fait enne­mi de Dieu » [13], nous pou­vons dire en toute véri­té : Quiconque donc veut être ami de ce monde se fait l’en­ne­mi de l’Immaculée.
Nous espé­rons donc, que le Saint-​Père, qui aime tant le père de Montfort – puis­qu’il a tiré sa devise [14] du Traité de la vraie dévo­tion à la sainte Vierge ; puis­qu’il est allé en pèle­ri­nage au tom­beau du père de Montfort [15]; puis­qu’il a célé­bré par une lettre spé­ciale [16], le 8 décembre 2003, le 160ème anni­ver­saire de la publi­ca­tion du même Traité – nous espé­rons que le pape sau­ra décou­vrir, grâce à l’Immaculée, les pièges de l’an­tique ser­pent et la solu­tion à la crise de l’Église qui fait rage aujourd’­hui dans l’Église, notre Mère bien-aimée.

2. Saint Pie X, reprend beau­coup plus expli­ci­te­ment le Protévangile
En publiant dès le début de son pon­ti­fi­cat une magni­fique prière qui tra­duit dans un acte de pié­té le ver­set 15 du cha­pitre 3 de la Genèse :

« Vierge très sainte, qui avez plu au Seigneur et êtes deve­nue sa Mère, Vierge Immaculée dans votre corps, dans votre âme, dans votre foi, et dans votre amour, de grâce, regar­dez avec bien­veillance les mal­heu­reux qui implorent votre puis­sante pro­tec­tion. Le ser­pent infer­nal, contre lequel fut jetée la pre­mière malé­dic­tion, conti­nue, hélas ! à com­battre et à ten­ter les pauvres fils d’Eve. Ô Vous, notre Mère bénie, notre Reine et notre avo­cate, vous qui avez écra­sé la tête de l’en­ne­mi dès le pre­mier ins­tant de votre Conception, accueillez nos prières, et, nous vous en conju­rons, unis en un seul cœur, présentez-​les devant le Trône de Dieu, afin que nous ne nous lais­sions jamais prendre aux embûches qui nous sont ten­dues, mais que nous arri­vions tous au port du salut, et qu’au milieu de tant de périls, l’Église et la socié­té chré­tienne chantent encore une fois l’hymne de la déli­vrance, de la vic­toire et de la paix. »

Prière publiée dans une lettre du 8 sep­tembre 1903, au début de son pon­ti­fi­cat. Livre bleu, Notre-​Dame du Pointet, 1992. p. 217.

Cette prière est, en quelque sorte, un résu­mé de pié­té du com­men­taire du père de Montfort. Dans cette prière, Saint Pie X nous fait deman­der à l’Immaculée concep­tion d’ac­com­plir sa mis­sion – pro­phé­ti­sée en Genèse III, 15 – dans notre vie, dans notre famille et dans notre cité… Il est bon de la connaître par cœur et de la réci­ter sou­vent pour nous assu­rer la vic­toire au cour de nos com­bats contre le démon… Il est sur­tout bon de la réci­ter pour deman­der à l’Immaculée de voir clair dans la crise de l’Église… Car toute vraie dévo­tion, authen­tique, à l’Immaculée peut don­ner aux âmes la lumière et leur faire com­prendre la néces­si­té du retour à la Tradition catho­lique pour le bien de l’Église entière. Car, selon l’en­sei­gne­ment marial du Père de Montfort :

« Jamais un fidèle dévot de Marie ne tom­be­ra dans l’hé­ré­sie ou illu­sion du moins for­melle ; il pour­ra bien errer maté­riel­le­ment, prendre le men­songe pour la véri­té, et le malin esprit pur le bon, quoique plus dif­fi­ci­le­ment qu’un autre ; mais il connaî­tra tôt ou tard sa faute et son erreur maté­rielle ; et quand il la connaî­tra, il ne s’o­pi­niâ­tre­ra en aucune manière à croire et à sou­te­nir ce qu’il avait cru véritable. »

C. Pie XII dans la Constitution apostolique Munificentissimus Deus.

Définissant l’Assomption – le 1er novembre 1950 – il reprend cette tra­di­tion mariale du Protévangile. Commençons par pré­ci­ser que Pie XII sou­ligne la connexion du dogme de l’as­somp­tion avec le dogme de l’Immaculée Conception :

« Ce pri­vi­lège res­plen­dit jadis d’un nou­vel éclat, lorsque notre pré­dé­ces­seur d’im­mor­telle mémoire, Pie IX, défi­nit solen­nel­le­ment le dogme de l’Immaculée Conception de la Mère de Dieu. Ces deux pri­vi­lèges sont, en effet, très étroi­te­ment liés. Par sa propre mort, le Christ a vain­cu le péché et la mort, et celui qui est sur­na­tu­rel­le­ment régé­né­ré par le bap­tême triomphe, par le même Christ, du péché et de la mort. Toutefois, en ver­tu d’une loi géné­rale, Dieu ne veut pas accor­der aux justes le plein effet de la vic­toire sur la mort, sinon quand vien­dra la fin des temps. C’est pour­quoi les corps mêmes des justes sont dis­sous après la mort, et ne seront réunis, cha­cun à sa propre âme glo­rieuse, qu’à la fin du monde. Cependant, Dieu a vou­lu exemp­ter de cette loi uni­ver­selle la bien­heu­reuse Vierge Marie. Grâce à un pri­vi­lège spé­cial, la Vierge Marie a vain­cu le péché par son Immaculée Conception, et de ce fait, elle n’a pas été sujette à la loi de demeu­rer dans la cor­rup­tion du tom­beau, et elle ne dut pas, non plus attendre jus­qu’à la fin du monde la rédemp­tion de son corps. C’est pour­quoi, lors­qu’il fut solen­nel­le­ment défi­ni que la Vierge Marie, Mère de Dieu, a été pré­ser­vée, dès sa concep­tion, de la tache ori­gi­nelle, les fidèles furent rem­plis d’un plus grand espoir de voir défi­nir le plus tôt pos­sible, par le suprême magis­tère de l’Église, le dogme de l’Assomption cor­po­relle de la Vierge Marie. »

ND 484 à 486, p. 298–299.

Remarquez bien ce qui est la plus impor­tant : com­ment la Vierge Marie écrase la tête du ser­pent ? Par son Immaculée Conception et par son Assomption, c’est-​à-​dire par sa vic­toire totale sur le péché et par sa vic­toire totale sue la mort, exac­te­ment comme son divin Fils. C’est donc aus­si, comme pour Jésus, une vic­toire per­son­nelle. Ceci est très impor­tant pour la suite. Continuons avec Pie XII qui, plus loin, après de nom­breux argu­ments de tra­di­tion, fait allu­sion au Protévangile :

« Tous ces argu­ments et consi­dé­ra­tions des saints Pères et des théo­lo­giens s’ap­puient sur les Saintes Lettres comme sur leur pre­mier fon­de­ment. Celles-​ci nous pro­posent, comme sous nos yeux, l’au­guste Mère de Dieu dans l’u­nion la plus étroite avec son divin Fils et par­ta­geant tou­jours son sort. […] Il faut sur­tout se sou­ve­nir que, depuis le IIe siècle, les saints Pères pro­posent la Vierge Marie comme une Eve nou­velle en face du nou­vel Adam et, si elle lui est sou­mise, elle lui est étroi­te­ment unie dans cette lutte contre l’en­ne­mi infer­nal, lutte qui devait, ain­si que l’an­non­çait le Protévangile, abou­tir à une com­plète vic­toire sur le péché et la mort qui sont tou­jours liés l’un à l’autre dans les écrits de l’Apôtre des nations. C’est pour­quoi, de même que la glo­rieuse Résurrection du Christ fut la par­tie essen­tielle de cette vic­toire et comme son suprême tro­phée, ain­si le com­bat com­mun de la bien­heu­reuse Vierge et de son fils devait se ter­mi­ner par la glo­ri­fi­ca­tion de son corps vir­gi­nal ; […]. C’est pour­quoi l’au­guste Mère de Dieu, unie de toute éter­ni­té à Jésus-​Christ, d’une manière mys­té­rieuse, par un même et unique décret de pré­des­ti­na­tion, imma­cu­lée dans sa concep­tion, Vierge très pure dans sa divine Maternité, géné­reuse Associée du divin Rédempteur qui rem­por­ta un com­plet triomphe du péché et de ses suites, a enfin obte­nu comme suprême cou­ron­ne­ment de ses pri­vi­lèges d’être regar­dée intacte de la cor­rup­tion du sépulcre, en sorte que, comme son Fils l’a­vait été après sa vic­toire sur la mort, elle aus­si fut éle­vée, dans son corps et dans son âme, à la gloire suprême du ciel ou, Reine, elle res­plen­di­rait à la droite de son fils, le Roi immor­tel des siècles. »

ND 518 à 520, p. 314 à 316.

