Pour que renaisse la Russie

Parce que le monde n’a pas vou­lu écou­ter le mes­sage de la bien­heu­reuse Vierge Marie à Fatima, la Russie a répan­du ses erreurs durant soixante-​dix ans dans l’u­ni­vers entier. Si, aujourd’­hui encore, il existe des pays offi­ciel­le­ment marxistes-​léninistes, c’est sous l’in­fluence pre­mière de la « patrie du socia­lisme », même si, pour des rai­sons de poli­tique inté­rieure, ces pays ont rom­pu avec elle à un moment ou à un autre.

Cependant, le sys­tème com­mu­niste, qui s’est d’a­bord dres­sé contre Dieu, contre toute trans­cen­dance et contre toute Révélation, s’est avé­ré en même temps pro­fon­dé­ment inhu­main, des­truc­teur de toute huma­ni­té. Ce qui est par­fai­te­ment logique : qui refuse le Créateur finit par détruire sa créa­ture. Soljenitsyne a sur ce point des mots défi­ni­tifs dans L’Archipel du Goulag.

Ayant atta­qué la pos­si­bi­li­té pour l’homme d’être lui-​même, de réa­li­ser ne fûtce que les pre­miers élé­ments de sa nature propre, le com­mu­nisme sciait la branche sur laquelle il était assis, détrui­sant métho­di­que­ment les der­nières qua­li­tés humaines élé­men­taires mises à son ser­vice, en sorte qu’il a fini par s’ef­fon­drer sous son propre poids.

Depuis ce moment, cahin-​caha, la Russie essaie d’é­mer­ger des ruines san­glantes de l’Union Soviétique. Des hommes poli­tiques, for­cé­ment tous plus ou moins issus du sys­tème com­mu­niste lui-​même, tentent de redon­ner à ce mal­heu­reux pays une exis­tence viable.

Toutefois, il ne faut pas négli­ger les consé­quences catas­tro­phiques de soixante-​dix années du com­mu­nisme le plus bar­bare. Le sac­cage de la nature humaine a été immense et pro­fond. Il serait faux de croire que le com­mu­nisme n’au­ra été qu’un bref inter­mède qui aurait lais­sé inal­té­rée une nature russe sup­po­sée immuable. Ces années ont rava­gé les âmes comme les corps, et il fau­dra au peuple russe des années, peut-​être même des siècles, pour s’en guérir.

Le déses­poir, le fata­lisme, la peur, la cor­rup­tion, l’al­coo­lisme, etc., minent encore les efforts de résur­rec­tion qui ont été entre­pris çà et là.

Dans cette des­truc­tion de l’âme russe qui a été l’ob­jet prin­ci­pal du pro­jet sovié­tique, il faut comp­ter au pre­mier chef l’en­sei­gne­ment sys­té­ma­tique de l’a­théisme et du maté­ria­lisme. Il ne s’a­git pas d’un ver­nis super­fi­ciel : trois ou quatre géné­ra­tions ont été for­mées dans le rejet de Dieu, du Christ et de son Église. Mais, objectera-​t-​on, il existe aujourd’­hui une renais­sance reli­gieuse en Russie ! Les églises ouvrent de nou­veau, cer­taines sont recons­truites, les fidèles s’y pressent, les bap­têmes (y com­pris d’a­dultes) se mul­ti­plient, beau­coup reven­diquent publi­que­ment leur atta­che­ment au christianisme.

C’est vrai. Mais il ne faut pas se lais­ser trom­per par les appa­rences : si les struc­tures (églises, cler­gé, etc.) tendent à se recons­ti­tuer après des décen­nies de per­sé­cu­tion, il est dou­teux que la vie chré­tienne se réen­ra­cine mas­si­ve­ment. Le chris­tia­nisme, une mémoire, une culture, une tra­di­tion pour le peuple russe : sans doute ! Une foi vivante, une vie sacra­men­telle, une pra­tique quo­ti­dienne : c’est beau­coup plus contestable.

De plus et sur­tout, ce renou­veau reli­gieux se fait dans le cadre de l’Église ortho­doxe, sépa­rée de Rome depuis des siècles. Certes, l’Église russe pos­sède des tré­sors spi­ri­tuels res­pec­tables ; mais ils ne sont plus vivi­fiés par le puis­sant cou­rant de la grâce venant du centre d’u­ni­té de l’Église. Pour qu’elle renaisse vrai­ment, il faut donc que « la Russie se conver­tisse » à la foi chré­tienne complète.

Nous pou­vons espé­rer que le sang chré­tien qui a cou­lé par tor­rents durant la ter­reur com­mu­niste sera le ferment d’une renais­sance authen­tique du peuple et de l’Église russes. Des mil­liers de reli­gieux et de fidèles furent sau­va­ge­ment tor­tu­rés et assas­si­nés, non d’a­bord parce qu’ils étaient catho­liques ou ortho­doxes, mais en haine de Dieu, du Christ et de son Église. Daignent ces témoins inter­cé­der pour la terre russe !

Le sang des mar­tyrs, « semence de chré­tiens » (Tertullien) laisse espé­rer une renais­sance com­plète, donc catholique.

Abbé Régis de Cacqueray †, Supérieur du District de France

Source : Fideliter n° 187

Capucin de Morgon

Le Père Joseph fut ancien­ne­ment l’ab­bé Régis de Cacqueray-​Valménier, FSSPX. Il a été ordon­né dans la FSSPX en 1992 et a exer­cé la charge de Supérieur du District de France durant deux fois six années de 2002 à 2014. Il quitte son poste avec l’ac­cord de ses supé­rieurs le 15 août 2014 pour prendre le che­min du cloître au Couvent Saint François de Morgon.

Fideliter

Revue bimestrielle du District de France de la Fraternité Saint-Pie X.