François

266e pape ; élu le 13 mars 2013

3 septembre 2017

Motu prorio Magnum principium

Sur l'ordonnancement et la traduction des livres liturgiques

Donné à Rome, près de Saint Pierre, le 3 sep­tembre, de l’An du Seigneur 2017, cin­quième de mon pontificat.

L’important prin­cipe (mag­num prin­ci­pium) confir­mé par le concile œcu­mé­nique Vatican II, selon lequel la prière litur­gique ren­due acces­sible au peuple devait être com­pré­hen­sible dans sa langue, a fait por­ter aux évêques la lourde res­pon­sa­bi­li­té d’introduire la langue ver­na­cu­laire dans la litur­gie et de pré­pa­rer et approu­ver les dif­fé­rentes tra­duc­tions des livres liturgiques.

L’Église latine était consciente du sacri­fice qui en décou­lait, d’abandonner par­tiel­le­ment sa langue litur­gique en vigueur à tra­vers le monde entier au cours des siècles. Elle ouvrit cepen­dant volon­tiers la porte au fait que ces tra­duc­tions, qui font par­tie des rites-​mêmes, deviennent la voix de l’Église qui célèbre les mys­tères divins, aux côtés du latin.

En même temps, en par­ti­cu­lier suite aux dif­fé­rentes opi­nions clai­re­ment expri­mées par les pères conci­liaires au sujet de l’utilisation des langues ver­na­cu­laires dans la litur­gie, l’Église était consciente des dif­fi­cul­tés qui pou­vaient sur­ve­nir en la matière. D’un côté, il fal­lait conci­lier le bien des fidèles – quels que soient leur âge et leur culture – et leur droit à une par­ti­ci­pa­tion consciente et active aux célé­bra­tions litur­giques avec l’unité sub­stan­tielle du Rite romain ; de l’autre, ce n’est sou­vent que de façon pro­gres­sive que les langues ver­na­cu­laires pou­vaient deve­nir des langues litur­giques aus­si res­plen­dis­santes que le latin de la litur­gie, par l’élégance de leur style et la pro­fon­deur des idées, pour faire gran­dir la foi.

C’est cela que visaient cer­taines des règles litur­giques, ins­truc­tions, lettres, indi­ca­tions et vali­da­tions des livres litur­giques en langue ver­na­cu­laire émises par le Saint-​Siège dès l’époque du Concile, et ce à la fois avant et après les règles éta­blies dans le Code de droit canon. Les règles éta­blies ont été et res­tent de façon géné­rale utiles et, dans la mesure du pos­sible, elles devront être sui­vies par les Commissions litur­giques car consti­tuant des ins­tru­ments adap­tés. Et ce afin que, dans la grande diver­si­té des langues uti­li­sées, l’ensemble de la litur­gie puisse revê­tir un style d’expression adap­té et cohé­rent pour cha­cun, tout en conser­vant inté­gri­té et stricte fidé­li­té, en par­ti­cu­lier dans la tra­duc­tion de cer­tains textes d’importance majeure dans cha­cun des livres liturgiques.

Le texte litur­gique, en tant que signe rituel, est un moyen de com­mu­ni­ca­tion oral. Mais pour les croyants qui célèbrent les rites sacrés, la parole reste aus­si un mys­tère : en effet, quand les paroles sont pro­non­cées, en par­ti­cu­lier quand on lit la Sainte Écriture, Dieu parle aux hommes ; le Christ lui-​même dans l’Évangile parle à son peuple, qui lui-​même ou via le célé­brant répond au Seigneur par la prière, dans l’Esprit Saint.

Pour la litur­gie de la parole, l’objectif des tra­duc­tions des textes litur­giques et des textes bibliques est d’annoncer aux fidèles la parole de salut confor­mé­ment à la foi et de faire mon­ter vers le Seigneur la prière de l’Église. Dans ce but, il faut com­mu­ni­quer fidè­le­ment à un peuple don­né, en uti­li­sant sa langue, ce que l’Église a vou­lu com­mu­ni­quer aupa­ra­vant avec le latin. Si on ne peut pas tou­jours juger la fidé­li­té à un texte à des paroles iso­lées mais dans son contexte et selon son genre lit­té­raire, cer­tains termes spé­ci­fiques sont cepen­dant à consi­dé­rer dans le contexte de la foi catho­lique dans son inté­gra­li­té, afin que l’ensemble des tra­duc­tions des textes litur­giques soient cohé­rentes avec la doctrine.