A la suite de ces deux pro­cla­ma­tions, un théo­lo­gien anti-​moderniste dont on ne peut plus taire le nom dans une his­toire de l’exé­gèse dans la crise de l’Église, conclut ainsi :

« Personne ne peut dou­ter que le Protévangile, inter­pré­té à la lumière de la Tradition catho­lique et de l’en­sei­gne­ment des sou­ve­rains pon­tifes, ne parle de Marie quand il parle de semen Mulieris … [sa des­cen­dance] et cela non seule­ment par une quel­conque accom­mo­da­tion ora­toire et poé­tique, mais dans un sens authen­tique et propre, enten­du et expri­mé par Dieu Lui-même. »

Mgr Spadafora, in Marianum 13, 1953, pp. 1–21. Cité dans Sisinono de juillet août 1996, p. 3.

C’est pour­quoi, nous sommes pei­nés de savoir que le Saint-​Père, ait dit, dans sa caté­chèse mariale du mer­cre­di du 29 mai 1996 :

« La Tradition et le Magistère ont indi­qué dans ce que l’on appelle le Protévangile, une source scrip­tu­raire de la véri­té de l’Immaculée Conception de Marie. Ce texte a ins­pi­ré, à par­tir de son ancienne ver­sion latine : Elle t’é­cra­se­ra la tête, de nom­breuses repré­sen­ta­tions de l’Immaculée écra­sant le ser­pent sous ses pieds ; Nous avons déjà eu l’oc­ca­sion de rap­pe­ler pré­cé­dem­ment que cette ver­sion ne cor­res­pond pas au texte hébreu, dans lequel ce n’est pas la femme, mais plu­tôt sa des­cen­dance, son des­cen­dant, qui doit écra­ser la tête du ser­pent. Ce texte attri­bue donc, non pas à Marie, mais à son Fils la vic­toire sur Satan. Cependant, comme la concep­tion biblique sup­pose une soli­da­ri­té pro­fonde entre parents et des­cen­dance, la repré­sen­ta­tion de l’Immaculée écra­sant le ser­pent est cohé­rente avec le sens ori­gi­nal du pas­sage, non par son propre pou­voir, mais par la grâce du Fils. »

Osservatore Romano du 30 mai 1996, p. 4.

Il y a là une rup­ture avec la grande Tradition mariale. En fait, la solu­tion de ce pro­blème exé­gé­tique consiste en ceci : l’hé­breu parle de la des­cen­dance qui écra­se­ra la tête du démon. Cette des­cen­dance du texte hébreu inclut Jésus et Marie. Les tra­duc­tions, par l’u­sage du mas­cu­lin ou du fémi­nin, feront res­sor­tir l’as­pect soit chris­to­lo­gique, soit mario­lo­gique du mys­tère. La tra­duc­tion grecque uti­lise le mas­cu­lin pour faire res­sor­tir l’as­pect chris­to­lo­gique du Protévangile. La tra­duc­tion latine emploie le fémi­nin pour faire res­sor­tir l’as­pect mario­lo­gique du Protévangile. Ce choix du tra­duc­teur est déli­bé­ré, car les deux gram­maires pres­crivent, dans le cas de cette tra­duc­tion à par­tir de l’Hébreu, le neutre. Chaque tra­duc­tion décrit le même mys­tère sous un aspect dif­fé­rent, aspects qui ne s’ex­cluent pas, mais sont com­plé­men­taires. Il y a sim­ple­ment que, pour arri­ver à ce résul­tat, il est néces­saire de faire une entorse aux règles de la gram­maire. Il en est de même pour l’ex­pres­sion Au Nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit : le mot Nom est au sin­gu­lier, pour­tant, gram­ma­ti­ca­le­ment, ce mot devrait être au plu­riel puis­qu’il y a trois per­sonnes qui sont concer­nées. Forcer la gram­maire dans ce cas ferait tom­ber dans une for­mule poly­théiste. De même pour le Protévangile : for­cer la gram­maire c’est sup­pri­mer la dimen­sion mariale du mys­tère. Il faut donc se rap­pe­ler que les études sacrées ne peuvent pas être abor­dée de manière pro­fane, comme le rap­pelle saint Pie X dans sa Lettre ency­clique Pascendi expli­quant le moder­nisme. Il faut abor­der les ques­tions sacrées avec les yeux de la Foi et à la lumière de la Tradition. La théo­lo­gie est tout à fait « scien­ti­fique » : elle a ses lois et sa dis­ci­pline propres, mais il ne faut pas que le scien­ti­fique pro­fane gou­verne la théo­lo­gie. La phi­lo­lo­gie seule ne suf­fit pas pour une exé­gèse catho­lique de Genèse, III, 15.

II. L’Immaculée intervient dans l’Histoire.

Nous allons voir main­te­nant com­ment l’Immaculée va venir dis­crè­te­ment encou­ra­ger et sou­te­nir l’Église dans l’Histoire moderne. Nous allons faire allu­sion, à quelques appa­ri­tions de la Vierge Marie : toutes, sans excep­tion, ont été recon­nues par l’Église catho­lique. Nous allons contem­pler cinq tableaux. Nous y ver­rons l’Immaculée inter­ve­nir spé­cia­le­ment pour remé­dier à la crise du sanc­tuaire, pour contre­car­rer l’er­reur du libé­ra­lisme et pour neu­tra­li­ser le fléau du communisme.

A. Au XVIe siècle à Manrèse.

C’est durant ce siècle que le fléau du pro­tes­tan­tisme, qui est à l’o­ri­gine de la crise néo-​protestante actuelle, va se déve­lop­per avec Luther. Le Bon Dieu va sus­ci­ter saint Ignace pour l’en­rayer. L’Immaculée va éga­le­ment inter­ve­nir : c’est elle qui va ins­pi­rer à saint Ignace, dans la grotte de Manrèse, les fameux Exercices spirituels :

« Saint Ignace apprit de la Mère de Dieu elle-​même com­ment il devait com­battre les com­bats du Seigneur. Ce fut comme de ses mains qu’il reçut ce code si par­fait dont tout sol­dat de Jésus-​Christ doit se servir. »

Pie XI, Lettre Meditantibus nobis, 3.XII.1922, cité in Livre Bleu [LB], Le Pointet, 1992, p. 296.

Notons que la crise litur­gique actuelle remonte éga­le­ment à la révolte de Luther, car Bugnini, l’ar­ti­san de la réforme litur­gique de Paul VI, disait qu’il fal­lait, dans cette réforme conci­liaire, « écar­ter toute pierre qui pour­rait consti­tuer l’ombre d’un risque d’a­chop­pe­ment ou de déplai­sir pour nos frères sépa­rés » [17]. Mais l’Immaculée appor­te­ra sa réponse le siècle suivant…

B. Au XVIIe siècle à Quito.

La Vierge Immaculée va donc inter­ve­nir dans la crise du sanc­tuaire qui débute, en réa­li­té, avec le pro­tes­tan­tisme, car celle que nous connais­sons aujourd’­hui – dénon­cée vigou­reu­se­ment par le Saint Siège [18] lui-​même en 2003 – n’est qu’un écho de celle inau­gu­rée par Luther au XVIe siècle.
Or, que voit-​on du côté de la Vierge Immaculée ? Le 2 février 1634, à Quito, capi­tale de l’Équateur, la Mère Marie-​Anne de Jésus Torres, de l’Ordre de l’Immaculée Conception, priait devant le Saint-​Sacrement quand, subi­te­ment, la lampe qui brillait devant l’au­tel s’é­tei­gnit. Comme elle essayait de la ral­lu­mer, une lumière sur­na­tu­relle inon­da l’é­glise : « Fille ché­rie de mon cœur, je suis Marie du Bon Suceso, etc. ». Après ces paroles, Notre-​Dame s’est mise à par­ler de l’Ordre de l’Immaculée Conception et spé­cia­le­ment de la Conception de Quito. La Vierge continue :

