Ecole et formation

1 – Dieu mis de côté

A la ren­trée des classes les élèves se mettent nor­ma­le­ment à étu­dier. Etudier quoi ? Mathématiques, fran­çais, his­toire, lit­té­ra­ture, phi­lo­so­phie, géo­gra­phie, physique-​chimie, bio­lo­gie, langue vivante 1, langues vivantes 2, 3, (4 ?), langues mortes, tech­no­lo­gie, musique, des­sin etc. On peut dire que tout est mis en place pour favo­ri­ser la pré­pa­ra­tion de son ave­nir pro­fes­sion­nel, s’o­rien­ter sui­vant ses goûts, avoir une situa­tion, s’as­su­mer hono­ra­ble­ment et, pour­quoi pas – objec­tif suprême – réus­sir (que ne met-​on pas der­rière ce mot ?).

Voilà le quo­ti­dien le plus banal, on pour­rait presque dire, le plus nor­mal de notre France moderne. Il y a cepen­dant un petit couac. Quel temps est réser­vé à Dieu dans tout cette intense acti­vi­té ? Pour des mil­lions d’en­fants, d’a­do­les­cents et de moins jeunes il n’en sera qua­si­ment jamais ques­tion au cours de ces longues années de formation.

Très vite la vie moderne les happe dans son tour­billon, ils sont acca­pa­rés à plein temps, ils n’ap­pren­dront ni à le connaître, ni à l’ai­mer, ni à le ser­vir, ni à lui rendre le culte qui lui est dû, et sur­tout ils n” auront jamais l’i­dée qu’on est prin­ci­pa­le­ment pla­cé sur terre pour faire sa volon­té quo­ti­dien­ne­ment : « haec est volun­tas Dei sanc­ti­fi­ca­tio ves­tra » « la volon­té de Dieu c’est votre sanc­ti­fi­ca­tion ».

A l’heure de com­pa­raître devant le Souverain Seigneur des chré­tiens auront igno­ré s’il a exis­té une façon pré­cise dont Dieu vou­lait être hono­ré et que c’é­tait là une chose qui devait s’ap­prendre et s’ap­prendre inten­sé­ment. Dans ce domaine c’est l’im­pro­vi­sa­tion la plus totale, à croire que l’ins­tinct et le cœur soient désor­mais les seuls guides des croyants. Comment en est on arri­vé là ? Certainement en grande par­tie à cause de l’in­fluence gran­dis­sante de l’é­cole laïque dont les visées sont pure­ment terrestres.

2 – Des écoles pour déformer

Dans ces écoles s’il arrive que l’on parle de Dieu ce sera presque tou­jours par déri­sion ou pour blas­phé­mer, même si – en prin­cipe – c’est contre le règle­ment. Mais atten­tion le suprême bien­fait que nous accorde cette ins­ti­tu­tion et qui fait l’ad­mi­ra­tion una­nime de ses par­ti­sans c’est sa neu­tra­li­té affichée.

Le pro­fes­seur hon­nête et com­pé­tent, conscien­cieux et sans pré­ju­gé (parce que sans reli­gion), res­pec­te­ra ceux qui ont le pauvre han­di­cap d’être croyants (super­sti­tieux ) et il s’ef­for­ce­ra de ne pas les frois­ser en gar­dant un silence sys­té­ma­tique mais bien­veillant sur Dieu.

En effet – selon l’é­van­gile laïc- ce genre de sujet concerne la stricte inti­mi­té d’un cha­cun car Dieu n’est pas objet de connais­sance et le savoir doit être neutre. C’est cela, paraît-​il, le sum­mum de la per­fec­tion de cette belle inven­tion sco­laire sor­tie de la secte des francs­ma­çons pour contre­car­rer l’in­fluence de l’Eglise dans notre beau pays. Les ques­tions théo­lo­giques sont oiseuses et pour­voyeuses de conflits, occu­pons nous uni­que­ment de ce monde qui a tant à nous appor­ter et lais­sons de côté le monde à venir s’il y en a un.

