Saint Jean devant La Porte Latine : 6 mai

« Jean, le dis­ciple bien-​aimé, que nous avons vus prés du ber­ceau de l’enfant de Bethléem repa­raît en ce jour sur le Cycle de Pâques pour faire sa cour au glo­rieux triom­pha­teur de la mort et de l’enfer. Couvert de la pourpre du mar­tyre, il marche d’un pas égal avec Philippe et Jacques, dont la double palme a réjoui nos regards au début de ce mois si fécond en héros.

Dans son ambi­tion mater­nelle, Salomé avait un jour pré­sen­té ses deux fils à Jésus, deman­dant pour eux les deux pre­mières places de son royaume. Le Sauveur avait alors par­lé du calice qu’il devait boire, et pré­dit qu’un jour ces deux dis­ciples le boi­raient à leur tour. L’aîné, Jacques le Majeur, a le pre­mier don­né à son Maître cette marque de son amour ; nous célé­bre­rons sa vic­toire sous le signe du Lion ; Jean, le plus jeune, a été appe­lé aujourd’hui à scel­ler de sa vie le témoi­gnage qu’il a ren­du à la divi­ni­té de Jésus.

Mais il fal­lait au mar­tyre d’un tel Apôtre un théâtre digne de lui. L’Asie-Mineure, évan­gé­li­sée par ses soins, n’était pas une contrée assez illustre pour por­ter digne­ment la gloire d’un tel com­bat. Rome seule, Rome où Pierre a déjà trans­fé­ré sa Chaire et répan­du son sang, où Paul a cour­bé sous le glaive sa tête véné­rable, méri­tait l’honneur de voir dans ses murs l’auguste vieillard, le dis­ciple que Jésus aima, le der­nier sur­vi­vant du Collège apos­to­lique, s’avancer vers le mar­tyre avec cette majes­té et cette dou­ceur qui forment le carac­tère de ce vété­ran de l’Apostolat.

Domitien régnait en tyran sur Rome et sur le monde. Soit que Jean ait entre­pris libre­ment le voyage de la cité reine pour y saluer l’Eglise prin­ci­pale, soit qu’un édit impé­rial ait ame­né char­gé de chaînes dans la capi­tale de l’empire l’auguste fon­da­teur des sept Eglises de l’Asie-Mineure, Jean a com­pa­ru en pré­sence des fais­ceaux de la jus­tice romaine. Il est convain­cu d’avoir pro­pa­gé dans une vaste pro­vince de l’empire le culte d’un Juif cru­ci­fié sous Ponce-​Pilate. Il doit périr ; et la sen­tence porte qu’un sup­plice hon­teux et cruel débar­ras­se­ra l’Asie d’un vieillard super­sti­tieux et rebelle. S’il a su échap­per à Néron, du moins il ne fui­ra pas la ven­geance du césar Domitien.

En face de la Porte Latine, une chau­dière rem­plie d’huile brû­lante a été pré­pa­rée ; un ardent bra­sier fait bouillon­ner dans le vase immense la liqueur homi­cide. L’arrêt porte que le pré­di­ca­teur du Christ doit être plon­gé dans ce bain affreux. Le moment est donc arri­vé où le fils de Salomé va par­ti­ci­per au calice de son Maître. Le cœur de Jean tres­saille de bon­heur à la pen­sée que lui, le plus aimé et cepen­dant le seul des Apôtres qui n’ait pas souf­fert la mort pour ce Maître divin, est enfin appe­lé à lui don­ner ce témoi­gnage de son amour. Après une cruelle fla­gel­la­tion, les bour­reaux sai­sissent le vieillard, ils le plongent avec bar­ba­rie dans la chau­dière mor­telle ; mais, ô pro­dige ! l’huile brû­lante a per­du tout à coup ses ardeurs ; aucune souf­france ne se fait sen­tir aux membres épui­sés de l’Apôtre ; bien plus, lorsqu’on l’enlève enfin de la chau­dière impuis­sante, il a recou­vré toute la vigueur que les années lui avaient enle­vée. La cruau­té du Prétoire est vain­cue, et Jean, mar­tyr de désir, est conser­vé à l’Eglise pour quelques années encore. Un décret impé­rial l’exile dans l’île sau­vage de Pathmos, où le ciel doit lui mani­fes­ter les futures des­ti­nées du chris­tia­nisme jusqu’à la fin des temps. L’Eglise Romaine, dont les fastes conservent entre ses plus glo­rieux sou­ve­nirs le séjour et le mar­tyre de Jean, a mar­qué par une Basilique le lieu où l’Apôtre ren­dit à la foi chré­tienne son noble témoi­gnage. Cette Basilique est située près de la Porte Latine, et un Titre car­di­na­lice y est attaché. »

Dom Guéranger, l’Année Liturgique.

Prières à sant Jean

Ps. 63,3

« Préservez-​moi Seigneur du com­plot des méchants, de la mul­ti­tude des ouvriers d’iniquité. »
« Ecoutez Seigneur ma prière quand j’im­plore avec insistance. »
« De la crainte des enne­mis déli­vrez mon âme. »

Prions.

« Ô Dieu qui nous voyez éprou­vés par les maux qui nous arrivent de toutes parts, accordez-​nous, nous vous en prions, la pro­tec­tion de la glo­rieuse inter­ces­sion de votre Apôtre et Evangéliste saint Jean. »