Lettre n° 26 de l’abbé Franz Schmidberger aux Amis et Bienfaiteurs de la FSSPX de mars 1984

Chers Amis et Bienfaiteurs,

ans les grandes lignes le déclin conti­nue dans l’Église et la socié­té. Quelques coups d’œil sur les évé­ne­ments des der­niers mois le mettent clai­re­ment en évidence.

– Le nou­veau Droit Canon, mise en forme juri­dique de l’esprit révo­lu­tion­naire du Concile est, mal­gré toutes les réserves et objec­tions de théo­lo­giens pru­dents, mis en vigueur le pre­mier dimanche de l’Avent 1983 par le par­ti pro­gres­siste. Il ne fait aucun doute, pour ne citer qu’un seul point, qu’avec l’adoption, au canon 204, de la mal­heu­reuse expres­sion conci­liaire, selon laquelle l’Eglise de Dieu sub­siste dans l’Eglise catho­lique (et donc que l’Eglise de Dieu ne serait pas iden­tique à l’Eglise catho­lique), on nie au moins impli­ci­te­ment la néces­si­té de l’Eglise catho­lique pour le salut, et l’on déclare moyens de salut d’autres confes­sions reli­gieuses. C’est ain­si que l’on passe d’une Eglise mis­sion­naire à une église mon­diale œcu­mé­nique, et dans une pro­chaine étape à la synar­chie, et que l’identité du Corps Mystique du Christ est minée dans son fondement.
Le Concordat entre l’Italie et le Saint-​Siège est abro­gé. L’Italie devient donc un Etat laï­ciste, l’enseignement de la Religion aux élèves n’est plus obligatoire.

– De manière révé­la­trice le Vatican rompt les rela­tions diplo­ma­tiques avec la Chine Nationaliste afin de pou­voir entrer en dia­logue avec la Chine Rouge et vend ain­si un des der­niers bas­tions de liberté.

– Le Pape prêche le troi­sième dimanche de l’Avent dans une église pro­tes­tante à Rome, et le 2 mars dans un dis­cours, il évoque de nou­veau la pers­pec­tive d’une union entre les Catholiques et les Luthériens.

– En Hollande – où déjà en 1970 le Synode sou­hai­tait que le Pape ne fût plus que le Secrétaire des Eglises unies, que le céli­bat ain­si que le sacer­doce soient abo­lis, et que les femmes soient admises à l’ordination – un groupe plus impor­tant de pro­fes­seurs de théo­lo­gie et de prêtres réclame main­te­nant la béné­dic­tion de l’Eglise pour le rema­riage des divor­cés, pour l’homophilie et l’euthanasie !

– En Allemagne, on met dans les mains de 130.000 jeunes catho­liques le nou­veau livre de chants, n° 2, aux visées com­plè­te­ment socia­listes et mar­xistes, et aux chants blasphématoires.

– La per­sé­cu­tion de ceux qui tiennent ferme à la Tradition bi-​millénaire de l’Eglise conti­nue : en Afrique du Sud un de nos amis prêtres a été en jan­vier frap­pé de sus­pense, et un second en Allemagne ces der­niers jours.

Quoi d’étonnant, si la théo­lo­gie se mue par­tout en une théo­lo­gie sociale d’orientation gau­chiste, si la litur­gie et la prière sont trans­for­mées en fonc­tion du culte de l’homme et si l’apostolat sombre dans l’épuisement !

« Que fera donc le chré­tien catho­lique, si une nou­velle épi­dé­mie cherche à conta­mi­ner non seule­ment une petite par­tie, mais toute l’Eglise en même temps ? Il aura à cœur de s’attacher à l’ancienneté, qui ne peut plus en aucune manière être cor­rom­pue par quelque trom­peuse nou­veau­té. Il se pré­oc­cu­pe­ra de tenir fer­me­ment ce qui par­tout, tou­jours et par tous a été cru » (saint Vincent de Lérins).

