Le District de France de la FSSPX souffle ses 40 bougies

Mgr Marcel Lefebvre, fondateur de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, à Lille le 29 août 1976

Cet anni­ver­saire, qui a été célé­bré aux jour­nées de la Tradition à Port-​Marly, mérite qu’on s’y attarde afin d’en faire un bilan. Si l’on veut syn­thé­ti­ser de manière lapi­daire cette période, il suf­fit d’op­po­ser cette com­mé­mo­ra­tion à une autre, les 30 ans du scan­dale d’Assise. La Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X est née dans une situa­tion de confron­ta­tion pour faire face à une crise pro­fonde, mais elle n’existe pas pour cette confron­ta­tion, en ce sens qu’elle ne se résume pas à dire non. Si les évêques, les prêtres et les fidèles opposent un refus caté­go­rique sur les prin­cipes, c’est ensuite pour pro­po­ser la Vérité de l’Église et pour construire sur le ter­rain sans s’en­fer­mer dans une bulle. La fameuse ligne de crête est tou­jours d’ac­tua­li­té et la crête n’a pas bou­gé d’un pouce, cepen­dant suivre cette ligne per­met éga­le­ment de trou­ver les moyens de recons­truire une chré­tien­té alors que tout sombre dans le chaos.

Le District de France est né en 1976, année de la fameuse messe de Lille du 29 aout 1976 qui a été un évè­ne­ment média­tique mon­dial et qui a don­né le ton. Un évêque a osé défier la moder­ni­té en décla­rant qu’il refu­sait cette nou­velle messe qu’il n’a pas hési­té à qua­li­fier de « rite bâtard », en conser­vant la messe en usage jus­qu’a­lors et en refu­sant les nou­veau­tés de la foi. Mgr Lefebvre a éga­le­ment pro­po­sé à Lille les treize pre­miers prêtres ordon­nés au sémi­naire d’Écône, en vue de don­ner aux dif­fé­rents pays les pas­teurs qu’ils récla­maient. Un refus assu­mé de la crise dans l’Église accom­pa­gné d’une volon­té farouche de recons­truire, telle est la double face de l’é­po­pée du District de France.

Défi

À la messe de Lille, Mgr Lefebvre a pour­tant dit au début de l’homélie :

« Cette mani­fes­ta­tion n’est pas un défi. Cette mani­fes­ta­tion, c’est vous qui l’a­vez dési­rée, chers fidèles, chers frères, qui êtes venus de loin. Pourquoi ? Pour mani­fes­ter votre foi catholique. »

L’évêque sou­li­gnait sim­ple­ment qu’il n’a­vait pas pré­vu de faire de cette messe une sorte de mani­fes­ta­tion reven­di­ca­tive du type syn­di­ca­liste, mais l’oc­ca­sion de l’af­fluence des médias a per­mis une démons­tra­tion que la foi de tou­jours n’é­tait pas morte et enten­dait se répandre. La Fraternité ne fai­sait que répondre à la demande des fidèles et son ensei­gne­ment sera sans conces­sion avec les erreurs modernes, refu­sant le coup de maître de Satan, à savoir détruire l’Église par voie d’o­béis­sance, refu­sant l’u­nion adul­tère de l’Église et de la Révolution, refu­sant de dia­lo­guer avec l’er­reur, refu­sant le libé­ra­lisme et prê­chant le Christ Roi. Il serait bon que les jeunes géné­ra­tions puissent connaître la teneur exacte de ce ser­mon his­to­rique et en voir la por­tée doctrinale.

