Pourquoi les discussions doctrinales avec Rome sont elles nécessaires ?

Chers fidèles vous l’avez appris récem­ment, enfin Rome accepte d’étudier avec la Fraternité le pro­blème réel, le pro­blème de fond qui est- retenez-​le bien – doc­tri­nal et non cano­nique.

En effet, une recon­nais­sance cano­nique de la Fraternité par l’Eglise conci­liaire est actuel­le­ment très pro­blé­ma­tique car nous com­bat­tons depuis la fon­da­tion de notre Fraternité (1970) les erreurs doc­tri­nales du concile, erreurs qui ne sont pas si dif­fé­rentes des erreurs du pas­sé et qui ont été maintes fois condam­nées par le Magistère de Rome au 19ème et 20ème siècle. Si, à tout hasard, une recon­nais­sance cano­nique de la FSSPX devait arri­ver plus tôt que pré­vue par la Rome actuelle cela signi­fie­rait qu’elle accep­te­rait une sorte « de guerre civile » dans son sein car la doc­trine moder­niste et la doc­trine tra­di­tion­nelle s’opposent de manière irréductible.

Comme toutes les guerres civiles cela se ter­mi­ne­ra tou­jours, tôt ou tard, par un vain­queur et un vain­cu ou, si vous pré­fé­rez, quelqu’un qui expulse et l’autre qui est expul­sé. A moins qu’il y ait conver­sion réelle à la vraie foi de ceux qui sont dans l’erreur : ce qui n’est pas pour nous déplaire car nous savons que le Christ a pro­mis la vic­toire à son Eglise qui seule est vraie et sainte.

Jusqu’ici on nous disait et répé­tait « obéis­sez d’abord on ver­ra ensuite pour vous don­ner une légi­ti­mi­té à vous aus­si comme aux autres ral­liés ». Nous avons tou­jours dit : Ce n’est pas la bonne méthode car le pro­blème est doc­tri­nal. Rome a enfin com­pris notre point de vue en accep­tant ces débats sur les textes mêmes du concile. Il est sou­hai­table que cet exemple de Rome fasse que les évêques de France se penchent eux aus­si sur le pro­blème de la doc­trine, alors la solu­tion des dif­fi­cul­tés en sera facilité.

Pourquoi obéir d’abord, c’est-à-dire avant la levée des dif­fi­cul­tés doc­tri­nales, n’était pas bon ? Tout le monde sait pour­tant que l’obéissance est bonne, sur­tout dans la Sainte Eglise qui est une Société divine hié­rar­chique et auto­ri­taire. C’est vrai, l’obéissance est bonne, très bonne même. Insistons encore davan­tage et ajou­tons qu’elle est tou­jours bonne car c’est une ver­tu et une ver­tu n’est jamais mau­vaise. Cependant il ne faut pas man­quer d’ajouter, l’obéissance est certes tou­jours bonne mais elle n’est pas sys­té­ma­ti­que­ment bonne. Il y a des cas excep­tion­nels où obéir n’est pas ver­tueux, et dans la Sainte Eglise le manque de ver­tu fait désordre car l’Eglise est une Société divine qui est char­gée aus­si de nous incul­quer le dis­cer­ne­ment pour agir sain­te­ment. L’Eglise ne cano­ni­se­ra jamais des robots très obéis­sants. En fait c’est une simple ques­tion de morale. Tout le monde com­prend qu’un enfant doit tou­jours obéir à son père mais cepen­dant dans cer­tains cas bien pré­cis et gra­ve­ment pec­ca­mi­neux il doit résis­ter (et cette résis­tance n’est pas man­quer à l’obéissance parce que ce n’est jamais la ver­tu d’obéissance qui peut nous obli­ger à faire le péché).

Pour nous, depuis le début de la contro­verse (1974), il est impos­sible d’obéir en conscience à l’Eglise conci­liaire puisque ce que l’on nous demande va contre la foi, contre la doc­trine catho­lique. Encore une fois c’est un pro­blème doc­tri­nal (cela touche à la foi) et non cano­nique ( d’ordre dis­ci­pli­naire). Nous disons : il y a dans le Concile Vatican II des erreurs qui vont contre la foi, des erreurs qui dimi­nuent l’expression de la foi ou des erreurs dont les consé­quences ultimes anéan­tissent la foi. Voilà pour­quoi les sacres de Mgr Lefebvre de 1988 n’avaient pas besoin d’une appro­ba­tion cano­nique des conci­liaires car il ne s’agissait pas là aus­si d’un pro­blème d’ordre cano­nique comme le recon­naît main­te­nant (et enfin) Benoît XVI, mais doctrinal.