Ainsi tan­dis que dans l’ensemble la débâcle pro­gresse, à par­tir d’humbles ini­tia­tives, dans le com­bat pour gagner quelques âmes iso­lées, dans le sou­tien appor­té à quelques familles, dans le ras­sem­ble­ment de reli­gieux dis­per­sés, par la fon­da­tion de nou­veaux sémi­naires et cou­vents, s’accomplit la recons­truc­tion et le renou­vel­le­ment de toute l’Eglise, tâche où la Fraternité Saint-​Pie X se voit entiè­re­ment au ser­vice de la garde de ce feu que le Seigneur lui-​même a jeté sur la terre afin qu’il y brûle. Selon leurs sta­tuts, ses membres, en tant qu’Apôtres de Jésus et de Marie, ne tendent à rien d’autre qu’à faire de leur vie une Messe vécue quo­ti­dien­ne­ment, avec une âme sacer­do­tale, et dans un acte per­ma­nent d’offrande d’eux-mêmes, dans un esprit de prière, de souf­france et de cha­ri­té rédemptrices.

Grâce à vos prières, chers Amis et Bienfaiteurs, à votre affec­tueux sou­tien, et à vos dons géné­reux, nous avons pu au cours de la der­nière demi-​année conso­li­der et édi­fier sen­si­ble­ment notre œuvre : le 8 décembre, la nou­velle église de Sydney (Australie) fut solen­nel­le­ment inau­gu­rée, le 8 jan­vier Monseigneur a consa­cré la nou­velle église de Marseille et moi-​même, le même jour, la pre­mière église à Helmond (Hollande) dédiée à la Sainte-​Famille. Avec la grâce de Dieu, Monseigneur pour­ra cette année ordon­ner 29 prêtres uni­que­ment pour notre Fraternité : 4 à Ridgefield (USA) le 13 mai, 19 à Ecône (Suisse) le 29 juin et 6 à Zaitzkofen (Allemagne) le 1er juillet. Nous pour­rons ain­si étendre de manière consi­dé­rable notre apos­to­lat en France, en Allemagne, en Suisse, en Autriche, en Italie, aux Etats-​Unis, au Canada, et avoir en vue de nou­veaux points d’appui en Hollande, Portugal, Colombie, Mexique et Afrique du Sud.

Les pro­tes­ta­tions des catho­liques fran­çais contre la sup­pres­sion de la liber­té d’enseignement et d’éducation nous sont un nou­veau cli­mat sti­mu­lant pour consa­crer une atten­tion accrue à l’apostolat de la jeu­nesse, selon les paroles du Sauveur : « Laissez venir à moi les petits enfants, car le royaume des cieux est à eux ».

Et c’est pour­quoi je m’adresse à vous, non avec un esprit hau­tain de reven­di­ca­tion, mais dans l’attitude d’un humble men­diant : conti­nuez à nous aider de vos fer­ventes prières et de vos géné­reux sacri­fices, comme vous l’avez fait jusqu’à pré­sent. Le sou­tien effi­cace de notre apos­to­lat par votre fidé­li­té à la foi et votre esprit com­ba­tif, votre sym­pa­thie com­pa­tis­sante et votre cha­ri­té dés­in­té­res­sée sont une néces­si­té vitale pour notre œuvre ! « Dieu aime celui qui donne lar­ge­ment », dit l’Apôtre.

Pour que notre acti­vi­té se situe tou­jours plus dans le plan du salut de Dieu, que notre Fraternité puisse tou­jours gran­dir en fécon­di­té, mérite et impor­tance, nous avons pré­vu de la consa­crer cette année en la fête de l’Immaculée Conception au Cœur Immaculé et Douloureux de Marie. Puis-​je vous deman­der de vous pré­pa­rer dès aujourd’hui avec nous pour ce jour impor­tant ? Comme un saint Maximilien Kolbe s’est mis sans réserve au ser­vice de l’Immaculée Conception, nous vou­lons nous consu­mer au ser­vice de son apos­to­lat dans le sanc­tuaire de son Divin Fils.

Que la Vierge des Douleurs, pleine de com­pas­sion pour l’unique Sauveur du monde, daigne avec saint Joseph nous conduire dans sa clé­mence à tra­vers ce carême, à tra­vers la pas­sion et la mort de Jésus-​Christ, jusqu’à sa résur­rec­tion au matin de Pâques !
Réjouissez-​vous, Vierge Marie, vous seule avez vain­cu toutes les héré­sies dans le monde entier.

Rickenbach, le 10 mars 1984

Abbé Franz Schmidberger

Supérieur Général

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