« La lampe qui brûle devant l’a­mour pri­son­nier et que tu as vue s’é­teindre a beau­coup de signi­fi­ca­tion. La pre­mière : à la fin du XIXe siècle et durant une grande par­tie du XXe siècle, diverses héré­sies foi­son­ne­ront sur cette terre alors répu­blique libre. La lumière pré­cieuse de la foi s’é­tein­dra dans les âmes en rai­son de la cor­rup­tion presque totale des mœurs […]. La seconde : Mes com­mu­nau­tés seront déser­tées […]. Combien de vraies voca­tions péri­ront par manque de direc­tion adroite, pru­dente pour les for­mer […]. Le troi­sième motif pour lequel la lampe s’est éteinte, c’est qu’en ce temps-​là l’at­mo­sphère sera rem­plie de l’es­prit d’im­pu­re­té qui, telle une mer immonde, inon­de­ra les rues, les places et endroits publics. Cette liber­té sera telle qu’il n’y aura plus au monde d’âme vierge. Un qua­trième motif est que, s’é­tant empa­ré de toutes les classes sociales, les sectes ten­dront, avec une grande habi­li­té, de péné­trer dans les familles pour perdre jus­qu’aux enfants. Le démon se glo­ri­fie­ra de se nour­rir d’une manière per­fide du cœur des enfants. C’est à peine si l’in­no­cence enfan­tine sub­sis­te­ra. Ainsi les voca­tions sacer­do­tales se per­dront […]. Les prêtres s’é­car­te­ront de leurs devoirs sacrés et dévie­ront du che­min tra­cé par Dieu. Alors, l’Église subi­ra la nuit obs­cure à cause de l’ab­sence d’un pré­lat et d’un Père qui veille avec amour, dou­ceur, force et pru­dence, et beau­coup d’entre eux per­dront l’es­prit de Dieu, met­tant en grand dan­ger leur âme. Prie avec insis­tance, crie sans te fati­guer et pleure sans cesse avec des larmes amères dans le secret de ton cœur, deman­dant à Notre Père du Ciel que, par amour pour le Cœur Eucharistique de mon très saint Fils, pour son Précieux Sang ver­sé avec tant de géné­ro­si­té et pour les pro­fondes amer­tumes et dou­leurs de sa Passion et de sa mort, il prenne en pitié ses ministres et qu’il mette fin à des temps si funestes, envoyant à l’Église le pré­lat qui devra res­tau­rer l’es­prit de ses prêtres. Ce fils que je ché­ris, celui que mon divin Fils et moi aimons d’un amour de pré­di­lec­tion, nous le com­ble­rons de beau­coup de dons, de l’hu­mi­li­té de cœur, de la doci­li­té aux diverses ins­pi­ra­tions, de force pour défendre les droits de l’Église […] Il condui­ra avec une dou­ceur toute divine les âmes consa­crées au ser­vice divin […]. Il tien­dra en sa main la balance du sanc­tuaire pour que tout se fasse avec poids et mesure en sorte que Dieu soit glo­ri­fié. Ce pré­lat et père, sera le contre­poids de la tié­deur des âmes consa­crées dans le sacer­doce et la reli­gion. […] Il y aura une guerre affreuse où cou­le­ra le sang des reli­gieux […]. Alors arri­ve­ra mon heure : de façon stu­pé­fiante, je détrui­rai l’or­gueil de Satan, le met­tant sous mes pieds, l’en­chaî­nant dans l’a­bîme infer­nal […]. Le cin­quième motif pour lequel la lampe s’est éteinte est que […] le peuple devien­dra indif­fé­rent aux choses du bon Dieu, pre­nant l’es­prit du mal et se lais­sant entraî­ner à tous les vices et pas­sions. […] Ma chère fille, s’il t’é­tait don­né de vivre en ces temps funestes, tu mour­rais de dou­leur en voyant se réa­li­ser tout ce que je t’ai annoncé. »

Cité dans Fideliter N°66, de novembre-​décembre 1988, p. 66 à 69.

Je vous laisse faire l’ap­pli­ca­tion de cette pro­phé­tie à notre époque. Je me per­mets de vous rap­pe­ler, pour cela, que les pro­phé­ties ne sont pas faites pour nous dire quand les choses arri­ve­ront, mais pour que, lors­qu’elle arrive, nous com­pre­nions que Dieu l’a­vait bien annon­cé, et que nous recon­nais­sions qu’est arri­vé ce qui avait été prophétisé.

C. Au XVIIIe siècle, le monde déclara la guerre à Dieu.

La guerre du libé­ra­lisme, secrète, sour­noise et cachée, com­mence avec la fon­da­tion de la Franc-​Maçonnerie en 1717, c’est-​à-​dire un an après la mort – en 1716 – du père de Montfort. Parmi les deux acteurs prin­ci­paux, se trouve un pro­tes­tant roche­lais. Le père de Montfort était par­fai­te­ment au cou­rant de ce qui se tra­mait, il en avait eu l’in­tui­tion : dans son livre L’Amour de la Sagesse éter­nelle, il démasque les alchi­mistes à la recherche de la fausse sagesse. Or ces alchi­mistes consti­tuent une des deux branches à l’o­ri­gine de la Franc-​maçonnerie[19].

La guerre du libé­ra­lisme, offi­cielle, ouverte et publique com­mence avec la grande Révolution fran­çaise de 1789. Les révo­lu­tion­naires choi­sissent pour emblème de leur révolte le bon­net phry­gien, le bon­net des esclaves affran­chis à Rome : leur révolte est en réa­li­té une révolte contre la Rome catho­lique et l’Église. A cette époque le Traité de la vraie dévo­tion à la sainte Vierge dis­pa­raît comme l’a­vait pro­phé­ti­sé le père Grignion :

« Je pré­vois bien des bêtes fré­mis­santes, qui viennent en furie pour déchi­rer avec leurs dents dia­bo­liques ce petit écrit et celui dont le Saint-​Esprit s’est ser­vi pour l’é­crire, ou du moins pour l’en­ve­lop­per dans les ténèbres et le silence d’un coffre, afin qu’il ne paraisse point ; ils atta­que­ront même et per­sé­cu­te­ront ceux et celles qui le liront et rédui­ront en pra­tique. Mais n’im­porte ! Mais tant mieux ! Cette vue m’en­cou­rage et me fait espé­rer un grand suc­cès, c’est-​à-​dire un grand esca­dron de braves et vaillants sol­dats de Jésus et de Marie […] pour com­battre le monde, le diable et la nature cor­rom­pue, dans les temps périlleux qui vont arri­ver plus que jamais. »

VD 114.

Ce petit Traité va réap­pa­raître pro­vi­den­tiel­le­ment au bon moment comme nous le ver­rons bien­tôt. Disons tout de suite pour ter­mi­ner ce paral­lèle entre le père de Montfort et la Révolution, qu’il sera cano­ni­sé, en 1947, un an avant la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, qui n’est autre que la codi­fi­ca­tion juri­dique du droit révo­lu­tion­naire contraire, comme le dit Mgr Gaume, au droit de Dieu. Comme en 1715, l’Apôtre marial pré­cède la Révolution d’un an : la Vierge Immaculée ne se laisse jamais devan­cer ! Veuillez noter que 1947 est aus­si l’an­née du sacre épis­co­pal de notre fondateur…

D. Au XIXe siècle à La Rue du Bac, à Lourdes et à La Salette.

L’Immaculée va inter­ve­nir, cette fois, pour contre­car­rer les erreurs du libé­ra­lisme. Déjà, à Quito, elle avait signa­lé les erreurs des XIXe et XXe siècles. Le libé­ra­lisme est la grande erreur du XIXe, tan­dis que le com­mu­nisme est la grande erreur du XXe. Ce sont donc les appa­ri­tions de la Rue du Bac, de Lourdes et de La Salette, du XIXe siècle, qui nous inté­ressent dans cette étude de l’ac­tion de la Vierge contre le libéralisme.