Il ne faut pas s’étonner si au cours de ce long tra­vail des dif­fi­cul­tés ont émer­gé entre les confé­rences épis­co­pales et le Siège apos­to­lique. Pour que les déci­sions du Concile sur l’utilisation des langues ver­na­cu­laires dans la litur­gie puissent s’appliquer à l’avenir, une constante col­la­bo­ra­tion est par­ti­cu­liè­re­ment néces­saire, pleine de confiance réci­proque, de vigi­lance et de créa­ti­vi­té entre les confé­rences épis­co­pales et le dicas­tère du Saint-​Siège qui a pour res­pon­sa­bi­li­té la pro­mo­tion de la litur­gie : la Congrégation pour le culte divin et la dis­ci­pline des sacre­ments. C’est pour­quoi, afin que se pour­suive le renou­veau de la vie litur­gique tout entière, il nous a sem­blé oppor­tun que cer­tains prin­cipes trans­mis depuis le Concile soient plus clai­re­ment réaf­fir­més et mis en pratique.

Il convient par-​dessus tout de pri­vi­lé­gier ce qui est utile et bon pour les fidèles, sans oublier le droit et la res­pon­sa­bi­li­té des confé­rences épis­co­pales qui, avec les confé­rences épis­co­pales régio­nales de même langue et avec le Siège apos­to­lique, doivent veiller à déter­mi­ner que, tout en res­pec­tant le carac­tère de chaque langue, le sens du texte ori­gi­nel soit ren­du plei­ne­ment et fidè­le­ment, et que les livres litur­giques tra­duits fassent tou­jours res­plen­dir l’unité du rite romain, même après leur adaptation.

Afin de rendre plus facile et plus fruc­tueuse la col­la­bo­ra­tion entre le Siège apos­to­lique et les Conférences épis­co­pales dans ce ser­vice à rendre aux fidèles, ayant enten­du l’avis de la Commission des évêques et des Experts que j’ai mise en place, je demande, avec l’autorité qui m’a été confiée, que la dis­ci­pline cano­nique actuel­le­ment en vigueur dans le can. 838 du CIC soit cla­ri­fiée, afin que, comme expli­ci­té dans la Constitution Sacrosantum Concilium, en par­ti­cu­lier aux articles 36 §§ 3.4, 40 et 63, et dans la lettre apos­to­lique en forme de Motu pro­prio Sacram Liturgiam, n. IX, appa­raisse plus clai­re­ment la com­pé­tence du Siège apos­to­lique en matière de tra­duc­tion des livres litur­giques et des adap­ta­tions plus pro­fondes, par­mi les­quelles puissent y figu­rer éga­le­ment de nou­veaux textes, éta­blis et approu­vés par les Conférences épiscopales.

Dans cet objec­tif, le can. 838 devient :

Can.838 – § 1. L’ordonnancement de la sainte litur­gie dépend uni­que­ment de l’autorité de l’Église ; cette auto­ri­té est déte­nue par le Siège Apostolique et, selon le droit, par l’Évêque diocésain.

§ 2. Il revient au Siège Apostolique d’organiser la sainte litur­gie de l’Église tout entière, d’éditer les livres litur­giques, de revoir (1) les adap­ta­tions approu­vées en ver­tu du droit canon par la Conférence épis­co­pale, mais aus­si de veiller à ce que les règles litur­giques soient fidè­le­ment obser­vées partout.

§ 3. Il appar­tient aux Conférences des évêques de pré­pa­rer fidè­le­ment les tra­duc­tions des livres litur­giques en langues ver­na­cu­laires, en les adap­tant de manière appro­priée dans les limites fixées, d’approuver et de publier les livres litur­giques, pour les régions rele­vant de leur com­pé­tence, après confir­ma­tion par le Siège apostolique.

§ 4. En matière litur­gique, il appar­tient à l’évêque dio­cé­sain de por­ter, pour l’Église qui lui est confiée et dans les limites de sa com­pé­tence, des règles aux­quelles tous sont tenus.

Il faut par consé­quent réin­ter­pré­ter à la fois l’art. 64 § 3 de la Constitution apos­to­lique Pastor Bonus et les autres règles, en par­ti­cu­lier celles qui sont conte­nues dans les livres litur­giques, selon leurs tra­duc­tions. De même, je décide que la Congrégation pour le culte divin et la dis­ci­pline des sacre­ments modi­fie son Regolamento sur la base de la nou­velle dis­ci­pline, et qu’elle aide les Conférences épis­co­pales à rem­plir leur mis­sion et s’engage à pro­mou­voir tou­jours davan­tage la vie litur­gique de l’Église latine.

J’ordonne que tout ce qui a été déci­dé par cette pré­sente Lettre Apostolique sous forme de Motu pro­prio, ait pleine et stable valeur, non­obs­tant toute chose contraire même digne de men­tion par­ti­cu­lière, et soit pro­mul­gué par publi­ca­tion dans l’Osservatore Romano, et publié dans les Acta Apostolicae Sedis, entrant en vigueur le 1er octobre 2017.

Donné à Rome près de Saint-​Pierre, le 3 sep­tembre de l’année 2017, cin­quième de mon Pontificat.

François, P.P.

FRANCISCUS PP.

27 novembre 2017
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