Après les événements de la Pentecôte 1979 à Lourdes – Lettre de la Congrégation pour la Doctrine de la foi

A la suite des inci­dents qui ont eu lieu à Lourdes à la Pentecôte, à l’oc­ca­sion d’un ras­sem­ble­ment de « tra­di­tio­na­listes » ayant à sa tête un groupe de prêtres liés à Mgr Marcel Lefebvre, Mgr Donze, évêque de Tarbes et Lourdes, a reçu du car­di­nal Seper, pré­fet de la S. Congrégation pour la Doctrine de la foi, la lettre ci-​après (1):

Rome, le 6 août 1979

EXCELLENCE,

Vous avez jugé oppor­tun d’in­for­mer la Congrégation pour la Doctrine de la foi au sujet d’un pèle­ri­nage « tra­di­tion­nel » qui s’est dérou­lé à Lourdes du 2 au 4 juin 1979.

Cette mani­fes­ta­tion a été carac­té­ri­sée non seule­ment par le refus, de la part des prêtres pré­sents, d’u­ti­li­ser l’Ordo Missae pro­mul­gué et ren­du obli­ga­toire par le Pape Paul VI, mais encore par une atti­tude géné­rale d’op­po­si­tion au Concile de Vatican II, et de sus­pi­cion à l’é­gard du Siège apos­to­lique et de l’Episcopat ; de plus, des inci­dents à l’in­té­rieur même des sanc­tuaires ont per­tur­bé le dérou­le­ment des pèle­ri­nages alors pré­sents à Lourdes.

Notre Congrégation ne peut que déplo­rer et réprou­ver de tels agis­se­ments. Elle relève en outre, dans la liste des « per­son­na­li­tés chefs de file » patron­nant ce pèle­ri­nage, le nom de plu­sieurs prêtres ou reli­gieux en situa­tion cano­nique irré­gu­lière, qui n’ont aucun droit à orga­ni­ser des offices, en par­ti­cu­lier dans les sanc­tuaires de Lourdes, contre la volon­té clai­re­ment mani­fes­tée de l’Ordinaire du lieu.

Dans ces condi­tions, ce dicas­tère estime jus­ti­fiées les mesures que vous avez été ame­né à prendre à l’oc­ca­sion de ce pèle­ri­nage, dans l’exer­cice de votre propre auto­ri­té épis­co­pale ; il consi­dère en outre que, dans d’autres cas sem­blables, Votre Excellence est fon­dée à user de tous les pou­voirs que lui confère le droit ecclésiastique.

Priant avec vous pour que ce sanc­tuaire si véné­ré de Notre-​Dame de Lourdes cesse de voir, même épi­so­di­que­ment, de pénibles affron­te­ments entre catho­liques, et soit tou­jours davan­tage un lieu de grâce et de fer­veur pour les fidèles venus du monde entier, je vous prie d’a­gréer, Excellence, l’ex­pres­sion de mes sen­ti­ments de très res­pec­tueux dévoue­ment dans le Seigneur.

François car­di­nal SEPER, pré­fet.

(1) Bulletin religieux du diocèse de Tarbes et Lourdes du 6 septembre 1979

A pro­pos de ces inci­dents, Mgr DONZE avait publié ce communiqué :

Après les inci­dents regret­tables qui ont per­tur­bé les récentes fêtes de Pentecôte à Lourdes, des esprits res­tent encore trou­blés ; nous jugeons néces­saire de faire la mise au point suivante :

1. Un cer­tain nombre de per­sonnes reprochent aux sanc­tuaires leur atti­tude peu accueillante à l’é­gard des pèle­ri­nages dits « traditionalistes ».

Elle est jus­ti­fiée avant tout par la thèse que les res­pon­sables de ces pèle­ri­nages sou­tiennent et dif­fusent abon­dam­ment par tracts, selon laquelle la messe « post-​conciliaire » est inva­lide ou du moins ambi­guë et que, par consé­quent, la pré­sence réelle du Christ dans l’Eucharistie, célé­brée selon les rites actuels, est douteuse.

Ils sont allés même cette année, comme au cours des années pré­cé­dentes, jus­qu’à impo­ser une pro­ces­sion eucha­ris­tique paral­lèle à la pro­ces­sion offi­cielle com­mune à l’en­semble des pèlerins.

2. Ces mêmes pèle­ri­nages n’ont jamais vou­lu se plier aux règles accep­tées par tous les autres pour la coor­di­na­tion et la bonne orga­ni­sa­tion de l’en­semble. Ils les ont déli­bé­ré­ment igno­rées jus­qu’à pré­sent et conti­nuent de le faire.

3. Quant aux troubles pro­vo­qués par eux au cours de ces der­niers jours, ils sont des plus regret­tables. L’évêque de Tarbes et Lourdes, ain­si que le Conseil pres­by­té­ral réuni le 7 juin à Tarbes, condamnent par­ti­cu­liè­re­ment l’a­gres­sion dont a été vic­time M. l’ab­bé Bordes, rec­teur des sanc­tuaires, le soir de la Pentecôte, à l’in­té­rieur de la basi­lique du Rosaire, et l’oc­cu­pa­tion illé­gi­time d’un lieu de prière habi­tuel­le­ment fer­mé à cette heure-là.

4. Aucun motif ne jus­ti­fie de tels actes de désordre et de vio­lence. Nous ne pou­vons que les réprou­ver et deman­der au Seigneur, par Notre Dame, de faire décou­vrir à leurs auteurs com­bien l’emploi de tels pro­cé­dés porte pré­ju­dice à la foi chré­tienne et se trouve au plus haut point dépla­cé dans le cadre des sanc­tuaires de Lourdes, lieux de paix, de prière et de fraternité.

† Henri DONZE, Evêque de Tarbes et Lourdes.

Journal de la Grotte de Lourdes, 17 juin 1979