En fait, c’est une défor­ma­tion que l’on remarque chez les évêques aujourd’hui et qui est un résul­tat de la col­lé­gia­li­té : l’Eglise conci­liaire est une orga­ni­sa­tion qui est trop pen­chée sur l’aspect cano­nique des choses et elle n’est pas suf­fi­sam­ment ver­sée dans la doc­trine1. Son prin­cipe fon­da­men­tal peut s’exprimer de la sorte « Tout ce qui est cano­nique est légi­time », donc les messes-​clowns (en cer­tains endroits cela se pra­tique avec la com­plai­sance de l’évêque) sont légi­times, les funé­railles faites par les laïcs sont légi­times, la com­mu­nion don­née par les laïcs pareil….etc. Pour la FSSPX ce qui compte c’est la doc­trine d’abord. Tout ce qui est juri­dique, cano­nique n’est légi­time que si pre­miè­re­ment la doc­trine est vraie, pure et sainte. Ainsi notre prin­cipe à nous peut se résu­mer « Tout ce qui est cano­nique est légi­time dans la mesure où il n’y a pas d’erreur doc­tri­nale à la base » : Le pro­blème est doc­tri­nal dit main­te­nant le Pape Benoît XVI et nous aus­si depuis tou­jours. Il faut savoir que dans les années soixante la méthode de gou­ver­ne­ment de la hié­rar­chie a chan­gé. L’obéissance à son évêque est deve­nu le der­nier mot d’une quel­conque affaire pour la simple rai­son qu’il pos­sède l’autorité cano­nique. Mais pour qu’une telle chose soit rece­vable il faut, chers fidèles, que la doc­trine de l’évêque soit irré­pro­chable car le légi­time ce n’est pas uni­que­ment ce qui est per­mis et vou­lu par l’autorité légi­time. Ce serait la porte ouverte à tous les abus. Il faut en plus le res­pect de la doc­trine de tou­jours. Sinon l’obéissance devient la reine des ver­tus, supé­rieure à la ver­tu de foi et c’est encore une énorme bizar­re­rie : une ver­tu morale est deve­nue supé­rieure à une ver­tu théo­lo­gale. Un exemple va vous faire com­prendre cette véri­té. Pourquoi sommes-​nous prêts à obéir à Jésus-​Christ aveu­glé­ment ? Parce qu’il est le Fils de Dieu et nous le croyons fer­me­ment (nous avons la vraie doc­trine c’est-à-dire la grâce de la foi qui nous fait admettre les réa­li­tés sur­na­tu­relles), mais nous ne croyons pas en la divi­ni­té Jésus-​Christ par obéis­sance à notre évêque ou aux Papes : ce serait pure folie.
Au bout de qua­rante ans, à Rome on s’en aper­çoit et on com­mence à com­prendre le mal­en­ten­du, donc on pro­gresse : réjouissons-nous !

Comprenez : si nous nous avions dit « il n’y a pas de pro­blème doc­tri­nal dans Vatican II », alors nous aurions dû comme les fra­ter­ni­tés ral­liées accep­ter au moins en prin­cipe la nou­velle messe, accep­ter au moins en prin­cipe que l’on prêche dans nos églises la valeur pour le salut de toutes les reli­gions. Un tel libé­ra­lisme est impos­sible car il a été moult fois condam­né dans les ency­cliques des Papes. Sachez-​le : Il y a des erreurs doc­tri­nales inad­mis­sibles dans le concile Vatican II : c’est ce qui sera démon­tré dans les mois à venir à Rome dans les bureaux du Saint Office où sont par­tis toutes les condam­na­tions magni­fiques des héré­sies pro­tes­tantes, moder­nistes et libé­rales qui perdent les âmes.

Fasse que la véri­té touche non seule­ment les intel­li­gences de tous mais aus­si les cœurs, il y va du salut éter­nel d’un très grand nombre.

Abbé Pierre Barrère, In Le Sainte Anne n° 213 de novembre 2009

  1. Un Cardinal a bien dit au sujet de « l’affaire Lefebvre » : « Je pré­fère avoir tort avec le Pape que rai­son contre le Pape ». Quant à nous nous pré­fé­rons avoir rai­son contre le Pape même s’il est très vrai que nous pré­fé­rons encore davan­tage avoir rai­son avec lui et avec tous les évêques (et même sous leur auto­ri­té). []