De l’Église conciliaire à l’Église ultra conciliante

Il est inté­res­sant de faire un paral­lèle entre ce qui s’est pas­sé récem­ment à Rome, et ce qui s’est pas­sé au concile Vatican II. Même si les choses ne sont pas abso­lu­ment iden­tiques, elles sont très instructives.

Vatican II (1962–1965)

C’est cer­tain, les pères qui ont par­ti­ci­pé au concile Vatican II n’é­taient pas tous des moder­nistes, loin s’en faut. Il y avait par­mi eux beau­coup de bons évêques, sérieux, com­pé­tents et dési­reux de pro­pa­ger par­tout la foi catho­lique dans toutes ses exi­gences et au prix de sacri­fices nom­breux. Il n’empêche, cette majo­ri­té s’est lais­sée influen­cer et entraî­ner pour ne pas dire mani­pu­ler, par des meneurs moder­nistes bien pré­pa­rés qui avaient un tout autre but.

Ces moder­nistes n’at­ten­daient, on le sait, que l’oc­ca­sion d’un concile œcu­mé­nique pour mettre en œuvre leur redou­table tac­tique. Le car­di­nal Billot en par­ti­cu­lier, l’a signa­lé avec d’autres dès 1923 au Pape Pie XI qui lui aus­si évo­quait alors la réunion d’un concile.

Le car­di­nal Billot disait en conclu­sion « Ne doit-​on pas craindre de voir le concile « manœuvré » par les pires enne­mis de l’Église, les moder­nistes, qui s’ap­prêtent déjà, comme des indices cer­tains le montrent, à pro­fi­ter des États géné­raux de l’Église pour faire la révo­lu­tion, un nou­veau 1789  » (p.289 « Marcel Lefebvre, Une vie » Mgr Tissier de Mallerais)

Voilà pour­quoi ce concile pas­to­ral dont on vous parle si sou­vent dans les dif­fé­rentes revues et bul­le­tins de notre Fraternité, dans le but d’é­clai­rer et pro­té­ger votre foi, n’a pas et ne peut pas avoir l’au­to­ri­té d’un concile infaillible comme les autres conciles œcu­mé­niques bien connus de l’his­toire de l’Église. Il est d’un genre à part, un troi­sième genre, pourrait-​on dire. En effet il y a eu dans l’histoire :

1- les bons conciles : ils peuvent être géné­raux (œcu­mé­niques) ou par­ti­cu­liers ; ex : Concile de Trente 1542–1563 ; les conciles de Tolède etc.

2- les mau­vais conciles, non recon­nus par l’Église ; ex : 2e Concile d’Éphèse – 449 (appe­lé bri­gan­dage d’Éphèse) ; le Concile in Trullo (691–692). etc.

3- et il y a le concile pas­to­ral Vatican II. Sa carac­té­ris­tique, inédite dans l’histoire de l’Église, est qu’il est tel­le­ment ambi­gu et confus dans ses textes que l’on constate à l’usage que c’est tou­jours le mau­vais qui en est tiré.

Ce concile est donc très contes­table, en lui-​même et dans son appli­ca­tion. Il a d’ailleurs été contes­té prin­ci­pa­le­ment par notre fon­da­teur Mgr Lefebvre et par Mgr de Castro Mayer. (cf livre « J’accuse le Concile » de Mgr Lefebvre).

Nous devons, à leur suite, conti­nuer à le contes­ter tant qu’il demeu­re­ra « la bous­sole » des diri­geants en place à Rome puisque ses ravages conti­nuent… en pire. C’est une ques­tion de foi.

Ce n’est pas le nombre de 2500 évêques pré­sents au Concile qui doit nous impres­sion­ner. Tous ces pères n’étaient pas plei­ne­ment una­nimes dans les docu­ments contra­dic­toires qu’ils ont, de fait, signés. Bien sou­vent c’est par las­si­tude qu’ils l’ont fait et les meilleurs sur­tout vou­laient en finir avec ses dis­cus­sions inter­mi­nables et alam­bi­quées qui leur fati­guaient la tête : un vrai lavage de cer­veau : ils en avaient assez. Marre !

