Sermon de Mgr Bernard Fellay à Saint-​Malo lors de la procession du 15 août 2013

Au nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit, ain­si soit-il.

Mes chers Frères, 

Nous célé­brons aujourd’­hui la fête de la glo­rieuse Assomption de la Très Sainte Vierge Marie, fête qui doit vrai­ment réjouir nos cœurs. J’aimerais vous lais­ser trois points en consi­dé­ra­tion : le pre­mier sur l’é­tat du corps glo­rieux, le deuxième sur le pour­quoi de cette Assomption, le troi­sième sur la vic­toire de la Très Sainte Vierge Marie. 

Tout d’a­bord, remar­quons que nous par­lons d’un évé­ne­ment sem­blable lorsque nous regar­dons Notre-​Seigneur mon­ter au Ciel avec son corps, son âme, le jour de l’Ascension. A ce moment-​là, nous par­lons d’Ascension. Pour la Sainte Vierge qui monte aus­si au Ciel avec son corps, son âme, nous par­lons d’Assomption. Et ce n’est pas par hasard. Si nous par­lons d’Ascension pour Notre-​Seigneur, c’est qu’il y monte tout seul. Il monte, donc on parle d’une Ascension. Pour la Sainte Vierge, elle ne monte pas. Elle est por­tée, elle est assu­mée, assu­mere, assomp­tion. Elle est prise dans le Ciel. C’est le Bon Dieu qui la prend, qui la fait mon­ter. C’est pas­sif, tan­dis que Notre-​Seigneur qui est Dieu monte tout seul. Voilà pour­quoi tout d’a­bord on parle d’une Assomption pour la Très Sainte Vierge Marie. C’est un dogme. 

C’est le dogme le plus récent. Qui dit dogme récent, ne veut pas dire nou­veau. Lorsque l’Eglise pro­clame un dogme, elle cano­nise, elle défi­nit un des points de la foi auquel nous étions déjà tenus. Mais elle le pré­cise. Là, Pie XII – car c’est sous Pie XII en 1950 – va nous pré­ci­ser que la Très Sainte Vierge Marie à la fin du cours de sa vie ter­restre – ce sont des mots très pré­cis – à la fin du cours de sa vie ter­restre, a été enle­vée au Ciel, avec son âme et son corps. 

Pie XII n’a pas vou­lu trai­ter ou tran­cher une autre ques­tion qui reste donc ouverte. C’est celle de savoir si la Sainte Vierge est morte. À la fin du cours de sa vie, est-​elle morte ? N’est-​elle pas morte ? Il n’a pas vou­lu tran­cher la ques­tion. Vous êtes libres de pen­ser sur ce point ce que vous vou­lez. Mais, tou­te­fois, on parle de dor­mi­tion de la Sainte Vierge. Le mot dor­mir dans l’Ecriture Sainte, veut dire mou­rir. On parle quand même de dor­mi­tion de la Sainte Vierge d’une manière tra­di­tion­nelle. Eh bien, tout d’un coup, la Sainte Vierge se retrouve au Ciel avec son corps et son âme. Lorsqu’on parle des Saints, vous le savez bien, d’une manière com­mune, on dit qu’ils laissent leur corps ici sur la terre. Même les Saints qui sont aujourd’­hui au Ciel, qui jouissent de la vision béa­ti­fique, ne retrou­ve­ront leur corps qu’a­près la résur­rec­tion des corps, lors du Jugement der­nier qui aura lieu à ce moment-là.

Pour la Sainte Vierge, il n’en va pas ain­si. Immédiatement, comme Notre-​Seigneur, elle se retrouve au Ciel. Son âme reste unie à son corps. Et ce corps se trouve alors dans un état glo­rieux. Il est dif­fi­cile pour nous de sai­sir ce que c’est que cet état glo­rieux. Je vais essayer de vous don­ner quelques élé­ments. Ici-​bas, notre âme qui est un esprit est comme pri­son­nière du corps. Mais c’est elle qui com­mande à ce corps, c’est elle qui anime ce corps. C’est donc elle qui est supé­rieure au corps. Mais en même temps, ce corps limite – on peut dire comme ceci – les mou­ve­ments de l’âme. Pour connaître, l’âme doit pas­ser par les sens qui appar­tiennent à notre corps. Pour se mou­voir – même si elle dési­rait, je ne sais pas, aller de l’autre côté de la terre – eh bien, elle est obli­gée de pas­ser par toutes les limites qui sont impo­sées par son corps. Elle doit man­ger, elle doit dor­mir. Elle est sujette à ce corps qui est comme une pri­son. Même si elle en est le maître, d’un autre côté, elle en est prisonnière.

