14 février au 8 décembre 1876

Apparitions de Notre-​Dame à Pellevoisin

L’histoire des apparitions

En 1875, une jeune femme de 32 ans, Estelle Faguette atteinte d’une mala­die incu­rable, écrit, avec un cœur d’enfant et dans une grande confiance, une lettre à la Sainte Vierge : elle lui demande d’intercéder auprès de son divin Fils pour obte­nir sa gué­ri­son, afin de sou­te­nir ses parents âgés. La Vierge Marie répond à cette lettre par quinze appa­ri­tions, de février à décembre 1876, au cours des­quelles elle éduque Estelle a la sain­te­té et lui délivre un mes­sage de miséricorde.

Le 19 février 1876, Estelle est entiè­re­ment gué­rie. Dès 1877, l’Archevêque de Bourges auto­rise le Culte public à Notre-​Dame de Pellevoisin et la chambre d’Estelle est trans­for­mée en chapelle.

En avril 1900, le Pape Léon XII recon­naît offi­ciel­le­ment le sca­pu­laire du Sacré Cœur tel qu’Estelle l’a vu por­té par la Vierge Marie, et encou­rage tous les fidèles qui le dési­rent à le porter.

La gué­ri­son d’Estelle a été offi­ciel­le­ment décla­rée mira­cu­leuse en 1983 par Mgr Vignancour, alors Archevêque de Bourges. Cette décla­ra­tion fait suite à tous les actes favo­rables et marques de bien­veillance des sou­ve­rains pon­tifes et des arche­vêques de Bourges à l’é­gard de Pellevoisin depuis plus d’un siècle.

La lettre d’Estelle à la Vierge Marie

Ô ma bonne Mère, me voi­ci de nou­veau pros­ter­née à vos pieds. Vous ne pou­vez pas refu­ser de m’en­tendre. Vous n’a­vez pas oublié que je suis votre fille et que je vous aime. Accordez-​moi donc de votre divin Fils la san­té de mon pauvre corps pour sa gloire.

Regardez donc la dou­leur de mes parents, vous savez bien qu’ils n’ont que moi pour res­sources. Ne pourrai-​je pas ache­ver l’œuvre que j’ai com­men­cée ? Si vous ne pou­vez, à cause de mes péchés, m’ob­te­nir une entière gué­ri­son, vous pour­rez du moins m’ob­te­nir un peu de force pour pou­voir gagner ma vie et celle de mes parents. Vous voyez, ma bonne Mère, ils sont à la veille de fal­loir men­dier leur pain ; je ne puis pen­ser à cela sans être pro­fon­dé­ment affligée.

Rappelez-​vous donc les souf­frances que vous avez endu­rées, la nuit de la nais­sance du Sauveur, lorsque vous fûtes obli­gée d’al­ler de porte en porte deman­der asile ! Rappelez-​vous aus­si ce que vous avez souf­fert quand Jésus fut éten­du sur la Croix. J’ai confiance en vous, ma bonne Mère ; si vous vou­lez, votre Fils peut me gué­rir. Il sait que j’ai dési­ré vive­ment être du nombre de ses épouses, et que c’est en vue de lui être agréable que j’ai sacri­fié mon exis­tence pour ma famille qui a tant besoin de moi.

Daignez écou­ter mes sup­pli­ca­tions, ma bonne Mère, et les redire à votre divin Fils. Qu’il me rende la san­té si tel est son bon plai­sir, mais que sa volon­té soit faite et non la mienne. Qu” Il m’ac­corde au moins la rési­gna­tion entière à ses des­seins et que cela serve pour mon salut et celui de mes parents. Vous pos­sé­dez mon cœur, Vierge Sainte, gardez-​le tou­jours et qu’il soit le gage de mon amour et de ma recon­nais­sance pour vos mater­nelles bon­tés. Je vous pro­mets, ma bonne Mère, si vous m’ac­cor­dez les grâces que je vous demande, de faire tout ce qui dépen­dra de moi pour votre gloire et celle de votre divin Fils.

Prenez sous votre pro­tec­tion ma chère petite nièce, et mettez-​la à l’a­bri des mau­vais exemples. Faites, ô Vierge Sainte, que je vous imite dans votre obéis­sance et qu’un jour je pos­sède avec vous Jésus dans l’éternité.

Lettre écrite en 1975

La vie d’Estelle Faguette et un résumé des apparitions

Dans une petite auberge, à Saint Memmie, près de Chalons en Champagne, le 12 sep­tembre 1843, naît une petite Estelle, seconde fille de Victor et Antoine Faguette. Ces der­niers, rui­nés et réduits à une extrême pau­vre­té se retrouvent à Chalons comme concierges.