En 1830, l’ap­pa­ri­tion de Notre-​Dame à Sainte Catherine Labouré à la Rue du Bac ouvre le grand cycle des appa­ri­tions mariales récentes qui vont pro­mou­voir la dévo­tion popu­laire à l’Immaculée. Ces appa­ri­tions se situent au cour du com­bat catho­lique anti-​libéral du XIXe siècle. Marie choi­sit dis­crè­te­ment une date emblé­ma­tique pour entrer dans ce com­bat : en octobre 1830, Félicité de Lamennais, père du libé­ra­lisme catho­lique dont nous souf­frons aujourd’­hui, fon­dait à Paris, avec quelques-​uns de ses dis­ciples, un quo­ti­dien, L’Avenir, qui conte­nait en germe le libé­ra­lisme catho­lique [20]. Cette appa­ri­tion de 1830 est un pré­am­bule à la pro­cla­ma­tion du dogme de l’Immaculée concep­tion [21]. Or, c’est pré­ci­sé­ment l’an­née de la pro­cla­ma­tion du dogme de l’Immaculée concep­tion, en 1854, que Dieu met un terme à la car­rière de Lamennais : en 1854 qu’il quit­tait ce monde. C’est la réponse de l’Immaculée qui prend les choses en main per­son­nel­le­ment. Quatre années plus tard, à Lourdes, à l’oc­ca­sion des appa­ri­tions à sainte Bernadette, en 1858, l’Immaculée vient confor­ter le vicaire de son Fils dans son magis­tère : « Je suis l’Immaculée Conception » dit-​elle en réponse à l’Église qui vient de pro­cla­mer le dogme.

Les appa­ri­tions de La Salette vont nous don­ner une lumière défi­ni­tive sur l’in­ter­ven­tion de l’Immaculée contre le libé­ra­lisme. Dans le cadre de cette théo­lo­gie mariale de l’Histoire, un seul pas­sage retien­dra notre atten­tion, un pas­sage du mes­sage de La Salette, mérite une atten­tion par­ti­cu­lière, parce que la Vierge Immaculée y parle des âmes qui se sont consa­crées à elle :

« J’adresse un pres­sant appel à la terre : [.] j’ap­pelle mes enfants, mes vrais dévots, ceux qui se sont don­nés à moi pour que je les conduise à mon divin Fils, ceux que je porte pour ain­si dire dans mes bras, ceux qui ont vécu de mon esprit ; enfin j’ap­pelle les Apôtres des der­niers temps, le fidèles dis­ciples de Jésus-​Christ qui ont vécu dans un mépris du monde et d’eux-​mêmes, dans la pau­vre­té et dans l’hu­mi­li­té, dans le mépris et le silence, dans l’o­rai­son et la mor­ti­fi­ca­tion, dans la chas­te­té et dans l’u­nion à Dieu, dans la souf­france et incon­nus du monde. »

Imprimatur de Mgr L’évêque de Lecce. Nihil obs­tat du 15 novembre 1879.

Notons pour com­men­cer que, si l’Incarnation a eu lieu à la plé­ni­tude des temps, Fillion, dans son com­men­taire des épîtres pré­cise que les der­niers temps ont com­men­cé avec Jésus-​Christ. Nous y sommes donc depuis 2000 ans ! Ces paroles, donc, de Notre-​Dame de la Salette, sont pré­ci­sé­ment l’é­cho du Traité de la vraie dévo­tion à la sainte Vierge du père de Montfort :

« Mais qui seront ces ser­vi­teurs, esclaves et enfants de Marie ? […] Ce seront des Apôtres véri­tables des der­niers temps, […] ce seront de vrais dis­ciples de Jésus-​Christ, qui mar­chant sur les traces de sa pau­vre­té, humi­li­té, mépris du monde et cha­ri­té, ensei­gnant la voie étroite de Dieu dans la pure véri­té, selon le saint Évangile, et non selon les maximes du monde, sans se mettre en peine ni faire accep­tion de per­sonne, sans épar­gner, écou­ter ni craindre aucun mor­tel, quelque puis­sant qu’ils soit. Ils auront dans leur bouche le glaive à deux tran­chants de la parole de Dieu ; ils por­te­ront sur leurs épaules l’é­ten­dard ensan­glan­té de la Croix, le cru­ci­fix dans la main droite, le cha­pe­let dans la gauche, les sacrés Noms de Jésus et de Marie sur leur cœur, et la modes­tie et mor­ti­fi­ca­tion de Jésus-​Christ dans toute leur conduite. »

VD N° 56 à 59.

Il s’a­git presque d’un mot à mot de la Vierge Marie, vis-​à-​vis du Traité. Or, le Traité de la vraie dévo­tion a été retrou­vé le 22 avril 1842, soit quatre années avant les appa­ri­tions de Notre-​Dame de la Salette. Cette année-​là était pré­ci­sé­ment l’é­poque à laquelle les œuvres du père de Montfort allaient être envoyées à Rome dans le cadre de l’exa­men de sa cause. La pro­vi­dence orga­ni­sait tout pour que soit retrou­vée la pièce maî­tresse des œuvres de l’Apôtre marial [22]. La voix du Traité devien­dra, en quelque sorte celle de Rome, selon l’en­sei­gne­ment de saint Pie X et de Pie XII comme nous l’a­vons déjà vu.

Une fois encore, avec La Salette, la Vierge Marie vient encou­ra­ger l’Église dans la voie mariale. Mais, sur­tout, elle vient don­ner le remède dont les âmes ont besoin. Un fait signi­fi­ca­tif nous le fera com­prendre : en 1997 a été retrou­vé un manus­crit de Victor Schoelcher, sous-​secrétaire aux colo­nies, Franc-​maçon, reven­di­quant l’a­bo­li­tion de l’es­cla­vage. Ce docu­ment est le plus ancien en la matière : il est daté de 1842. C’est-​à-​dire l’an­née même de la décou­verte du Traité. Mais tan­dis que la maçon­ne­rie tra­vaille acti­ve­ment à cette abo­li­tion, elle ins­taure un escla­vage beau­coup plus dur beau­coup plus grave et beau­coup plus périlleux : celui du libé­ra­lisme, ou du droit à l’er­reur et au péché. Contre cet escla­vage du démon, l’Immaculée nous indique le remède, celui conte­nu dans le Traité de la vraie dévo­tion : c’est-​à-​dire le Saint Esclavage. Car, comme le dit l’au­teur du Traité :

« Avant le bap­tême, nous étions esclaves du diable ; le bap­tême nous a ren­dus esclaves de Jésus-​Christ : ou il faut que les chré­tiens soient esclaves du diable, ou esclaves de Jésus-​Christ [.]. Tout ce qui convient à Dieu par nature, convient à Marie par grâce, disent les saints ; en sorte que, selon eux, n’ayant tous deux que la même volon­té et la même puis­sance, ils ont tous deux les mêmes sujets, ser­vi­teurs et esclaves. On peut donc, sui­vant le sen­ti­ment des saints et de plu­sieurs grands hommes, se dire et se faire l’es­clave amou­reux de la très sainte Vierge, afin d’être par là plus par­fai­te­ment esclave de Jésus-Christ. »

VD N°73

Bien enten­du, d’un côté, il faut pré­ci­ser qu’il s’a­git d’un escla­vage d’a­mour, volon­taire, qui n’a rien à voir avec l’es­cla­vage odieux éta­bli entre les hommes. Mais, d’un autre côté, il faut pré­ci­ser que l’ex­pres­sion Saint Esclavage est en quelque sorte incon­tour­nable, non­obs­tant les affir­ma­tion d’un jésuite, qui écrit [23] à ce sujet :

« Notre sen­si­bi­li­té cultu­relle elle-​même édu­quée […] à la démo­cra­tie […] rejette spon­ta­né­ment un mot qui évoque d’autres temps. […] l’o­rien­ta­tion des his­to­riens de cette spi­ri­tua­li­té qui sont por­tés à évi­ter cette for­mu­la­tion, en lui sub­sti­tuant une ter­mi­no­lo­gie plus adap­tée à la men­ta­li­té actuelle, nous semble très oppor­tune […]. D’autres for­mu­la­tions sont pen­sables […] qui ne tra­hissent pas la pen­sée pro­fonde du saint et qui le placent dans la culture d’au­jourd’­hui. [24] »