Au Ciel, la rela­tion est inverse. C’est-​à-​dire que, à ce moment-​là, l’âme domine le corps tota­le­ment. Elle est la plus forte. Cette domi­na­tion est telle que, d’une part, sa gloire, la gloire d’une âme du Ciel, sa vision béa­ti­fique, redonde sur son corps et que, d’autre part, ce corps en devient glo­rieux. Un peu comme sur le Mont Thabor, Notre-​Seigneur laisse écla­ter la gloire de ce corps qui est un rejaillis­se­ment de son âme qui est dans la vision béa­ti­fique. Si saint Paul, qui nous parle un tout petit peu de ces choses, nous dit : « ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’o­reille n’a pas enten­du…, on ne peut pas ima­gi­ner ».- c’est tout un tas d’ex­pres­sions de ce genre – on ne peut pas ima­gi­ner ; n’al­lons pas plus loin. Ce sera extra­or­di­naire, ce sera magnifique. 

Cette fête de l’Assomption nous invite déjà à ce regard, qui est encore aujourd’­hui un regard de foi, mais néan­moins aus­si à cette joie. Cette joie est la joie des saints, la joie des anges, de voir la beau­té de l’âme et du corps de Notre-​Dame, de ce corps glorifié. 

Ce corps est tel­le­ment sou­mis à l’âme que non seule­ment il est immor­tel mais il devient incor­rup­tible ; donc, il n’est plus sou­mis ni à la mort, ni à la souf­france d’au­cune sorte. Il pos­sède alors des qua­li­tés abso­lu­ment éton­nantes, stu­pé­fiantes comme l’a­gi­li­té. Comme je vous le disais, pour me dépla­cer ici sur terre, si je veux me rendre seule­ment d’i­ci jus­qu’à l’hô­tel, eh bien il faut que mes jambes veuillent bien me por­ter jusque-​là. Et de même toutes mes join­tures et ain­si de suite. Au Ciel, du moment que l’âme a déci­dé de se rendre quelque part, elle s’y trouve. Je veux aller sur la lune, en un ins­tant, j’y suis. Je veux aller me pro­me­ner sur une autre galaxie qui est à des années-​lumière, à l’ins­tant même j’y suis. Le corps est tota­le­ment sou­mis à l’âme, même dans le mou­ve­ment. Voyez donc le corps de Notre-​Seigneur, il passe à tra­vers les murs. Il n’est plus du tout sou­mis à ces qua­li­tés qui suivent les corps ici sur terre, qui sont liées à la quan­ti­té, à la sur­face, à l’im­pé­né­tra­bi­li­té de cer­tains corps. Eh bien, ces éléments-​là dis­pa­raissent au Ciel. Encore une fois, c’est très dif­fi­cile pour nous de conce­voir ces choses-​là cor­rec­te­ment. On laisse faci­le­ment le libre cours à notre ima­gi­na­tion et là Dieu sait où l’on s’en va ! Mais bien sûr, le plus impor­tant n’est pas là. Le plus impor­tant est dans cette âme glorifiée. 

Mais alors, pour­quoi, pour­quoi le Bon Dieu, Notre-​Seigneur, a‑t-​Il vou­lu que la Sainte Vierge soit dès main­te­nant au Ciel, avec son corps ? C’est une récom­pense. Et c’est aus­si la consé­quence d’une condi­tion ; cette condi­tion est expo­sée ain­si par l’Écriture Sainte : rien d’im­pur ne peut paraître devant Dieu. Rien d’im­pur… Il n’en va pas ain­si – et nous le savons bien – d’une âme qui a encore la moindre tache au moment de la mort. Cette tache, ça peut être un péché véniel, ça peut même être un man­que­ment de répa­ra­tion des fautes qui ont été par­don­nées mais qui n’ont pas encore été suf­fi­sam­ment répa­rées. Donc vrai­ment un rien, mais qui reste encore une tache, une impu­re­té. Eh bien, c’est suf­fi­sant. Cette âme ne peut pas paraître comme cela devant Dieu. La majes­té de Dieu est tel­le­ment grande, elle est tel­le­ment infi­nie qu’elle ne peut pas souf­frir – c’est par­fai­te­ment juste – elle ne peut pas souf­frir la moindre chose qui Lui serait contraire. C’est pour cela que c’est une grande misé­ri­corde, de la part du Bon Dieu, d’a­voir per­mis aux âmes de pas­ser par le Purgatoire. Il y a encore, si l’on peut dire, une chance après la mort de ter­mi­ner cette puri­fi­ca­tion. Elles sont en état de grâce, ces âmes. Grâce à ce Purgatoire, grâce à ce sup­plé­ment de puri­fi­ca­tion, elles pour­ront jouir de la vision béatifique. 

