Lettre n° 10 du Père Directeur de la M.I. – Saint Maximilien Kolbe à saint Grignion de Montfort – 28 février 2018

Chers Chevaliers de l’Immaculée !

Afin de com­prendre cor­rec­te­ment saint Maximilien Kolbe, nous devons reve­nir aux sources les plus impor­tantes qui ont mis en forme et ins­pi­ré sa vie inté­rieure : l’histoire de son pays, com­plè­te­ment mar­qué par la pré­sence de Marie, par­ti­cu­liè­re­ment véné­rée en Pologne, comme le « Commandant-​en-​chef » des armées chré­tiennes, la Médaille mira­cu­leuse, les appa­ri­tions de Marie à Lourdes et en par­ti­cu­lier saint Louis-​Marie Grignion de Montfort. 

Le plus pro­bable est qu’il a ren­con­tré le grand maître de la « par­faite sou­mis­sion à Marie » pen­dant ses études à Rome. Ce n’est cer­tai­ne­ment pas une coïn­ci­dence s’il fut ordon­né prêtre le 28 avril, la fête de saint Louis-​Marie (à cette époque il n’était encore que le bien­heu­reux Louis-​Marie), il y a exac­te­ment 100 ans.

Il fit connaître saint Louis-​Marie en Pologne, impri­ma et dif­fu­sa la pre­mière tra­duc­tion du « Secret de Marie ». Dans la pré­face, il rédi­gea une courte bio­gra­phie et un résu­mé de la spi­ri­tua­li­té de Grignion. Il insis­ta sur­tout sur la simi­li­tude de la situa­tion aux dif­fé­rentes époques aux­quelles ils vécurent. À l’époque de saint Louis-​Marie, les enne­mis étaient les jan­sé­nistes, aujourd’hui ce sont les francs-​maçons et les dif­fé­rentes sectes. La marque dis­tinc­tive de tous : une haine pour la véri­table dévo­tion à Jésus et Marie. Comme les Chevaliers de l’Immaculée aujourd’hui, Grignion était alors le grand apôtre de la Médiatrice de toutes les grâces. Tel un outil par­fait dans ses mains imma­cu­lées, il a sau­vé d’innombrables âmes des chaines de Satan durant ses célèbres mis­sions. Tout comme aujourd’hui la M.I. fait face aux armées toutes puis­santes du mal, Grignion fut aus­si expo­sé au pou­voir puis­sant de l’ennemi. Souvent seul, aban­don­né même par ses amis, il devint la cible de la méchan­ce­té et de la jalou­sie des héré­tiques. Et cepen­dant, Grignion et Maximilien ont sur­tout tiré ensemble la source de leur force et de leur cou­rage : ils ont mis toute leur confiance en Notre-​Dame et lui étaient tota­le­ment obéis­sants en tout, tou­jours et par­tout et tota­le­ment, il n’y a qu’ELLE qui compte ! 

Il y a cepen­dant une coïn­ci­dence encore plus impor­tante : Grignion de Montfort fut cer­tai­ne­ment ins­pi­ré « d’En-Haut » quand il mit en évi­dence le rôle de Marie à la fin des temps : si la supré­ma­tie du dra­gon et de ses ser­vi­teurs est si grande qu’ils peuvent réus­sir à détruire l’Église et à entraî­ner presque tous les hommes sur le che­min de la dam­na­tion, alors à ce moment la Femme de l’Apocalypse appa­raît (Apoc. 12, 1). À tra­vers ses fidèles ser­vi­teurs, Elle écrase la tête de Satan et vainc toutes ses attaques, mais sur­tout, par ses fidèles « apôtres de Jésus et Marie de la fin des temps », Elle reprend à son adver­saire une innom­brable quan­ti­té d’âmes. Saint Maximilien attire l’attention des Chevaliers de l’Immaculée sur la des­crip­tion par Grignion de ces fidèles esclaves de Marie, qui ne craignent aucun pou­voir, qui vont par­tout où leur Reine les envoie, qui tiennent le cru­ci­fix dans leur main droite, le rosaire dans la main gauche et ont gra­vé dans leur cœur les noms de Jésus et de Marie. 

