5 février 251

Sainte Agathe

Née vers 231 à Catane, Sicile
et morte vers 251 (à peu près 20 ans) à Catane, Sicile.

Sainte Agathe est véné­rée dans le dio­cèse de Fréjus-​Toulon où les églises de Riboux[1] et d’Esparron[2] lui sont dédiées, des cha­pelles à Besse-​sur-​Issole, et au Cap Brun de Toulon, portent son nom, et des tableaux la repré­sentent, comme dans l’église de Mons[3].

Agathe, chré­tienne sici­lienne de famille patri­cienne, voua très jeune sa vir­gi­ni­té à Jésus-​Christ. Catane et Palerme se dis­putent son origine.

Quintien, pré­teur de Sicile, épris de la beau­té et des richesses d’Agathe, ten­ta vai­ne­ment par diverses ruses de la séduire pour de la corrompre.

Le 3 jan­vier 250, l’empereur Dèce ordon­na que le peuple sacri­fiât aux idoles. Le refus des chré­tiens l’amena à les per­sé­cu­ter. Quintien, sachant qu’Agathe était chré­tienne, en pro­fi­ta pour la faire com­pa­raître à son tri­bu­nal à Catane.

Agathe, qui n’avait pas qua­torze ans, adres­sa promp­te­ment cette prière : « Jésus-​Christ, sou­ve­rain Seigneur de toutes choses, vous voyez mon cœur, vous savez quel est mon désir ; soyez le seul pos­ses­seur de tout ce que je suis. Vous êtes mon Pasteur, ô mon Dieu ! et je suis votre bre­bis ; rendez-​moi digne de vaincre le démon. »

Agathe se serait enfuie trois mois sur l’île de Malte avant d’affronter le martyre.

Quintien la livra aus­si­tôt à Aphrodisia, mère de neuf pros­ti­tuées dans une mai­son infâme, d’où Agathe sor­ti­ra indemne après un mois de détention.

Quintien la convo­qua de nou­veau à son tri­bu­nal lui repro­chant de mener la vie humble et ser­vile des chré­tiens, elle qui est de noble extrac­tion. Agathe lui répon­dit : « L’humilité et la sou­mis­sion chré­tiennes sont plus hono­rables que les richesses et les pompes des rois[4]… Je suis de condi­tion libre et de famille res­pec­table, comme toute ma paren­té l’atteste[5], mais la suprême liber­té est la ser­vi­tude avé­rée envers le Christ[6]… Je suis la ser­vante du Christ, c’est pour­quoi je me montre comme ayant la condi­tion ser­vile[7] ». Elle ajou­te­ra : « Si tu me pro­mets les bêtes, en enten­dant le Nom du Christ, elles s’adouciront[8] ; si tu emploies le feu, les Anges répan­dront du ciel sur moi une rosée salu­taire[9]. » Quintien ordon­na qu’on la giflât abon­dam­ment avant de la conduire en pri­son vers laquelle elle marche avec joie, et se recom­mande au Seigneur[10].

Le len­de­main, Agathe affi­cha la même constance devant Quintien qui la fit étendre sur le che­va­let sur lequel Agathe ne céda en rien aux tor­tures de lames incan­des­centes. Dépité, Quintien lui fit cou­per les seins[11]. De quoi Agathe le blâme : « Cruel tyran, ne devrais-​tu pas rou­gir de muti­ler chez une femme ce que tu as sucé chez ta mère ? » Elle fut ren­voyée en pri­son sans aucun soin et sans qu’on lui appor­tât aucune nour­ri­ture. La nuit sui­vante, un vieillard lui appa­rut dans une lumière écla­tante : « Qui es-​tu, toi qui es venu vers moi pour gué­rir mes bles­sures ? » – « Je suis l’Apôtre du Christ, n’aie aucun doute à mon sujet, ma fille. C’est lui-​même qui m’a envoyé vers toi. Lui que tu as aimé en ton âme et avec un cœur pur. Car moi, je suis son Apôtre, et sache qu’en son nom tu seras gué­rie. » Et l’Apôtre Pierre lui res­ti­tua la poi­trine et gué­rit ses blessures.

