Fraternité Saint-​Pie X : Deux avis divergents à propos des relations avec Rome

Le 27 avril 2012, inter­ro­gé par le maga­zine fran­çais Le Pèlerin, Mgr Gérard Defois (à droite sur la pho­to), arche­vêque émé­rite de Lille, consi­dère qu’une « éven­tuelle réin­té­gra­tion au sein de l’Eglise catho­lique des membres de la Fraternité Saint-​Pie X » est un enjeu mineur. « On com­prend bien la volon­té du Saint-​Siège de trou­ver une solu­tion hono­rable pour cha­cun afin de ne pas faire durer inuti­le­ment le schisme », déclare-​t-​il en ajou­tant : « le tout est de savoir en quels termes. Cela ne peut pas se faire au détri­ment des avan­cées du concile Vatican II, au risque de remettre en cause l’infaillibilité pon­ti­fi­cale elle-​même ». – On igno­rait jusqu’à pré­sent que ce concile pas­to­ral enga­geait « l’infaillibilité pon­ti­fi­cale elle-même ».

Et Mgr Defois de déplo­rer : « Je regrette la publi­ci­té exces­sive faite autour de ces dis­cus­sions. Cela reste fina­le­ment un enjeu mineur pour l’Eglise d’aujourd’hui. La vraie prio­ri­té n’est-elle pas l’évangélisation des nou­velles géné­ra­tions évo­luant dans une culture déchris­tia­ni­sée ? » Et d’insister : « Je le répète : nous sommes là sur une ques­tion mar­gi­nale, même si elle reste for­te­ment symbolique ».

Le même jour, 27 avril, Mgr Nicola Bux, consul­teur à la Congrégation pour la doc­trine de la foi et au Bureau des célé­bra­tions litur­giques du pape, répon­dait dans Il Foglio aux ques­tions des jour­na­listes Alessandro Gnocchi et Mario Palmaro. Il tenait des pro­pos très dif­fé­rents de ceux de Mgr Defois : « ceux qui ont iso­lé de l’histoire de l’Eglise le concile Vatican II et qui l’ont sur­éva­lué par rap­port à ses inten­tions ne se privent pas de cri­ti­quer, par exemple, le concile Vatican I ou le concile de Trente. Certains pré­tendent que la Constitution dog­ma­tique Dei Filius de Vatican I a été rem­pla­cée par Dei Verbum de Vatican II, c’est de la ‘fan­ta­théo­lo­gie’. Il me semble au contraire que la bonne théo­lo­gie est celle qui pose le pro­blème de la valeur des docu­ments, de leur ensei­gne­ment, de leur signi­fi­ca­tion : dans le concile Vatican II, il existe des docu­ments de valeurs dif­fé­rentes et, par consé­quent, d’une force de contrainte dif­fé­rente, qui per­mettent dif­fé­rents degrés de discussion.

Le Pape, quand il était encore le car­di­nal Ratzinger, en 1988, a par­lé du risque de trans­for­mer Vatican II en ‘super­dogme’ ; aujourd’hui, avec ‘l’herméneutique de la réforme dans la conti­nui­té’, il a four­ni un cri­tère pour affron­ter la ques­tion, pas pour la fer­mer. Il ne faut pas être plus papiste que le Pape. Les conciles, tous les conciles et pas seule­ment Vatican II, doivent être reçus avec obéis­sance, mais on peut éva­luer intel­li­gem­ment ce qui appar­tient à la doc­trine et ce qui doit être cri­ti­qué. » – Pour ce théo­lo­gien ita­lien, répu­té proche de Benoît XVI, l’herméneutique de la réforme dans la conti­nui­té per­met d’ouvrir le débat sur le Concile, pas de le clore. Et il ne voit pas là une remise en cause « de l’infaillibilité pon­ti­fi­cale elle-même ».

Sources : Pèlerin/​Foglio – DICI n°254 du 11/​05/​12