Les ralliés, 20 ans après, à l’épreuve des faits

Des compromis doctrinaux

20 ans après, le constat est acca­blant. Comme le notait M. l’ab­bé de Cacqueray le 22 avril 2007,

Au fur et à mesure que se sont ral­liés à la Rome conci­liaire dif­fé­rents monas­tères, ins­ti­tuts ou prêtres iso­lés, il s’est tou­jours pro­duit un affa­dis­se­ment, un gau­chis­se­ment des idées qui s’est d’a­bord opé­ré par le rem­pla­ce­ment ou le détour­ne­ment de sens d’un mot puis de quelques-​uns. Il suf­fit d’a­voir consen­ti à l’un d’entre eux – car il existe nor­ma­le­ment une cohé­rence dans une pen­sée – pour qu’il en amène d’autres à ger­mer, qui vont lui impo­ser peu à peu une tout autre orien­ta­tion. Quelques années après, l’on se frotte les yeux en se deman­dant com­ment il est pos­sible qu’un tel fos­sé ait pu se creuser.

« L’abbé Laguérie à la croi­sée des che­mins, La Porte Latine.

Ouvrons jus­te­ment les yeux, car doc­tri­na­le­ment, ces ins­ti­tuts ont cédé sur :

1. La messe. Curieusement, ces ins­ti­tuts qui passent pour être les cham­pions de la litur­gie ont tous lâché sur ce point en recon­nais­sant la légi­ti­mi­té de la nou­velle messe et en se tai­sant logi­que­ment sur la noci­vi­té de celle-​ci [1] . Mentionnons Dom Gérard, abbé du Barroux (le 27 avril 1995), Mgr Wach, supé­rieur du Christ-​Roi (le 21 décembre 1991), Mgr Rifan, supé­rieur de l’Institut saint Jean-​Marie Vianney de Campos (le 8 décembre 2004) qui ont tous concé­lé­bré dans le nou­veau rite [2] . Nous pour­rions citer éga­le­ment et abon­dam­ment la revue Sedes Sapientiæ qui défen­dait la par­faite ortho­doxie de la nou­velle litur­gie [3] ou M. l’ab­bé Ribeton, supé­rieur actuel du dis­trict de France de la FSSP [4] ou encore mes­sieurs les abbés de Tanouärn et C. Héry (de l’IBP) défen­dant l’un la légi­ti­mi­té [5], l’autre la valeur [6] du nou­veau rite.

2. La liber­té reli­gieuse : c’est le cas du Barroux avec la jus­ti­fi­ca­tion de la liber­té reli­gieuse par le père Basile dans sa très longue thèse ; c’est le cas de l’IBP, avec un article de l’ab­bé C. Héry qui encense le pas­sage du Discours de Benoît XVI de décembre 2005 où il est ques­tion de la liber­té reli­gieuse [7] ;

3. L’ecclésiologie du sub­sis­tit in avec le ral­lie­ment enthou­siaste de M. l’ab­bé Ph. Laguérie à l’in­ter­pré­ta­tion désor­mais clas­sique de Rome [8] ;

4. L’œcu­mé­nisme. Voici ce qu’o­sait décla­rer il y a quelques années, l’an­cien supé­rieur et cofon­da­teur de la Fraternité Saint-​Pierre, M. l’ab­bé Bisig :

Je ne vois rien de mau­vais dans le fait que des catho­liques se donnent un rendez-​vous avec des non-​catholiques, qu’ils s’en­tre­tiennent avec eux, etc. Assise avait en un cer­tain sens, une grande impor­tance, dans la mesure où, dans le cadre de la prière pour la paix, se ren­con­traient les fidèles des dif­fé­rentes reli­gions [9] .

5. Du nou­veau code de droit cano­nique que tous ces ins­ti­tuts ont adop­té sans sourciller.

Et la liste pour­rait se ral­lon­ger encore. Un der­nier point à ce sujet. Pas un mot, pas l’ombre d’une cri­tique à l’é­gard des scan­dales doc­tri­naux de Rome. Il n’y aurait que ce silence à mettre à la charge de ces ins­ti­tuts ain­si muse­lés, cela serait une preuve suf­fi­sante que cette atti­tude de sou­mis­sion à la Rome moder­niste reste vouée à l’échec.