Quatre jours après, Quintien la fit ame­ner, et fut insen­sible au pro­dige opé­ré sur elle qui attes­ta : « Je n’ai employé aucun remède humain pour mon corps, mais je pos­sède le Seigneur Jésus-​Christ qui, d’une seule parole, res­taure toutes choses[12]. » Il la fit rou­ler sur des mor­ceaux de pots cas­sés, mêlés avec des char­bons ardents. Mais alors un trem­ble­ment tel­lu­rique secoua la cité et deux murs tom­bèrent écra­sant Silvinus et Falconius, fami­liers de Quintien. La cité en fut si émue que Quintien crai­gnit une sédi­tion au point de faire rame­ner en secret Agathe, mou­rante, en pri­son. Là, elle pria, les mains éten­dues : « Seigneur, vous qui m’avez créée et pro­té­gée depuis mon enfance, don­né dès la fleur de l’âge une ver­tu supé­rieure à ma condi­tion, éloi­gné de mon cœur l’amour du siècle, sépa­ré mon corps de la pol­lu­tion[13], fait sup­por­ter les tour­ments des bour­reaux, rece­vez mon esprit ! » Ce qu’ayant dit, elle expi­ra, le 5 février 251. Des Chrétiens ense­ve­lirent son corps.

Quant à l’empereur Dèce, après n’avoir régné que deux ans, il mou­rut embour­bé en cam­pagne en fin d’année 251.

Aux approches du jour anni­ver­saire du mar­tyre d’Agathe, le Mont Etna entrant en érup­tion et mena­çant Catane, les païens, aiguillon­nés par la peur, allèrent au tom­beau de la mar­tyre, où, sai­sis­sant son voile[14]), l’opposèrent à la lave enva­his­sante qui aus­si­tôt ces­sa sa cou­lée. Ils se conver­tirent ain­si au chris­tia­nisme[15]. Au cours des siècles, le voile de sainte Agathe, por­té en pro­ces­sion, renou­vel­le­ra le pro­dige contre les cou­lées vol­ca­niques autant que de besoin.

Sainte Agathe est l’une des cinq vierges mar­tyres figu­rant au Canon Romain[16] de la Messe.

L’intercession de sainte Agathe fut aus­si sou­vent effi­cace en Italie contre les trem­ble­ments de terre[17], d’où la mul­ti­pli­ci­té de ses cha­pelles jusqu’en Provence. De plus, la Provence[18] et la Sicile furent unies poli­ti­que­ment lorsque Charles d’Anjou[19], comte de Provence, devint roi de Sicile en 1265, jusqu’aux fameuses Vêpres sici­liennes du 30 mars 1282.

Sainte Agathe est la patronne[20] des femmes qui allaitent, elle est invo­quée contre les maux de seins, et on la priait à Méolans[21], pour les enfants qui ne veulent pas téter. Elle est la patronne des fon­deurs de cloches et des bijou­tiers[22].

Abbé L. Serres-Ponthieu

Notes de bas de page
  1. Petite com­mune (dizaine d’âmes) sur le ver­sant sud du mas­sif de la Ste-​Baume. []
  2. Entre Rians et Barjols.[]
  3. On dit que la nuit de la Ste-​Agathe, à Mons, les femmes mariées et céli­ba­taires se retrouvent entre elles, pour ven­ger Sainte Agathe qui ne vou­lait se marier.[]
  4. Leçon IV.[]
  5. Antienne 1. []
  6. Antienne 2.[]
  7. Antienne 3.[]
  8. Antienne 4.[]
  9. Antienne 5[]
  10. Antienne 6.[]
  11. MR : plu­riel.[]
  12. Antienne 2 des Laudes.[]
  13. Répons VII.[]
  14. Elle est ain­si patronne des tis­se­rands (en Espagne ?[]
  15. Antienne à Magnificat.[]
  16. Le Cal Schuster rap­pelle que les Siciliens influen­cèrent la litur­gie pri­mi­tive de Rome qui comp­te­ra une dizaine d’églises dédiées à sainte Agathe.[]
  17. Liber Sacramentorum, Cal Schuster, tome VI, Vromant 1930, p.254.[]
  18. En Arles, on son­nait les cloches de Sainte-​Agathe les jours d’orage pour écar­ter la foudre. La veille de sa fête, c’est contre la tem­pête que l’on tirait ses cloches.[]
  19. Dernier frère du roi saint Louis.[]
  20. Sainte Agathe est aus­si la patronne de Malte qui pro­té­gea l’archipel d’une incur­sion turque en 1551.[]
  21. Dans le dio­cèse de Digne.[]
  22. Ramsgate.[]