Alors Paul VI signait des textes mal faits, sans cesse retou­chés ; il sen­tait bien que tout deve­nait incon­trô­lable et dans ce brouillard il ne voyait plus la piste et com­ment gérer l’at­ter­ris­sage, il signait afin de mettre un terme. Les évêques disaient « Cela ne peut pas être mau­vais et puisque le pape le fait : alors je signe. »

Ce fut un concile long et bâclé : bâclé parce que trop long dans des dis­cus­sions volon­tai­re­ment confuses, avec une uti­li­sa­tion sur­abon­dante d’un voca­bu­laire impré­cis et nou­veau que seuls les experts (sus­pects de moder­nisme) maî­tri­saient par­fai­te­ment. En aucune façon l’in­tel­li­gence qui est faite pour le vrai et la clar­té ne peut y trou­ver sa satis­fac­tion pour des direc­tives sûres.

Contrairement à ce que l’on veut nous faire admettre, ce concile pour­ra être remis en ques­tion du tout au tout par une auto­ri­té incon­tes­table et déci­dée à mettre l’ordre catho­lique sans aucune autre consi­dé­ra­tion, c’est-​à-​dire ne cher­chant ni à plaire aux pro­tes­tants, ni à plaire aux juifs ou aux musul­mans ou aux libé­raux et aux francs-​maçons… etc.

Un futur suc­ces­seur de Pierre aux idées nettes, à la tête bien vis­sée et qui ne fera pas les choses à moi­tié pour­ra envoyer promp­te­ment toutes ces déci­sions tor­tueuses dans la cor­beille des ambi­guï­tés, dans la pou­belle des erreurs ou dans la fosse nau­séa­bonde des héré­sies pour que tout cela rejoigne les autres inven­tions ins­pi­rées par Satan, « le père du mensonge ».

Ce jour vien­dra, vous pou­vez en être per­sua­dé car la Sainte Église ou plu­tôt celle qui en ce moment se pré­tend telle, ne pour­ra pas indé­fi­ni­ment faire croire aux fidèles des inep­ties, sur­tout des inep­ties énormes condam­nées de manière très offi­cielles comme l’œcuménisme (toutes les reli­gions peuvent don­ner le Salut) et la liber­té reli­gieuse (l’homme est libre de croire ou de ne pas croire et d’a­dop­ter la reli­gion de son choix), la nou­velle messe de Luther, la renon­cia­tion théo­rique et pra­tique de la doc­trine sociale de l’Église.

C’est jus­te­ment parce que notre foi catho­lique est très pré­cise et très affir­ma­tive sur beau­coup de points (même si par ailleurs elle est pleine de mys­tères) que la contes­ta­tion de ces points par ses propres chefs ne peut être rece­vable par les simples catho­liques : la tra­hi­son est trop visible.

Avis à ceux qui ont des doutes.

  • Ceux qui doutent que ce point de vue soit objec­tif et qui disent que le concile Vatican II avec ses cin­quante ans d’exis­tence a désor­mais une auto­ri­té incontestable ;
  • ceux qui pensent que ce concile doit s’ins­crire néces­sai­re­ment dans la Tradition de l’Église grâce à une habile inter­pré­ta­tion qui doit décan­ter le bon grain de l’i­vraie qui s’est glis­sée par mégarde ;
  • ceux qui croient qu’il suf­fi­ra de mettre en lumière cette sage et savante inter­pré­ta­tion par « une her­mé­neu­tique de la conti­nui­té » (encore une expres­sion de pro­fes­seur retors) pour dis­si­per les fumées média­tiques qui obs­cur­cissent tou­jours et encore l’ex­cellent et vrai Concile que l’on n’a pas encore découvert…je les invite à s’in­té­res­ser aux évé­ne­ments plus récents qui se sont pas­sés à Rome avec l’ap­pro­ba­tion du pape François et le sou­tien de bon nombre de ses amis car­di­naux et évêques.

Nous devons tou­jours gar­der comme base de rai­son­ne­ment les fon­da­men­taux de la foi et de la morale catho­liques et ceux qui s’en écartent, fussent-​ils « doc­teurs en Israël » ou « assis sur la chaire de Moïse » donc, appa­rem­ment, l’Église ensei­gnante, ne peuvent avoir auto­ri­té pour nous impo­ser des nou­veau­tés si criantes : « Il vaut mieux obéir à Dieu plu­tôt qu’aux hommes. »

Cinquante ans après Vatican II : comment après l’Église conciliaire est-​on passé à une Église ultra conciliante ?

