Editorial de juin 2011 – Pontmain : les portes de la Basilique ont été fermées

Pontmain : les portes de la Basilique ont été fermées pour notre pèlerinage

Nous avons eu notre pèle­ri­nage à Pontmain et nous ne sommes pas mécon­tents dans l’ensemble de son dérou­le­ment, même si les choses auraient pu se pas­ser beau­coup mieux si cer­tains y avaient mis un peu de bonne volonté.

La Mairie de Pontmain s’est mon­trée comme d’habitude très ouverte pour notre tra­di­tion­nelle pro­ces­sion de l’après-midi depuis le par­vis de la Basilique jusqu’à la salle des fêtes où nous avions rendez-​vous pour la pré­di­ca­tion sur les écoles catho­liques et le Salut du Saint-​Sacrement. Il faut dire que cette pro­ces­sion se déroule depuis trente et un ans dans l’ordre, le calme, la séré­ni­té et notre ser­vice d’ordre suf­fit si bien à l’affaire qu’il n’a jamais été néces­saire de déran­ger la police ou la gen­dar­me­rie pour un quel­conque trouble à l’ordre public. Il n’y a jamais eu une plainte ou un blâme du côté des auto­ri­tés civiles qui nous laissent toute lati­tude pour nous orga­ni­ser : tout se passe en très bon termes avec eux.

A cela rien d’étonnant : « Si ton œil est sain, dit l’évangile, tout ton exté­rieur sera éclai­ré » (Matt.6–22).

En effet, que voit-​on à Pontmain au moment de notre pas­sage, lorsqu’on se contente d’ouvrir les yeux et que l’on n’est pas habi­té par la mal­veillance, les pré­ju­gés ou pire par la haine ? Des prêtres, des reli­gieux (ses), des hommes, des femmes, des jeunes, des moins jeunes et des petits enfants qui pro­ces­sionnent et qui prient en chan­tant des can­tiques en l’honneur de la Sainte Vierge, parce qu’en ce lieu elle s’est mon­trée à des enfants et a deman­dé de prier : « Mais priez mes enfants, Mon Fils se laisse tou­cher. En peu de temps Dieu vous exaucera ».

Mais il en est tout autre­ment du côté de l’évêché de Laval qui s’obstine à appli­quer dans toute sa rigueur les direc­tives de l’idéologie conci­liaire contre la Tradition. Pour nous les portes de la Basilique étaient fer­mées.

Mais rien d’étonnant à cela :

« Si ton œil est gâté, tout ton corps sera dans les ténèbres. Mais si la lumière qui est en toi est ténèbres, quelles ténèbres ! » (Matt.6–23).

Voilà pour­quoi c’est le blo­cage com­plet. Impossible d’engager une quel­conque dis­cus­sion et plu­sieurs fois l’évêque nous a écrit que la chose était inutile avec nous.

Motifs ? Les argu­ments sont déri­soires et affli­geants. : « Je ne peux pas dia­lo­guer avec vous parce que je sais que vous êtes contre le dia­logue sous quelque forme que ce soit » (sic).

L’évêque pré­fère aus­si se fier, sans trop d’enquête, aux rap­ports faux et néga­tifs qui lui sont faits sur nous (Par qui ? Allez savoir ! ) : « Vous avez enfer­mé le rec­teur de Pontmain dans la sacris­tie » (chose entiè­re­ment fausse que nous nions abso­lu­ment ! mais bien évi­dem­ment nous sommes des men­teurs) ; « Vous adop­tez une pos­ture de com­bat ».

Bigre ! A croire que nous sommes venus « cum gla­diis et fus­ti­bus » (avec des épées et des bâtons) pour fra­cas­ser des têtes ou faire cou­ler le sang.

Par contre l’argument qui paraît le plus sérieux est tou­jours celui tiré du droit canon. Il nous est régu­liè­re­ment assé­né par nos adver­saires et il est bon de sai­sir toute la malice qui peut se cacher der­rière son uti­li­sa­tion. Il donne l’impression que les évêques ne font que se sou­mettre à la dis­ci­pline en vigueur, qu’ils ne peuvent tolé­rer le « n’importe quoi » et qu’ils sont tou­jours et par­tout les gar­diens vigi­lants pour l’application de toutes les règles codi­fiées par la Sainte Eglise. Tout cela est bien vrai et juste …théo­ri­que­ment. Mais concrè­te­ment nous ver­rons plus loin dans cet article com­ment cela se passe en pratique.