Toute petite, Estelle est édu­quée chez les sœurs de Portieux, et en 1857 la famille s’installe à Paris pour trou­ver du tra­vail. Estelle a 14 ans lorsqu’elle est pla­cée en appren­tis­sage chez une blan­chis­seuse ; dès que le temps le lui per­met, elle se met au ser­vice des sœurs de saint Vincent de Paul et entre­ra dans cette com­mu­nau­té à l’âge de 17 ans, se dévouant aux pauvres à l’Hospice de la Charité.

En 1858, date des appa­ri­tions à Lourdes, Estelle tombe malade pour la pre­mière fois. Deux ans plus tard, elle entre au novi­ciat des Augustines Hospitalières de l’Hôtel Dieu de Paris. Mais son état de san­té fra­gile l’oblige à quit­ter la vie religieuse.

En 1865, Estelle entre au ser­vice de la famille de La Rochefoucauld jusqu’en 1875. Là, elle s’occupe des enfants et sui­vra la famille, de Paris au châ­teau de Montbel à Pellevoisin, dans le Berry.

Progressivement, une mala­die sour­noise lui pro­voque un long et dou­lou­reux cal­vaire. Le 29 août 1875, le pro­fes­seur Pucquoy la déclare irré­mé­dia­ble­ment per­due. Estelle se sent aban­don­née et fati­guée. Elle prend la réso­lu­tion de faire une demande à la Sainte Vierge en lui écri­vant une lettre [Voir ci-dessus].

Estelle demande à une amie, Mlle Reiter, de dépo­ser cette lettre à la petite grotte de Notre Dame de Lourdes que la famille de La Rochefoucauld avait fait construire dans le parc à la demande des enfants. L’état de san­té d’Estelle deve­nant extrême, elle fut rame­née auprès de ses parents dans une mai­son, au centre du vil­lage, près de l’église et du cimetière !

Le 14 févier 1876, le méde­cin déclare :

Elle n’en a plus que pour quelques heures ». Dans la nuit…Estelle raconte : « Il était minuit, c’était le 15 février, je cher­chais à me repo­ser quand tout à coup appa­rut le diable au pied de mon lit. Oh que j’avais peur !…A peine était-​il arri­vé que la Sainte Vierge appa­rut de l’autre côté…et me dit dou­ce­ment : « Ne crains rien, tu sais bien que tu es ma fille…Courage, prends patience, mon Fils va se lais­ser tou­cher. Tu souf­fri­ras encore cinq jours, en l’honneur des cinq plaies de mon Fils, same­di tu seras morte ou gué­rie. Si mon Fils te rend la vie, je veux que tu publies ma gloire.

La paix revient désor­mais dans l’esprit d’Estelle qui se met à contem­pler la Vierge Marie et à res­sen­tir la dou­ceur qui émane de sa per­sonne imma­cu­lée et rem­plie de grâce. Estelle ali­tée, fati­guée, ne parle pas de l’apparition dans l’immédiat à ses parents, mais elle en infor­ma l’abbé Salmon, curé de Pellevoisin.

Le len­de­main, dans la nuit, la Sainte Vierge réap­pa­rut en regar­dant Estelle avec bon­té et lui dit : « Mon Fils s’est lais­sé atten­drir, il te laisse la vie, tu seras gué­rie same­di ». Dans la nuit du 16 au 17, la Sainte Vierge se rend pour la troi­sième fois auprès d’Estelle : « J’ai mon­tré cette lettre à mon Fils ». La Vierge Marie men­tionne la lettre qu’Estelle lui avait écrite et fait dépo­ser à la grotte de Montbel fin août 1875 ; entre temps, six mois s’étaient écou­lés. Cette lettre fut retrou­vée 10 mois plus tard, par hasard, juste avant la fête de l’Immaculée Conception.

« Je suis toute misé­ri­cor­dieuse… », « Courage, Patience, Résignation », « Tu publie­ras ma gloire ».Estelle essaya de dire com­ment elle n’en a pas eu le temps. La Sainte Vierge lui dit en par­tant : « Fais tous tes efforts ». C’était la 4ème apparition.

Estelle est gué­rie dans la nuit du 18 au 19 février. Elle raconte : « Après un moment de repos, je me sen­tais bien, je deman­dais l’heure, il était minuit et demi. Je me sen­tais guérie…c’était après la 5e appa­ri­tion ».

