Entretien avec l’abbé P. Pazat : Le Tiers-​Ordre de la FSSPX

La Porte latine : Cher abbé Pazat, pouvez-​vous vous pré­sen­ter aux lec­teurs de La Porte latine ?

Abbé Philippe Pazat : Je suis le troi­sième enfants d’une famille de dix. Née à Paris, j’ai vécu en Algérie, en France métro­po­li­taine et en Espagne. C’est en Espagne que j’ai ter­mi­né mes études secon­daires. À l’age de 17 ans, je suis ren­tré au monas­tère de « Mailys » dans les landes, sui­vant les conseils de notre cher Père Barielle. Malheureusement le moder­nisme pro­gres­sant au monas­tère, je l’ai quit­té à la même période que Dom Augustin, que j’ai rejoint en Suisse. Mais le bon Dieu me fit connaître Ecône. J’ai fait mes études de phi­lo­so­phie au sémi­naire, et après une inter­rup­tion pour mon ser­vice mili­taire (ser­gent au 9° RCP), j’ai pu ter­mi­ner mon sémi­naire et être ordon­né à la prê­trise le 29 juin 1978. Je suis un vieux de la fra­ter­ni­té. Entre mes frères et sœurs, nous avons trois prêtres et une religieuse.
Après mon ordi­na­tion, Son Excellence Mgr. Lefebvre me deman­da de fon­der la fra­ter­ni­té en Espagne. Pendant six ans j’en fus le pre­mier prieur de la mai­son auto­nome. Ensuite il me fut deman­dé de faire la même chose au Portugal. Cela fut un peu plus dif­fi­cile ayant à apprendre la langue. Après presque dix ans au Portugal et un court pas­sage de 14 mois en Argentine, j’ai été nom­mé aux USA. Pendant tous ces périples, j’ai eu l’oc­ca­sion de prê­cher de nom­breuses retraites et mis­sions au Brésil, en Argentine, au Pérou, en Colombie et en République Dominicaine.
Aux usa, je fus d’a­bord envoyé sur la Côte Ouest, à Post Falls, des­ser­vant les mis­sions des îles Hawaï, l’Alaska et l’État de Montana. Après cette bonne expé­rience, je fus trans­fé­ré sur la Côte Est, à la mai­son de retraire de Rigdfield dans le Connecticut. Enfin je fus nom­mé pour fon­der le prieu­ré de Syracuse dans l’é­tat de New York.

La Porte latine : Après toutes ces muta­tions pour le plus grand bien du déve­lop­pe­ment de la Tradition, vous avez été nom­mé Chapelain du Tiers-​Ordre aux USA. Que repré­sente le Tiers-​Ordre dans cet immense pays ?

Abbé Philippe Pazat : Actuellement, nous avons presque atteint le nombre de 900 membres, répar­tis dans tous les Etats. Cependant notre mai­son de Saint Mary’S est cer­tai­ne­ment la plus nombreuse.

La Porte latine : Tous les prieu­rés sont-​ils concer­nés de la même façon ?

Abbé Philippe Pazat : Tous nos prêtres font un bon apos­to­lat pour le Tiers-​Ordre. La dif­fé­rence vient sur­tout entre les prieu­rés et les cha­pelles de nos mis­sions. Il est évident que là où les prêtres sont rési­dents nous pou­vons avoir beau­coup plus de fruits. Pour les fidèles qui viennent à nos mis­sions, c’est beau­coup plus dif­fi­cile car ils n’ont pas tou­jours la messe.
Par exemple aux îles Hawaï et en Alaska nous y avons la messe seule­ment une fois par mois. Aux USA nous cou­vrons des dis­tances énormes, dif­fi­ciles à ima­gi­ner pour les Européens. Pour vous don­ner un exemple : depuis le prieu­ré de Post Falls, j’ai pris l’a­vion le Jeudi pour célé­brer des funé­railles aux îles Hawaï, puis le week-​end, je me suis ren­du en Alaska pour des­ser­vir nos mis­sions d’Anchorage et Fairbanks. Et, enfin je suis reve­nu au Prieuré le lun­di matin. C’est comme si vous par­tiez de Paris pour célé­brer un enter­re­ment à Téhéran, puis ensuite aller célé­brer la messe à Moscou, pour reve­nir à Paris, ceci en 5 jours.

La Porte latine : Malgré ces incroyables tra­jets, nous savons qu’outre le Tiers-​Ordre vous avez un impres­sion­nant champ d’a­pos­to­lat : quelles sont vos prin­ci­pales activités ?

Abbé Philippe Pazat : Actuellement nous avons à Syracuse, , allant du jar­din d’en­fance à la ter­mi­nale. Depuis le prieu­ré nous des­ser­vons une cha­pelle à Buffalo, qui se trouve à deux heures et demie de route à l’Ouest. Un autre confrère sert deux mis­sions : l’une tout au Nord de l’État de New York où nous avons aus­si une école, puis une autre mis­sion à l’Est, a Glens Falls. Cela repré­sente un voyage plus ou moins tri­an­gu­laire de trois heures pour chaque branche. A Syracuse, je célèbre deux messes les dimanches avec une assis­tance dépas­sant les trois cents âmes, et l’a­près midi, je me rends au Sud, à Binghamptom. C’est un « petit » voyage d’une heure et demie de route. Il arrive que le cli­mat ne soit pas tou­jours très coopé­rant. La tem­pé­ra­ture en hivers peut des­cendre à moins vingt et il peut y avoir faci­le­ment un mètre de neige. Il y a deux ans l’ac­cu­mu­la­tion totale de neige pen­dant la période d’hi­ver dépas­sant les deux cents pouces (NDLR : un peu plus de 5 mètres). Il m’ar­rive aus­si de m’ab­sen­ter pour prê­cher des retraites aux membres du Tiers-​Ordre d’autres prieu­rés ou .

