Editorial de juin 2011 – La folie du sacerdoce

La folie du sacerdoce

Prions pour les prêtres en ce mois de juin, car ils sont un don du Sacré-​Cœur, la mani­fes­ta­tion de l’Amour de Dieu pour nos âmes. Comme de cou­tume, les Ordinations sacer­do­tales en la Fête des saints Pierre et Paul don­ne­ront à l’Eglise toute entière, de nou­veaux prêtres dans la Vigne du Seigneur. Chaque prêtre, en fêtant l’an­ni­ver­saire de son Ordination, dit après la col­lecte de la Sainte Messe, l’o­rai­son spé­ciale pour son propre sacer­doce « pro seip­so sacer­dote ». Quelle grâce de célé­brer les Saints Mystères qui sont le fait de l’im­mense misé­ri­corde de Dieu et non pas la consé­quence de nos propres mérites…

Apostol vous offre ce mois-​ci quelques réflexions sur le prêtre : est-​il encore néces­saire dans un monde qui se suf­fit à lui-​même et qui veut se pas­ser de Dieu ? A‑t-​il encore sa place dans nos propres com­mu­nau­tés parois­siales et nos Prieurés ? Il est légi­time de se poser la ques­tion ! En effet, les prêtres sont trop peu nom­breux, et il a bien fal­lu s’or­ga­ni­ser sans eux. Bien sou­vent, leurs défauts nous scan­da­lisent… On veut des prêtres saints ou per­sonne ! Enfin, mieux vau­drait avoir des prêtres qui nous donnent le strict néces­saire, qui ne nous dérangent sur­tout pas, en un mot des « dis­tri­bu­teurs de sacre­ments », la vie étant déjà si compliquée !

A cela, il faut répondre sans ambages que le Bon Dieu nous demande de por­ter un regard de foi sur le prêtre. Nous avons besoin du Christ pour connaître le che­min du ciel, et le prêtre, alter Christus, est une bous­sole pour le monde. Le Roi David le dit dans le Psaume XV qui nous chante le bon­heur du Juste qui a choi­si Dieu pour sa part :

« Tu me feras connaître le sen­tier de la vie ; il y a plé­ni­tude de joie devant ta face, des délices à ta droite, pour tou­jours ! ».

Le prêtre est le témoin de la présence de Jésus-​Christ dans le monde.

Les juifs et les païens ont cru pou­voir éli­mi­ner Jésus, La Babylone actuelle croit pou­voir éli­mi­ner ses prêtres. Mais Jésus règne tou­jours. Ses prêtres sont inlas­sa­ble­ment ses témoins vivants et publics par la sou­tane, le cha­pe­let, et les prieu­rés d’où ils rayonnent. L’opposition au sacer­doce ne fai­bli­ra pas, mais notre réponse est celle du Christ : « La défense humble, mais forte, éner­gique, imper­tur­bable, de sa mis­sion vis-​à-​vis des pha­ri­siens, qui l’in­sultent en refu­sant de croire à sa mis­sion, est une des choses les plus sublimes dans l’Evangile. Quelle séré­ni­té ! Quel calme ! Quelle pleine pos­ses­sion de la véri­té se mani­feste en Notre-​Seigneur ! Elle désarme tous ses ennemis :

« Jusques à quand tiendras-​tu notre âme en sus­pend ? Si tu es le Christ, dis-​le nous ouver­te­ment. – Je vous parle et vous ne me croyez point ; les œuvres que je fais au nom de mon Père rendent témoi­gnage de moi (Jn 10, 24–25) ». (Mgr Lefebvre, notes de retraites, 1938)

Le prêtre n’est bous­sole que parce qu’il est ins­tru­ment de la grâce

« Le prêtre est ministre de Jésus-​Christ, donc ins­tru­ment entre les mains du divin Rédempteur pour la conti­nua­tion de son œuvre rédemp­trice dans toute son uni­ver­sa­li­té mon­diale et sa divine effi­ca­ci­té, pour la construc­tion de cette œuvre admi­rable qui trans­forme le monde ». (Pie XI Ad catho­li­ci sacer­do­tii fas­ti­gium).

Il en res­sort que l’ins­tru­ment doit être docile en conti­nuant ce que le Christ a inau­gu­ré sur cette terre : l’Evangile. C’est d’abord la vie cachée, faire le bien et prier dans le secret.

Mais cet ins­tru­ment qu’est le prêtre doit paraître bon devant les hommes : C’est aus­si la vie publique. La Très Sainte Vierge, Saint Joseph, et plus récem­ment Sainte Thérèse de l’Enfant-​Jésus, car­mé­lite de Lisieux dont les reliques sillonnent le monde, furent par­mi les plus cachés des saints, et aujourd’hui les plus connus !

Dieu fait luire comme Il veut ceux qui sont mis sous le bois­seau. L’abbé Berto, théo­lo­gien per­son­nel de Mgr Lefebvre au Concile, fai­sait la réflexion sui­vante : « il ne faut pas nous croire trop obli­gés de paraître ; cela doit pou­voir don­ner place à bien des illu­sions ». (Le cénacle et le jar­din, p 225).

Comprenons bien que c’est Dieu qui uti­lise son ins­tru­ment, et non pas l’in­verse ! Plus nous sommes inté­rieurs, plus nous sommes dociles à l’instrumentalité divine, et plus nous pro­dui­sons de fruits. Ce n’est ni le nombre, ni la publi­ci­té, ni nos inter­ven­tions sociales qui donnent la grâce.

Osons cet acte de foi dans le sacer­doce ! Le moder­nisme théo­rique a fait som­brer le sacer­doce dans son égout col­lec­teur de toutes les héré­sies (St Pie X). Prenons garde à notre tour de ne pas le détruire dans les eaux du moder­nisme pra­tique, qui tente d’instrumentaliser le prêtre pour tel par­ti, le pro­fa­ner par nos paroles, et décou­ra­ger fina­le­ment les futures vocations.

St Paul a par­lé de la folie de la Croix ; il pour­rait par­ler de la folie du sacerdoce !

Aimons les prêtres, prions pour eux, exal­tons le sacer­doce : c’est la meilleur façon de tou­cher le Sacré-​Cœur pour en obte­nir de plus saints et plus nombreux.

Abbé Renaud de la Motte +, Prieur

Extrait de Apostol n° 45 de juin 2011