A la merci de Rome et des évêques.

Les (rela­ti­ve­ment) récents déboires de la Fraternité Saint-​Pierre en France en 2006 : récu­pé­ra­tion par les dio­cèses des centres parois­siaux de Versailles, Lyon et Orléans, mani­festent que la sou­mis­sion aux évêques s’ac­com­pagne d’un frein non négli­geable à l’a­pos­to­lat. A ce titre, la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X mani­feste par les cou­dées franches dont elle dis­pose qu’il est bien plus facile d’ou­vrer pour la tra­di­tion à l’ex­té­rieur des struc­tures ordi­naires. Combien de refus ne faut-​il pas essuyer, com­bien de démarches ne faut-​il pas entre­prendre avant d’ob­te­nir quelques bien­faits des évêques [10] .

Du reste, ces dif­fi­cul­tés avec les auto­ri­tés locales ne sont que l’é­cho des pres­sions romaines. Rappelons-​nous qu’en 1999, lorsque le supé­rieur de la Fraternité Saint-​Pierre, M. l’ab­bé Bisig, vou­lut s’op­po­ser à la frange gauche de sa socié­té, Rome don­na rai­son à celle-​ci, attri­bua à tout prêtre de la FSSP le droit de célé­brer selon le nou­veau rite [11] et impo­sa un nou­veau supé­rieur bi-​ritualiste en 2000.

L’abandon de poste

A la lumière, d’une part, de cette sou­mis­sion impru­dente à des struc­tures ecclé­sias­tiques aux mains de moder­nistes, et, d’autre part, de tous ces gau­chis­se­ments, déviances et renon­ce­ments sur des ques­tions liées inti­me­ment à la foi, on a l’im­pres­sion de se trou­ver face à un aban­don de poste, une dimi­nu­tion de l’es­prit de com­bat. Comme le disait d’ailleurs E. Hello dans L’Homme :

« quand un homme qui aimait la véri­té cesse de l’ai­mer, il ne com­mence pas par décla­rer sa défec­tion ; il com­mence par moins détes­ter l’erreur ».

Une division profonde et durable

Cette red­di­tion pra­tique et doc­tri­nale d’une par­tie du bloc jus­qu’a­lors homo­gène de la Tradition a inévi­ta­ble­ment conduit à une divi­sion pro­fonde et durable. On peut en effet remar­quer que, dans la quasi-​totalité des cas, Rome n’a accor­dé cer­taines liber­tés tra­di­tion­nelles qu’à des anciens de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X.

A chaque fois qu’une pré­ten­due ouver­ture de Rome s’est faite en faveur de la Tradition, elle s’est accom­pa­gnée de divi­sions au sein de la Fraternité Saint-​Pie X. Ce fut le cas lors de la fon­da­tion de la Fraternité Saint-​Pierre, l’Institut saint Philippe Néri, la Fraternité Saint-​Jean, le sémi­naire Mater Ecclesiae et der­niè­re­ment l’Institut du Bon Pasteur qui ont tous été fon­dés par des anciens de la Fraternité Saint-​Pie X entraî­nant des divi­sions en elle ; de même le Barroux, Chéméré, Campos sont des fon­da­tions d’an­ciens alliés dont les ral­lie­ments se sont accom­pa­gnés de nou­velles divi­sions dans le front autre­fois uni de la Tradition.

Ce n’est donc pas une multiplication par addition mais par division.

