Le Pèlerin : « Pourquoi Benoît XVI tend la mains aux intégristes ? »


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Pourquoi Benoît XVI tend la mains aux intégristes ?

Le sym­bole ne pou­vait guère échap­per : le décret pon­ti­fi­cal levant l’excommunication des quatre évêques ordon­nés illi­ci­te­ment, en 1988, par Mgr Lefevbre a été ren­du public la veille du 25 jan­vier, jour du 50e anni­ver­saire de l’annonce, par Jean XXIII, de la convo­ca­tion du concile Vatican II. Un sym­bole dif­fi­cile à manier.

Certains enten­dront les expli­ca­tions romaines sur un signe d’unité retrou­vée, conforme à l’intuition de Vatican II. D’autres retien­dront la réin­té­gra­tion d’évêques dont la rup­ture vient pré­ci­sé­ment d’un refus de Vatican II sur lequel ils ne sont jamais reve­nus. Au plan for­mel, le schisme n’existe plus. C’était là le vœu le plus cher de Benoît XVI. Les 491 prêtres et les 200 000 fidèles de la Fraternité Saint-​Pie‑X doivent à pré­sent déci­der, à leur tour, s’ils rentrent dans le giron de l’Eglise catholique.

Mais tout main­tien d’une sépa­ra­tion d’avec Rome est mena­cé d’extinction, puisqu’il n’existe plus d’évêque schis­ma­tique sus­cep­tible d’ordonner de nou­veaux prêtres dis­si­dents. L’indulgence pon­ti­fi­cale suffira-​t-​elle à conso­li­der une com­mu­nion véri­table autour du pape et des évêques ? Rien n’est moins sûr. De décla­ra­tion en décla­ra­tion, Mgr Fellay ne cesse de rap­pe­ler que les deux « condi­tions » posées pour leur retour étant acquises (retour de la messe selon le rite de saint Pie V et levée des excom­mu­ni­ca­tions), le dia­logue va pou­voir s’engager sur le « bilan » du Concile.

On n’ose pas ima­gi­ner Benoît XVI céder sur les deux points qui nour­rissent, depuis tou­jours, le dis­cours inté­griste sur la « tra­hi­son » : le dia­logue œcu­mé­nique et la liber­té reli­gieuse. Deux déci­sions qui ont été prises par les Pères conci­liaires et reçues par l’immense majo­ri­té des catho­liques comme conformes à la foi reçue des apôtres. Elles ne peuvent donc nour­rir le débat sur une pré­ten­due rup­ture de Vatican II avec la Tradition.

Reste que l’accueil des fils pro­digues, sans repen­tance expli­cite de leur part, est aujourd’hui reçu, par beau­coup, comme une injus­tice, même au-​delà de l’Eglise, où les pro­pos révi­sion­nistes de l’un d’eux ajoutent à l’incompréhension.

Nul ne conteste que l’excommunication de 1988 ait pu plon­ger bien des fidèles, sin­cères, dans une grande souf­france. Mais l’apparent dés­in­té­rêt de Rome pour celles et ceux qui, par cen­taines de mil­liers, se sen­tant incom­pris ou exclus, ont quit­té l’Eglise sur la pointe des pieds, est aujourd’hui une autre forme de scan­dale. Combien d’entre eux conti­nuent en leur cœur de croire en Jésus- Christ, fils de Dieu, mort et res­sus­ci­té ? Qui se sou­cie de leur tendre la main ?

René Poujol, rédac­teur en chef du Pèlerin