En effet l’affaire Mgr Nourrichard, pour ne prendre que celle-​là, démontre qu’il y a en fait, deux poids et deux mesures.

En atten­dant on nous rétorque : Il est vrai que la messe de saint Pie V est désor­mais per­mise ; il est vrai aus­si que vous n’êtes plus excom­mu­niés ; mais il manque tout de même un petit quelque chose qui nous oblige tou­jours à vous exclure comme des pestiférés.

Quoi donc ô Grandissime Excellence ?

Votre situa­tion cano­nique n’est pas encore par­faite. Vous n’êtes pas en com­mu­nion ou du moins pas en pleine com­mu­nion et il vous faut encore « che­mi­ner vers la lumière » (sic) !

Ce qui veut dire : accep­tez tout ce qu’on vous demande sans dis­cus­sion sinon vous serez chas­sés dehors comme des vauriens.

La pleine com­mu­nion com­pre­nez bien de quoi il s’agit. C’est une sorte de pen­sée unique que l’ont veut impo­ser aux clercs, mais atten­tion ! Il ne s’agit pas de leur deman­der d’accepter tous les dogmes et tous les points de morale que l’Eglise a tou­jours et par­tout vou­lu qu’on observe : rien de plus légi­time qu’une telle obli­ga­tion soit impo­sée par ceux qui sont en charge de veiller sur la pure­té des mœurs et la fidé­li­té doc­tri­nale. Non, il faut sur­tout et par des­sus tout accep­ter les orien­ta­tions nou­velles de la pen­sée conci­liaire : nou­velle messe, œcu­mé­nisme, liber­té de conscience.

Nous sommes donc obli­gés de conclure que les motifs pour nous exclure ne sont pas solides. Ils ne sont en fait que de la poudre aux yeux, des pré­textes qui cachent quelque chose.

Mais quoi exac­te­ment ? Pour le savoir ima­gi­nez un seul ins­tant qu’un évêque comme Mgr Scherrer ne trouve dans son for inté­rieur (sa conscience) aucun incon­vé­nient à ce que les prêtres de la FSSPX célèbrent la sainte Messe dans la Basilique à Pontmain pour leur petit pèle­ri­nage annuel. Va-​t-​il pour autant favo­ri­ser une telle chose ? Non il ne le fera pas. Beaucoup de pro­blèmes réels et ima­gi­naires vont se dres­ser subi­te­ment devant lui qui vont le dis­sua­der de se ris­quer vers cette direc­tion : des pro­blèmes psy­cho­lo­giques et des cri­tiques exté­rieures très fortes et très méchantes qu’il fau­dra subir de la part de ses pairs :

« Que va-​t-​on pen­ser de moi ? Que vont dire mes confrères dans l’épiscopat qui se battent depuis qua­rante ans contre cette Fraternité hon­nie ? Certainement ils diront : « En voi­là un qui favo­rise ces galeux d’intégristes ! C’est un traître qui ne fait pas cohé­sion avec l’assemblée épis­co­pale ! »

Une telle pers­pec­tive téta­nise nos cou­ra­geux Pasteurs, même les plus bien­veillants. Ils se sont trop habi­tués à vivre dans « l’ecclésiastiquement cor­rect » et ils ne bou­ge­ront plus le petit doigt pour s’opposer à des atti­tudes que la conscience catho­lique réprouve : les carac­tères actuels ne sont plus exer­cés à témoi­gner jusqu’à ce point.

Respect humain quand tu nous tiens…aussi sa réac­tion est bien com­pré­hen­sible (et nous com­pa­tis­sons) mais pour­tant elle est inad­mis­sible (et nous la déplorons).

Il faut le recon­naître, le sys­tème de la col­lé­gia­li­té a réus­si à pro­mou­voir et ins­ti­tu­tion­na­li­ser une sorte de res­pect humain au niveau épis­co­pal et c’est une chose très dom­ma­geable pour l’Eglise.