Et comme nous venons de le mon­trer – preuves à l’ap­pui – cet aban­don de la Fraternité Saint-​Pie X sup­pose chez ceux qui la quittent l’ac­cep­ta­tion pro­gres­sive et mani­feste des erreurs conci­liaires et litur­giques. Cette volon­té de divi­sion était déjà d’ailleurs clai­re­ment expri­mée par feu Mgr Decourtray le 4 décembre 1988 :

Si Mgr Lefebvre avait confir­mé la signa­ture don­née le 5 mai au pro­to­cole d’ac­cord, il aurait fait la preuve qu’il était dis­po­sé à accueillir tout le concile Vatican II en même temps que l’au­to­ri­té du pape actuel et des évêques locaux qui lui sont unis. En réa­li­té, si Mgr Lefebvre n’a pas accep­té le pro­to­cole qui lui était pro­po­sé, c’est pré­ci­sé­ment qu’il a com­pris sou­dain sa signi­fi­ca­tion réelle. « Ils vou­laient nous trom­per », a‑t-​il dit équi­va­lem­ment. Cela signi­fiait : « Ils vou­laient nous faire accep­ter le concile ».

Progresser dans la fidé­li­té au concile. Discours d’in­tro­duc­tion du car­di­nal Decourtray à l’as­sem­blée de l’é­pis­co­pat à Lourdes », La Documentation catho­lique 1973,

De même, « Au len­de­main de l’ac­cord des prêtres de Campos a paru un entre­tien (Radio-​Vatican) avec le théo­lo­gien de la mai­son pon­ti­fi­cale, le Père Georges Cottier, O.P., dans lequel celui-​ci expri­mait qu’il était insuf­fi­sant que les prêtres de Campos recon­naissent la vali­di­té de la nou­velle messe, mais que l’on devait les ame­ner à la célébrer :

Nous devons nous attendre peu à peu à d’autres actes de rap­pro­che­ment : par exemple, la par­ti­ci­pa­tion à des concé­lé­bra­tions dans le rite réfor­mé. Mais il faut encore faire preuve de patience. Il est essen­tiel que leurs cours ne s’y refusent pas plus long­temps. L’unité retrou­vée au sein de l’Eglise ren­ferme en elle-​même une dyna­mique interne qui por­te­ra ses fruits.

Nouvelles de Chrétienté n°73, Mars-​Avril 2002, p. 4

On pour­rait citer encore l’a­vis auto­ri­sé de la revue de La Documentation catho­lique dans sa tra­duc­tion fran­çaise pré­sen­tant le docu­ment de fon­da­tion de l’Institut du Bon Pasteur :

L’Institut du Bon Pasteur qui a pour voca­tion d’ac­cueillir dans l’Eglise catho­lique des prêtres issus de la fra­ter­ni­té Saint-​Pie X, schis­ma­tique. [12].

.Enfin, il est à noter que pour ces ins­ti­tuts qui se séparent du vais­seau ami­ral, cela s’ac­com­pagne d’un éloi­gne­ment de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X [13] voire d’une condam­na­tion de celle-​ci [14] .

D’un glissement doctrinal à la confusion dans les esprits

Cédant sur la doc­trine, les ins­ti­tuts Ecclesia Dei se sont cram­pon­nés sur la ques­tion litur­gique en la vidant de son aspect pro­fon­dé­ment doc­tri­nal. En ava­li­sant la valeur et la légi­ti­mi­té de la nou­velle messe, en occul­tant les erreurs du magis­tère actuel, ces ins­ti­tuts ont chan­gé la pers­pec­tive du com­bat de la Tradition. Il ne s’a­git plus pour ces der­niers ni de sou­te­nir la messe de saint Pie V en condam­nant la nou­velle messe, ni de com­battre les erreurs modernes prê­chées par la Rome actuelle pour prê­cher la foi de tou­jours. Il s’a­git uni­que­ment de mani­fes­ter la plus grande richesse doc­tri­nale et litur­gique de la messe tridentine.

Le dépla­ce­ment d’ac­cent n’est pas petit. Et cela explique sans doute une confu­sion si pré­sente aujourd’­hui dans nos milieux, celle de limi­ter le com­bat de la Tradition à celui de la messe comme si l’on devait s’en satis­faire et ne pas exi­ger la foi de tou­jours avec la messe de tou­jours [15] . C’est pour­quoi nous pen­sons que c’est aujourd’­hui, peut-​être plus qu’a­vant, que nous payons les fruits amers de cette divi­sion de 1988.

