16 janvier 430

Saint Honorat

Né en Gaule, et mort le 16 jan­vier 430 à Arles.

Saint Honorat, né en Gaule((En Champagne ou en Lorraine vers la mi-​IVe siècle.)) de parents païens d’origine romaine et consu­laire, se pré­pa­ra au bap­tême notam­ment en dis­tri­buant aux pauvres ses reve­nus. Baptisé, il est inci­té par son père à pro­fi­ter de la vie du monde, mais Honorat se rai­son­nait en lui-même : 

Cette vie plaît, mais elle trompe. J’entends dans le monde des pré­ceptes tout dif­fé­rents de ceux de l’Eglise ; il faut choi­sir entre les deux ; d’un côté on me prêche la modes­tie, la rete­nue, la vie de l’âme ; de l’autre, une jouis­sance effré­née, la vie du corps. Ici, Jésus m’appelle à régner dans le ciel ; là, le démon à régner sur la terre. Tout ce qu’il y a dans le monde et ce qui flatte les yeux, passent ; celui-​là seul qui fait la volon­té de Dieu, demeure tou­jours. Hâtons-​nous donc de nous tirer de ces pièges, tan­dis que nous n’y sommes pas encore bien pris. Quand les liens sont com­plè­te­ment for­més, il est dif­fi­cile de les rompre : faibles, ils sont plus faciles à défaire, que forts, à cou­per. Sauve ton âme sur les hau­teurs, loin des pen­sées ter­restres qui la salissent et l’empêchent de res­pi­rer libre­ment. Ceux qui pos­sèdent de l’or sont pos­sé­dés par l’or… ceux qui se plaisent dans les digni­tés abaissent la digni­té de leur âme, qui est l’image de Dieu. Mes esclaves à moi, ce seront mes mau­vaises pas­sions ; ma joie, le salut de mon âme ; mon épouse, la sagesse ; ma volup­té, la ver­tu ; mon tré­sor, le Christ, qui, en échange des biens caducs, m’en don­ne­ra d’impérissables ; le ser­vir sur la terre et régner avec lui dans le ciel. 

Il se coupe alors les che­veux, revêt des habits modestes au grand dam de son père, quitte le monde, et engage son frère aîné, Venance, à le suivre dans la voie de per­fec­tion. Dormant sur un cilice, ayant une pierre pour oreiller, ils reçoivent cha­ri­ta­ble­ment les pauvres et le cler­gé à leur table. Mais la répu­ta­tion qui se répand de leur ver­tu leur ins­pire la fuite. Laissant leurs biens aux pauvres, ils emmènent avec eux S. Caprais, un vieillard auquel ils se sou­mettent. Arrivés à Marseille, l’évêque Procule essaie de les rete­nir dans son dio­cèse, mais les trois céno­bites s’embarquent pour la Mer Egée, où les côtiers ignorent le latin, afin d’y vivre inco­gni­to. A Nicomédie, ils s’adjoignent S. Jacques, un perse récem­ment bap­ti­sé. Leur périple les fait enfin accos­ter en Péloponnèse. Là, à Modon, Venance, n’ayant pas les forces pour de tels voyages, décède. Malade, Honorat décide de rejoindre les Gaules. Honorat et Caprais sont aimés au pas­sage en Italie, mais ils pour­suivent jusqu’en Provence où ils se lient d’amitié avec S. Léonce, évêque de Fréjus. Ils cherchent un lieu iso­lé peu éloi­gné de cet homme de Dieu : Léonce les mène vers l’an 391 à l’archipel de Lérins((LEtoile de la Mer (décembre 2011) nar­ra dans la vie de S. Léonce com­ment Honorat chas­sa tous les ser­pents de l’archipel.)). Léonce vou­lut ordon­ner Honorat prêtre pour offi­cier sur cet îlot de paix, Honorat dut s’y sou­mettre mal­gré son humble pro­tes­ta­tion. La com­mu­nau­té construi­sit une église et le monas­tère. Premier abbé du monas­tère, il écri­vit une règle, depuis per­due, ins­pi­rée de celle de S. Pacôme. Dieu lui fit connaître les secrets des cœurs et des corps. La cha­ri­té hos­pi­ta­lière du monas­tère atti­ra de plus en plus de voya­geurs. La géné­ro­si­té du saint abbé ne regar­dait pas sur les réserves du monas­tère, et Honorat répa­rait au besoin les pro­vi­sions par des pro­diges. Quand la bourse fut vide, il dit : Si notre cha­ri­té n’a plus rien à don­ner, Celui qui doit nous rendre n’est pas loin. Quoique souf­frant quelques infir­mi­tés, il parais­sait dépas­ser en vigueur les plus robustes, et visi­tait des malades moins infirmes que lui.

Avec quelques céno­bites, il évan­gé­li­sa la pro­vince Viennoise enva­hie en 413 par les Burgondes : remon­tant le Rhône et la Saône, il conver­tit S. Hilaire, et S. Maxime en 420 près de Digne ; il pousse jusqu’en Tarentaise, y laisse ses com­pa­gnons qui, en 423, à l’arrivée des Burgondes, le rejoin­dront à Lérins. Nouveau Moïse, Honorat fit cou­ler mira­cu­leu­se­ment une source à par­tir d’un rocher, tan­dis que le jeune saint Véran pei­nait à creu­ser pour trou­ver une source.

Malgré lui, Honorat sera pres­sé par la plu­part des Arlésiens, fin 426, de quit­ter l’île, pour deve­nir leur évêque, lais­sant Maxime diri­ger l’abbaye. Honorat rever­sa les richesses iniques de l’ancien évêque Patrocle au béné­fice des âmes du Purgatoire. La renom­mée d’Honorat gagna toute la Gaule. Devenu plus acces­sible, il reçut la visite de quelques membres de sa famille, mais ne leur fit aucun trai­te­ment de faveur.

Au ser­mon de l’Epiphanie 429, il s’effondra et entra dans une ago­nie de plu­sieurs jours. Hilaire pleu­ra devant ses souf­frances, et Honorat lui répon­dit : Que sont les souf­frances du moindre de tous, auprès des tor­tures qu’ont endu­rées à leurs der­niers moments tant de saints ? Le pré­fet des Gaules vint saluer l’évêque sur sa couche, et s’entendit dire : La mort n’est pas une peine si elle ne mène pas aux sup­plices. Dure est sans doute la sépa­ra­tion de l’âme et de la chair, mais beau­coup plus dure sera la réunion de l’âme et de la chair dans les flammes de l’enfer… Honorat indi­qua Hilaire pour lui suc­cé­der ; il avait une parole pour cha­cun et savait encore sou­rire et badi­ner ! La nuit de son tré­pas, cer­tains virent son âme entrer dans les Chœurs glo­rieux des Anges, d’autres furent réveillés et allèrent véné­rer son corps à l’église.

Abbé L. Serres-Ponthieu