Saint Paul résiste au successeur de Pierre…

Dans l’épître aux Éphésiens de saint Paul, nous lisons au cha­pitre V : « Que la for­ni­ca­tion, et toute impu­re­té, ou l’avarice ne soient pas même nom­mées par­mi vous, comme il convient à des saints » (v. 3 ; toutes les cita­tions et notes sont tirées de Fillion). C’est donc à contre­cœur, mais pous­sé par la néces­si­té, que le Combat de la foi catho­lique aborde, dans ses colonnes, le pro­blème de la ques­tion, deve­nue tris­te­ment célèbre, posée par le pape François …

Qui suis-​je pour juger ?

Le 28 juillet 2013, au cours de la confé­rence de presse qu’il a don­née à bord d’un avion qui le rame­nait à Rome après son voyage au Brésil, le pape François posait cette ques­tion : « Si une per­sonne est gay et cherche le Seigneur avec bonne volon­té, qui suis-​je pour la juger ? » Cette ques­tion est ambigüe car elle ne dis­tingue pas le pécheur en tant que pécheur pri­vé, du pécheur en tant que pécheur public, c’est-à-dire du pécheur qui vou­drait conti­nuer à vivre socia­le­ment en confor­mi­té avec sa per­ver­sion et être recon­nu comme tel…

Il est clair que l’Église ne demande à per­sonne de juger les cœurs : cela revient à Dieu seul. L’Église enseigne que tous les péchés, si nom­breux et si graves soient-​ils, peuvent obte­nir misé­ri­corde. L’Église, comme Jésus-​Christ, son Époux, enseigne à aimer le pécheur et à détes­ter le péché : « Moi non plus, je ne te condam­ne­rai pas », dit Jésus à la femme adul­tère sur­prise en fla­grant délit, mais « va, et désor­mais ne pèche plus ! » Jésus ne juge pas la péche­resse repen­tante, mais cela ne l’empêche pas de por­ter un juge­ment sur le péché et d’exiger de le quit­ter, pour tou­jours, avec l’aide de sa grâce qu’il ne refuse à personne.

Quant au pécheur per­ver­ti qui pré­tend vivre socia­le­ment sa per­ver­sion, la ques­tion est tout autre. Et il semble que saint Paul s’est déjà expri­mé sur cette question.

Saint Paul reprend Pierre…

Nous pou­vons lire dans l’épitre de saint Paul aux Galates au cha­pitre II : « Lorsque Céphas – c’est-à-dire saint Pierre, le pre­mier pape – vint à Antioche, je lui résis­tai en face, parce qu’il était répré­hen­sible » (v. 11). Laissons donc saint Paul ins­truire lui-​même le pape François.

Nous lisons dans la pre­mière épître à Timothée, au cha­pitre I :

« Certaines per­sonnes s’étant éga­rées, se sont tour­nées vers de vains dis­cours, vou­lant être doc­teurs de la loi, et ne com­pre­nant ni ce qu’elles disent, ni ce qu’elles affirment… La loi n’a pas été éta­blie pour le juste, mais pour les méchants et les rebelles, pour les impies et les pécheurs, pour les scé­lé­rats et les pro­fanes, pour les meur­triers de leur père et leur mère, pour les homi­cides, les for­ni­ca­teurs, les infâmes, les voleurs d’hommes, les men­teurs et les par­jures » (vv. 5–10).

Le mot « infâmes » tra­duit l’expression latine « mas­cu­lo­rum concu­bi­to­ri­bus ». Il n’y a pas besoin d’avoir fait du latin pour com­prendre cette expres­sion… A ce sujet, on lit en note, dans l’édition de Fillion : « Masculorum… (vers. 10) l’impudicité contre nature ».

Nous lisons ensuite dans la pre­mière épître de saint Paul aux Corinthiens, cha­pitre VI :

« Ne savez-​vous pas que les injustes ne pos­sè­de­ront point le royaume de Dieu ? Ne vous y trom­pez pas : ni les impu­diques, ni les ido­lâtres, ni les adul­tères, ni les effé­mi­nés, ni les infâmes, ni les voleurs, ni les avares, ni les ivrognes, ni les médi­sants, ni les rapaces ne pos­sè­de­ront le royaume de Dieu » (vv. 9 et 10).