Dès lors qu’ils admettent la fausse liber­té reli­gieuse, conclut Mgr Lefebvre, (.) le faux œcu­mé­nisme (.) la réforme litur­gique (.) ils contri­buent offi­ciel­le­ment à la révo­lu­tion dans l’Eglise, et à sa destruction.

Itinéraire spi­ri­tuel, Fideliter, p. 10–11

La porte ouverte à la mondanité

Parmi ces fruits qu’on est en droit d’at­tendre, la mon­da­ni­té ne nous semble pas exempte. Psychologiquement, l’ha­bi­tude du com­pro­mis intel­lec­tuel mène natu­rel­le­ment au com­pro­mis moral. A force de céder sur des points de doc­trine jugés secon­daires, l’âme prend l’ha­bi­tude de céder sur des points de morale jugés secondaires.

Des sacrements douteux ?

Curieusement, la vali­di­té de cer­tains sacre­ments don­nés par les prêtres des­dits ins­ti­tuts est rare­ment remise en cause. Pourtant, si l’on tient compte que :

  1. les sacre­ments d’extrême-​onction et de confir­ma­tion sont dou­teu­se­ment valides si l’huile uti­li­sée n’est pas de l’huile d’olive,
  2. cette huile est consa­crée par l’évêque,
  3. ces ins­ti­tuts n’ont pas d’é­vêque [16] tra­di­tion­nel et qu’ils sont à la mer­ci d’é­vêques pou­vant uti­li­ser de l’huile autre que l’huile d’olive ;

Qu’en est-​il alors de l’extrême-​onction qu’ils confèrent avec ces huiles ? » demande l’ab­bé Célier.

L’Eglise déchi­rée, Fideliter, 1994, p. 44. Ouvrage au demeu­rant fort instructif.

Ces ins­ti­tuts usent-​ils avec cer­ti­tude d’une véri­table huile d’o­live ? De la réponse à cette ques­tion dépend la cer­ti­tude de la vali­di­té de leurs sacre­ments d’extrême-​onction et de confirmation.

Le diable porte pierre

Tout ce réqui­si­toire, pour être fon­dé, n’en est pas moins sévère. Sans aucun doute y a‑t-​il de nom­breuses âmes de bonne foi, pieuses, mor­ti­fiées, sur­na­tu­relles dans ces ins­ti­tuts. Peut-​être d’ailleurs que des âmes, n’o­sant fran­chir le seuil de cha­pelles affu­blées du carac­tère injuste de schis­ma­tique, ont ain­si trou­vé le che­min d’une vie chré­tienne plus fer­vente, plus riche litur­gi­que­ment et doc­tri­na­le­ment dans ces ins­ti­tuts. Nous ne vou­lons et ne pou­vons pas le nier. De même, ces ins­ti­tuts sont par­fois l’oc­ca­sion pour des prêtres et fidèles de décou­vrir le com­bat de la Tradition et d’ar­ri­ver fina­le­ment jus­qu’à la Fraternité Saint-​Pie X mais ceci mal­gré l’o­rien­ta­tion géné­rale de ces ins­ti­tuts qui conduisent à l’as­si­mi­la­tion des prin­cipes conciliaires.

De plus, comme l’en­seigne le prin­cipe de morale rap­pe­lé par l’Apôtre : « Ne fai­sons pas le mal pour qu’il advienne du bien ». La fin ne jus­ti­fie pas les moyens. C’est pour­quoi le bien réel qui se fait dans ces ins­ti­tuts ne sau­rait jus­ti­fier leur ral­lie­ment aux erreurs conci­liaires [17] .

Au contraire, nous pen­sons que si ces prêtres et fidèles de bonne foi étaient (res­tés) fidèles au vrai com­bat sans se décou­ra­ger, leur effi­ca­ci­té apos­to­lique en serait décu­plée. Doctrinalement et spi­ri­tuel­le­ment par­lant, ils n’au­raient pas ce dan­ger pour leur foi. Spirituellement par­lant, ils ne bai­gne­raient pas dans ce cli­mat pro­pice à la mon­da­ni­té. Pratiquement par­lant, ils n’au­raient pas la dif­fi­cul­té liée à la mau­vaise volon­té de la plu­part des évêques.