Si cette messe de 1976 ne fut pas vou­lue comme un défi, elle fut vécue comme tel à Rome, car n’ou­blions pas que Mgr était sus­pens a divi­nis c’est-​àdire inter­dit de sacre­ments, depuis les pre­mières ordi­na­tions d’Écône. Et toute la suite de l’his­toire du District de France semble par contre se révé­ler un défi pro­gres­sif, celui de la relève de tous les vieux prêtres qui résis­taient ça et là et qui com­men­çaient à fati­guer, celui de la pré­di­ca­tion conti­nuelle de la doc­trine oppo­sée aux erreurs conci­liaires. Ces années furent en fait un défi conti­nuel aux évêques de France qui vou­laient s’en­fon­cer dans l’es­prit du Concile, et qui fai­saient tout pour tuer dans l’oeuf ce mou­ve­ment de tra­di­tion en renais­sance. 1988 fut un nou­veau défi par les sacres, non que ce soit une pro­vo­ca­tion à l’é­gard de Rome, mais la réponse de l’an­cien mis­sion­naire pour per­mettre la péren­ni­té de son œuvre en assu­rant la conti­nua­tion des ordi­na­tions sacer­do­tales. Une nou­velle cen­sure ecclé­sias­tique injuste vint le frap­per, qui n’empêcha pas l’ex­pan­sion de la congré­ga­tion qu’il avait fon­dée. Le dis­trict de France est ain­si pas­sé de 55 à actuel­le­ment plus de 170 prêtres.

Édification

Ainsi, Si le District de France, dans la suite de Mgr Lefebvre, par­lait haut et fort pour faire entendre un dogme catho­lique non fre­la­té, il ne pas­sait pas son temps à cri­ti­quer les autres. Il construi­sait, il édi­fiait, il sanc­ti­fiait.

C’est en effet une flo­rai­son de cha­pelles, de prieu­rés, tous construits dans des situa­tions dif­fi­ciles, qui carac­té­rise ces années. Tisser la toile des lieux de culte afin de pro­po­ser un accès aux sacre­ments ne fut pas une mince affaire et les dif­fi­cul­tés s’ac­crurent lors­qu’il fal­lut mettre en place des écoles pri­maires, mais aus­si secon­daires.

Loin de vou­loir s’en­fer­mer dans un bun­ker en atten­dant la fin du monde, le prag­ma­tisme du District fut tou­jours por­té par le zèle apos­to­lique, par l’es­prit conqué­rant de l’Église qui désire tou­cher le maxi­mum d’âmes afin de leur offrir la richesse de la foi et la joie du salut. Ce n’est pas seule­ment l’œuvre des prêtres mais bien cette col­la­bo­ra­tion du sacer­doce et des fidèles qui ont fait tant de sacri­fices qui ont per­mis un tel résul­tat, au milieu d’un monde en pleine déliquescence.

La région nan­taise connaît actuel­le­ment cette mul­ti­pli­ca­tion et cette conso­li­da­tion des œuvres, par la concré­ti­sa­tion pro­gres­sive de l’é­pa­nouis­se­ment des écoles et des lieux de messe.

Nous construi­sons, et nous avons l’a­ve­nir devant nous dans la mesure où nous sommes fidèle à notre pas­sé. Et si les bâti­ments s’é­lèvent, c’est tou­jours notre âme qui doit la pre­mière être édifiée.

Notre loyau­té à conser­ver la foi sans conces­sion, à ne pas diva­guer d’une messe à l’autre, à ne pas être séduit par des faci­li­tés ten­tantes, à ne pas se lais­ser entraî­ner par la tié­deur ou la rou­tine, doit res­ter pour nous un défi qui per­mette l’en­ra­ci­ne­ment de la grâce dans nos familles. L’avenir est donc à nous, c’est pour­quoi l’Hermine pro­pose un dos­sier sur l’é­du­ca­tion visant spé­cia­le­ment la petite enfance.

De même que pour les adultes la fidé­li­té aux prin­cipes per­met le bon accom­plis­se­ment des actes dans la durée, de même pour les petites têtes blondes, leur don­ner les bonnes habi­tudes dès le début est une néces­si­té pour assu­rer le déve­lop­pe­ment har­mo­nieux de leur per­son­na­li­té sous le regard de Dieu.

Abbé Bruno France †

Sources : L’Hermine n° 51 d’oc­tobre 2016