Et le corps ? Eh bien, vous le savez aus­si, c’est le même prin­cipe. Nous arri­vons sur terre avec le péché ori­gi­nel. Ce péché ori­gi­nel, évi­dem­ment, touche l’âme. Dès qu’on parle de péché, on parle de notre âme. Mais le Bon Dieu a fait en sorte que jus­te­ment il y ait un lien, une rela­tion très intime entre notre âme et notre corps. C’est tout un, cette âme et ce corps. C’est nous. Eh bien, c’est avec notre corps que nous arri­vons bles­sés à l’exis­tence. Il y a une redon­dance de l’un sur l’autre et il arrive donc avec le péché ori­gi­nel. Nous avons une tache. On va appe­ler cela les bles­sures du péché ori­gi­nel. Et chaque péché que nous allons com­mettre, en tout cas la plu­part des péchés – ce serait sim­ple­ment les péchés intel­lec­tuels qui ne seraient pas tou­chés par cela – ont une redon­dance sur notre corps. Ça peut être même des péchés d’i­ma­gi­na­tion. L’imagination est de notre corps, elle n’est pas seule­ment de notre esprit. Un désir, une pas­sion, tout ça sont des taches sur notre corps. Il faut répa­rer. On voit… c’est un petit peu un reflet de ce mys­tère de l’Assomption, ces corps incor­rup­tibles. Il y a des âmes qui ont vécu une vie toute pure. Toutefois, le Bon Dieu ne per­met pas que ces âmes se retrouvent immé­dia­te­ment au Ciel avec leur corps. Cependant, Il per­met, comme pour mon­trer un signe de cette pure­té, que ces corps ne connaissent pas la cor­rup­tion qui est l’une des consé­quences, jus­te­ment, du pre­mier péché. Tu es pous­sière et tu retour­ne­ras en pous­sière. C’est une des condam­na­tions du péché ori­gi­nel. Eh bien, la Sainte Vierge a été épar­gnée, n’a pas connu ce péché originel. 

Lorsqu’on parle de l’Immaculée, on parle d’une pure­té totale, non seule­ment dans son âme, mais aus­si dans son corps vir­gi­nal. La Sainte Vierge est toute pure sous tous les aspects. Et dès sa concep­tion et jus­qu’à la fin de sa vie sur terre, à aucun moment ni son âme ni son corps ne vont connaître le péché, la souillure du péché, la tache. Il faut recon­naître, il faut voir dans la Sainte Vierge la réa­li­sa­tion par­faite du plan de Dieu sur les hommes. Le Bon Dieu vou­lait, en créant les hommes, que ça se passe ain­si pour tous les hommes. Il vou­lait un pas­sage sur terre, certes, avec des épreuves, mais un pas­sage imma­cu­lé. Et à la fin de ce pas­sage sur terre, eh bien, les hommes auraient été pris au Ciel, comme la Sainte Vierge a été prise au Ciel, sans la mort et, en plus, sans la souf­france. Si la Sainte Vierge a eu quelques-​unes des consé­quences du péché, qui sont le sort des hommes, après le péché, elle n’a pas eu ces liens directs avec le péché. Et donc le fait de voir que Notre-​Seigneur prenne au Ciel la Sainte Vierge avec son âme et son corps, eh bien, oui, c’est une récom­pense pour sa pure­té de vie. Voyez-​vous, lors­qu’on dit pure­té, lors­qu’on dit imma­cu­lée, on ne dit pas quelque chose de néga­tif. C’est sem­blable – c’est très inté­res­sant – c’est sem­blable à l’une des manières que nous avons de par­ler du Bon Dieu. 