Ces évé­ne­ments sont inté­res­sants en ce sens qu’ils nous éclairent tou­jours plus sur la méthode moder­niste, méthode qui se per­fec­tionne, il faut le recon­naître, car main­te­nant ils sont plus à l’aise et plus rapides dans l’exé­cu­tion de leurs plans. Leur façon de faire est très effi­cace pour ins­tau­rer une situa­tion nou­velle, un cli­mat nou­veau dans l’Église. Ceci leur per­met­tra d’al­ler par la suite encore beau­coup plus loin et de faire admettre des chan­ge­ments tou­jours plus auda­cieux qui déna­turent l’Église du Christ.

Mais pour ces moder­nistes il n’y a là rien d’a­nor­mal puisque l’Église doit être en per­pé­tuelle muta­tion et même à la pointe de la nou­veau­té ou du pro­grès et, selon eux, c’est pour cela que le Christ l’a instituée.

Le pape Pie IX avait bien com­pris cette men­ta­li­té per­verse quand il condam­na la pro­po­si­tion sui­vante : « Le pon­tife romain peut et doit se récon­ci­lier et com­po­ser avec le pro­grès, le libé­ra­lisme et la culture moderne. » (Syllabus n°80)

C’est vrai­ment une œuvre démo­niaque à laquelle nous assis­tons. Encore une fois « la révo­lu­tion en chape et en tiare » dont par­laient les francs-​maçons au 19e siècle est plus que jamais en marche. Les bap­ti­sés suivent uni­ment les pas­teurs imbi­bés des prin­cipes faux du libé­ra­lisme en croyant suivre le Christ lui-​même et ce sont les papes conci­liaires, les uns après les autres qui imposent une cadence de plus en plus vive, lais­sant der­rière eux, au fur et à mesure de leur course, des pans entiers de la tra­di­tion. Les der­niers évé­ne­ments jettent une lumière plus intense sur la réa­li­té de ce « mys­tère d’i­ni­qui­té » signa­lé par saint Paul 2 thess. 2/​7.

Que s’est-​il passé à Rome ?

Suite aux deux synodes (2014–2015) sur la famille, qui auraient dû ser­vir nor­ma­le­ment à for­ti­fier la famille dans une fidé­li­té plus grande à l’en­sei­gne­ment du Christ, en rai­son notam­ment des attaques de plus en plus vio­lentes qu’elle subit dans la socié­té civile, le pape a publié une exhor­ta­tion apos­to­lique Amoris lae­ti­tia, le 19 mars 2016, ren­due publique en avril de la même année.

Cette exhor­ta­tion, beau­coup le constatent, contient des prin­cipes qui détruisent la famille. Cela fait bien­tôt deux ans que ce docu­ment est sor­ti. Dès sa paru­tion, il a très vite été inter­pré­té par les obser­va­teurs atten­tifs comme appor­tant un chan­ge­ment pas­to­ral notable, sur­tout en ce qui concerne la ques­tion des divor­cés rema­riés (adul­tères) puisque désor­mais ceux-​ci, tout en vivant mari­ta­le­ment dans une seconde union, pour­ront com­mu­nier comme les bons chré­tiens qui s’ef­forcent de vivre en état de grâce.

En face de ce document il y a trois sortes d’attitudes de la part de la hiérarchie actuelle :

  • 1. ceux qui sont favo­rables et enthou­siastes aux déci­sions du pape : ce n’est plus « l’a­po­sta­sie silen­cieuse » évo­quée par Jean-​Paul II, c’est l’a­po­sta­sie joyeuse.
  • 2. ceux qui sont contre et le font savoir avec plus ou moins d’éner­gie : cela va de la pré­sen­ta­tion polie de « dubia » ou « doutes » (res­tés sans réponse) jus­qu’à des accu­sa­tions res­pec­tueuses de pro­pa­ger des héré­sies manifestes.
  • 3. ceux qui ne disent rien, du moins en public (c’est la grande majo­ri­té). Ceux-​ci semblent igno­rer le pro­blème. Ils ne sont ni pour, ni contre, du moins de manière offi­cielle. Ils ne semblent pas être per­tur­bés plus que cela et sont dans une sorte d’in­ca­pa­ci­té de réagir.