Les deux mots fran­çais « effé­mi­nés » et « infâmes » tra­duisent les expres­sions latines « molles » et « mas­cu­lo­rum concu­bi­tores ». Au sujet de ces termes, on lit en note (v. 10) : « Molles : ce terme et le sui­vant (mas­cu­lo­rum concu­bi­tores) se rap­portent à des habi­tudes infâmes, contre nature ». Saint Paul indique leur sort : « Ne vous y trom­pez pas… ni les impu­diques… ni les adul­tères…. ni les effé­mi­nés… ni les infâmes… ne pos­sè­de­ront le royaume de Dieu. » De là, on en déduit qu’il s’agit de péchés mor­tels qui com­pro­mettent le salut et vouent à l’enfer éternel.

Que les hommes d’Église ne viennent pas dire que tout cela n’est pas évident ! Car nous lisons dans l’épître aux Galates au cha­pitre V :

« Les œuvres de la chair sont mani­festes : c’est la for­ni­ca­tion, l’impureté, l’impudicité, la luxure (…) dont je vous pré­dis, comme je l’ai déjà fait, que ceux qui les com­mettent ne seront point héri­tiers du royaume de Dieu » (vv. 19–20). Les vices contre nature sont, en effet, une sorte d’impudicité.

Nous lisons encore dans l’épître aux Éphésiens :

« Sachez-​le bien, aucun for­ni­ca­teur, aucun impu­dique, aucun avare, ce qui est une ido­lâ­trie, n’a d’héritage dans le royaume de Dieu. Que per­sonne ne vous séduise par de vains dis­cours : c’est à cause de ces choses que vient la colère de Dieu sur les hommes rebelles » (vv. 5–6).

Enfin, nous lisons, dans la deuxième épître aux Corinthiens au cha­pitre XII, l’unique solu­tion pas­to­rale que saint Paul pro­pose. C’est la conver­sion et la pénitence :

« Je crains qu’à mon arri­vée, je ne vous trouve peut-​être pas tels que je vou­drais… Je crains… qu’à mon retour chez vous, Dieu ne m’humilie, et que je sois dans le deuil au sujet d’un grand nombre de ceux qui, ayant péché pré­cé­dem­ment, n’ont pas fait péni­tence de l’impureté, de la for­ni­ca­tion et des dérè­gle­ments qu’ils ont com­mis » (vv. 20–21).

Tout cela est de foi

Il n’est loi­sible à aucun suc­ces­seur de Pierre de chan­ger cette doc­trine morale révé­lée par le Saint-​Esprit à tra­vers les écrits de saint Paul. Dans l’épître aux Galates au cha­pitre I, on peut lire la belle cita­tion que Mgr Lefebvre a intro­duite dans sa Déclaration du 21 novembre 1974 (cf. Combat de la foi, n° 171) :

« Il y a des gens qui vous troublent et qui veulent ren­ver­ser l’Évangile du Christ. Mais si quelqu’un, fût-​ce nous-​mêmes ou un ange du Ciel, vous annon­çait un autre Évangile que celui que nous vous avons annon­cé, qu’il soit ana­thème ! Je l’ai dit, et je le dis encore : Si quelqu’un vous annon­çait un autre Évangile que celui que vous avez reçu, qu’il soit ana­thème ! » (vv. 6–9).

L’enseignement de l’Eglise

Le caté­chisme de saint Pie X enseigne qu’il y a des « péchés qui crient ven­geance devant la face de Dieu ». Ils sont au nombre de quatre : 1) l’homicide volon­taire (par exemple l’avortement) ; 2) le péché impur contre l’ordre de la nature (ce qui nous occupe ici) ; 3) l’oppression des pauvres ; 4) le refus du salaire aux ouvriers.

Le caté­chisme, qui est ordi­nai­re­ment l’expression de toute la Tradition de l’Église catho­lique, explique pour­quoi ces péchés crient ven­geance : « On dit que ces péchés « crient ven­geance » devant la face de Dieu, parce que l’Esprit-Saint le dit, et parce que leur ini­qui­té est si grave et si mani­feste qu’elle pro­voque Dieu à les punir des plus sévères châ­ti­ments » (Catéchisme de saint Pie X, par­tie V, cha­pitre 5, édi­tion DMM).