Pour beau­coup de choses, lorsque nous essayons de par­ler du Bon Dieu, nous ne disons pas ce qu’Il est, nous disons ce qu’Il n’est pas. En fait, nous essayons de Le com­pa­rer à nous-​mêmes, parce que nous nous connais­sons nous-​mêmes. Et alors, on dit : Il n’est pas comme ça. Par exemple, nous disons qu’Il est infi­ni ; fini, on connaît cela. Fini veut dire : qui a des limites. Eh bien, le Bon Dieu est sans limites, Il est infi­ni. Immense, men­sus veut dire : mesu­ré. Nous sommes mesu­rés, nous avons un poids, une taille. En toutes choses, jus­te­ment, nous sommes mesu­rés, nous tom­bons sous une mesure. Le Bon Dieu ne tombe sous aucune mesure. Et c’est le mot immense, sans mesure. Voyez-​vous, beau­coup d’élé­ments que nous uti­li­sons pour par­ler du Bon Dieu, beau­coup de concepts, sont des concepts néga­tifs mais on ne parle pas du Bon Dieu en néga­tif. C’est une autre manière de par­ler pour essayer de dire qu’Il est grand. Eh bien, dans le mot imma­cu­lée, vous avez la même chose. Maculé veut dire : taché. Et lors­qu’on veut par­ler de la Sainte Vierge, on dit qu’elle est imma­cu­lée. Le im est quelque chose de néga­tif. Vous com­pre­nez très bien que lors­qu’on dit de quel­qu’un qu’il est imma­cu­lé, on ne dit pas quelque chose de néga­tif. Ce mot imma­cu­lé, on le trouve dans la Sainte Écriture, d’une manière presque exclu­sive, lié au sacri­fice. Vous l’a­vez pra­ti­que­ment tou­jours avec le mot agneau, l’a­gneau imma­cu­lé, ou l’hos­tie imma­cu­lée, sans tache, toute pure. Et lors­qu’on regarde la Sainte Vierge, évi­dem­ment, on ne peut pas ne pas pen­ser à ce sacrifice.

Et par là on passe au troi­sième point, la vic­toire. Cette mon­tée au Ciel, l’Eglise la voit comme une vic­toire, et non pas seule­ment comme une récom­pense ou comme la joie de voir cette vie toute belle, magni­fique, ter­mi­ner en apo­théose au Ciel. Non, pas seule­ment cela. C’est une vic­toire et on le voit dans l’Introït et aus­si dans l’Epître. Lorsque Pie XII a pro­cla­mé le dogme, en 1950, il va chan­ger la Messe. Il va faire une nou­velle Messe pour la Sainte Vierge, pour cette nou­velle fête. Il va choi­sir cet Introït, Signum mag­num appa­ruit in cælo : un grand signe est appa­ru dans le Ciel. C’est une phrase de l’Apocalypse. Elle va décrire cet immense com­bat avec le dra­gon. Ce magni­fique signe, entou­ré des étoiles, est jus­te­ment la Sainte Vierge. L’Église, par cet Introït, attri­bue direc­te­ment à la Sainte Vierge cette expres­sion de l’Apocalypse. Elle veut nous faire com­prendre l’im­pli­ca­tion dans le plan du Bon Dieu, pour notre salut, de la Très Sainte Vierge Marie, dans ce com­bat ter­ri­fiant, annon­cé par le Bon Dieu Lui-​même, juste après le péché ori­gi­nel, lors­qu’il y eut cette ren­contre assez sai­sis­sante entre, d’un côté, le Bon Dieu et, de l’autre, Adam, Eve et le ser­pent. Chacun repasse à l’autre la faute, n’est-​ce pas ? Pourquoi as-​tu fait cela ? C’est l’é­pouse que tu m’as don­née. Pourquoi as-​tu fait cela ? C’est le ser­pent qui m’a trom­pée. On passe tou­jours à l’autre. On voit là la psy­cho­lo­gie humaine. Ça ne date pas d’au­jourd’­hui. Eh bien, à ce moment-​là, le Bon Dieu a pro­non­cé les sen­tences, et dans l’une de ces sen­tences, par­lant au diable, le ser­pent, Il dit : « Je pose une ini­mi­tié entre toi et la Femme, entre ta des­cen­dance et sa descendance ». 