Saint Paul nous dit pour­tant : « Ne vous y trom­pez pas : ni les impu­diques, ni les ido­lâtres, ni les adul­tères, ni les effé­mi­nés, ni les infâmes… ne pos­sé­de­ront le Royaume de Dieu » 1 Cor. 6–9/10.

Comprenons-​le : l’a­dul­tère est un péché mor­tel, le péché mor­tel inter­dit de com­mu­nier sinon c’est un autre péché mor­tel plus grave que l’on com­met et qui porte le nom de sacri­lège. cf : 1 Cor. 11–29.

Il faut ajou­ter : aucune auto­ri­té dans l’Église ne peut chan­ger cela. Du moins, pour ce der­nier point, c’est ce que l’on pou­vait croire avant l’ar­ri­vée des deux synodes, de l’ex­hor­ta­tion « Amoris lae­ti­tia », cha­pitre 8, et des inter­pré­ta­tions sub­sé­quentes vou­lues par le pape.

Le Christ a don­né un ensei­gne­ment suf­fi­sam­ment clair. Il a inter­dit le divorce que Moïse avait per­mis en le légi­fé­rant afin de limi­ter les abus les plus extrêmes.  » C’est à cause de la dure­té de votre cœur » que Moïse a auto­ri­sé le libelle de répu­dia­tion dira Jésus.

Mais le Christ a réins­tau­ré le mariage dans sa per­fec­tion ini­tiale et cela sup­pose qu’il donne aux bap­ti­sés toutes les grâces pour être fidèles. Cette res­tau­ra­tion se fait lors­qu’il dit : « Moïse vous a dit.…Moi je vous dis » : Il suf­fit de lire St Matthieu ch 19 v.8–9 « C’est à cause de la dure­té de votre cœur que Moïse vous a per­mis de ren­voyer vos femmes ; mais, au com­men­ce­ment, il n’en était pas ain­si. Or je vous dis que qui­conque ren­voie sa femme, si ce n’est pour infi­dé­li­té, et en épouse une autre, com­met un adul­tère, et que celui qui épouse une femme ren­voyée com­met un adul­tère. » L’Église n’a jamais chan­gé sur ce point, jus­qu’à François.

On a l’im­pres­sion que le pape François dans une audace déme­su­rée enseigne : » Jésus a dit …mais moi je vous dis : dans cer­tains cas les adul­tères peuvent mener une vie dans la grâce, donc ils peuvent com­mu­nier et se confes­ser tout en conti­nuant à vivre comme ils sont… etc. »

C’est un autre Évangile, c’est sûr. En effet, pou­voir chan­ger de femme ou de mari n’est-ce pas une bonne nou­velle ça ? Mais rappelons-​nous saint Paul « Si quel­qu’un, fût-​ce nous-​même ou un ange du ciel vous annon­çait un autre évan­gile que celui que vous avez reçu : qu’il soit ana­thème. » Gal. I‑9.

Par quel artifice en est-​on arrivé là ?

Tout cela a été ren­du pos­sible par l’ap­pli­ca­tion de leur méthode col­lé­giale qui est de loin la plus per­verse car géné­ra­le­ment elle para­lyse les réac­tions fortes des plus clair­voyants : cha­cun se sent obli­gé de suivre ce que la majo­ri­té a déci­dé à la fin des débats, sur­tout si l’au­to­ri­té suprême approuve.

On peut aus­si appe­ler cette méthode, la méthode Caïphe, puisque nous lisons : « Alors les princes des prêtres et les anciens s’as­sem­blèrent dans la cour du grand prêtre (Caïphe), et ils tinrent conseil pour se sai­sir de Jésus par ruse, et le faire mou­rir. » Mt 24–3/4. Quand on a un sale coup à réa­li­ser, il faut le faire « par ruse » c’est la meilleure façon d’y parvenir.

Voyons le déroulement de leur stratégie malicieuse en six points.