Personne par­mi les évêques n’ose se démar­quer de ce qu’a sta­tué la CEF (Conférence des Evêques de France) même si la foi ou le bien des âmes doit en pâtir.

Ainsi ce n’est plus le sou­ci de dif­fu­ser et d’affermir la foi qui guide prin­ci­pa­le­ment chaque Pasteur dans son dio­cèse ou la recherche du bien des âmes, mais tout doit d’abord avoir au moins l’agrément impli­cite (et par­fois expli­cite) de la CEF. Chaque Pasteur abdique de son auto­ri­té per­son­nelle au pro­fit des déci­sions col­lé­giales. Disons-​le tout net : une telle chose ne cor­res­pond pas à ce qu’a vou­lu le Christ lorsqu’il a ins­ti­tué les évêques.

Comprenez bien. Désormais ce qui est pre­mier et essen­tiel pour un évêque c’est d’être en par­faite har­mo­nie avec ce qui est vou­lu par la Collégialité : d’où ces réac­tions uni­formes et irré­flé­chies contre la Tradition en géné­ral et la FSSPX en par­ti­cu­lier « irré­flé­chies » car aucun argu­ment sérieux n’est déve­lop­pé contre la FSSPX, (ce qui serait en soi légi­time) mais ils la com­battent par des inter­dits sys­té­ma­tiques et ces inter­dits ont été déci­dés col­lé­gia­le­ment par fidé­li­té à Vatican II.

En effet, depuis Vatican II la col­lé­gia­li­té est réso­lu­ment ouverte à l’esprit du monde sécu­la­ri­sé et oppo­sée à la Tradition Catholique qui cherche à réta­blir les droits de Dieu dans la société.

Tout l’épiscopat avance ain­si imper­tur­ba­ble­ment, plus ou moins vite sui­vant le tem­pé­ra­ment de cha­cun, dans le sens du moder­nisme des­truc­teur de la foi. Voilà pour­quoi les évêques ne trouvent aucune contra­dic­tion à auto­ri­ser dans leurs églises les pires fan­tai­sies litur­giques : si la CEF ne fus­tige jamais ces sortes de scan­dales (ils sont pour elle comme inexis­tants), pour­quoi un évêque le ferait-​il per­son­nel­le­ment au risque d’être ain­si iso­lé, de paraître rétro­grade et anti Vatican II. Voilà pour­quoi cer­tains évêques se per­mettent aus­si d’encourager les cultes héré­tiques et puisque le CEF ne désa­voue pas cela, per­sonne par­mi les évêques ne peut rien dire car se serait mani­fes­ter une cas­sure dans la pleine com­mu­nion. De fait per­sonne ne dit rien.

La preuve ? Nous y venons : Rappelez-​vous Mgr Nourrichard qui est allé par­ti­ci­per en Angleterre à des ordi­na­tions de femmes ! Mgr Nourrichard est en pleine com­mu­nion avec ses confrères dans l’épiscopat – il n’a jamais été blâ­mé par aucun d’entres eux, son acte a été plu­tôt per­çu comme une ouver­ture, un pro­grès dans les rela­tions avec les com­mu­nau­tés sépa­rées ! Ainsi, par­ti­ci­per à des ordi­na­tions scan­da­leuses et inva­lides n’est plus per­çu par ses col­lègues évêques comme un mal grave, ni comme une entorse aux pres­crip­tions du droit canon.

Par contre, quand s’il s’agit de don­ner quelques miettes favo­rables à la Tradition (2 petites heures par an dans une Basilique pour la messe) les évêques (la grosse majo­ri­té) se montrent alors comme de vrais pha­ri­siens. C’est là que l’on s’aperçoit qu’il y a deux poids, deux mesures dans l’application du code de l’Eglise. Subitement les chefs de dio­cèses se rap­pellent qu’il est de leur devoir impé­rieux d’appliquer de manière très res­tric­tive tous les petits ali­néas du droit ecclé­sias­tique contre les contemp­teurs de leur auto­ri­té. C’est un jeu d’enfant alors pour eux que de contrer nos paci­fiques et pieux pèle­ri­nages au nom de la fidé­li­té à l’Eglise.

