LAB de l’école St-​Bernard de Bailly : 50 ans de liberté

Depuis près d’un demi-​siècle, on nous prône l’é­du­ca­tion de la liber­té par la liber­té, l’i­déal du « prof-​copain-​que-​lon-​tutoie », du « papa-​cool-​et-​sympa ». Cette remise en ques­tion de l’au­to­ri­té est même pas­sée dans la révo­lu­tion Vatican II : l’au­to­ri­té doc­tri­nale pré­fère main­te­nant la pas­to­rale, et la révé­la­tion elle-​même doit céder devant le « j’aime – j’aime pas » des sentiments.

Cet état d’es­prit serait nor­mal pour un enfant en crois­sance entrant dans la crise d’a­do­les­cence : il aspire à deve­nir adulte, il reven­dique sa liber­té – et cela dans tous les domaines. Cette atti­tude est bien moins nor­male lors­qu’elle touche des indi­vi­dus cen­sés être adultes.

Le fait qu’un enfant sup­porte mal l’au­to­ri­té est une étape à dépas­ser pour faire l’ap­pren­tis­sage de la liber­té. C’est impor­tant : des vic­toires ou des défaites sur cette pas­sion de la liber­té, décou­le­ra la volon­té d’être res­pon­sable et de tenir ses enga­ge­ments ou le refus et la peur de s’engager.

Toute auto­ri­té repose sur un besoin, ou même, si vous le vou­lez, sur une néces­si­té : le désir, le besoin pour tout groupe humain d’a­voir une uni­té dans sa pour­suite du bien com­mun. Cette mis­sion cir­cons­crit clai­re­ment son domaine à l’au­to­ri­té : le cadre du bien com­mun ; elle lui marque aus­si ses limites et son mode d’a­gir. Une fois l’u­ni­té cor­rec­te­ment assu­rée, l’au­to­ri­té n’a pas à inter­ve­nir dans l’exer­cice des liber­tés individuelles…

Chaque membre du groupe jouit alors de l’au­to­no­mie. L’acte d’au­to­ri­té n’est alors envi­sa­geable que dans l’exer­cice du bien com­mun ; le tyran est celui qui détourne l’au­to­ri­té pour son inté­rêt personnel.

La consul­ta­tion des avis ne doit pas lais­ser pen­ser que l’au­to­ri­té est un plé­bis­cite ; si celui qui a auto­ri­té prend conseil, c’est dans le cadre de l’acte pru­dent. L’autorité n’est pas jus­ti­fiée par son expli­ca­tion ; elle l’est par le bien com­mun. Si expli­ca­tion il y a, elle ne peut être que pos­té­rieure à l’acte et sera donc péda­go­gique. Le père de famille peut expli­quer ses déci­sions pour aider à l’ap­pren­tis­sage de la liber­té, et donc de l’au­to­ri­té, mais jamais il ne le fera pour se jus­ti­fier. Bien évi­dem­ment, l’au­to­ri­té reste une pater­ni­té : elle engendre le consen­sus et élève à elle chaque membre. Mais il se peut que le consen­sus tarde ; c’est un petit désordre qu’il faut sup­por­ter pour évi­ter une plus grande injus­tice. L’obéissance est la ver­tu par laquelle le Christ se dis­tin­gua : elle est une per­fec­tion de l’acte libre, elle est ce par quoi l’in­fé­rieur est éle­vé au niveau du supé­rieur. Elle est une ver­tu donc une dis­po­si­tion acquise par­fois au prix de com­bats inté­rieurs importants.