Du cœur, Rodrigue !

Pour clore ce cha­pitre dou­lou­reux, ter­mi­nons par une ques­tion d’hon­neur, ou si l’on pré­fère, de cour. Il y a 20 ans, Mgr Lefebvre, dont la vie ne fut qu’un écho fidèle de la Tradition de l’Eglise, fut condam­né pour le motif de n’a­voir pas res­pec­té cette même Tradition [18] .

Avec lui, c’est toute la Tradition de l’Eglise qui fut excom­mu­niée, l’en­sei­gne­ment constant de l’Eglise et, au-​delà tous ces prêtres et fidèles qui ont si bien méri­té de l’Eglise en ces années troublées.

Il doit être éga­le­ment évident, pré­cise M. l’ab­bé de Cacqueray, pour tous ceux qui savent quelle est la bataille de Monseigneur Lefebvre, que la jus­tice la plus élé­men­taire inter­dit de nouer “des accords” si la mémoire de celui à qui nous devons tout – autant qu’il est pos­sible de tout devoir à un homme – n’a pas été lavée des injus­tices et des peines subies. L’existence même de la com­mis­sion Ecclesia Dei, dres­sée sur la condam­na­tion de nos évêques, qui regroupe ceux “qui ont aban­don­né le mou­ve­ment de Monseigneur Lefebvre” (inter­view du car­di­nal Castrillón Hoyos, 06.08.2007) se trouve viciée dès l’o­ri­gine. Accepter d’en être est une gifle à la mémoire d’une per­sonne qui nous est sacrée. Ce n’est point là affaire de sus­cep­ti­bi­li­té. Chacun peut com­prendre que nous serions, tout au contraire, des fils bien indignes et bien ingrats, et que nous pèche­rions gra­ve­ment contre l’hon­neur et contre la pié­té filiale, si nous admet­tions une régu­la­ri­sa­tion cano­nique de notre situa­tion sans plus nous sou­cier de notre fon­da­teur. L’origine même de cette com­mis­sion pon­ti­fi­cale, comme sa déno­mi­na­tion invi­tant tex­tuel­le­ment les fidèles à s’af­fran­chir du com­bat des seuls évêques qui ont osé se lever pour défendre la doc­trine tra­di­tion­nelle, nous est odieuse et suf­fit à la dis­cré­di­ter à nos yeux.

Lettre aux amis et bien­fai­teurs n°71, décembre 2007, p. 21.

Comment par le fait, pourrions-​nous nous entendre avec ces ral­liés qui, non contents de s’u­nir à la Rome qui a condam­né la Tradition se ral­lie à cette condam­na­tion même [19]?

