Pontmain : les portes de la Basilique ont été fermées pour notre pèlerinage
Nous avons eu notre pèlerinage à Pontmain et nous ne sommes pas mécontents dans l’ensemble de son déroulement, même si les choses auraient pu se passer beaucoup mieux si certains y avaient mis un peu de bonne volonté.
La Mairie de Pontmain s’est montrée comme d’habitude très ouverte pour notre traditionnelle procession de l’après-midi depuis le parvis de la Basilique jusqu’à la salle des fêtes où nous avions rendez-vous pour la prédication sur les écoles catholiques et le Salut du Saint-Sacrement. Il faut dire que cette procession se déroule depuis trente et un ans dans l’ordre, le calme, la sérénité et notre service d’ordre suffit si bien à l’affaire qu’il n’a jamais été nécessaire de déranger la police ou la gendarmerie pour un quelconque trouble à l’ordre public. Il n’y a jamais eu une plainte ou un blâme du côté des autorités civiles qui nous laissent toute latitude pour nous organiser : tout se passe en très bon termes avec eux.
A cela rien d’étonnant : « Si ton œil est sain, dit l’évangile, tout ton extérieur sera éclairé » (Matt.6–22).
En effet, que voit-on à Pontmain au moment de notre passage, lorsqu’on se contente d’ouvrir les yeux et que l’on n’est pas habité par la malveillance, les préjugés ou pire par la haine ? Des prêtres, des religieux (ses), des hommes, des femmes, des jeunes, des moins jeunes et des petits enfants qui processionnent et qui prient en chantant des cantiques en l’honneur de la Sainte Vierge, parce qu’en ce lieu elle s’est montrée à des enfants et a demandé de prier : « Mais priez mes enfants, Mon Fils se laisse toucher. En peu de temps Dieu vous exaucera ».
Mais il en est tout autrement du côté de l’évêché de Laval qui s’obstine à appliquer dans toute sa rigueur les directives de l’idéologie conciliaire contre la Tradition. Pour nous les portes de la Basilique étaient fermées.
Mais rien d’étonnant à cela :
« Si ton œil est gâté, tout ton corps sera dans les ténèbres. Mais si la lumière qui est en toi est ténèbres, quelles ténèbres ! » (Matt.6–23).
Voilà pourquoi c’est le blocage complet. Impossible d’engager une quelconque discussion et plusieurs fois l’évêque nous a écrit que la chose était inutile avec nous.
Motifs ? Les arguments sont dérisoires et affligeants. : « Je ne peux pas dialoguer avec vous parce que je sais que vous êtes contre le dialogue sous quelque forme que ce soit » (sic).
L’évêque préfère aussi se fier, sans trop d’enquête, aux rapports faux et négatifs qui lui sont faits sur nous (Par qui ? Allez savoir ! ) : « Vous avez enfermé le recteur de Pontmain dans la sacristie » (chose entièrement fausse que nous nions absolument ! mais bien évidemment nous sommes des menteurs) ; « Vous adoptez une posture de combat ».
Bigre ! A croire que nous sommes venus « cum gladiis et fustibus » (avec des épées et des bâtons) pour fracasser des têtes ou faire couler le sang.
Par contre l’argument qui paraît le plus sérieux est toujours celui tiré du droit canon. Il nous est régulièrement asséné par nos adversaires et il est bon de saisir toute la malice qui peut se cacher derrière son utilisation. Il donne l’impression que les évêques ne font que se soumettre à la discipline en vigueur, qu’ils ne peuvent tolérer le « n’importe quoi » et qu’ils sont toujours et partout les gardiens vigilants pour l’application de toutes les règles codifiées par la Sainte Eglise. Tout cela est bien vrai et juste …théoriquement. Mais concrètement nous verrons plus loin dans cet article comment cela se passe en pratique.
En effet l’affaire Mgr Nourrichard, pour ne prendre que celle-là, démontre qu’il y a en fait, deux poids et deux mesures.
En attendant on nous rétorque : Il est vrai que la messe de saint Pie V est désormais permise ; il est vrai aussi que vous n’êtes plus excommuniés ; mais il manque tout de même un petit quelque chose qui nous oblige toujours à vous exclure comme des pestiférés.
Quoi donc ô Grandissime Excellence ?
Votre situation canonique n’est pas encore parfaite. Vous n’êtes pas en communion ou du moins pas en pleine communion et il vous faut encore « cheminer vers la lumière » (sic) !
Ce qui veut dire : acceptez tout ce qu’on vous demande sans discussion sinon vous serez chassés dehors comme des vauriens.
