Mars 2012 – Dans le monde, pas du monde, par l’abbé John Brucciani

Dans le monde, pas du monde

Bien chers parois­siens et amis,

C’est fait, on ne peut y échap­per. Noël et l’Epiphanie sont pas­sées, Pâques est à venir mais est encore loin, et entre-​temps, il faut faire péni­tence.

Nous appré­hen­dons chaque année le Carême. Les cho­co­lats accu­mu­lées à Noël sont si déli­cieux. Ils nous tentent depuis le fond de leurs boîtes. Hélas, on ne peut plus les dégus­ter. Il faut faire pénitence.

A l’i­mage de notre Maître et Sauveur, nous devons mettre de la dis­tance entre nous-​mêmes et le monde. Notre Seigneur s’est reti­ré dans le désert pour prier et jeûner.

Nous devons aus­si nous reti­rer dans le désert inté­rieur de notre âme pour jeu­ner et prier. Notre âme est en effet un désert. Rudesse de sen­ti­ments, tié­deur dans la prière, tour­billons et bour­rasques d’é­mo­tions contraires, séche­resse géné­rale. Et ci et là les bêtes sau­vages de la ten­ta­tion et du vice qui nous traquent, et qui hurlent dans la nuit pour nous faire peur.

C’est dans ce désert que Dieu nous invite. Il le connaît et Il nous assure qu’Il nous accom­pagne. La visite fait peur et c’est pour­quoi nous n’ai­mons pas la faire. Mais faire il le faut, de peur de nous croire quel­qu’un alors que nous ne sommes personne.

Carême est donc une retraite de 40 jours, ali­men­tée par des lec­tures et des prières, où nous essayons vrai­ment de croire et d’ac­cep­ter que nous ne sommes que pous­sière, et qu’en pous­sière nous retournerons.

Et pen­dant ce par­cours de notre désert inté­rieur, nous jeû­nons. Nous renon­çons à de la nour­ri­ture, aux sucre­ries et autres petits plai­sirs savou­reux et légitimes.

Nous jeû­nons aus­si de mille autres manières : nous rédui­sons l’u­ti­li­sa­tion de l’é­cran, nous renon­çons à cer­taines acti­vi­tés mon­daines si cela est pos­sible et si nous n’of­fen­sons pas notre invi­té. Nous étei­gnons le lec­teur DVD pour l’in­té­gra­li­té de ce temps de péni­tence, etc.

La retraite dans le désert et la pra­tique du jeûne sont les aspects néga­tifs du Carême. Ils pré­parent le ter­rain pour un action plus posi­tive et plus enri­chis­sante : la prière et la méditation.

En effet, le silence fait, nous arri­ve­rons à per­ce­voir la douce voix de Dieu qui chu­chote comme le mur­mure du vent et le bruis­se­ment léger d’une forêt d’au­tomne. Dieu ne nous parle jamais avec une voix claire et dis­tincte. Nous ne L’entendons jamais direc­te­ment. Nous savons seule­ment quand Il nous a parlé.

La prière et la médi­ta­tion se font sous forme de lec­ture sui­vie, d’un cha­pe­let réci­té à genoux, d’une messe sui­vie en semaine, d’une œuvre de misé­ri­corde. Les livres de dom Marmion consti­tuent un excellent sou­tien qui élève notre âme et lui fait visi­ter les som­mets de la contem­pla­tion bénédictine.

L’objet de ce temps de retraite et de péni­tence est de nous rap­pe­ler que nous ne sommes que de pas­sage ici-​bas. Notre vraie patrie, là où nous serons plei­ne­ment ras­sa­siés, où tout sera juste et équi­li­bré, est le ciel. Quel can­di­dat à la pré­si­den­tielle ose­rait rap­pe­ler cela ?

Abbé John Brucciani

Extrait duBelvédère n° 14 de mars 2012