1- L’autorité (moder­niste) veut arri­ver à un but « pas très catho­lique » : légi­ti­mer une seconde union et don­ner la pos­si­bi­li­té aux adul­tères d’ac­cé­der à la com­mu­nion. Elle s’en­tend avec des per­sonnes capables de la sou­te­nir, des moder­nistes dépour­vus de scru­pules et dont « la per­ver­sion de l’es­prit » dont parle saint Pie X dans Pascendi (ency­clique sur le moder­nisme) n’est plus à démon­trer (ex : car­di­nal Kasper, car­di­nal Schönborn et autres)

2- L’autorité (moder­niste) décide alors un concile (ou un synode : dans le cas qui nous occupe il y aura deux synodes) pour pro­po­ser un aggior­na­men­to ou mise à jour de la doc­trine sur la famille et répondre aux besoins de l’é­poque moderne. Eh oui, le concile Vatican II c’est vieux : aujourd’­hui il y a d’autres besoins qui doivent être satis­faits pour le bien des hommes de ce temps.

3- Le jour du synode arrive et se déroule sur des plans moder­nistes : on pro­pose des solu­tions nou­velles (mais pas si nou­velles que ça car elles ont déjà été appli­quées abu­si­ve­ment contre l’au­to­ri­té pré­cé­dente : Jean-​Paul II les avait inter­dites). Une résis­tance se des­sine (ex : car­di­nal Burke, Cardinal Caffara : ce sont les anciens res­tés fidèles à Jean-​Paul II et Benoît XVI). Il fal­lait s’y attendre. Les auto­ri­tés moder­nistes en place repèrent les plus dan­ge­reux de ces oppo­sants d’a­bord pour en prendre note. Elles com­mencent par les blâ­mer, puis les mar­gi­na­li­ser et se réservent la pos­si­bi­li­té de les éli­mi­ner par des sanc­tions au besoin.

4- À la fin du synode, le pape ou un de ses amis annonce offi­ciel­le­ment que les échanges qui se sont dérou­lés ont jeté une lumière inédite (c’est une nou­velle Pentecôte et on ne manque pas de rap­pe­ler l’ac­tion tan­gible du Saint Esprit : d’ailleurs c’est l’an­née de la misé­ri­corde : comme la Providence est bonne !). À par­tir de là per­sonne donc n’a le droit de contes­ter ce que « l’as­sem­blée ecclé­siale » a déci­dé avec le pape pour le bien de tous : il faut se sou­mettre. Un docu­ment du pape sor­ti­ra bien­tôt qui don­ne­ra les conclu­sions des débats (débats pipés d’un bout à l’autre) et don­ne­ra des directives.

5- Le docu­ment sort : c’est Amoris lae­ti­tia : ceux qui sont divor­cés rema­riés sont exhor­tés à per­sé­vé­rer dans cette voie, à com­mu­nier et vivre dans la paix leur seconde noce et les prêtres doivent les accom­pa­gner et tous les fidèles sont invi­tés à se réjouir.

6- Les oppo­sants sont stig­ma­ti­sés comme des pha­ri­siens sans cœur, des divi­seurs orgueilleux et des ambi­tieux qui veulent faire par­ler d’eux ou encore des gens fer­més par une for­ma­tion dog­ma­tique rigide, sclé­ro­sée, d’un autre âge.

Depuis Vatican II : un état de scandale permanent.

Les choses sont graves. Cela fait cin­quante ans qu’il se passe des choses graves.

La tra­di­tion authen­tique, celle qui a été excom­mu­niée, s’en offusque et s’en plaint sou­vent. C’est une preuve de sa san­té : là où il y a réac­tion, là il y a encore la vie. Un cadavre ne réagit jamais en face des scan­dales et plus la foi est malade moins le scan­dale est perceptible.

Mais il faut tout de même faire un aveu, il y a par­fois une las­si­tude com­pré­hen­sible à dénon­cer les scan­dales pro­pa­gés par Rome ou ailleurs. Le doute peut s’ins­tal­ler. Est-​ce la bonne façon de faire ? Est-​ce qu’on n’en fait pas trop ? Pourtant si nous croyons que la FSSPX tient tou­jours haut et fier l’é­ten­dard de la vraie tra­di­tion c’est parce qu’à la dif­fé­rence des ral­liés, elle pousse jus­qu’au bout la logique de cette tra­di­tion et qu’elle ne se tait pas en face des erreurs : elle les dénonce et ne manque pas aus­si de dénon­cer ceux qui les colportent.

