Suppression de la Commission Ecclesia Dei : mise au point d’un évêque

Monseigneur de Moulins-​Beaufort est arche­vêque de Reims depuis le mois d’août 2018 et il est pré­sident de la Commission doc­tri­nale de la Conférence des Evêques de France. Il y a deux mois, il a publié un article sur le site de la confé­rence épis­co­pale fran­çaise au sujet de la récente déci­sion du pape François de sup­pri­mer la Commission Ecclesia Dei. On sait que celle-​ci avait été ins­ti­tuée par le pape Jean-​Paul II pour encou­ra­ger les prêtres et les fidèles à s’éloigner de Monseigneur Lefebvre et de la Fraternité Saint-​Pie X. Son nom même repre­nait la bulle qui avait pré­ten­du excom­mu­nier l’évêque qui avait sau­vé la messe traditionnelle.

Monseigneur de Moulins-​Beaufort constate que les com­mu­nau­tés dites ral­liées sont inté­grées dans les dio­cèses à la dif­fé­rence de la Fraternité qui, elle, conti­nue à reje­ter le concile Vatican II : « d’autre part (le pape) remet en lumière la néces­si­té de dis­cus­sions doc­tri­nales appro­fon­dies avec la Fraternité Saint- Pie X. Les points en jeu ne sont pas des détails. » Les évêques de France recon­naissent donc main­te­nant que la ques­tion est doc­tri­nale. Il y a une réelle évo­lu­tion par rap­port aux accu­sa­tions de schisme et de déso­béis­sance. Auparavant la hié­rar­chie se conten­tait d’appeler à la sou­mis­sion puisque, selon elle, le concile Vatican II n’avait nul­le­ment chan­gé l’enseignement de l’Église.

Monseigneur de Moulins-​Beaufort lui-​même donne trois exemples de l’opposition de l’Église conci­liaire avec l’enseignement traditionnel :

  • « Il ne suf­fit pas d’insister sur la réa­li­té sacri­fi­cielle de l’Eucharistie, encore faut-​il pré­ci­ser ce qu’est ce sacri­fice qui, en régime chré­tien, ne sau­rait être une pro­lon­ga­tion des sacri­fices païens ni même des sacri­fices du Temple. » Avec le concile de Trente, la Fraternité enseigne en effet que la messe est « vrai­ment et pro­pre­ment » un sacri­fice puis­qu’elle réitère l’immolation du Calvaire par la double consé­cra­tion qui sépare réel­le­ment et sacra­men­tel­le­ment le Corps et le Sang du Christ. À la messe, Notre-​Seigneur ne souffre pas mais Il est réel­le­ment pré­sent dans son état de vic­time de pro­pi­tia­tion. La men­tion faite par Monseigneur de Moulins-​Beaufort des rites païens est péjo­ra­tive sous sa plume, mais nous pou­vons la reprendre en affir­mant, avec toute la Tradition, que la messe offre un vrai sacri­fice à Dieu comme les peuples ido­lâtres en offraient aux démons. La notion de sacri­fice est natu­relle et il n’est pas éton­nant qu’on la retrouve dans les fausses reli­gions. De fait, il a fal­lu la des­truc­tion du Temple de Jérusalem pour empê­cher les Juifs d’offrir ceux qui avaient été pres­crits par Dieu et qui ont trou­vé leur accom­plis­se­ment dans celui du Calvaire. L’Église conci­liaire ne croit plus à cela. Selon le caté­chisme dit de l’Église catho­lique de 1992, l’Eucharistie n’est un sacri­fice que dans la mesure où elle est la com­mé­mo­ra­tion ou « la pro­cla­ma­tion » litur­gique du mys­tère pas­cal dont l’un des élé­ments est le sacri­fice du Golgotha.
  • « Il ne suf­fit pas de se récla­mer de la Tradition, encore faut-​il rendre clair ce qu’est la Tradition du Christ à ses Apôtres qui ne sau­rait n’être que le poids du pas­sé s’imposant à toutes les géné­ra­tions. » La trans­mis­sion de la foi inchan­gée depuis les apôtres n’est un poids que pour les adeptes de la phi­lo­so­phie de « l’action » et du « deve­nir » qui est une des sources du moder­nisme. La Fraternité est fière au contraire de pro­fes­ser la foi apos­to­lique qui a tou­jours été ensei­gnée par l’Église. Monseigneur de Moulins-​Beaufort croit à la Tradition que l’on qua­li­fie de « vivante » depuis le concile Vatican II pour expli­quer les chan­ge­ments opé­rés dans la doc­trine de l’Église. Elle consiste en une « relec­ture » ou une « her­mé­neu­tique » des textes du magis­tère de tou­jours pour leur faire dire le contraire de ce qu’ils affirment.
  • « Il ne suf­fit pas d’affirmer que la reli­gion catho­lique est la seule vraie, encore faut-​il expli­quer en quoi cette véri­té exclu­sive honore la puis­sance sal­vi­fique du Christ qui a acquis le pou­voir de répandre son Esprit- Saint en tous les hommes pour atti­rer tous les hommes. » Monseigneur de Moulins-​Beaufort pro­fesse ici sa foi dans une Église du Christ qui ne fait que sub­sis­ter dans l’Église catho­lique puisque, selon l’enseignement conci­liaire, elle aurait une ampli­tude bien plus large. Le Saint-​Esprit uti­li­se­rait toutes les reli­gions pour sau­ver les âmes. La nou­velle évan­gé­li­sa­tion est la mort de l’esprit mis­sion­naire. La Fraternité Saint-​Pie X, quant à elle, garde la foi dans l’Église catho­lique qui EST l’Église du Christ. Selon la doc­trine tra­di­tion­nelle, elle enseigne que les infi­dèles ne peuvent se sau­ver que mal­gré leur fausse reli­gion et jamais grâce à elle, et qu’ils ne le feront que très dif­fi­ci­le­ment, même s’ils sont de bonne foi, étant pri­vés des moyens ordi­naires de salut.

Nous pou­vons remer­cier le suc­ces­seur de saint Rémi de cette mise au point !

Sources /​La Porte Latine du 5 mars 2019