La pleine communion comprenez bien de quoi il s’agit. C’est une sorte de pensée unique que l’ont veut imposer aux clercs, mais attention ! Il ne s’agit pas de leur demander d’accepter tous les dogmes et tous les points de morale que l’Eglise a toujours et partout voulu qu’on observe : rien de plus légitime qu’une telle obligation soit imposée par ceux qui sont en charge de veiller sur la pureté des mœurs et la fidélité doctrinale. Non, il faut surtout et par dessus tout accepter les orientations nouvelles de la pensée conciliaire : nouvelle messe, œcuménisme, liberté de conscience.
Nous sommes donc obligés de conclure que les motifs pour nous exclure ne sont pas solides. Ils ne sont en fait que de la poudre aux yeux, des prétextes qui cachent quelque chose.
Mais quoi exactement ? Pour le savoir imaginez un seul instant qu’un évêque comme Mgr Scherrer ne trouve dans son for intérieur (sa conscience) aucun inconvénient à ce que les prêtres de la FSSPX célèbrent la sainte Messe dans la Basilique à Pontmain pour leur petit pèlerinage annuel. Va-t-il pour autant favoriser une telle chose ? Non il ne le fera pas. Beaucoup de problèmes réels et imaginaires vont se dresser subitement devant lui qui vont le dissuader de se risquer vers cette direction : des problèmes psychologiques et des critiques extérieures très fortes et très méchantes qu’il faudra subir de la part de ses pairs :
« Que va-t-on penser de moi ? Que vont dire mes confrères dans l’épiscopat qui se battent depuis quarante ans contre cette Fraternité honnie ? Certainement ils diront : « En voilà un qui favorise ces galeux d’intégristes ! C’est un traître qui ne fait pas cohésion avec l’assemblée épiscopale ! »
Une telle perspective tétanise nos courageux Pasteurs, même les plus bienveillants. Ils se sont trop habitués à vivre dans « l’ecclésiastiquement correct » et ils ne bougeront plus le petit doigt pour s’opposer à des attitudes que la conscience catholique réprouve : les caractères actuels ne sont plus exercés à témoigner jusqu’à ce point.
Respect humain quand tu nous tiens…aussi sa réaction est bien compréhensible (et nous compatissons) mais pourtant elle est inadmissible (et nous la déplorons).
Il faut le reconnaître, le système de la collégialité a réussi à promouvoir et institutionnaliser une sorte de respect humain au niveau épiscopal et c’est une chose très dommageable pour l’Eglise.
Personne parmi les évêques n’ose se démarquer de ce qu’a statué la CEF (Conférence des Evêques de France) même si la foi ou le bien des âmes doit en pâtir.
Ainsi ce n’est plus le souci de diffuser et d’affermir la foi qui guide principalement chaque Pasteur dans son diocèse ou la recherche du bien des âmes, mais tout doit d’abord avoir au moins l’agrément implicite (et parfois explicite) de la CEF. Chaque Pasteur abdique de son autorité personnelle au profit des décisions collégiales. Disons-le tout net : une telle chose ne correspond pas à ce qu’a voulu le Christ lorsqu’il a institué les évêques.
Comprenez bien. Désormais ce qui est premier et essentiel pour un évêque c’est d’être en parfaite harmonie avec ce qui est voulu par la Collégialité : d’où ces réactions uniformes et irréfléchies contre la Tradition en général et la FSSPX en particulier « irréfléchies » car aucun argument sérieux n’est développé contre la FSSPX, (ce qui serait en soi légitime) mais ils la combattent par des interdits systématiques et ces interdits ont été décidés collégialement par fidélité à Vatican II.
En effet, depuis Vatican II la collégialité est résolument ouverte à l’esprit du monde sécularisé et opposée à la Tradition Catholique qui cherche à rétablir les droits de Dieu dans la société.
Tout l’épiscopat avance ainsi imperturbablement, plus ou moins vite suivant le tempérament de chacun, dans le sens du modernisme destructeur de la foi. Voilà pourquoi les évêques ne trouvent aucune contradiction à autoriser dans leurs églises les pires fantaisies liturgiques : si la CEF ne fustige jamais ces sortes de scandales (ils sont pour elle comme inexistants), pourquoi un évêque le ferait-il personnellement au risque d’être ainsi isolé, de paraître rétrograde et anti Vatican II. Voilà pourquoi certains évêques se permettent aussi d’encourager les cultes hérétiques et puisque le CEF ne désavoue pas cela, personne parmi les évêques ne peut rien dire car se serait manifester une cassure dans la pleine communion. De fait personne ne dit rien.