Il veut que les Chevaliers de l’Immaculée s’identifient aux apôtres de Jésus et de Marie de la fin des temps :

« Notre but et les moyens d’atteindre cet idéal (être apôtre de Jésus et Marie) sont en accord com­plet avec les vues de saint Louis-​Marie. Son désir le plus ardent, le désir de toute sa vie, fut d’honorer l’Immaculée en tant que Reine de toute l’humanité, pour trans­mettre son amour à tous les cœurs bat­tant des hommes. » 

Pour cette rai­son, selon le vœu de saint Maximilien, tous les habi­tants de la Cité de l’Immaculée, à la fois en Pologne et au Japon, ont fait la consé­cra­tion selon Montfort. Pour deve­nir un véri­table Chevalier de l’Immaculée dans le sens com­plet du terme, on doit être son enfant obéis­sant et son esclave sou­mis. On ne peut deve­nir tota­le­ment un ins­tru­ment que si on appar­tient com­plè­te­ment à l’artiste comme sa propriété. 

Il est cer­tai­ne­ment vrai que saint Maximilien a ren­du facile pour cha­cun de deve­nir un Chevalier, et ne demande pra­ti­que­ment rien d’autre que la consé­cra­tion, une petite prière quo­ti­dienne et le fait de por­ter la Médaille mira­cu­leuse. Néanmoins, il exprime son désir le plus pro­fond que chaque Chevalier se sente inves­ti d’une mis­sion magni­fique et incroya­ble­ment importante : 

« Nous devons nous effor­cer d’appartenir tou­jours plus à l’Immaculée, de Lui être obéis­sants et ain­si d’être son ins­tru­ment pour qu’Elle puisse nous uti­li­ser comme Elle le veut, afin de sau­ver autant d’âmes que possible. » 

Cependant, ceci est incroya­ble­ment dif­fi­cile, par­ti­cu­liè­re­ment de nos jours. Et plus la fin approche, plus le com­bat devient dif­fi­cile et dan­ge­reux ! Dans de tels moments, nous ne devrions jamais oublier que la moindre chose que nous fai­sons pour l’Immaculée est géné­reu­se­ment récom­pen­sée par Elle. Le pre­mier à être rem­pli des grâces de l’Immaculée sera son fidèle ins­tru­ment lui-​même. Mes efforts pour la conver­sion des pauvres pécheurs me béné­fi­cie­ront à moi d’abord, le plus pauvre des pauvres pécheurs. 

Mais quelle est la dif­fé­rence entre les deux consé­cra­tions ? Comment sont-​elles liées l’une à l’autre ?

Notre-​Dame a don­né à saint Louis-​Marie la grâce de la dévo­tion véri­table et par­faite envers Elle. À tra­vers cette dévo­tion, Elle devient notre mère et reine dans le sens le plus vrai du terme et nous deve­nons ses enfants et esclaves. En tant que mère, Elle prend notre main et nous aide à retour­ner à Dieu, pour sau­ver nos âmes, pour nous libé­rer des pièges du diable et nous accro­cher à Jésus-​Christ. De cette manière, nous accom­plis­sons nos vœux de bap­tême et com­men­çons à rem­plir le com­man­de­ment de Dieu le plus impor­tant : l’amour de Dieu par-​dessus tout ! Visiblement, la « dévo­tion par­faite » nous est don­née pour notre propre conver­sion et sanc­ti­fi­ca­tion, pour notre rela­tion avec Dieu Lui-​même : « Sans ma Mère et Reine, je ne trou­ve­rai jamais « la voie, la véri­té et la vie ». Même si je les avais trou­vées, je les per­drais sûre­ment à nou­veau sans Marie. Mais main­te­nant qu’Elle dirige le vais­seau de ma vie, Elle va me rame­ner sain et sauf au port. » 

Après le pre­mier com­man­de­ment majeur sur l’amour pour Dieu, Notre Seigneur Jésus-​Christ nous demande éga­le­ment de « nous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés », et il appelle ceci son nou­veau com­man­de­ment. Comment est-​ce que le Christ nous a aimés ? Il s’est don­né Lui-​même pour nous sau­ver de la dam­na­tion éter­nelle et nous conduire à la béa­ti­tude éternelle. 

Et ici aus­si, nous devons nous deman­der : à quelle fré­quence pensons-​nous au salut de nos sem­blables ? Nous ne fai­sons pas atten­tion à la plu­part d’entre eux, les autres nous ennuient et s’il nous arrive de sou­hai­ter du bien à quelqu’un, alors c’est en géné­ral pour lui sou­hai­ter « san­té, bien-​être et succès ». 