En effet, toute la Tradition est una­nime au sujet de la pra­tique chré­tienne du Saint Esclavage [25] : Jésus « a pris la pris la forme d’es­clave pour notre amour : Formam ser­vi acci­piens », et la Sainte Vierge s’est dite « l’es­clave du Seigneur » [26]. Saint Paul [27] comme saint Jacques[28] se déclarent « ser­vus Christi », c’est-​à-​dire esclave [29] du Christ. Le Père de Montfort pré­cise à ce sujet : « lequel mot de ser­vus […] ne signi­fiait autre­fois qu’un esclave, parce qu’il n’y avait point encore de ser­vi­teurs comme ceux d’au­jourd’­hui. » [30]. Saint Thomas d’Aquin affirme que « celui-​là est vrai­ment esclave qui s’est obli­gé à ser­vir. » [31]. Sainte Thérèse d’Avila déclare : « Savez-​vous bien ce que c’est d’être vrai­ment spi­ri­tuel ? C’est se faire l’es­clave de Dieu » [32]. Sainte Marguerite-​Marie « se voue comme esclave à la Vierge, Mère de Dieu, pour appar­te­nir en cette même qua­li­té au Cœur sacré de l’a­do­rable Jésus » [33]. Saint Ignace de Loyola, dans la contem­pla­tion de Jésus et Marie dans le mys­tère de la nati­vi­té, dit : « Je me tien­drai en leur pré­sence comme un petit men­diant et un petit esclave indigne de paraître devant eux » [34]. Le Saint Esclavage, c’est donc la grande tra­di­tion évan­gé­lique.
De plus, dans le Traité de la vraie dévo­tion, le Père de Montfort fait un véri­table tra­vail théo­lo­gique : il dis­tingue les « deux manières ici-​bas d’ap­par­te­nir à un autre et de dépendre de son auto­ri­té » [35]; il dis­tingue « trois sortes d’es­cla­vages » [36]; il éta­blit, en cinq points, qu’il y a « une totale dif­fé­rence entre un ser­vi­teur et un esclave » [37]. Il signale que le Catéchisme du concile de Trente ne laisse « aucun doute que nous soyons esclaves de Jésus-​Christ », car il l’ex­prime « par un terme qui n’est point équi­voque, en nous appe­lant man­ci­pia Christi : esclaves de Jésus-​Christ » [38]. Il conclut : « Je dis que nous devons être à Jésus-​Christ et le ser­vir, non seule­ment comme des ser­vi­teurs mer­ce­naires, mais comme des esclaves amou­reux » [39]. Quand un théo­lo­gien s’ap­plique à un tel tra­vail de dis­tinc­tion, de défi­ni­tion et de pré­ci­sion, c’est qu’il veut don­ner un sens pré­cis aux mots qu’il emploie et qu’il tient à ce que ces mots soient enten­dus comme il le désire. Évacuer l’ex­pres­sion Saint Esclavage c’est donc rompre avec la Tradition et tra­hir la pen­sée du père de Montfort. Le P. Poupon, domi­ni­cain, est for­mel à ce sujet :

« Ils com­mettent une erreur, ils causent un dom­mage ceux qui pré­tendent en éli­mi­ner le vocable ; ils édul­corent sinon trans­forment la spi­ri­tua­li­té du saint poète [Le Père de Montfort] ; car on ne sau­rait faire subir un chan­ge­ment quel­conque à la pro­prié­té d’une chose sans alté­rer la nature de cette chose. »

Le poème de la consé­cra­tion à Marie, [PCM], par le Père Poupon, o.p. Bellecour, Lyon, 1947, p. 337.

Le car­di­nal Gerlier, confirme la chose dans son intro­duc­tion du livre du dominicain :

« Le R.P. Poupon […] main­tient le terme escla­vage de Marie mal­gré les attaques dont il a été l’ob­jet, mal­gré la rudesse appa­rente d’un voca­bu­laire avec lequel sont peu fami­lia­ri­sées les oreilles modernes. Sans doute, ce terme n’est aucu­ne­ment impo­sé : et ceux qui pré­fèrent ne pas l’employer res­tent libres. Mais, pour le conser­ver, ne suffit-​il pas, en réa­li­té, de le com­prendre ? Il ne s’a­git pas ici de vaines dis­putes de mots. La consé­cra­tion mariale de Montfort requiert une par­faite et totale dépen­dance vis-​à-​vis de la Vierge Marie. Or aucun terme n’a plus d’ef­fi­ca­ci­té pour mar­quer cette dépen­dance que celui d’antan. »

PCM, Préface du Cardinal Gerlier, arche­vêque de Lyon, p. 2.

Les mont­for­tains post­con­ci­liaires les plus lucides affirment la même thèse :

« Quand on veut vrai­ment péné­trer et expli­quer en pro­fon­deur la pen­sée de Montfort, il faut bien recou­rir à son texte, en expo­ser le sens et mon­trer sa confor­mi­té au don­né évangélique. »

Les intui­tions d’un auteur spi­ri­tuel, par le P. A. Bossard, s.m.m. Louis-​Marie de Montfort, Théologie spi­ri­tuelle, Centre inter­na­tio­nal mont­for­tain, Rome 2002. p. 192, note 14.

Redisons-​le : au moment même ou s’ins­taure l’es­cla­vage du libé­ra­lisme, sous cou­vert de la libé­ra­tion de l’es­cla­vage humain, la Providence nous pro­pose le vrai remède : le Traité de la vraie dévo­tion à la Sainte Vierge qui enseigne le Saint Esclavage de Jésus en Marie, comme grand remède à l’es­cla­vage du péché. C’est pour­quoi, per­son­nel­le­ment, j’ap­pelle le Traité de la vraie dévo­tion à la sainte Vierge le Manuel du com­bat marial anti-libéral.

E. Au XXe siècle à Fatima.

L’Immaculée Conception va ensuite s’in­té­res­ser au pro­blème au fléau du com­mu­nisme. Pour cela elle appa­raît à Fatima, au XXe siècle sous le signe du Cœur Immaculé. Sous des appa­rences dif­fé­rentes, c’est tou­jours la Mère de Dieu qui appa­raît. C’est donc tou­jours l’Immaculée Conception qui appa­raît éga­le­ment : à Fatima comme à La Salette ; à La Salette comme à Lourdes ; à Lourdes comme à la Rue ru Bac. Veuillez remar­quer que, comme la Vierge de Lourdes, la Vierge de Fatima décline son iden­ti­té. A Lourdes, elle se pré­sente comme l’Immaculée Conception, à Fatima elle se pré­sente comme la Vierge du Rosaire :

« En octobre, Je dirai qui je suis [.] et Je ferai un miracle que tous ver­ront pour croire [.] Je suis Notre-​Dame du Rosaire. »

Fatima, joie intime, évè­ne­ment mon­dial [FJE], publié par la Contre-​réforme Catholique, Chapitre II, p. 41 à 87. 1ère cita­tion, p. 60. La Vierge réitère le 13 sep­tembre, p. 78. 2ème cita­tion, p. 83.

Une nou­velle fois la Vierge inter­vient dans l’his­toire de l’Église pour encou­ra­ger le vicaire de son Fils. Elle se mani­feste qua­torze ans après la mort de Léon XIII qui a écrit plus d’une ving­taine de fois en faveur du Rosaire, dont douze lettres ency­cliques. Jamais un pape n’a­vait autant écrit sur un seul et même sujet. Lui-​même devait sa grande dévo­tion au Rosaire au père de Montfort sur­nom­mé Le Père au Grand cha­pe­let [40]. L’Immaculée vient de nou­veau encou­ra­ger le pape dans sa dévo­tion mariale.

Elle vient aus­si pour nous apprendre les moyens de faire triom­pher son Cœur Immaculé. La très sainte Vierge a affir­mé le 13 juillet 1971 : « A la fin mon Cœur Immaculé triom­phe­ra »[41]. Elle pré­co­nise pour cela la Consécration de la Russie et la Dévotion répa­ra­trice des pre­miers same­dis du mois. Saint Pie X avait déjà encou­ra­gé la dévo­tion des pre­miers same­dis. Et ici encore, la Vierge Immaculée encou­rage la papau­té. Pour ce qui est de la Consécration de la Russie, un émi­nent fati­mo­logue affirme que la consé­cra­tion n’a pas encore été réa­li­sée [42], et qu’il est pro­bable que le saint Père ne l’en­vi­sage pas durant son pon­ti­fi­cat [43].