Le témoignage de l’Ecriture

Voici main­te­nant le fon­de­ment biblique de cet ensei­gne­ment caté­ché­tique. Dans l’histoire d’Abraham, nous lisons au sujet de ces péchés contre nature que l’on com­met­tait dans une ville tris­te­ment célèbre pour des crimes de ce genre : « Le cri de Sodome et Gomorrhe s’augmente de plus en plus, et leur péché est mon­té jusqu’à son comble » (Gen. XVIII, v. 20). Et voi­ci ce que dirent deux anges envoyés par Dieu : « Nous allons détruire ce lieu, parce que le cri des abo­mi­na­tions de ces peuples s’est éle­vé de plus en plus devant le Seigneur, et Il nous a envoyés pour les perdre » (Gen. XIX, v. 13).

Le caté­chisme de saint Pie X, appuyé sur la révé­la­tion, est donc extrê­me­ment clair sur le sujet. Les hommes d’Église devraient en être d’autant plus aver­tis que le concile Vatican II a eu la (fausse) pré­ten­tion de rame­ner la révé­la­tion à sa seule source écrite… Cet ensei­gne­ment catho­lique, même dans la pers­pec­tive conci­liaire, est donc indiscutable.

On com­prend main­te­nant pour­quoi l’affirmation, elle aus­si ambigüe, du rap­port final (18 octobre 2014) du Synode extra­or­di­naire des évêques sur la famille est tout aus­si répré­hen­sible : « Les hommes et les femmes à ten­dances homo­sexuelles doivent être accueillis avec res­pect et déli­ca­tesse. A cet égard, on évi­te­ra toute marque de dis­cri­mi­na­tion injuste » (n° 55, in finem). Cette affir­ma­tion est une vraie bombe à retar­de­ment qui pour­rait bien obli­ger un jour à don­ner la com­mu­nion à des pécheurs publics vivant dans la per­ver­sion sexuelle notoire…

Conséquences graves

Ignorer l’enseignement de la révé­la­tion sur un tel sujet, n’est pas sans consé­quences. L’Ecriture donne des aver­tis­se­ments à ce sujet. Dans l’Ancien Testament, nous lisons, dans le Livre de la Sagesse, au cha­pitre X :

« Ceux qui ont négli­gé la Sagesse ne sont pas seule­ment tom­bés dans l’ignorance du bien, mais ils ont en outre lais­sé aux hommes le sou­ve­nir de leur folie, sans que leurs fautes aient pu demeu­rer cachées » (v. 8).

Selon la Révélation, trois mal­heurs arrivent donc à ceux qui refusent la Sagesse ou s’en éloignent : ils tombent : 1) dans l’ignorance et dans l’aveuglement ; 2) dans la folie ; 3) dans le scan­dale et le péché.

Or les hommes d’Église, depuis le concile Vatican II, ont délais­sé la Sagesse de la Tradition catho­lique. Ils pro­fessent la liber­té reli­gieuse et pra­tiquent l’œcuménisme, les­quels ne sont rien d’autre qu’une atteinte au 1er article de la foi et au 1er com­man­de­ment de Dieu. Il ne faut donc pas être éton­né des erre­ments dans les­quels ils s’engagent en actes ou en paroles. Ce seul pas­sage du Livre de la Sagesse n’explique-t-il pas, à lui seul, tous les scan­dales ecclé­sias­tiques de mœurs dont la sainte Église est vic­time depuis le concile Vatican II (sur ce sujet, on lira le Courrier de Rome n° 364 de mars-​avril 2013) et toutes les dis­cus­sions scan­da­leuses actuelles ? (sur ce sujet, on se repor­te­ra à l’opuscule inti­tu­lé L’étrange pon­ti­fi­cat du pape François, par Alexandre-​Marie, aux édi­tions du Sel, et aux dif­fé­rentes ana­lyses sur le Synode pour la famille d’octobre 2014, faites par la Fraternité Saint-​Pie X).