Là, le Seigneur nous envoie un secours afin que nous puis­sions de mieux en mieux mettre en pra­tique le grand com­man­de­ment de la cha­ri­té : c’est la Mère aimante, la Reine, qui après le Christ, aime tant tout le monde, cha­cun d’entre nous plus que l’amour de toutes les meilleures mères du monde pour leurs propres enfants ché­ris. De plus, le Christ Lui a don­né toutes les grâces afin que ces gens soient conver­tis et sau­vés. Mais main­te­nant Dieu sou­haite éga­le­ment que nous par­ti­ci­pions à cette œuvre. C’est pour­quoi, nous avons reçu un autre sacre­ment, la sainte confir­ma­tion, qui nous imprègne du Saint-​Esprit, non seule­ment pour notre propre sanc­ti­fi­ca­tion, mais aus­si pour deve­nir les sol­dats du Christ et pour par­ti­ci­per à l’édification du Corps Mystique du Christ. 

Pour ne pas gâcher les grandes grâces du sacre­ment de confir­ma­tion et pour fina­le­ment entrer dans l’armée du Roi et suivre son appel, le Seigneur nous envoie l’Immaculée afin que nous deve­nions ses Chevaliers, que nous rejoi­gnions sa petite armée et L’aidions à sau­ver les âmes de ses enfants, autant que pos­sible. Et voi­ci la Reine du Ciel vient à moi comme une men­diante et me demande humblement :

« Mon enfant, J’ai besoin de toi ! Veux-​tu M’aider à sau­ver mes enfants, les âmes immor­telles ? Tant d’âmes sont per­dues pour tou­jours parce qu’il n’y a per­sonne qui prie ni ne fait de sacri­fices pour elles » (voir l’apparition du 19 août 1917 à Valinhos).

Pour cette mis­sion, l’Immaculée nous a envoyé son ser­vi­teur, qui nous enseigne à sau­ver les âmes, en tant qu’instruments et pour répandre de plus en plus les grâces de la sainte confir­ma­tion : saint Maximilien Kolbe a fon­dé la Militia Immaculatae pour mettre le monde entier à ses pieds, afin qu’« Elle puisse écra­ser par­tout la tête du diable et puisse vaincre les héré­sies à tra­vers le monde ».

Comme l’amour du pro­chain se construit sur l’amour de Dieu et le pré­sup­pose, et comme la confir­ma­tion se base sur le bap­tême, le pré­sup­pose et le com­plé­mente, ain­si toute l’œuvre de saint Maximilien est basée sur la consé­cra­tion totale à Marie selon Grignion, comme son exten­sion et son com­plé­ment. En d’autres termes, pour com­plé­ter la consé­cra­tion entière à Marie selon saint Louis-​Marie, on recour­ra à la consé­cra­tion de saint Maximilien. Seulement à ce moment-​là, notre exis­tence entière pour­ra être ren­due entiè­re­ment dépen­dante de Marie, péné­trée par sa pré­sence et la plé­ni­tude de sa grâce : non seule­ment notre rela­tion avec Dieu mais aus­si notre rela­tion avec notre sem­blable ; non seule­ment notre propre sanc­ti­fi­ca­tion mais aus­si la mis­sion que nous avons reçue de Dieu dans ce monde, c’est-à-dire être le cham­pion du Christ pour l’expansion de son Royaume. Notre che­min vers le Ciel, nos luttes sur terre pour le salut des âmes : tout sans excep­tion, tout Lui appar­tient, tout comme Elle appar­tient à Dieu. 

D’un autre côté cepen­dant, cela signi­fie aus­si que le Chevalier de l’Immaculée doit encore et tou­jours être conscient de ses fon­da­tions spirituelles : 

« Ô ma Reine, vic­to­rieuse dans toutes les batailles de Dieu, je peux être votre ins­tru­ment et votre che­va­lier dans votre armée, mais seule­ment dans la mesure où je suis com­plè­te­ment votre enfant et Vous ma Mère, je suis votre esclave et vous ma Maîtresse. » 

Pour par­ler rigou­reu­se­ment, on ne peut être tota­le­ment son Chevalier sans la consé­cra­tion totale par laquelle nous recon­nais­sons solen­nel­le­ment Marie comme notre Mère et notre Reine, et ain­si notre dépen­dance abso­lue envers Elle en tant que ses enfants et esclaves. 

