Le retour du RP Teilhard de Chardin ?

Dans une lettre adres­sée le 7 octobre 1929 à l’abbé Christophe Godefroy, le père Teilhard de Chardin, jésuite, écrivait : 

il m’a par­fois semble que, dans l’Eglise actuelle, il y a trois pierres péris­sables dan­ge­reu­se­ment enga­gées dans les fon­da­tions : la pre­mière est un gou­ver­ne­ment qui exclut la démo­cra­tie ; la deuxième est un sacer­doce qui exclut et mini­mise la femme ; la troi­sième est une révé­la­tion qui exclut, pour l’avenir, la Prophétie.

Lettres inédites, Le Rocher, 1988, p.80

François, l’accomplissement de Teilhard ?

Pour cer­tains, ce pas­sage montre com­bien le père Teilhard de Chardin était en avance sur son temps. Pour cette rai­son, il fut incom­pris de son vivant par tous ceux qui étaient aux com­mandes de l’Eglise. Pour eux, le célèbre jésuite fut lui-​même un pro­phète, l’évolution actuelle de l’Eglise prou­vant qu’il avait eu rai­son avant tous les autres. Il est en effet éton­nant de voir com­bien le pape François semble l’instrument ultime pour extir­per ces ≪ trois pierres péris­sables dan­ge­reu­se­ment enga­gées dans les fon­da­tions ≫ de l’Eglise. Il existe beau­coup d’autres paroles et écrits du pape François qui montrent com­bien il est impré­gné du mode de pen­sée teil­har­dien (ne serait-​ce que son ency­clique Laudato Si ou il cite expres­sé­ment le père Teilhard de Chardin).

La mise en place d’une struc­ture syno­dale est clai­re­ment le fait du pape François. La col­lé­gia­li­té avait ouvert le gou­ver­ne­ment de l’Eglise uni­ver­selle aux évêques. La syno­da­li­té l’ouvre a tout le peuple de Dieu et abou­tit à une nou­velle Église, démocratique.

Le synode sur l’Amazonie semble bien être le moyen d’extirper « la deuxième pierre enga­gée dans les fon­da­tions » de l’Eglise. La volon­té du pape semble être de ban­nir désor­mais un sacer­doce qui « exclut et mini­mise la femme ».

Dans un ser­mon date de sa pre­mière année de pon­ti­fi­cat (16 décembre 2013), le pape François s’exprimait ain­si : « Quand dans le peuple de Dieu, la pro­phé­tie fait défaut, il manque quelque chose : il manque la vie du Seigneur ! Et la force tombe sur la léga­li­té. Quand, dans le peuple de Dieu, n’existe pas de pro­phé­tie, le vide qui existe laisse la place au clé­ri­ca­lisme. Que notre prière soit celle-​ci : Seigneur, que nous n’oublions pas ta pro­messe ! Nous tous bap­tises, nous sommes pro­phètes. Que nous ayons la force d’aller de l’avant ! Que nous ne nous enfer­mions pas dans les léga­li­tés qui ferment les portes ! Seigneur, libère ton peuple de l’esprit du clé­ri­ca­lisme et aide-​le par l’esprit de pro­phé­tie ».

En fait, le pon­ti­fi­cat du pape François n’est que l’aboutissement des idées du concile Vatican II et se trouve dans la conti­nui­té de ses pré­dé­ces­seurs post­con­ci­liaires. C’est ce que montre admi­ra­ble­ment M. l’abbé Pagliarani, Supérieur General de notre Institut, dans l’excellent entre­tien qu’il a don­né le 12 sep­tembre dernier.

Faisant suite à cin­quante années de reformes post­con­ci­liaires, le pape régnant pré­pare l’avènement du « Christ cos­mique » si cher au Père Teilhard.

Teilhard, une pensée non catholique

Mais comme l’écrivait le phi­lo­sophe Marcel de Corte, « le teil­har­disme n’est ni en marge du catho­li­cisme, ni en bor­dure du chris­tia­nisme et il n’est pas davan­tage une héré­sie chré­tienne. Il est une autre reli­gion qui uti­lise Notre-​Seigneur Jésus-​Christ comme un palier de « l’ascension cos­mique ». […] Je tiens que le Révérend Père Teilhard de Chardin, prêtre de la Compagnie de Jésus, n’a jamais été chré­tien de pen­sée ni d’âme. Il n’a jamais cru, au sens propre du mot croire, au Christ des Ecritures. Comme l’écrit avec per­ti­nence et modé­ra­tion le R. P. Guerard des Lauriers o.p., pro­fes­seur à l’Université pon­ti­fi­cale du Latran, » une doc­trine qui implique comme sa consé­quence néces­saire d’identifier le Christ a l’âme du cos­mos maté­riel en évo­lu­tion, cette doctrine-​là est anti-​chrétienne… Car la foi chré­tienne pro­fesse que le Verbe de Dieu a assume per­son­nel­le­ment une Humanité issue non du cos­mos, mais d’une créa­ture humaine pré­des­ti­née per­son­nel­le­ment par Dieu en vue de cette mis­sion… Alors il faut le décla­rer tout net : le Christ de Teilhard, c’est la figure contem­po­raine de l’antéchrist « .»1

A l’un de ses amis, le Père Auguste Valensin, le Père Teilhard avait écrit : ” Je rêve d’un nou­veau saint François ou d’un nou­veau saint Ignace, qui vien­drait nous pré­sen­ter le nou­veau genre de vie chré­tienne (plus mêlé au monde et plus déta­ché, à la fois) dont nous avons besoin”. Il est mal­heu­reu­se­ment fort pos­sible que le concile Vatican II ait engendre ce nou­veau “saint” François rêvé par le père Teilhard.

Abbé Thierry Legrand, prêtre de la Fraternité Saint-​Pie X.

Source : La Porte Latine du 30 octobre 2019

  1. Revue Itinéraires n°91, mars 1965, La reli­gion teil­har­dienne par Marcel de Corte, pages 144 et 149 []