La Porte latine : Avez-​vous des voca­tions reli­gieuses ou sacer­do­tales grâce au Tiers-Ordre ?

Abbé Philippe Pazat : Nous avons très cer­tai­ne­ment des voca­tions. Cependant il semble que la plu­part de nos membres rejoignent le Tiers-​Ordre après avoir déci­dé leur vie. Mais ce qui est le plus impor­tant pour moi, c’est l’ef­fi­ca­ci­té des prières des membres du Tiers-​Ordre. Je suis convain­cu que leurs prières nous attirent beau­coup de voca­tions et de très nom­breuses grâces. Leurs prières est un élé­ment indis­pen­sable de sou­tien pour notre Sacerdoce et notre apos­to­lat. Dès que j’ai la charge du Tiers-​Ordre aux USA, j’ai deman­dé des prières spé­ciales pour tous les confrères qui nous ont quit­tés. Ils étaient des membres de notre famille, il faut qu’ils reviennent au ber­cail. Bien enten­du je laisse la Providence Divine déci­der du temps et des conditions.

La Porte latine : Avez-​vous des rela­tions avec les et souhaiteriez-​vous les voir se développer ?

Abbé Philippe Pazat : Mes rela­tions avec les aumô­niers du Tiers-​Ordre se limite aux pays anglo­phones. J’ai un contact rela­ti­ve­ment fré­quent en Australie. Mais à vrai dire, le temps manque pour pou­voir tout faire et je ne me sens pas capable d’é­ta­blir une rela­tion plus fré­quente. Actuellement je ne sais pas qui est l’au­mô­nier du Tiers-​Ordre pour la France (Note de la rédac­tion : il s’a­git de ).

La Porte latine : Y‑a-​t-​il un évêque qui s’oc­cupe plus par­ti­cu­liè­re­ment du Tiers-​Ordre dans la FSSXP ?

Abbé Philippe Pazat : Il est évident que le Supérieur Général est la tête du Tiers-​Ordre, cepen­dant Son Excellence Monseigneur Tissier de Mallerais en est char­gé de manière plus directe.

La Porte latine : Comment voyez-​vous le déve­lop­pe­ment de cet outil indis­pen­sable pour la Fraternité ?

Abbé Philippe Pazat : Le Tiers-​Ordre est des­ti­né à une élite de laïcs vou­lant une vie spi­ri­tuelle plus éle­vée ou plus intense, en liai­son avec notre Fraternité. Surtout dans ce monde moderne où toutes sortes d’oc­cu­pa­tions et de dis­trac­tions nous éloignent de la vraie vie d’u­nion avec Notre Seigneur, il est urgent de redon­ner de solides bases à notre vie spi­ri­tuelle. N’oublions pas que le Saint Sacrifice de la Messe a pour pre­mier but la louange divine. Si nous vou­lons vivre de la Messe, nous avons besoin de nous unir à Notre Seigneur. Nous sommes sou­mis à de nom­breuses tri­bu­la­tions, internes et externes. Il faut que les membres du Tiers-​Ordre soient les cel­lules vivantes dif­fu­sant l’a­mour du Bon Dieu et l’a­mour de l’Église. Qu’ils n’ou­blient pas que nous appar­te­nons à l’Église et à Notre Seigneur à tra­vers une ins­ti­tu­tion reli­gieuse. Leur atta­che­ment au Tiers Ordre et à la Fraternité doit être la garan­tie de leur atta­che­ment à l’Église et à Notre Seigneur.

La Porte latine : Ne peut-​on pas envi­sa­ger une jour­née mon­diale de ren­contre des membres du Tiers-​Ordre tous les trois ans à l’is­sue d’un pèle­ri­nage inter­na­tio­nal ou à tout autre occasion ?

Abbé Philippe Pazat : Je ne suis pas sûr que cela soit réa­li­sable. Il y a les incon­vé­nients des dis­tances et des prix de trans­port ; il y a les limites de com­mu­ni­ca­tion entre dif­fé­rentes langues. Cependant, si la Providence nous donne des signes évi­dents que cela est pos­sible, je serais cer­tai­ne­ment pré­sent aux rendez-​vous. Peut-​être que nous pour­rions com­men­cer par une ren­contre entre aumô­niers natio­naux, mais une telle déci­sion appar­tient à mes supérieurs.

La Porte latine : Avez vous des pro­jets pour le Tiers-​Ordre aux USA ?

Abbé Philippe Pazat : Pour le moment je n’ai rien de spé­cial en vue. Au début de mes fonc­tions comme aumô­nier, j’ai publié un petit manuel du Tiers-​Ordre, en me ser­vant du tra­vail déjà fait par mes confrères. C’est un bon moyen de dif­fu­ser le Tiers-​Ordre. Normalement je devrais avoir une lettre bimen­suelle, mais l’a­pos­to­lat à Syracuse, sur­tout l’é­cole, absorbe presque toutes mes éner­gies. Cependant j’es­père avoir l’oc­ca­sion de des­ti­nées uni­que­ment aux membres du Tiers-​Ordre afin de les aider à for­ti­fier leur vie spi­ri­tuelle et la fidé­li­té a la Fraternité.

La Porte latine : Nous remer­cions vive­ment mon­sieur l’ab­bé Philippe Pazat de nous avoir consa­cré quelques pré­cieux ins­tants de son rare temps libre. Nous invi­tons les lec­teurs de La Porte latine à prier pour lui et à se sou­ve­nir dans leurs prières de ses chers parents rap­pe­lés à Dieu et qui ont tant don­né pour le com­bat vital de la Tradition.