Les pro­fes­seurs se doivent être inco­lores, inodores et sans saveur pour Dieu ; on ne leur demande que d’être capables d’en­sei­gner leurs matières pro­fanes. Ne jamais par­ler de Dieu, ni en bien ni en mal, c’est aux yeux de la laï­ci­té être juste, impar­tial, c’est res­pec­ter tous les hommes et leurs droits les plus sacrés. Il est admis comme véri­té pre­mière fon­da­men­tale que chaque homme doit en reli­gion se faire une opi­nion par lui même, en toute liber­té , (com­pre­nez bien : sans les prêtres et l’Eglise), et sur­tout il doit se faire une opi­nion pour lui même ( défense à Dieu de débor­der de son ciel sur notre terre). La reli­gion est prin­ci­pa­le­ment une affaire privée.

3- Les catholiques réagissent mollement.

Malheureusement beau­coup de catho­liques sont désor­mais plei­ne­ment satis­faits de cela. Quoi d’é­ton­nant ? Si depuis plus d’un siècle Dieu ne fait plus par­tie du pro­gramme offi­ciel de ce qu’un être humain doit savoir, il est hors de doute que l’at­mo­sphère envi­ron­nante qui s’est plus ou moins dou­ce­ment mise en place, déforme inévi­ta­ble­ment la manière de pen­ser des bap­ti­sés. D’autant plus que les écoles catho­liques dans leur ensemble ont qua­si­ment capi­tu­lé et se sont ali­gnées sur la manière de faire des écoles d’Etat.

L’instruction reli­gieuse n’y est plus qu’ex­cep­tion­nel­le­ment obli­ga­toire et sou­vent elle est don­née sans convic­tion par des gens qui n’ont même pas la foi. Souvent, grâce à Vatican II, le cours de reli­gion s’est trans­for­mé en un cours des reli­gions ( ce qui est tout autre chose) où la part belle est faite à tout ce qui n’est pas de l’Eglise catholique .

Aussi plus que jamais les parents doivent être conscients des dom­mages qui peuvent en résul­ter pour eux-​mêmes et leurs enfants. Ils doivent réagir et se mon­trer vigi­lants car aujourd’­hui plus qu’au­tre­fois le mal n’a fait qu’empirer d’une géné­ra­tion sur l’autre.

Contrairement au pas­sé, les évêques ne montent plus au cré­neau pour com­battre vigou­reu­se­ment l’é­cole sans Dieu qui dis­tille son venin per­vers d’in­dif­fé­rence reli­gieuse par­mi les masses. C’est ain­si que les catho­liques deviennent libé­raux, fades au point d’être reje­tés de Dieu : « Dieu vomit les tièdes ».

Il faut savoir que les attaques les plus dan­ge­reuses contre la foi ne sont pas les attaques fron­tales, celles des ins­ti­tu­teurs ou des maîtres qui insultent la reli­gion. Un enne­mi visible et connu comme tel nous fait nor­ma­le­ment réagir et nous tenir sur nos gardes : on résiste beau­coup moins à une ambiance, une atmo­sphère, un esprit qui se répand dans les moeurs par petites touches suc­ces­sives insi­gni­fiantes avec même une sorte d’ai­mable poli­tesse. Alors on est ame­né à croire à un chan­ge­ment har­mo­nieux et légi­time, une sorte de pro­grès : c’est là qu’est le dan­ger pour la foi.

4 – Les remèdes à cette situation.

Aussi lorsque les parents ne peuvent pas mettre leurs enfants dans les écoles vrai­ment catho­liques ( chose qui serait nor­ma­le­ment obli­ga­toire mais qui pour des rai­sons très légi­times dont les parents sont les juges com­pé­tents n’est pas tou­jours pos­sible ou sou­hai­table) il importe de se pré­mu­nir le mieux pos­sible contre les dan­gers qui menacent de rui­ner ou de dimi­nuer la foi.