Il y a un autre prin­cipe fon­da­men­tal : l’au­to­ri­té se mérite. Qu’il s’a­gisse de l’au­to­ri­té natu­relle, comme celle du père de famille, ou de l’au­to­ri­té d’é­lec­tion, comme celle du chef d’é­quipe, de socié­té ou de gou­ver­ne­ment, l’au­to­ri­té se mérite par la com­pé­tence pro­fes­sion­nelle, l’ap­ti­tude à orien­ter le groupe vers le bien com­mun, à l’or­ga­ni­ser, à l’u­ni­fier : en un mot, par le ser­vice. L’appréciation de ces apti­tudes n’est pas du res­sort du sujet de ces apti­tudes. Par contre, le mérite doit être com­pris comme un dés­in­té­res­se­ment per­son­nel tou­jours supé­rieur pour celui qui est appe­lé à s’oc­cu­per des autres : l’au­to­ri­té se mérite par l’es­prit de ser­vice que sup­posent la conci­lia­tion, le contact humain, les déci­sions qui doivent prises, et les sanc­tions qu’il faut par­fois poser.

Il est éton­nant de voir que ceux qui cri­tiquent habi­tuel­le­ment l’au­to­ri­té sont en fait ceux qui ont le moins l’es­prit de ser­vice… c’est en fait nor­mal, puisque le ser­vice est jus­te­ment la règle de l’au­to­ri­té : « De même que le Fils de l’homme n’est pas venu pour être ser­vi mais pour ser­vir et don­ner son âme comme ran­çon pour la mul­ti­tude… je vous ai don­né l’exemple afin que vous agis­siez à votre tour comme j’ai agi pour vous ».

L’autorité pater­nelle est d’un type spé­cial : ni les parents, ni les enfants ne l’ont choi­sie, elle est don­née et suit légi­ti­me­ment le fait d’en­gen­drer. L’autorité pater­nelle se trouve ain­si dou­blée de cette carac­té­ris­tique : auto­ri­té sur la groupe fami­lial qui doit assu­rer le bien com­mun et auto­ri­té par­ti­cu­lière sur chaque enfant. Cette auto­ri­té par­ti­cu­lière est une auto­ri­té de sup­pléance et s’a­me­nui­se­ra au fur et à mesure qu’en gran­dis­sant l’en­fant devien­dra capable de se prendre en charge. Cette matu­ri­té ne cor­res­pond pas aux nombres des années, et chaque indi­vi­du est bien dif­fé­rent, même au sein d’une même fra­trie ; le jour où l’en­fant atteint la pleine conscience de ses actes, il ne res­te­ra aux parents que l’au­to­ri­té com­mune sur le groupe familial.

Il faut cepen­dant rete­nir de cette auto­ri­té qu’elle est un ser­vice et une sup­pléance. Etre père est une vraie charge ; c’est un ser­vice et un devoir d’ab­né­ga­tion pour sa famille et cha­cun de ses enfants, qui ne tolère aucun égoïsme personnel.

L’éducation est acte d’au­to­ri­té parce que la liber­té se mérite. Et parce qu’elle se mérite, et dans la mesure où l’en­fant le mérite, il convient de lui faire confiance, de le remettre à son auto­no­mie et de lui lais­ser la res­pon­sa­bi­li­té de ses choix. Il est une manière d’é­du­quer aujourd’­hui qui consiste à ne sol­li­ci­ter l’en­fant que lors­qu’il le sou­haite ou qu’il est bien dis­po­sé. C’est un non-​sens, et cela res­semble beau­coup à cette manière qui explique tout à l’en­fant avant d’exi­ger de lui.

Heureux l’homme qui dès l’au­rore de sa vie aura com­pris qu’il ne peut vivre sans auto­ri­té et que toute auto­ri­té est digne de res­pect, de la plus humble à la plus illustre. « Agissez en hommes libres, dit saint Pierre, non pas en hommes qui font de la liber­té un voile sur leur malice, mais en esclaves de Dieu. » Car invrai­sem­bla­ble­ment, c’est en nous fai­sant fils, en envoyant en nos cœurs « l’es­prit de son Fils qui crie : Abba ! Père ! » que le Seigneur nous a fait pas­ser de l’es­cla­vage à la liberté.

Abbé Vincent Bétin, Directeur, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X

Sources : Ecole Saint-​Bernard de Bailly /​La Porte Latine du 14 mai 2018

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