Clément XI

243ᵉ Pape ; de 1700 à 1721

8 septembre 1713

Bulle pontificale Unigenitus

Condamnation du jansénisme

Cette bulle condamne de la manière la plus ferme et la plus solen­nelle, le livre le Nouveau Testament en fran­çais avec des Réflexions morales comme conte­nant de nom­breuses pro­po­si­tions héré­tiques qui reprennent la doc­trine de Jansénius. Ce livre, quoique déjà condam­né, jouit hélas encore d’une grande répu­ta­tion d’intégrité et d’une grande dif­fu­sions auprès des fidèles, si bien que nombres d’évêques ain­si que le roi de France ont récla­mé une inter­ven­tion du Saint Siège.

Clément, Évêque,
Serviteur des ser­vi­teurs de Dieu,

À tous les fidèles chré­tiens,
Salut et béné­dic­tion apostolique.

Lorsque le Fils Unique de Dieu, qui s’est fait Fils de l’Homme pour notre Salut, et pour celui de tout le monde, ensei­gnait à ses Disciples la doc­trine de véri­té, et lors­qu’il ins­trui­sait l’Eglise uni­ver­selle dans la per­sonne de ses Apôtres, il don­na des pré­ceptes pour for­mer cette Eglise nais­sante ; et pré­voyant ce qui devait l’a­gi­ter dans les Siècles futurs, il sut pour­voir à ses besoins par un excel­lente et salu­taire aver­tis­se­ment ; c’est de nous tenir en garde contre les faux Prophètes, qui viennent à nous revê­tus de la peau des bre­bis ; et il désigne prin­ci­pa­le­ment sous ce nom, ces maîtres de men­songes, ces séduc­teurs plein d’ar­ti­fices, qui ne font écla­ter dans leur dis­cours les appa­rences de la plus solide pié­té, que pour insi­nuer imper­cep­ti­ble­ment leurs dogmes dan­ge­reux, et que pour intro­duire sous les dehors de la sain­te­té, des sectes qui conduisent les hommes à leur perte ; sédui­sant avec d’au­tant plus de faci­li­té ceux qui ne se défient pas de leurs per­ni­cieuses entre­prises, que comme des Loups, qui dépouillent leur peau pour se cou­vrir de la peau des bre­bis, ils s’en­ve­loppent, pour ain­si par­ler, des maximes de la lois divines, des pré­ceptes des Saintes Ecritures, dont ils inter­prètent mali­cieu­se­ment les expres­sions, et de celles même du Nouveau Testament, qu’ils ont l’a­dresse de cor­rompre en diverses manières pour perdre les autres, et pour se perdre eux-​mêmes : Vrais fils de l’an­cien père de men­songe, ils ont appris par son exemple et par ses ensei­gne­ments, qu’il n’est point de voie plus sure ni plus prompte pour trom­per les âmes, et pour leur insi­nuer le venin des erreurs les plus cri­mi­nelles, que de cou­vrir ses erreurs de l’au­to­ri­té de la Parole de Dieu.

Pénétrés de ces divines ins­truc­tions, aus­si­tôt que nous eûmes appris dans la pro­fonde amer­tume de notre cœur, qu’un cer­tain Livre impri­mé autre­fois en langue fran­çaise, et divi­sé en plu­sieurs tomes, sous ce titre, le Nouveau Testament en fran­çais, avec des Réflexions morales, etc… Que ce Livre, quoique l’eus­sions déjà condam­né parce qu’en effet les Vérités Catholiques y sont confon­dues avec plu­sieurs dogmes faux et dan­ge­reux, pas­sait encore dans l’o­pi­nion de beau­coup de per­sonnes pour un Livre exempt de toute sorte d’er­reurs : qu’on le met­tait par­tout entre les mains des fidèles et qu’il se repen­dait de tous cotés par les soins affec­tés de cer­tains esprits remuants, qui font de conti­nuelles ten­ta­tives en faveur des nou­veau­tés : qu’on l’a­vait même tra­duit en Latin afin que la conta­gion de ses maximes per­ni­cieuses pas­sa, s’il était pos­sible, de nation en nation, et de Royaume en Royaume : Nous fûmes sai­sis d’une très vive dou­leur de voir le trou­peau du Seigneur, qui est com­mis à nos soins, entraî­né dans la voie de per­di­tion par des insi­nua­tions si sédui­santes et si trom­peuses : ain­si donc éga­le­ment exci­tés par nos sol­li­ci­tudes Pastorales, par les plaintes réité­rées des per­sonnes, qui ont un vrai zèle pour la Foi ortho­doxe, sur­tout par les Lettres et par les prières d’un grand nombre de nos véné­rables frères les Évêques de France, nous avons pris la réso­lu­tion d’ar­rê­ter par quelque remède le cours d’un mal qui crois­sait tou­jours et qui pour­rait avec le temps pro­duire les plus funestes effets.