Pour conclure sur les inter­ven­tions de Marie dans l’his­toire, disons qu’à l’aube du 3ème mil­lé­naire, le libé­ra­lisme et le com­mu­nisme se sont, non seule­ment répan­du dans le monde entier, mais ont aus­si, pour ain­si dire, fusion­né dans ce qu’il faut appe­ler un com­mu­nisme libé­ral ou un libé­ra­lisme com­mu­niste, ceci par un double phé­no­mène conver­geant : la com­mu­ni­sa­tion du libé­ra­lisme et la libé­ra­li­sa­tion du com­mu­nisme. Ces deux ten­dances, même si elles ne sont pas arri­vées à leur pleine matu­ra­tion, convergent vers leur terme com­mun, le culte de l’homme en vue du règne de l’Antéchrist, qui ins­tau­re­ra cette syn­thèse poli­tique qui sera encore plus ter­rible que les deux fléaux. Ce sys­tème poli­tique dia­bo­lique consis­te­ra en un monde dans lequel toute erreur intel­lec­tuelle et tout mal moral a droit de cité, tan­dis que le vrai et le bien en seront juri­di­que­ment exclus. La ten­ta­tive de loi contre l’ho­mo­pho­bie en est que les pré­misses. Règnera alors un unique escla­vage : celui du démon dans toute son ampleur. C’est dans ce contexte déci­sif de l’his­toire du salut que Marie fera triom­pher son Cœur Immaculé. Elle donne pour cela une arme essen­tielle, la consé­cra­tion mont­for­taine mariale du Saint Esclavage, et ses acces­soires : d’une part, elle a livré au monde la Médaille mira­cu­leuse à la Rue du Bac ; d’autre part, elle a rap­pe­lé, à Fatima, deux grandes pra­tiques mariales : celle du rosaire et celle du sca­pu­laire [44]. Ces der­nières pra­tiques ne sont à la consé­cra­tion que ce que le corps est à l’âme : c’est parce qu’une âme s’est consa­crée dans l’ar­mée mariale qu’elle porte sur elle le sceau de son appar­te­nance ; c’est parce qu’elle s’est dépouillée de tout qu’elle porte le petit habit qu’est le sca­pu­laire de la Vierge ; c’est parce qu’elle s’est liée à Marie par les chaînes du Saint Esclavage d’a­mour qu’elle récite le cha­pe­let, dévo­tion qui l’en­chaîne spi­ri­tuel­le­ment à sa bien-​aimée. C’est ain­si que l’a­pôtre marial enseigne com­ment mettre en pra­tique l’af­fir­ma­tion de la Vierge à la sœur Lucie de Fatima, qui s’a­dresse aus­si à toutes les âmes :

« Mon Cœur Immaculé sera ton refuge et le che­min qui te condui­ra jus­qu’à Dieu. »

FJE, p. 55.

III. Le Triomphe du Cœur Immaculé.

Beaucoup d’imaginations rêvent de voir, un jour de gri­saille, les nuages du ciel ter­restre se dis­si­per pour lais­ser place à un cœur tout brillant, ceint d’épines et entou­ré d’angelots, pro­je­tant des éclairs d’une lumière toute divine qui pénètrent toutes les âmes pour les conver­tir sur-​le-​champ. Cela n’est qu’imagination… Comment ce réa­li­se­ra ce triomphe ? De quoi s’agit-il ?
Ce triomphe doit s’entendre pre­miè­re­ment de la conver­sion de la Russie [45]. C’est Notre Seigneur qui le dit :

« Je veux que toute mon Église recon­naisse cette consé­cra­tion [Nous pro­po­sons de lire : cette conver­sion] comme un triomphe du Cœur Immaculé de Marie, afin d’étendre ensuite son culte et pla­cer, à côté de la dévo­tion à mon Divin Cœur, la dévo­tion à ce Cœur Immaculé. »

Lettre de Lucie du 18 mai 1936, dans laquelle elle rap­porte ce que Notre Seigneur lui a répon­du pour­quoi la Russie ne se conver­ti­rait pas sans sa consé­cra­tion. FJE, P. 220.

Le P. Poupon a bien pré­ci­sé que cette consé­cra­tion por­tant sur une réa­li­té poli­tique, et fai­sant appel à la royau­té de Marie, n’est que le pré­am­bule du triomphe de la Mère de Miséricorde dans des âmes par la grâce :

« La royau­té pré­pare cette com­mu­ni­ca­tion vitale, – d’abord sur le plan col­lec­tif et par voie de consé­quence dans le domaine per­son­nel, – et elle en favo­rise le déve­lop­pe­ment jusqu’à cette consom­ma­tion où tous les élus règne­ront avec le Roi et la Reine. »

PCM, p. 226.

Ce prin­cipe est capi­tal. Cela montre éga­le­ment que le Triomphe du Cœur Immaculé de Marie doit abou­tir à la consé­cra­tion mariale per­son­nelle des âmes. Il ne faut pas oublier que la cause maté­rielle de l’Église ce sont les âmes et non pas les nations, ni même les paroisses, ni même les familles : ce sont les âmes. Voilà pour­quoi qui­conque pré­tend tra­vailler au Triomphe du Cœur Immaculé de Marie, doit pen­ser in concre­to à la consé­cra­tion mariale per­son­nelle des âmes. C’est ici que saint Louis-​Marie Grignion de Montfort tient une place de choix avec sa Consécration de soi-​même à Jésus-​Christ, la Sagesse incar­née par les mains de Marie. En effet, le père Grignion dit à sa manière que ce triomphe est prin­ci­pa­le­ment, essen­tiel­le­ment et ulti­me­ment un triomphe inté­rieur, et non pas pre­miè­re­ment un simple triomphe extérieur :

« Marie est la reine du ciel et de la terre par grâce, comme Jésus en est le roi par nature et par conquête. Or, comme le royaume de Jésus-​Christ consiste prin­ci­pa­le­ment dans le cœur ou l’in­té­rieur de l’homme, selon cette parole [de l’Évangile] : Le royaume de Dieu est au-​dedans de vous, de même le royaume de la très sainte Vierge est prin­ci­pa­le­ment dans l’in­té­rieur de l’homme, c’est-​à-​dire dans son âme, et c’est prin­ci­pa­le­ment dans les âmes qu’elle est plus glo­ri­fiée avec son Fils que dans toutes les créa­tures visibles, et nous pou­vons l’ap­pe­ler avec les saints la Reine des Cœurs(77). »

VD 38.

A la fin de son Traité, il donne une des­crip­tion mys­tique de ce triomphe :

« L’âme de la sainte Vierge se com­mu­ni­que­ra à vous pour glo­ri­fier le Seigneur ; son esprit entre­ra en la place du vôtre pour se réjouir en Dieu, son salu­taire, pour­vu que vous vous ren­diez fidèle aux pra­tiques de cette dévo­tion [il cite saint Ambroise] : Que l’âme de Marie soit en cha­cun pour y glo­ri­fier le Seigneur ; que l’es­prit de Marie soit en cha­cun, pour s’y réjouir en Dieu. Ah ! Quand vien­dra cet heu­reux temps, dit un saint homme de nos jours qui était tout per­du en Marie, ah ! Quand vien­dra cet heu­reux temps où la divine Marie sera éta­blie maî­tresse et sou­ve­raine dans les cœurs, pour les sou­mettre plei­ne­ment à l’empire de son grand et unique Jésus. Quand est-​ce que les âmes res­pi­re­ront autant Marie que les corps res­pirent l’air ? Pour lors, des choses mer­veilleuses arri­ve­ront dans ces bas lieux, où le Saint-​Esprit, trou­vant sa chère épouse comme repro­duite dans les âmes, y sur­vien­dra abon­dam­ment et les rem­pli­ra de ses dons, et par­ti­cu­liè­re­ment du don de sa sagesse, pour opé­rer des mer­veilles de grâces. Mon cher frère, quand vien­dra ce temps heu­reux et ce siècle de Marie, où plu­sieurs âmes choi­sies et obte­nues du Très-​Haut par Marie, se per­dant elles-​mêmes dans l’a­bîme de son inté­rieur, devien­dront des copies vivantes de Marie, pour aimer et glo­ri­fier Jésus-​Christ ? Ce temps ne vien­dra que quand on connaî­tra et on pra­ti­que­ra la dévo­tion que j’en­seigne [ : Pour qu’arrive le Règne de Jésus, qu’arrive le Règne de Marie !]. »

VD 217.

Et ce triomphe abou­ti­ra au triomphe de Jésus-Christ :

« Si nous éta­blis­sons la solide dévo­tion de la très sainte Vierge, ce n’est que pour éta­blir plus par­fai­te­ment celle de Jésus-​Christ, ce n’est que pour don­ner un moyen aisé et assu­ré pour trou­ver Jésus-Christ. »

VD 62.