Depuis là, mes chers frères, jus­qu’à la fin des temps, il y a, on peut dire, l’ins­crip­tion dans le des­tin des hommes, de ce com­bat, entre ceux qui sont avec le Bon Dieu, avec la Sainte Vierge, avec l’Église, et ceux qui sont contre, c’est-​à-​dire avec le démon. C’est un com­bat qui tra­ver­se­ra toutes les exis­tences. C’est l’Histoire de l’Église. Si l’Église est appe­lée mili­tante, c’est parce qu’elle est ins­crite dans ce com­bat. Et pré­tendre vou­loir vivre en paix avec le monde, eh bien, ce n’est pas pos­sible. Tout sim­ple­ment pas pos­sible. Le démon, enra­gé jus­qu’au bout, veut notre mort spi­ri­tuelle. Il veut qu’on le rejoigne en enfer. Il veut qu’on ne puisse pas arri­ver au Ciel. Il fera tout pour cela. Eh bien, de l’autre côté, il faut nous battre. Il faut nous défendre. Dans un com­bat qui a des aspects ter­ri­fiants, c’est une immense conso­la­tion, dans ce regard sur ce com­bat, que de voir cette vic­toire de l’Immaculée, qui est consa­crée aujourd’­hui dans l’Assomption, dans l’ar­ri­vée au Ciel. C’est vrai­ment une vic­toire, une vic­toire qui est aus­si la vic­toire de Notre-​Seigneur. C’est le plus beau fruit de la Passion de Notre-​Seigneur que cette Assomption de la Très Sainte Vierge Marie, par les mérites de son Fils.

Eh bien, pour nous qui sommes des humains, qui ne sommes pas Dieu, on peut tou­jours dire qu’Il appar­tient à Dieu de résis­ter aux ten­ta­tions. Il était Dieu. La Sainte Vierge, elle, de notre huma­ni­té, est femme. Elle appar­tient à notre genre humain, à notre condi­tion humaine. Eh bien, elle a vain­cu en résis­tant à toutes les ten­ta­tions du démon. Il n’y a pas un seul ins­tant dans sa vie où elle aurait lâché quelque chose. Il n’y a pas l’ombre d’une tache. Et cette Mère de Dieu que nous saluons aujourd’­hui, c’est notre Mère, source de joie, mais aus­si de conso­la­tion, aus­si d’espérance. 

On voit bien tous les jours : cette vie n’est pas facile, vie contre le péché, contre le monde, contre les ten­ta­tions qui sont par­tout. Souvent, on se demande, com­ment est-​ce pos­sible de vivre, com­ment est-​ce pos­sible de se sau­ver dans une telle situa­tion tel­le­ment forte ? Eh bien, jetons notre regard sur la Sainte Vierge. Le Bon Dieu ne nous a jamais deman­dé de faire notre salut tout seul. Au contraire, Il nous demande de comp­ter sur Lui, de comp­ter sur sa Grâce. Et pour nous aider, si on peut dire, Il nous donne sa Mère. Cette rela­tion d’un enfant vers sa mère, c’est quelque chose qui est tel­le­ment pro­fond chez les hommes. Eh bien, dans l’ordre sur­na­tu­rel, dans l’ordre de la grâce, le Bon Dieu nous dit, mais pen­sez donc à votre Mère. Et croyez-​vous qu’une mère va oublier ses enfants ? Notre-​Seigneur uti­lise cet argu­ment pour nous dire qu’une mère n’ou­blie pas ses enfants. Et bien, même si une mère oubliait ses enfants, moi je ne vous oublie pas. C’est dans l’Ecriture Sainte et ce signe pour ne pas nous oublier, on le trouve aus­si dans le fait qu’Il nous donne sa Mère. C’est vrai­ment la Mère de la grâce. Nous avons une maman au Ciel. Elle est au Ciel. Et croyez-​vous qu’elle ne s’oc­cupe pas de nous ? C’est notre Mère. Il y a un cœur de mère là-​haut, que nous avons fait payer, qui a payé pour nous, qui a souf­fert pour nous. Ce qui nous arrive n’est pas du tout indif­fé­rent, mais pas du tout. Bien sûr, il reste le voile de la foi. Nous n’a­vons pas, si l’on peut dire, le télé­phone facile avec la Sainte Vierge. Il reste tout ce mérite de la foi. Mais néan­moins, c’est une véri­té, c’est une réa­li­té que cette mater­ni­té de la Très Sainte Vierge Marie envers les enfants de Dieu, envers nous, envers les bap­ti­sés. Et donc, réjouissons-​nous de sa victoire. 