A - D’abord ils doivent se rap­pe­ler sou­vent ce qu’ont fait les francs maçons pour conqué­rir la domi­na­tion totale de l’en­sei­gne­ment sur l’Eglise : per­sé­cu­tion des reli­gieux ensei­gnants, expul­sions, confis­ca­tion de leur patri­moine, contrainte de toutes sortes pour les empê­cher d’exer­cer leur rôle d’é­du­ca­teur. Cette connais­sance leur don­ne­ra une hor­reur pro­fonde et une méfiance ins­tinc­tive de tout ce qui est neutre et laïcisé.

B - Ensuite le catho­lique se rap­pel­le­ra encore que la neu­tra­li­té est un leurre, un men­songe affreux ins­pi­ré par Satan et ses dis­ciples, les francs maçons. Elle est pour les chré­tiens un véri­table scan­dale : depuis notre bap­tême nous sommes des enfants de Dieu, du par­ti de Dieu, de Jésus-​Christ et de la seule Eglise qu’Il a fon­dée. La neu­tra­li­té déforme l’es­prit et le cœur des chré­tiens : elle va direc­te­ment contre l’en­sei­gne­ment du Christ :

« qui n’est pas avec moi est contre moi »,(Mt 12, 30) « lais­sez venir à moi les petits enfants, ne les empê­chez pas » (Luc 18, 16), « Malheur à celui qui scan­da­lise un de ces petits qui croient en moi, mieux vau­drait pour lui qu’on lui sus­pende une meule à âne autour du cou et qu’on le pré­ci­pite au fond de la mer » (Mt 18,6)

C - De plus c’est lorsque les écoles laïques et catho­liques libé­rales ont très bonne répu­ta­tion (il est vrai que c’est rare) à cause de leurs résul­tats indé­niables que la vigi­lance doit être au maxi­mum, car on est tou­jours por­té à admi­rer ce qui marche, qui est sérieux et qui pro­duit de bons effets : un chré­tien peut faus­se­ment en conclure que c’est là un signe d’ap­pro­ba­tion divine.

Les écoles catho­liques de Tradition ont beau­coup pro­gres­sé, il est vrai, depuis leur fon­da­tion mais elles demandent d’é­normes sacri­fices pour tous ( parents, ensei­gnants et diri­geants ) et les moyens finan­ciers ne seront jamais à la hau­teur de ce que verse l’Etat grâce aux impôts de tous. Il est très facile de les cri­ti­quer parce qu’elles ont des défauts par­fois patents (sur­tout dans les débuts tou­jours dif­fi­ciles), néan­moins elles donnent de moins en moins de bonnes rai­sons de le faire et cer­taines de nos écoles riva­lisent avec ce que l’on peut sou­hai­ter de meilleur.

D - Il faut encore pour tous – mais sur­tout les jeunes – que le poi­son néfaste que l’on res­pire dans ce monde laï­ci­sé soit le plus pos­sible ren­du inof­fen­sif grâce à une for­ma­tion catho­lique forte : lec­ture des grandes ency­cliques des papes anti­li­bé­raux, étude du caté­chisme du Concile de Trente, cours de doc­trine, cercles, lec­tures des grands auteurs catho­liques etc.

E - Enfin les catho­liques doivent s’u­nir le plus pos­sible par dif­fé­rentes ren­contres pour se sou­te­nir. Ils ne doivent pas se diluer vers ce qui est catho­lique libé­ral (sous pré­texte que c’est tout de même catho­lique) mais entre­te­nir dans le concret les œuvres intègres pour les rendre encore plus fortes Vous le faites déjà, certes autour des prieu­rés, des cha­pelles de notre Fraternité, à l’oc­ca­sion de pèle­ri­nages, de confé­rences et de dif­fé­rentes mani­fes­ta­tions, mais com­bien encore sont indé­cis et par une cha­ri­té mal com­prise vont man­ger à tous les râteliers.

Ainsi dans l’ad­ver­si­té ou la pros­pé­ri­té nous serons non plus comme des enfants flot­tants et bal­lot­tés à tout vent de doc­trine, au milieu de la malice des hommes mais, pra­ti­quant la véri­té dans la cha­ri­té, nous croî­trons dans Celui qui est le Chef, le Christ.

Saint Paul

Abbé Pierre BARRERE †

(Extrait du Sainte-​Anne n° 192 d’oc­tobre 2007)