La preuve ? Nous y venons : Rappelez-vous Mgr Nourrichard qui est allé participer en Angleterre à des ordinations de femmes ! Mgr Nourrichard est en pleine communion avec ses confrères dans l’épiscopat – il n’a jamais été blâmé par aucun d’entres eux, son acte a été plutôt perçu comme une ouverture, un progrès dans les relations avec les communautés séparées ! Ainsi, participer à des ordinations scandaleuses et invalides n’est plus perçu par ses collègues évêques comme un mal grave, ni comme une entorse aux prescriptions du droit canon.
Par contre, quand s’il s’agit de donner quelques miettes favorables à la Tradition (2 petites heures par an dans une Basilique pour la messe) les évêques (la grosse majorité) se montrent alors comme de vrais pharisiens. C’est là que l’on s’aperçoit qu’il y a deux poids, deux mesures dans l’application du code de l’Eglise. Subitement les chefs de diocèses se rappellent qu’il est de leur devoir impérieux d’appliquer de manière très restrictive tous les petits alinéas du droit ecclésiastique contre les contempteurs de leur autorité. C’est un jeu d’enfant alors pour eux que de contrer nos pacifiques et pieux pèlerinages au nom de la fidélité à l’Eglise.
Le : « vous n’êtes pas en pleine communion ! » c’est-à-dire « vous ne pensez pas exactement comme nous au sujet des nouveautés » suffit pour exclure définitivement et en toute légitimité qui ils veulent et quand ils veulent.
En résumé tirons quelques leçons.
1/La collégialité sert actuellement à paralyser l’initiative d’un éventuel évêque qui pourrait avoir des velléités de se tourner vers la Tradition ou lui être favorable même ponctuellement.
2/Elle sert aussi à maintenir certains évêques conservateurs dans le giron de l’Eglise conciliaire par toutes sortes de compromis avec les ultramodernistes, notamment dans leur lutte contre la FSSPX qu’il faut fuir et combattre absolument.
3/Elle sert encore, comme on l’a vu dans l’affaire Nourrichard, à étouffer les scandales de toutes sortes et les actes hérétiques d’un confrère dans l’épiscopat et elle réussit à faire de chacun des évêques, même s’il y a une réprobation dans leur for intérieur de ces scandales, au moins un complice muet.
Où est le respect de Dieu et de l’Eglise dans tout ça ? Pour terminer il serait bon de lire les premiers chapitres de l’Apocalypse de Saint Jean. Dans ce livre inspiré, Jésus- Christ s’adresse à chacun des évêques de sept villes d’Asie mineure. Jésus-Christ ne connaît pas le système de la Collégialité (ou la CEF) : cette institution comme on vous l’a dit est née à Vatican II mais ce n’est pas elle qui va dédouaner de leur responsabilité les Pasteurs des diocèses. Un jour il y aura aussi pour eux le face à face avec le Christ qui leur demandera un compte sévère de leur gestion. Et alors la maltraitance des catholiques de la Tradition qui ne demandent qu’à prier tranquillement selon leur droit sera dans la balance du jugement : ils feraient bien de s’en souvenir !
Lisons un passage de l’Apocalypse. Jésus-Christ s’adresse à l’évêque de Laodicée :
« Je connais tes œuvres : tu n’es ni froid ni chaud. Plût à Dieu que tu fusses froid ou chaud ! Aussi, parce que tu es tiède et que tu n’es ni froid ni chaud, je vais te vomir de ma bouche. Tu dis : Je suis riche, j’ai acquis de grands biens, je n’ai besoin de rien ; et tu ne sais pas que tu es un malheureux, un misérable, pauvre, aveugle et nu, je te conseille de m’acheter de l’or éprouvé par le feu, afin que tu deviennes riche ; des vêtements blancs pour te vêtir et ne pas laisser paraître la honte de ta nudité ; et un collyre pour oindre tes yeux, afin que tu voies. Moi, je reprends et je châtie ce que j’aime ; aie donc du zèle et repens toi…. »
Prions donc pour les évêques : que le Seigneur retire le voile qui cache leurs yeux et qu’ils parviennent eux aussi à la connaissance du Christ et de Celui qui l’a envoyé.
De notre côté ne nous étonnons pas trop si les portes de la Basilique à Pontmain étaient fermées par les conciliaires et les partisans de l’œcuménisme (c’est ‑à-dire ceux qui accueillent tous les faux cultes dans l’Eglise sauf la FSSPX) : Le Christ nous l’a prédit
« Car, on vous chassera des synagogues (des églises) …Ils vous traiteront de la sorte, parce qu’ils ne connaissent ni mon Père, ni Moi. » (St Jean ch 15)
Abbé Pierre Barrère
Extrait du Sainte-Anne n° 230 de juin 2011