Sermon de Mgr Lefebvre – Prise d’habit – 5 avril 1980

Mes bien cher frères,

Dans quelques ins­tants vous allez rece­voir l’habit reli­gieux de novice qui sera aus­si celui du frère. Profitez de cette occa­sion pour jeter un regard sur le pas­sé, sur toutes les grâces que le Bon Dieu vous a don­nées et qui vous ont conduit aujourd’hui à Écône, dans la Fraternité, pour deve­nir reli­gieux, frère de la Fraternité.

Je suis bien cer­tain que vous ren­dez grâces au Bon Dieu d’avoir eu une famille aus­si chré­tienne, aus­si pro­fon­dé­ment atta­chée à sa foi et qui dans les cir­cons­tances actuelles mani­feste encore son atta­che­ment à Notre Seigneur, son atta­che­ment à l’Église et à la foi de l’Église de tou­jours. C’est là une grâce que le Bon Dieu vous a faite et dont il faut le remer­cier aujourd’hui. Si vos parents n’avaient pas eu cette foi, peut-​être ne seriez-​vous pas ici aujourd’hui.

Remerciez aus­si le Bon Dieu d’avoir eu déjà dans le sein de la Fraternité, des grâces qui vous ont per­mis de voir ce qu’était cette famille dans l’Église, son rôle et le rôle que vous aurez à jouer dans cette famille, afin d’accomplir la vraie voca­tion du reli­gieux frère.

Et pen­dant ce novi­ciat, vous aurez alors à consi­dé­rer à la fois l’avenir et le pré­sent. L’avenir parce que vous aurez à connaître d’une manière plus pro­fonde, plus exacte, ce qu’est le reli­gieux, ce qu’est un reli­gieux et ce qu’est un frère religieux.

Religieux, vous aurez à vous atta­cher à connaître les ver­tus fon­da­men­tales du reli­gieux, car vous aurez à pro­non­cer à la fin de votre novi­ciat, les vœux de reli­gion, de pau­vre­té, de chas­te­té et d’obéissance. Les grandes ver­tus essen­tielles du reli­gieux et de ceux qui se consacrent à Dieu pour la vie. Je suis sûr que vous le ferez de tout votre cœur. Et vous aurez comme conso­la­tion d’avoir auprès de vous des prêtres qui vous ensei­gne­ront ce que sont ces ver­tus. Et qui vous ensei­gne­ront que pour acqué­rir ces ver­tus, vous devez vous appro­cher de Notre Seigneur Jésus-Christ.

Approcher de Notre Seigneur Jésus-​Christ en étant près de Lui, dans cette mai­son où se trouvent nos frères, il y a des cha­pelles ; il y a le Saint Sacrement. Vous vous trou­ve­rez donc auprès de Notre Seigneur pen­dant une année. Vous allez le prier. Vous allez Lui deman­der les grâces dont vous avez besoin. Vous allez médi­ter sur les ver­tus de Notre Seigneur. Vous allez pro­fi­ter des céré­mo­nies, de la litur­gie, autant de grâces que le Bon Dieu va vous don­ner, dont vous pro­fi­te­rez, j’en suis sûr.

Et puis, vous médi­te­rez sur votre apos­to­lat futur. L’apostolat du frère, c’est d’abord l’apostolat par l’exemple, l’exemple de la vie reli­gieuse, l’exemple pour ses frères, pour ceux qui l’entourent, d’une vie reli­gieuse convain­cue, d’une vie rem­plie de pié­té, de don à Dieu, d’amour de Dieu, d’amour de Notre Seigneur Jésus-Christ.

Et puis l’exemple aus­si qui déborde d’ailleurs de nos mai­sons. Vous aurez à prendre des contacts avec les fidèles. Peut-​être aurez-​vous la joie d’enseigner à quelques enfants le caté­chisme. Vous aurez à mon­trer par consé­quent l’exemple des ver­tus reli­gieuses à tous ceux que vous appro­che­rez, à tous ceux qui vous approcheront.

Encore là un bel apos­to­lat mais vous aurez sur­tout, l’apostolat de la prière. La prière avec vos confrères prêtres, vos confrères frères, prier pour la rédemp­tion des âmes et accom­plir aus­si dans cette inten­tion. Et c’est cela que vous devrez cher­cher sur­tout à bien com­prendre que toutes vos actions plus tard seront sanc­ti­fiées, dans la mesure où vous serez un saint Religieux. Toutes vos actions seront un hom­mage au Bon Dieu, une louange au Bon Dieu, une prière en union avec Notre Seigneur, avec sa vie ici-​bas. Notre Seigneur aus­si a vécu, en défi­ni­tive comme un frère reli­gieux, dans la mai­son de Nazareth, pen­dant trente années. Il n’a même pas fait d’apostolat direct. Il a même pas­sé la plus grande par­tie de sa vie, dans l’humilité, dans l’esprit de prière, dans l’esprit de louange, tra­vaillant de ses mains avec saint Joseph, avec la très Sainte Vierge Marie.

Voilà le bel exemple que Notre Seigneur nous a don­né à tous et vous a don­né par­ti­cu­liè­re­ment à vous qui avez choi­si la voca­tion de frère.

Alors c’est dans cet esprit que vous devez tou­jours tra­vailler, quelque tra­vail que vous fas­siez. Que ces tâches aus­si humbles que pos­sible, eh bien vous devez faire cela, avec l’intention avec laquelle Notre Seigneur a tra­vaillé dans la mai­son de Nazareth.

Et alors vous vous sanc­ti­fie­rez et vous sanc­ti­fie­rez les autres. Et vous aurez une vie heu­reuse, une vie pai­sible, une vie régu­lière, une vie qui sera toute rem­plie de la joie d’être uni à Dieu, d’aimer Dieu et d’aimer vos frères.

Voilà la belle vie de reli­gieux et du frère.

Alors nous allons tous prier ici, tous ceux qui sont pré­sents, tous ceux qui s’unissent à vous, qui se réjouissent de vous voir prendre la sou­tane. Nous allons prier avec vous, pour que vous rece­viez ces grâces dès à pré­sent et que vous rece­viez les grâces par­ti­cu­lières dont vous aurez besoin au cours de votre noviciat.

Nous le deman­de­rons à la très Sainte Vierge Marie, Mère de Jésus, qui a vécu avec Lui à Nazareth, et qui par consé­quent vous appren­dra ce qu’étaient vrai­ment la vie et les pen­sées de Jésus à Nazareth.

Au nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit. Ainsi soit-il.

Fondateur de la FSSPX

Mgr Marcel Lefebvre (1905–1991) a occu­pé des postes majeurs dans l’Église en tant que Délégué apos­to­lique pour l’Afrique fran­co­phone puis Supérieur géné­ral de la Congrégation du Saint-​Esprit. Défenseur de la Tradition catho­lique lors du concile Vatican II, il fonde en 1970 la Fraternité Saint-​Pie X et le sémi­naire d’Écône. Il sacre pour la Fraternité quatre évêques en 1988 avant de rendre son âme à Dieu trois ans plus tard. Voir sa bio­gra­phie.