Son père qui la veillait put consta­ter sa gué­ri­son. Le matin même, l’abbé Salmon vient lui por­ter l’Eucharistie. Sitôt qu’elle l’eut reçue, l’abbé ache­va les prières litur­giques, les larmes aux yeux et la voix trem­blante, et, la lais­sant en action de grâces, il consta­ta qu’Estelle était tota­le­ment gué­rie, comme l’avait annon­cé la Sainte Vierge lors de sa pre­mière visite.

Au cours de ces cinq appa­ri­tions, la Vierge Marie mani­feste à Estelle son atten­tion de Mère. Elle l’encourage et for­ti­fie son cou­rage dans l’espérance. Elle la sti­mule et éduque ses com­por­te­ments, fai­sant jaillir de son cœur le plus vif amour pour son Fils. La réponse à la géné­ro­si­té d’Estelle et à son aban­don fut sa gué­ri­son, inté­rieure et physique.

La Vierge Marie appa­rut à Estelle quinze fois, au long de l’année 1876. Estelle raconte :

Je ne pou­vais assez dire qu’elle était belle. Elle a des traits régu­liers, un teint blanc et rosé, plu­tôt un peu pâle, de grands yeux doux, elle sou­rit, elle me regarde avec bonté…

Au cours des appa­ri­tions, la Vierge Marie éduque Estelle :

« Du calme mon enfant… », « Sois simple, que tes actions répondent à tes paroles… », « Je t’ai choi­sie, je choi­sis les petits et les faibles pour ma gloire ».

Lors de la 9ème appa­ri­tion, c’est la révé­la­tion suprême de Marie à Estelle : celle du cœur de son Fils repo­sant sur sa poi­trine, le sca­pu­laire.

La Vierge Marie s’adresse alors à Estelle : « Depuis long­temps les tré­sors de mon Fils sont ouverts, qu’ils prient ». En disant cela, elle sou­le­va la petite pièce de laine qu’elle por­tait sur la poi­trine en disant : « J’aime cette dévotion…C’est ici que je serai hono­rée ».

des­sin du sca­pu­laire fait par Estelle

Estelle pour­suit :

« J’aperçois un cœur rouge qui res­sor­tait très bien, j’ai pen­sé de suite que c’était le sca­pu­laire du Sacré Cœur ».

A la 12e appa­ri­tion, c’est le mys­tère du silence de Marie : 

« Elle ne m’a rien dit, puis elle jeta les yeux sur moi et m’a regar­dée avec beau­coup de bon­té et par­tit ».

C’est ain­si que Marie, par son silence, ini­tie Estelle à la contemplation.

Le 8 décembre 1876, fête de l’Immaculée Conception, après la grand messe, en pré­sence de plu­sieurs témoins, la Vierge Marie appa­raît à Estelle pour la der­nière fois. Pleine d’émotion, Estelle raconte :

« Elle était plus belle que jamais ; il y avait autour d’elle sa guir­lande de roses comme au mois de juillet, puis elle me dit : « Ma fille rappelle-​toi mes paroles », et, à ce moment-​là, je les revis toutes depuis le mois de février ».

Instant inou­bliable pour Estelle : 

« La Sainte Vierge tenait son sca­pu­laire des deux mains : il était ravis­sant, je l’admirais tan­dis qu’un par­fum exquis s’exhalait de la cou­ronne de roses ».

« Je serai invi­si­ble­ment près de toi » est une des der­nières paroles que la Vierge Marie lais­sa à Estelle.

L’année 1876 s’achève, mar­quée par ces évé­ne­ments vécus par Estelle. Il s’agit bien d’une « gué­ri­son – résur­rec­tion ». C’est le mys­tère Pascal d’Estelle, vécu à l’école de Marie, avec elle.

Dès sa gué­ri­son, Estelle reprit son tra­vail auprès de la famille de La Rochefoucault et, répon­dant à la demande de la Sainte Vierge, elle n’aura de cesse de publier la gloire de Marie à tra­vers diverses démarches. Une archi­con­fré­rie fut éri­gée en 1894. Estelle alla à Rome fin jan­vier 1900, où le Pape Léon XIII la reçut favo­ra­ble­ment et ordon­na par décret du 4 avril 1900 la dif­fu­sion du Scapulaire du Sacré-Cœur.

Estelle, à l’âge de 80 ans, deman­da à être admise dans le Tiers-​Ordre Dominicain. Elle mou­rut le 23 août 1929, à 86 ans. Jusqu’à ses der­niers moments, elle fut inébran­lable dans sa foi aux appa­ri­tions et au Message de la Vierge. Elle repose au cime­tière de Pellevoisin, près de la tombe du cha­noine Salmon, mort le 9 juin 1922 à Pellevoisin, après avoir affir­mé jusqu’au bout lui aus­si sa foi aux apparitions.