Abbé François-​Marie Chautard in Le Chardonnet n° 239 de juin 2008

Notes de bas de page
  1. Deux excep­tions à notre connais­sance. La pre­mière vient de L’IBP qui, par une logique qui nous laisse son­geur, adopte la légi­ti­mi­té et la valeur de la nou­velle messe tout en fai­sant sienne la cri­tique de celle-​ci. La seconde vient de Renaissance catho­lique à tra­vers la réédi­tion du Bref exa­men cri­tique, Renaissance catho­lique dont nous avons peine à com­prendre la cohé­rence puisque ce mou­ve­ment n’hé­site pas à invi­ter à des ado­ra­tions du Saint-​Sacrement dans des églises où les hos­ties sont consa­crées à une messe que le Bref exa­men cri­tique qua­li­fie de dou­teu­se­ment valide.[]
  2. A noter que Mgr Rifan eut l’im­pu­dence de décla­rer qu’il avait simu­lé cette concé­lé­bra­tion. Cela en dit long sur le cou­rage et l’hon­nê­te­té d’un tel évêque. De plus, et à pro­pos des ins­ti­tuts ral­liés après les sacres, comme Campos ou l’IBP qui se basent non sur un chan­ge­ment de Rome en 1988 mais à la fin du règne de Jean-​Paul II ou au début de celui de Benoît XVI, le rai­son­ne­ment reste fon­da­men­ta­le­ment le même : on peut main­te­nant faire confiance à Rome. L’évolution rapide de ce ins­ti­tuts (men­tion­née dans cet article) ou la sta­bi­li­té des idées moder­nistes à Rome (cf. article sui­vant) démontre l’ir­réa­lisme d’un tel juge­ment.[]
  3. « Qu’il s’a­gisse de la valeur et de la sain­te­té des anciens et des nou­veaux livres [litur­giques], un clerc adhé­rant à l’u­sage ancien ou nou­veau ne pour­rait se dire plei­ne­ment catho­lique s’il lais­sait sub­sis­ter une ambi­guï­té sur ses convic­tions intimes en ces matières » abbé Pierre-​Olivier, « Accueillir le Motu pro­prio » dans Sedes Sapientiæ, n°101, automne 2007, p. 28. On aime­rait deman­der à cet abbé ce que signi­fie pour lui être non plei­ne­ment catho­lique. Comprenons nous bien. Que celui qui n’a jamais com­mis d’é­cart de plume leur jette le pre­mier calame. Il s’a­git pas de cela ici mais de mon­trer que ce ne sont jus­te­ment pas des écarts de plume mais le résul­tat d’une posi­tion pra­tique.[]
  4. « Je ne crois pas que célé­brer la messe selon le nou­vel ordo puisse en soi consti­tuer un désordre moral objec­tif » (inter­ven­tion sur Le Forum catho­lique du 13/​11/​2006). Mgr Lefebvre disait exac­te­ment le contraire : « La nou­velle messe conduit au péché contre la foi, et c’est un des péchés les plus graves, les plus dan­ge­reux (.) Autant conclure qu’une per­sonne qui serait consciente et aver­tie du dan­ger de cette messe, et qui s’y ren­drait, ferait cer­tai­ne­ment au moins un péché véniel. Pourquoi, me direz-​vous, pour­quoi ne dites-​vous pas un péché grave ? Parce que je pense qu’une seule assis­tance à cette messe ne consti­tue pas un dan­ger pro­chain. Je pense que le dan­ger devient grave et par consé­quent devient sujet d’un péché grave par la répé­ti­tion. (…) Le péché devient grave si une per­sonne consciente et aver­tie y va quand même régu­liè­re­ment et dit : “Moi cela m’est égal, oh, moi je ne crains pas pour ma foi.”, alors qu’elle sait par­fai­te­ment que c’est dan­ge­reux » (Mgr Lefebvre, La messe de tou­jours, textes réunis par l’ab­bé Troadec, Clovis, 2005, p. 396–397).[]
  5. « Ce Novus Ordo Missae reste un rite légi­time de l’Eglise catho­lique romaine » (Valeurs actuelles n°3653, 1er décembre 2006). Tellement légi­time que l’ab­bé n’hé­si­ta pas ni à ani­mer de sa voix puis­sante la messe de funé­railles de P.Pujo célé­brée dans le nou­veau rite ni à prê­cher à celle-​ci. L’abbé a sans doute oublié ce pro­pos de Mgr Lefebvre : « nous refu­sons de dire qu’elle [la nou­velle messe] est légi­time » (Communicantes, août 1985).[]