Parce que Jésus-Christ :

« est notre unique maître qui doit nous ensei­gner, notre unique Seigneur de qui nous devons dépendre, notre unique chef auquel nous devons être unis, notre unique modèle auquel nous devons nous confor­mer, notre unique pas­teur qui doit nous nour­rir, notre unique voie qui doit nous conduire, notre unique véri­té que nous devons croire, notre unique vie qui doit nous vivi­fier, et notre unique tout en toutes choses qui doit nous suf­fire. Il n’a point été don­né d’autre nom sous le ciel, que le Nom de Jésus, par lequel nous devions être sau­vés. Dieu ne nous a point mis d’autre fon­de­ment de notre salut, de notre per­fec­tion et de notre gloire, que Jésus-​Christ : tout édi­fice qui n’est pas posé sur cette pierre ferme est fon­dé sur le sable mou­vant et tom­be­ra infailli­ble­ment tôt ou tard. Tout fidèle qui n’est pas uni à lui comme une branche au cep de la vigne, tom­be­ra, séche­ra et ne sera propre qu’à être jeté au feu. Si nous sommes en Jésus-​Christ et Jésus-​Christ en nous, nous n’a­vons point de dam­na­tion à craindre : ni les anges des cieux, ni les hommes de la terre, ni les démons des enfers, ni aucune autre créa­ture ne nous peut nuire, parce qu’elle ne nous peut sépa­rer de la cha­ri­té de Dieu qui est en Jésus-​Christ. Par Jésus-​Christ, avec Jésus-​Christ, en Jésus-​Christ, nous pou­vons toutes choses : rendre tout hon­neur et toute gloire au Père, en l’u­ni­té du Saint-​Esprit ; nous rendre par­faits et être à notre pro­chain une bonne odeur de vie éternelle. »

VD 61.

La théo­lo­gie mariale de l’histoire est donc bien ordon­née, et subor­don­née à la théo­lo­gie chris­to­lo­gique de l’Histoire. C’est sa fina­li­té, le terme dans lequel elle s’épanouit.

Conclusion

Dom de Monléon, moine béné­dic­tin, dans son com­men­taire sur l’Apocalypse, pré­cise que la « Femme revê­tue du soleil, figure l’Église, enve­lop­pée tout entière dans le Christ qui est à la fois sa pro­tec­tion et sa parure comme le vête­ment l’est pour le corps » [46]. Mais il ajoute que la Femme revê­tue du soleil désigne « aus­si la Vierge Marie, irra­diée par le Verbe dans le mys­tère de l’Incarnation […] Les douze étoiles […] font la cou­ronne de la Vierge » [47]. Dans un autre ouvrage, Les Noces de Cana, il fait cette méditation :

« On remar­que­ra que dans l’Offertoire de la nou­velle messe de l’Assomption [après la pro­cla­ma­tion du dogme en 1950], qui est tirée du Protévangile dont nous avons par­lé plus haut, le mot Muleriem [c’est-​à-​dire Femme] a été écrit avec une majus­cule. Il est per­mis de croire qui ce détail typo­gra­phique, inusi­té jusqu’ici, n’a pas été intro­duit dans la litur­gie sans rai­son. L’Église a vou­lu sou­li­gner qu’elle recon­naît en Marie, la Femme par excel­lence ; celle qui domine toute l’Écriture sainte, depuis les pre­miers cha­pitres de la Genèse, où nous lui voyons écra­ser la tête du ser­pent jusqu’à l’Apocalypse, où elle nous est mon­trée, nim­bée du Soleil de Justice, la tête cou­ron­née d’étoiles, et tenant la lune sous ses pieds. »

Les Noces de Cana, cha­pitre VIII.

Ainsi donc, l’Immaculée, comme Jésus-​Christ son Fils, domine bien toute l’histoire dans le plan divin : Elle est la Femme de la Genèse [48], la Femme Vierge d’Isaïe [49], la Femme des Noces de Cana [50], la Femme du Calvaire [51], et la Femme de l’Apocalypse [52].

La Genèse pro­phé­tise le mys­tère de la Femme par excel­lence qui ne sera mis en lumière que pro­gres­si­ve­ment dans l’Histoire de l’Église. Dès lors, dans la Genèse, Dieu la pré­sente déjà, mys­té­rieu­se­ment, comme l’Immaculée Conception. Avec Isaïe, Dieu annonce que la Femme imma­cu­lée doit être Mère vir­gi­nale de Dieu ; avec les Noces de Cana, la Femme se mani­feste comme Médiatrice de toutes grâces auprès de son divin Fils ; au Calvaire, la Femme, accom­plit son rôle de « Généreuse asso­ciée » [53] dans le plan de la Rédemption, c’est-​à-​dire rem­plis­sant son office de Co-​rédemptrice. Avec l’apocalypse, elle est pré­sen­tée par Dieu comme la Mère spi­ri­tuelle, type de l’Église, vic­to­rieuse du démon, qui enfante ses enfants à la vie surnaturelle.

C’est vrai­ment tout le Mystère de Marie [54] qui est résu­mé dans le Mystère de la Femme par excel­lence : l’homme était tom­bé par la femme, c’est-​à-​dire Eve, l’homme se relève par la Femme, c’est-​à-​dire Marie, l’Immaculée Conception. Il y a donc bien une théo­lo­gie mariale de l’Histoire du monde et du Salut. Ne crai­gnons donc pas, comme dit Notre Seigneur : « Nolite timere… Ne crai­gnez point petit trou­peau, car Dieu votre Père a pour agréable de vous don­ner le royaume ». [Lc 12,32] :

« Ne crai­gnez point – com­mente le père de Montfort –, quoique natu­rel­le­ment vous ayez tout à appré­hen­der : vous n’êtes qu’un petit trou­peau et si petit qu’un enfant peut l’é­crire, Puer scri­bet eos [Is 10,19]. Et voi­là les nations, les mon­dains, les avares, les volup­tueux, les liber­tins assem­blés à mil­liers pour vous com­battre par leurs raille­ries, leurs calom­nies, leur mépris et leurs vio­lences, Convenerunt in unum [Ps 2,2]. Vous êtes petits, ils sont grands. Vous êtes pauvres, ils sont riches. Vous êtes sans cré­dit, ils sont appuyés de tous. Vous êtes faibles, ils ont l’au­to­ri­té en main. Mais encore un coup, Nolite timere, ne crai­gnez point volon­tai­re­ment, écou­tez Jésus-​Christ qui vous dit : Ego sum, Nolite timere, c’est moi, ne crai­gnez point ; c’est moi qui vous ai choi­sis, Ego ele­gi vos ; [Jn 15,16] c’est moi qui suis votre bon Pasteur : ego sum pas­tor bonus ; je vous connais comme mes bre­bis, Ego cognos­co, etc. Nolite mira­ri si odit vos mun­dus, sci­tote, etc. : ne vous éton­nez point si le monde vous hait, sachez qu’il m’a haï le pre­mier. Si vous étiez du monde, le monde vous ché­ri­rait comme une chose qui lui appar­tien­drait ; mais, parce que vous n’êtes point du monde, il faut que vous essuyiez sa haine, ses calom­nies, ses injures, ses mépris, ses outrages. Ego pro­tec­tor tuus sum in mani­bus meis des­crip­si te. Je suis votre pro­tec­tion et votre défense, […], vous dit le Père éter­nel, je vous ai gravé[e] dans mon cœur et écrit[e] en mes mains, pour vous ché­rir et vous défendre, parce que avez mis votre confiance en moi et non dans les hommes, en ma Providence et non dans l’argent. Je vous déli­vre­rai des pièges qu’on vous tend, des calom­nies qu’on vous impose, des ter­reurs de la nuit et des ténèbres qui vous inti­mident, des assauts du démon du midi qui veut vous séduire ; je vous cache­rai sous mes ailes ; je vous por­te­rai sur mes épaules ; je vous nour­ri­rai à mes mamelles ; je vous arme­rai de ma véri­té, et si puis­sam­ment que vous ver­rez de vos yeux vos enne­mis tom­ber à mil­liers à vos côtés : mille mau­vais pauvres à votre gauche, dix mille mau­vais riches à votre droite, sans que ma ven­geance approche même de vous. Vous mar­che­rez avec cou­rage sur l’as­pic et le basi­lic envieux et calom­nia­teur ; vous fou­le­rez à vos pieds le lion et le dra­gon impie, empor­té et orgueilleux ; je vous exau­ce­rai dans vos prières ; je vous accom­pa­gne­rai en vos souf­frances ; je vous déli­vre­rai de tous vos maux ; je vous glo­ri­fie­rai de toute ma gloire que je vous mon­tre­rai dans mon royaume, à décou­vert, après que vous aurai comblé[e] de jours et de béné­dic­tions sur la terre. Ce sont là […] les pro­messes admi­rables que Dieu vous a fait par la bouche du Prophète, si vous met­tez par Marie – L’Immaculée Conception, la Femme par excel­lence – toute votre confiance en lui. »

Saint Louis-​Marie Grignion de Montfort, Aux Associés de la Compagnie de Marie [ACM], N°1 à 4.