Mais il y a un dan­ger réel. Ne risque-​t-​on pas de paraître de moins en moins cré­dible à force d’exercer ce rôle de cen­seur tous azi­muts ? En le fai­sant ne donne-​t-​on pas l’im­pres­sion que c’est là fina­le­ment notre « fonds de com­merce » ? S’il fal­lait croire cer­taines cri­tiques on fini­rait par se per­sua­der que nous ne sommes friands que de cela – les scan­dales – afin de pou­voir en par­ler, nous dis­tin­guer et nous délec­ter de notre supé­rio­ri­té : « Seigneur je vous remer­cie de ne pas être comme le reste des hommes » disait le pharisien.

C’est faux nous ne nous délec­tons de rien et ceux qui ont l’impression du contraire se trompent. On peut juste faire une conces­sion, il est vrai que par­fois quand un bon argu­ment extrê­me­ment per­cu­tant démo­lit un sophisme ou une erreur, l’on peut res­sen­tir une cer­taine satis­fac­tion, la satis­fac­tion du boxeur qui s’est bien bat­tu contre un méchant agres­sif et qui l’a mis au tapis sans prendre une seule bosse. C’est humain, trop humain sans doute, mais ça ne va pas plus loin.

Mais il faut prendre note de cette cri­tique qui nous est faite, car elle exerce une influence réelle sur beau­coup de per­sonnes qui veulent la foi mais qui ne veulent pas entendre par­ler de conflits, notam­ment avec des hommes d’Église.

C’est une réac­tion natu­relle mais qui manque de foi sur­na­tu­relle. Chacun aspire en lui-​même à la tran­quilli­té, à la paix, et à l’en­tente avec les autres : tou­jours se battre et jeter des dards contre ceci ou contre cela n’est-​ce pas un signe de déséquilibre ?

Il faut répondre : ce serait vrai s’il s’a­gis­sait de brou­tilles mais ce n’est pas le cas. Ce que nous cri­ti­quons est désor­mais ins­crit aux AAS (actes authen­tiques du Saint Siège) et c’est, ni plus ni moins, l’ac­cep­ta­tion du divorce catho­lique, de l’a­dul­tère et du sacri­lège à répétition

Conclusion

Ce qui s’est dit et déci­dé à Rome est très mau­vais et la réac­tion de quelques-​uns dans l’Église conci­liaire est encore très faible en nombre (c’est évident) mais aus­si en inten­si­té. Ces résis­tants ne sont pas excom­mu­niés de « l’Église ultra conci­liante » du pape François qui est désor­mais en place.

Même s’ils ont des dif­fi­cul­tés réelles, il est pro­bable qu’ils ne le seront jamais. Jusqu’ici ils n’ont fait que décla­mer leur mécon­ten­te­ment et récla­mer des cor­rec­tions sans rien obte­nir si ce n’est un mépris affi­ché. Ils sup­portent cela assez bien. C’est un bon début me direz-​vous, certes, mais c’est peu. Il n’est pas sûr que la foi bien dimi­nuée par cin­quante ans de diva­ga­tions moder­nistes soit assez forte chez eux pour réagir au-​delà de quelques belles paroles et de beaux témoi­gnages écrits.

Certes c’est heu­reux qu’une poi­gnée de noto­rié­tés ecclé­sias­tiques (car­di­naux et évêques) réagissent et fassent un cer­tain tapage pour aver­tir, mais cette réac­tion ne porte que sur un point pré­cis de la doc­trine catho­lique à savoir le mariage et les erreurs col­la­té­rales. Tout ce qui a pré­cé­dé, tout ce pour quoi Mgr Lefebvre a été sanc­tion­né et qui n’é­tait pas moins grave, loin de là, semble tota­le­ment igno­ré de ces nou­veaux réac­tion­naires. Ils ne voient plus. Reconnaître un schisme en ce qui concerne la FSSPX ne semble pas trop les gêner (cf : inter­ven­tion du car­di­nal Burke 15-​07-​2017).

Un ban­deau est sur leurs yeux. Il serait temps pour eux de reve­nir pour de bon à une tra­di­tion plus pure et plus libre du car­can moder­niste de Vatican II. Ils font, en ce moment, à cause de la nou­velle pas­to­rale sur le mariage, une petite expé­rience des déboires qu’a connus en son temps le fon­da­teur d’Écône pour pré­ser­ver, lui et Mgr Castro Mayer, tous les fon­de­ments de la foi.

Abbé Pierre Barrère, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X

Sources : Pelican n° 98 de jan­vier 2018