  6. Le Mascaret n° 290 (novembre 2007), p. 6–7.[]
  7. Abbé Christophe Héry dans Le Mascaret n° 281 (juillet-​août 2006), p. 6–7. A ren­fort de cita­tions tron­quées, notre abbé essaye de prou­ver que Benoît XVI donne une lec­ture de Dignitatis huma­nae conforme à la Tradition. Pour reprendre l’ex­pres­sion de M. l’ab­bé Célier, « Il n’est plus ques­tion pour [lui] de cher­cher à inter­pré­ter Dignitatis humanæ dans le sens de la Tradition, mais plu­tôt de cher­cher à inter­pré­ter la Tradition dans le sens de Dignitatis humanæ (L’Eglise déchi­réeFideliter, 1994, p. 68). En réa­li­té, le récent Discours à l’ONU du 18 avril 2008 (où on lit que le prin­cipe de la liber­té reli­gieuse vise « à obte­nir la liber­té pour tout croyant » et que « la pleine garan­tie de la liber­té reli­gieuse ne peut pas être limi­tée au libre exer­cice du culte, mais doit prendre en consi­dé­ra­tion la dimen­sion publique de la reli­gion ») dis­sipe toute illu­sion.[]
  8. « le pape rend ain­si à l’Eglise catho­lique romaine, après tant d’hu­mi­lia­tions subies, sa place unique d’é­pouse du Christ Jésus (.) Deo gra­tias, l’in­ter­pré­ta­tion authen­tique du Concile a bel et bien com­men­cé (.) Ainsi, les ortho­doxes consti­tuent de véri­tables églises par­ti­cu­lières tou­jours », « Réponse à des ques­tions (Document de la Sacrée congré­ga­tion pour la doc­trine de la foi du 29 juin 2007) » dans Blog de l’ab­bé Philippe Laguérie du 25 juillet 2007.[]
  9. Revue Wdroze, jan­vier 1999 cité dans Le com­bat de la foi n°127, 1er sep­tembre 1999, p.7. Plus récem­ment, « lorsque la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X a publié en 2004 une étude de 45 p. inti­tu­lée De l’œ­cu­mé­nisme à l’a­po­sta­sie silen­cieuse, cosi­gnée par nos quatre évêques, le dis­trict de France de la FSSP y a répon­du par une cri­tique de 100 p. (.) jus­ti­fiant les 25 ans d’œ­cu­mé­nisme de Jean-​Paul II, y com­pris Assise » (abbé P. FrançoisBulletin du prieu­ré Marie Reine, déc. 2006).[]
  10. Comme le disait jus­te­ment l’ab­bé de Tanouärn le 1er avril 2008 sur le forum catho­lique en par­lant de la Fraternité Saint-​Pie X : « si l’ins­tru­ment est si effi­cace, c’est qu’il n’est pas lié à la hié­rar­chie catho­lique offi­cielle ». Quant à l’IBP, le car­di­nal Ricard dans La Croix du 11 sep­tembre 2005, rap­pe­lait « que pour ce qui est de l’a­pos­to­lat, ils dépendent de l’é­vêque dio­cé­sain, et ils sont obli­gés d’a­voir l’ac­cord de l’é­vêque dio­cé­sain pour toute implan­ta­tion dans un dio­cèse ».[]
  11. Cf. pour les docu­ments, Fideliter n°132, septembre-​octobre 1999.[]
  12. DC n°2367, p. 970. c’est aus­si le point de vue de l’ab­bé Ribeton, supé­rieur du dis­trict de France de la FSSP pour qui celle-​ci est un pont entre la FSSPX et l’Eglise (inter­ven­tion sur Le Forum catho­lique du 13/​11/​2006). Un petit exemple très concret illus­tre­ra cette « bonne volon­té épis­co­pale ». L’Institut du Christ-​Roi s’est ins­tal­lé à Libreville (Gabon) à 100 mètres de notre mis­sion saint Pie X. Comme si l’é­vêque ne pou­vait pas leur don­ner une paroisse plus éloi­gnée et comme si l’Afrique n’é­tait pas assez grande et dépour­vue de prêtres pour ne pas tom­ber dans un esprit de concur­rence mes­quine ![]