Ainsi, croyons fer­me­ment avec Saint Louis-​Marie Grignion de Montfort que C’est par Marie – l’Immaculée Conception, la Femme par excel­lence – que nous devons cher­cher et trou­ver Jésus, que nous écra­se­rons la tête du ser­pent et que nous vain­crons tous nos enne­mis et nous-​mêmes pour la plus grande gloire de Dieu [55]. Ainsi soit-il.

Guy CASTELAIN †

Notes de bas de page

  1. Traité de la Vraie Dévotion à la Saint Vierge [VD] de saint Louis-​Marie Grignion de Montfort, N°1.[]
  2. VD 49.[]
  3. Adaptation de VD 62.[]
  4. Ultimo dit le texte latin (DzS 3900) : terme qui pos­sède de mul­tiples sens en fran­çais : le plus haut, le plus rele­vé, le pre­mier, le der­nier, l’ex­trême, le plus recu­lé, le plus ancien, etc.[]
  5. Affirmation du Courrier de Rome, Sisinono N° 181 (371) juillet-​août 1996, p. 3. Toute cette pre­mière par­tie s’ins­pire de l’ar­ticle inti­tu­lé « A Marie et à son Fils ! Jean-​Paul II et le sens marial du pro­té­van­gile », publié dans le même numé­ro de cette revue.[]
  6. Datée du 2 février 1904, pour le cin­quan­te­naire de la pro­cla­ma­tion du dogme de l’Immaculée concep­tion (1854).[]
  7. VD 51–54.[]
  8. Le Traité de la vraie dévo­tion à la sainte Vierge de saint Louis-​Marie Grignion de Montfort.[]
  9. Saint Louis-​Marie Grignion de Montfort, Georges Rigault, p. 195. Éditions Les Traditions Françaises, Tourcoing, 1947. Bien enten­du, il ne s’a­git pas d’une défi­ni­tion extra­or­di­naire. Il s’a­git du Magistère ordi­naire per­son­nel du pape.[]
  10. Le corps mys­tique du Christ, du R.P. Mura. A. Blot, Paris, 1937. II, p. 132. Cité par La pos­tu­la­tion géné­rale mont­for­taine, Rome 22 avril 1942, in Traité de la vraie dévo­tion à la sainte Vierge, par le bien­heu­reux Louis-​Marie Grignion de Montfort, Reproduction pho­to­gra­phique du manus­crit [RPVD]. Préface, p. XXVI et XXVII.[]
  11. Les Pères de la Compagnie de Marie fon­dée par saint Louis-​Marie Grignion de Montfort.[]
  12. Témoignage oral du pro­fes­seur en ques­tion. J’ai pas­sé per­son­nel­le­ment plu­sieurs heures avec ce prêtre. Je tiens ces deux his­toires de sa propre bouche. Je garde l’a­no­ny­mat par dis­cré­tion.[]
  13. Epître catho­lique de Saint Jacques, cha­pitre 4, ver­set 4. Traduction de Glaire sur la Vulgate.[]
  14. Élu pape en 1978. Sa devise : Tuus totus, c’est-​à-​dire : Je suis tout à vous [ô Marie] ». VD 223.[]
  15. Le 19 sep­tembre 1996, à l’oc­ca­sion du 150ème anni­ver­saire des appa­ri­tions de La Salette.[]
  16. Lettre du Pape aux familles mont­for­taines sur la doc­trine mariale de leur saint Fondateur, du 8 décembre 2003. L’Osservatore roma­no [langue fran­çaise] N°3, 20 jan­vier 2004.[]
  17. Osservatore Romano du 19 mars 1965.[]
  18. Voir le docu­ment Ecclesia de Eucharistia, Lettre Encyclique du sou­ve­rain pon­tife sur l’Eucharistie dans son rap­port avec l’Église, datée du 17 avril 2003. Voir sur ce sujet Sisinono N° 271 (461) d’oc­tobre 2004, et Le Sel de la Terre N°46, automne 2003, pp. 16–22.[]
  19. Connaissance élé­men­taire de la Franc-​Maçonnerie, Arnaud de Lassus, AFS, 2° édi­tion, 1996. p. 16–19.[]
  20. Connaissance élé­men­taire du libé­ra­lisme catho­lique, Supplément au numé­ro 140, p. 10. AFS, 31, rue Rennequin, F‑75017 Paris.[]
  21. Par la Bulle Ineffabilis Deus de Pie IX le 8 décembre 1854.[]
  22. RPVD, Introduction.[]
  23. Saint Louis-​Marie Grignion de Montfort, la doc­trine christo-​mariale, par G. Mucci, s.j. La Civilta cat­to­li­ca, 3 février 2001.[]
  24. Le jésuite s’ins­pire du P. B. Cortinovis, Dimensione eccle­siale del­la spi­ri­tua­li­ta di san lui­gi Maria de Montfort, Rome, Edizioni mon­for­tane, 1998, 216 s.[]
  25. Avant de don­ner les argu­ments de Tradition, un argu­ment his­to­rique : l’ex­pres­sion esclave n’a jamais été plus odieuse aux hommes qu’à l’é­poque où la cru­ci­fixion des esclaves était pra­ti­quée, c’est à dire jus­qu’au IVe siècle. Même à cette époque, les apôtres se sont fait appe­ler Esclave du Christ.[]
  26. VD N°72. Cf. Phil. II, 7 et Lc I, 38.[]
  27. Rom. I, 1. Fillion pré­cise en note : esclave au sens strict.[]
  28. Jac. I, 1.[]
  29. Fillion pré­cise en note la signi­fi­ca­tion grecque du mot : esclave.[]
  30. VD N°72.[]
  31. Somme théo­lo­gique, IIae, IIae, q. 184, a. 4. Il y a une ana­lo­gie entre la consé­cra­tion reli­gieuse et la consé­cra­tion mariale mont­for­taine : la consé­cra­tion mariale ne consiste pas en un vœu, mais on s’y oblige à ser­vir Jésus par Marie.[]
  32. Château inté­rieur, 7ème dem., Ch. IV, éd. Carmélites de Paris, p. 309.[]
  33. Œuvres com­plètes, éd. Gauthey, t. II, pp. 781–782.[]
  34. Exercices spi­ri­tuels, N°114.[]
  35. La ser­vi­tude et l’es­cla­vage. VD N°69[]
  36. De nature, de contrainte et de volon­té. VD N°70.[]
  37. VD N°71[]
  38. D N°72 et 129. Catechismus Conc. Trid., pars I, c. 3.[]
  39. VD N°73.[]
  40. Voir Saint Louis-​Marie Grignion de Montfort [LC], par le P. Le Crom, Clovis, 2003. p. 443.[]
  41. FJE, p. 61.[]
  42. Le Père Pierre Caillon. Voir sa bro­chure sur le sujet : « La consé­cra­tion de la Russie aux Très Saints Cours de Jésus et Marie, Téqui, 1983. p. 52–53. Depuis la situa­tion reste inchan­gé, non­obs­tant ce que l’on a pu dire….[]
  43. Le Père Caillon. Voir les six heures de confé­rences sur le thème Les papes et la consé­cra­tion de la Russie au Cœur Immaculé de Marie. Cassettes audio non dis­po­nibles dans le com­merce, dans les­quelles il expose ses démarches per­son­nelles auprès du pape Jean-​Paul II en faveur de la consé­cra­tion de la Russie et donne les rai­sons de cette pro­ba­bi­li­té.[]
  44. La Vierge s’est aus­si mon­trée à Lucie en tant que Notre-​Dame du Carmel : « Pourquoi dis-​tu que Notre-​Dame t’est appa­rue habillée comme Notre-​Dame du Carmel ? […] Parce qu’Elle avait quelque chose qui pen­dait de sa main ». FJE, p. 86–87.[]
  45. FJE, p. 220.[]
  46. Le sens mys­tique de l’Apocalypse [SMA], NEL, Paris, 1984. p. 190.[]
  47. SMA, p. 191.[]
  48. Genèse III, 15.[]
  49. Isaïe VII, 14.[]
  50. Saint Jean II.[]
  51. Saint Jean XIX, ver­sets 25–27.[]
  52. Chapitre XII.[]
  53. Pie XII, Munificentissimus Deus, 1950.[]
  54. Voir le livre du père Bernard O.P. Le Mystère de Marie déve­lop­pant la média­tion de Marie dans la pen­sée du père de Montfort.[]
  55. D’après la Lettre aux Habitants de Montbernage.[]