Le : « vous n’êtes pas en pleine com­mu­nion ! » c’est-à-dire « vous ne pen­sez pas exac­te­ment comme nous au sujet des nou­veau­tés » suf­fit pour exclure défi­ni­ti­ve­ment et en toute légi­ti­mi­té qui ils veulent et quand ils veulent.

En résu­mé tirons quelques leçons.
1/​La col­lé­gia­li­té sert actuel­le­ment à para­ly­ser l’initiative d’un éven­tuel évêque qui pour­rait avoir des vel­léi­tés de se tour­ner vers la Tradition ou lui être favo­rable même ponctuellement.
2/​Elle sert aus­si à main­te­nir cer­tains évêques conser­va­teurs dans le giron de l’Eglise conci­liaire par toutes sortes de com­pro­mis avec les ultra­mo­der­nistes, notam­ment dans leur lutte contre la FSSPX qu’il faut fuir et com­battre absolument.
3/​Elle sert encore, comme on l’a vu dans l’affaire Nourrichard, à étouf­fer les scan­dales de toutes sortes et les actes héré­tiques d’un confrère dans l’épiscopat et elle réus­sit à faire de cha­cun des évêques, même s’il y a une répro­ba­tion dans leur for inté­rieur de ces scan­dales, au moins un com­plice muet.

Où est le res­pect de Dieu et de l’Eglise dans tout ça ? Pour ter­mi­ner il serait bon de lire les pre­miers cha­pitres de l’Apocalypse de Saint Jean. Dans ce livre ins­pi­ré, Jésus- Christ s’adresse à cha­cun des évêques de sept villes d’Asie mineure. Jésus-​Christ ne connaît pas le sys­tème de la Collégialité (ou la CEF) : cette ins­ti­tu­tion comme on vous l’a dit est née à Vatican II mais ce n’est pas elle qui va dédoua­ner de leur res­pon­sa­bi­li­té les Pasteurs des dio­cèses. Un jour il y aura aus­si pour eux le face à face avec le Christ qui leur deman­de­ra un compte sévère de leur ges­tion. Et alors la mal­trai­tance des catho­liques de la Tradition qui ne demandent qu’à prier tran­quille­ment selon leur droit sera dans la balance du juge­ment : ils feraient bien de s’en souvenir !

Lisons un pas­sage de l’Apocalypse. Jésus-​Christ s’adresse à l’évêque de Laodicée :

« Je connais tes œuvres : tu n’es ni froid ni chaud. Plût à Dieu que tu fusses froid ou chaud ! Aussi, parce que tu es tiède et que tu n’es ni froid ni chaud, je vais te vomir de ma bouche. Tu dis : Je suis riche, j’ai acquis de grands biens, je n’ai besoin de rien ; et tu ne sais pas que tu es un mal­heu­reux, un misé­rable, pauvre, aveugle et nu, je te conseille de m’acheter de l’or éprou­vé par le feu, afin que tu deviennes riche ; des vête­ments blancs pour te vêtir et ne pas lais­ser paraître la honte de ta nudi­té ; et un col­lyre pour oindre tes yeux, afin que tu voies. Moi, je reprends et je châ­tie ce que j’aime ; aie donc du zèle et repens toi…. »

Prions donc pour les évêques : que le Seigneur retire le voile qui cache leurs yeux et qu’ils par­viennent eux aus­si à la connais­sance du Christ et de Celui qui l’a envoyé.

De notre côté ne nous éton­nons pas trop si les portes de la Basilique à Pontmain étaient fer­mées par les conci­liaires et les par­ti­sans de l’œcuménisme (c’est ‑à-​dire ceux qui accueillent tous les faux cultes dans l’Eglise sauf la FSSPX) : Le Christ nous l’a prédit

« Car, on vous chas­se­ra des syna­gogues (des églises) …Ils vous trai­te­ront de la sorte, parce qu’ils ne connaissent ni mon Père, ni Moi. » (St Jean ch 15)

Abbé Pierre Barrère

Extrait du Sainte-​Anne n° 230 de juin 2011