  13. « En 1984, Dom Gérard a été appe­lé à une ren­contre avec le pré­sident de la Confédération béné­dic­tine, à Florence, en Italie. Là, on lui a pro­po­sé de rece­voir les appro­ba­tions de Rome pour la vie monas­tique et pour la messe tra­di­tion­nelle, si, en échange, il accep­tait de ne plus aller à Ecône. A son retour, Dom Gérard en a par­lé à la com­mu­nau­té qui lui a répon­du que cette pro­po­si­tion était une tra­hi­son, et que lui n’é­tait pas un traître (.) Quatre ans plus tard (.) Dom Gérard a reçu le car­di­nal Mayer qui est rapi­de­ment venu au Barroux pro­po­ser un accord après le refus de Monseigneur Lefebvre de conti­nuer les négo­cia­tions. Pour faire un accord avec Rome, le Barroux devait s’é­loi­gner de Monseigneur Lefebvre. La même pro­po­si­tion qu’en 1984, néan­moins avec une réponse dif­fé­rente de Dom Gérard. Cette fois, la mitre et la crosse de l’ab­bé étaient en jeu. Rome savait séduire pour gagner. Et la tra­hi­son arri­va » (Dom Laurenco Fleichman osbLes marques de la souf­france : paroles d’un fils de Dom Gérard). Dans le même esprit, il suf­fit de relire le Motu pro­prio Ecclesia Dei afd­lic­ta tout impré­gné de cet esprit.[]
  14. Citons pour mémoire, l’ar­ticle de M.l’abbé de Montjoye, (des­ser­vant actuel de l’é­glise Saint-​André-​Saint-​Maurice de Charenton) « Peut-​on assis­ter à la messe et rece­voir les sacre­ments d’un prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie‑X ? » dans la revue Tu es Petrus (bul­le­tin des amis de la FSSP) n°82 (2002, p. 18–38), qui s’é­ver­tuait à mon­trer que les prêtres de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie‑X don­naient des sacre­ments sacri­lèges.[]
  15. Dernièrement M. l’ab­bé Aulagnier (dans Item, Un regard sur le monde poli­tique et reli­gieux au 22 février 2008, n° 160) s’en pre­nait à la phrase sui­vante de M. l’ab­bé Bourrat (dans Le Chardonnet n°235) dont voi­ci la teneur condam­nable : « La défense de la foi catho­lique ne peut se limi­ter, sous peine d’é­chec à plus ou moins loin terme, à la seule défense de la messe tra­di­tion­nelle ». C’est pour­tant ce que rap­pe­lait Mgr Lefebvre : « Ce n’est pas une petite chose qui nous oppose. Il ne suf­fit pas qu’on nous dise : « Vous pou­vez dire la messe ancienne, mais il faut accep­ter cela [le Concile] ». Non, ce n’est pas que cela [la messe] qui nous oppose, c’est la doc­trine. C’est clair. C’est ce qui est grave chez dom Gérard et c’est ce qui l’a per­du. Dom Gérard n’a tou­jours vu que la litur­gie et la vie monas­tique. Il ne voit pas clai­re­ment les pro­blèmes théo­lo­giques du Concile, de la liber­té reli­gieuse. Il ne voit pas la malice de ces erreurs » – Mgr Lefebvre, « Je pose­rai mes condi­tions à une reprise éven­tuelle des col­loques avec Rome » dans Fideliter n° 66 (septembre-​octobre 1988), p. 12–14.[]
  16. Excepté Campos avec Mgr Rifan.[]
  17. Pour don­ner un exemple plus fort, ce n’est parce que des païens peuvent être fort ser­viables qu’il est bon d’être païen.[]
  18. « A la racine de cet acte schis­ma­tique, on trouve une notion incom­plète et contra­dic­toire de la Tradition. Incomplète parce qu’elle ne tient pas suf­fi­sam­ment compte du carac­tère vivant de la Tradition. » (Ecclesia Dei Adflicta du 2/​7/​1988).[]
  19. Nous sommes conscients de ne pas avoir ici répon­du à l’ob­jec­tion clas­sique du schisme et de l’ex­com­mu­ni­ca­tion. Ces objec­tions ont été ample­ment réfu­tées pour ne pas y reve­nir. Nous ren­voyons à ces ouvrages, en par­ti­cu­lier celui publié par Le cour­rier de Rome, inti­tu­lé La Tradition excom­mu­niée, 2001. De même, il y aurait beau­coup à dire sur la tac­tique révo­lu­tion­naire d’une Rome qui veut résoudre la ques­tion sur le plan pra­tique en ren­voyant le pro­blème doc­tri­nal sur un ter­rain ambi­gu (comme l’ex­pres­sion équi­voque d” « atti­tude cri­tique posi­tive envers le Concile »). Cf. Le com­bat de la foi n°135.[]

FSSPX

M. l’ab­bé François-​Marie Chautard est l’ac­tuel rec­teur de l’Institut Saint Pie X, 22 rue du cherche-​midi à Paris.