Mais pen­sons aus­si que si c’est la sienne, c’est aus­si quelque part la nôtre. Il y a comme un gage. Si la maman est au Ciel, elle va s’oc­cu­per de ses enfants, elle va faire tout ce qui est pos­sible pour que ses enfants la retrouvent. Voyons ! Et comme elle est la Mère média­trice de toutes grâces, croyez-​vous qu’elle ne va pas s’oc­cu­per de nous don­ner ce qu’il faut ? Mais bien sûr pour nous, à nous d’en­trer dans cette rela­tion d’en­fant, dans cette rela­tion filiale envers notre Mère qui est en même temps – et cela nous oblige à un immense res­pect – la Mère de Dieu. La Reine du Ciel et de la Terre. 

Après l’Assomption, il y a immé­dia­te­ment le Couronnement de la Très Sainte Vierge. C’est dans ce sens-​là que je vous parle d’une vic­toire. C’est une conquête. Elle devient vrai­ment Reine, mais pas seule­ment reine de paco­tille comme on en voit aujourd’­hui. C’est une vraie reine, Reine du Ciel et de la Terre, avec un vrai pou­voir. Du Ciel, ce com­bat conti­nue, contre le démon, contre les enne­mis du genre humain. Et donc, si les temps sont dif­fi­ciles – c’est vrai, il ne faut pas le nier, il faut res­ter bien dans la réa­li­té – néan­moins fait par­tie de cette réa­li­té, cette aide de la Très Sainte Vierge Marie pour nous, cette aide du Bon Dieu, de sa Grâce. Ça fait par­tie de la réa­li­té, il ne faut pas l’ou­blier cela, même si cela ne se voit pas, même si cela ne tombe pas sous le sens. La Reine du Ciel et de la Terre est Terreur des démons – on le dit aus­si de saint Joseph -. De la Sainte Vierge, on dit qu’elle est ter­rible comme une armée ran­gée en bataille. On dit que c’est elle qui a écra­sé toutes les héré­sies. Il y a quelque chose de très solide. Ce n’est pas seule­ment une dévo­tion, une sen­si­ble­rie, non. Cet amour de la Sainte Vierge, pour nous mais aus­si contre tout ce qui est oppo­sé à Dieu, est très fort.

Profitons de cette fête pour bien entrer, pour appro­fon­dir cette rela­tion avec la Très Sainte Vierge Marie. Nous par­le­rons cet après-​midi de cette pro­messe, de ce vœu de Louis XIII, de cette consé­cra­tion si l’on peut dire, de cette volon­té de remettre dans les mains de la Sainte Vierge ce beau pays, mais il ne faut pas que ça reste sim­ple­ment des mots. S’il a vou­lu que cela se répète d’an­née en année, cela a un sens. C’est jus­te­ment pour qu’on ne l’ou­blie pas. Qu’on n’ou­blie pas cette mer­veilleuse rela­tion vou­lue par le Bon Dieu de nous, pauvres humains, avec celle qu’Il s’é­tait choi­sie, qui nous était choi­sie, pour qu’Elle soit sa Mère, la Mère de Dieu.

Aujourd’hui, met­tons donc tout notre cœur à la saluer, à la glo­ri­fier et demandons-​lui aus­si pré­ci­sé­ment de la glo­ri­fier par une vie sans tache, une vie toute don­née au Bon Dieu, une vie qui lutte, qui fait tout ce qu’elle peut pour évi­ter d’of­fen­ser Notre-​Seigneur et la Très Sainte Vierge.

Ainsi soit-​il.

Au Nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit, ain­si soit-il. 

Mgr Bernard Fellay, Saint-​Malo le 15 août 2013

Pour conser­ver à ce ser­mon son carac­tère propre, le style oral a été main­te­nu. Les sur­li­gnages et les inter­titres sont de la rédac­tion de LPL

Source : LPL

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FSSPX Premier conseiller général

De natio­na­li­té Suisse, il est né le 12 avril 1958 et a été sacré évêque par Mgr Lefebvre le 30 juin 1988. Mgr Bernard Fellay a exer­cé deux man­dats comme Supérieur Général de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X pour un total de 24 ans de supé­rio­rat de 1994 à 2018. Il est actuel­le­ment Premier Conseiller Général de la FSSPX.