Si vous n’avez pas encore fait votre consé­cra­tion selon saint Louis-​Marie, le Commandant-​en-​chef vou­drait vous invi­ter à décou­vrir le secret de la vic­toire cer­taine dans toutes les luttes et toutes les batailles. Si vous reje­tez cette invi­ta­tion, vous ne serez jamais un com­bat­tant achar­né de l’Immaculée. Au contraire, vous serez sou­vent trop faible pour résis­ter aux attaques des ter­ribles enne­mis. De plus, vous ne pour­rez rien faire de spé­cial dans cette bataille, car le géné­ral ne pour­ra comp­ter qu’un peu sur vous, vos armes sont rouillées et vos muni­tions sont épuisées.

Si vous avez déjà reçu la grâce for­mi­dable que la Reine vous accepte comme son esclave et enfant, et qu’Elle est à pré­sent théo­ri­que­ment capable de vous mener en sûre­té au som­met de la per­fec­tion, il est très impor­tant de renou­ve­ler encore et tou­jours la sou­mis­sion totale à Marie, au moins une fois par an.[1]

La rai­son est simple : tant que nous vivons, nous man­que­rons tou­jours de la confiance pour com­prendre tota­le­ment et sérieu­se­ment cette dévo­tion. À tra­vers chaque renou­vel­le­ment de notre consé­cra­tion, nous deve­nons un peu moins misé­rables et un peu plus fidèles ! 

Il y a une autre rai­son : le com­bat est ter­rible, nous sommes tou­jours sur le champ de bataille. Le Chevalier peut être faci­le­ment fati­gué, sur­tout quand il est constam­ment occu­pé à aider l’Immaculée à sau­ver les âmes. Le tumulte sans fin nous use. C’est pour­quoi la Mère veut nous tirer à Elle, afin que nous puis­sions nous repo­ser un ins­tant, tel un enfant sur le cœur de sa mère. Elle veut nous rap­pe­ler à nou­veau com­bien Elle nous aime, com­bien pour nous Elle est une Mère et ce qu’Elle veut de nous (2e semaine de pré­pa­ra­tion). Elle veut que nous réflé­chis­sions encore et encore sur qui nous sommes, en tant que créa­tures com­plè­te­ment dépen­dantes de Dieu, mais aus­si en tant que pauvres hommes déchus (1re semaine de pré­pa­ra­tion). Elle désire sur­tout nous mener à son Fils, afin qu’à tra­vers Elle, nous puis­sions Le connaître et L’aimer tota­le­ment, et puis­sions Lui appar­te­nir, Lui qui nous a aimés « sans limite et qui s’est don­né pour nous jusqu’à la mort sur la Croix » (3e semaine de préparation). 

Le jour de solen­ni­té pré­fé­ré du Père de Montfort est le 25 mars, fête de l’Annonciation, à laquelle tous sont invi­tés à renou­ve­ler l’acte de consé­cra­tion (ou à le faire pour la pre­mière fois). La grande solen­ni­té de la M.I. est le 8 décembre, fête de l’Immaculée Conception, au cours de laquelle nous devons faire le renou­vel­le­ment de l’acte de consé­cra­tion pour être son ins­tru­ment. Ainsi, la pré­pa­ra­tion et la consé­cra­tion en tant qu’esclaves tombent en géné­ral pen­dant le Carême, alors que la consé­cra­tion en tant que Chevaliers tombe pen­dant l’Avent. Si ceci n’est pas une rémi­nis­cence de la Providence, qui de cette manière nous aide à prendre cette magni­fique réso­lu­tion en ces temps de péni­tence et de conversion ?…

À part ça, toutes les fêtes de Marie sont aus­si conve­nables pour renou­ve­ler nos consé­cra­tions à l’Immaculée, une dévo­tion impor­tante pour que n’oublions jamais notre iden­ti­té : main­te­nant et pour toute l’éternité, nous avons le pri­vi­lège d’être enfants, esclaves et che­va­liers de l’Immaculée.

QU’ELLE SOIT LOUEE ET GLORIFIEE pour cette grâce que nous ne méri­tons pas ! 

Jakarta, le 26 février 2018. 

Abbé Karl Stehlin , prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X

Source : La Porte Latine du 11 mars 2018

[1] Pour le renou­vel­le­ment annuel de l’acte de consé­cra­tion, saint Louis-​Marie sou­haite que nous le pré­pa­rions pen­dant trois semaines : « Chaque année, le même jour, vous devriez renou­ve­ler la consé­cra­tion pen­dant trois semaines après les mêmes exer­cices. Vous pou­vez même la renou­ve­ler chaque mois ou même chaque jour en réci­tant cette courte prière : « Je suis à Vous et tout ce que j’ai est à Vous, mon cher Jésus par Marie, votre sainte Mère. » (Traité n° 233).