Quelqu’un dira peut-​être que tout cela n’était valable que dans l’Ancien Testament ? Non, car nous lisons, dans le Nouveau Testament des aver­tis­se­ments sem­blables. En effet, nous lisons dans l’épître de saint Paul aux Romains au cha­pitre I :

« La colère de Dieu se révèle du haut du Ciel contre toute l’impiété et l’injustice de ces hommes qui retiennent la véri­té de Dieu dans l’injustice ; car ce que l’on connaît sur Dieu est mani­feste pour eux, Dieu le leur ayant fait connaître… de sorte qu’ils sont inex­cu­sables, parce qu’ayant connu Dieu, ils ne l’ont point glo­ri­fié comme Dieu, et ne lui ont pas ren­du grâce ; mais ils se sont éga­rés dans leurs pen­sées, et leur cœur insen­sé a été obscurci. »

L’Apôtre annonce ensuite le châ­ti­ment de ceux qui n’ont pas vou­lu recon­naître ou qui ne recon­naissent plus le seul vrai Dieu comme les hommes d’Église qui nient pra­ti­que­ment la pre­mier com­man­de­ment , « Un seul Dieu tu ado­re­ras », en pro­fes­sant la liber­té reli­gieuse et en pra­ti­quant l’œcuménisme du concile Vatican II :

« C’est pour­quoi Dieu les a livrés aux dési­rs de leur cœur, à l’impureté, en sorte qu’ils ont désho­no­ré eux-​mêmes leur propre corps : eux qui ont chan­gé la véri­té de Dieu en men­songe… C’est pour­quoi Dieu les a livrés à des pas­sions hon­teuses ; car leurs femmes ont chan­gé l’usage natu­rel en celui qui est contre nature. De même, les hommes, aban­don­nant l’usage natu­rel de la femme, se sont embra­sés dans leurs dési­rs des uns pour les autres, les hommes com­met­tant l’infamie avec les hommes, et rece­vant eux-​mêmes le salaire dû à leur éga­re­ment. Et comme ils n’ont pas mon­tré qu’ils avaient la connais­sance de Dieu, Dieu les a livrés à un sens réprou­vé, de sorte qu’ils ont fait des choses qui ne conviennent pas : rem­plis de toute ini­qui­té, de malice, de for­ni­ca­tion… » (vv. 18–31).

Les plus hautes auto­ri­tés romaines sont pour­tant à deux doigts de cau­tion­ner ce que saint Paul pré­sente comme le châ­ti­ment de ceux qui ont mécon­nu le vrai Dieu ou qui s’en sont détour­nés. La suite du texte sacré devrait faire trem­bler les hommes d’Église, eux qui, aujourd’hui, deviennent com­plai­sants envers toutes sortes de vices impurs : « Ayant connu la jus­tice de Dieu, ils n’ont pas com­pris que ceux qui font de telles choses sont dignes de mort, et non seule­ment ceux qui les font, mais encore ceux qui approuvent ceux qui les font » (v. 32).

Jésus tranchera lui-​même la question

C’est bien Jésus-​Christ en per­sonne qui juge­ra, en der­nier res­sort, les hommes qui reven­diquent comme sta­tut social à part entière les dépra­va­tions dont parle saint Paul.

Nous lisons dans l’Apocalypse de saint Jean, sur­nom­mé pour­tant « Apôtre de la charité » :

« Voici que je viens bien­tôt – c’est Jésus-​Christ qui parle -, et ma rétri­bu­tion est avec moi, pour rendre à cha­cun selon ses œuvres. Je suis l’Alpha et l’Oméga, le pre­mier et le der­nier, le com­men­ce­ment et la fin. Heureux ceux qui lavent leurs vête­ments dans le Sang de l’Agneau, afin d’avoir droit à l’arbre de vie, et d’entrer par les portes de la ville. Dehors les chiens, et les magi­ciens, et les impu­diques, et les homi­cides, et les ido­lâtres, et qui­conque aime et fait le men­songe » (chap. XII, vv. 12–15). Et, sous la plume de Fillion, on lit en note, pour le ver­set qui donne l’énumération des vices, le ren­voi aux épîtres de saint Paul. La boucle est bouclée…

Abbé Guy Castelain+, prêtre de la FSSPX

Source : Le Combat de la Foi n° 172