Après avoir don­né toute notre appli­ca­tion à décou­vrir la cause d’un mal si pres­sant, et après avoir fait sur ce sujet, de mûres et de sérieuses réflexions, Nous avons enfin recon­nu très dis­tinc­te­ment que le pro­grès dan­ge­reux qu’il a fait et qui s’aug­mente tous les jours, vient prin­ci­pa­le­ment de ce que le venin de ce livre est très caché, sem­blable à un abcès dont la pour­ri­ture ne peut sor­tir qu’a­près qu’on y a fait des inci­sions. En effet, à la pre­mière ouver­ture du livre, le Lecteur se sent agréa­ble­ment atti­ré par de cer­taines appa­rences de pié­té. Le style de cet ouvrage est plus doux et plus cou­lant que l’huile : mais ses expres­sions sont comme ces traits prêts à par­tir d’un arc, qui n’est ten­du que pour bles­ser imper­cep­ti­ble­ment ceux qui ont le cœur droit. Tant de motifs nous ont don­né lieu de croire que nous ne pou­vons rien faire de plus à pro­pos ni plus salu­taire, après avoir jus­qu’à pré­sent mar­qué en géné­ral la doc­trine arti­fi­cieuse de ce Livre, que d’en décou­vrir les erreurs en détail ; et que de les mettre plus clai­re­ment et plus dis­tinc­te­ment devant les yeux de tous les Fidèles, par un extrait de plu­sieurs pro­po­si­tions conte­nues dans l’ou­vrage où nous leur feront voir l’i­vraie dan­ge­reuse sépa­rée du bon grain qui la cou­vrait. Par ce moyen nous dévoi­le­rons, et nous met­trons au grand jour, non seule­ment quelques unes de ces erreurs ; mais nous en expo­se­rons un grand nombre des plus per­ni­cieuses, soit qu’elles aient été déjà condam­nées, soit qu’elles aient été inven­tées depuis peu. Nous espé­rons que le Ciel béni­ra nos soins ; et que nous ferons si bien connaître et si bien sen­tir la véri­té, que tout le monde sera for­cé de suivre ses lumières.

Ce ne sont pas seule­ment les Évêques ci-​dessus men­tion­nés, qui nous ont témoi­gné que par ce moyen nous ferions une chose très utile et très néces­saire pour l’in­té­rêt de la Foi Catholique et pour le repos des consciences et que nous met­trions fin aux diverses contes­ta­tions, qui se sont éle­vées prin­ci­pa­le­ment en France, et qui doivent leur ori­gine à de cer­tains esprits, qui veulent se dis­tin­guer par une doc­trine nou­velle, et qui tâchent de faire naître dans ce Royaume flo­ris­sant des divi­sions encore plus dan­ge­reuses ; mais même notre très-​cher fils en Jésus-​Christ, Louis Roi de France Très-​Chrétien, dont nous ne pou­vons assez louer le zèle pour la défense et pour la conser­va­tion de la Foi Catholique, et pour l’ex­tir­pa­tion des héré­sies ; ce Prince par ses ins­tances réité­rées et dignes d’un Roi Très-​Chrétien, nous a for­te­ment sol­li­ci­té de remé­dier inces­sam­ment au besoin pres­sant des âmes par l’au­to­ri­té d’un Jugement Apostolique.

Touchés de ces rai­sons, ami­nés par le Seigneur, et met­tant notre confiance en son divin secours, nous avons cru devoir faire une si sainte entre­prise, et nous y sommes atta­chés avec le soin et toute l’ap­pli­ca­tion, que l’im­por­tance de l’af­faire pou­vait exi­ger. D’abord, nous avons fait exa­mi­ner par plu­sieurs Docteur en Théologie, en pré­sence de deux de nos véné­rables frères Cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, un grand nombre de pro­po­si­tions extraites avec fidé­li­té et res­pec­ti­ve­ment des dif­fé­rentes édi­tions dudit Livre, tant fran­çaises que latines dont nous avons par­lé ci-​dessus : Nous avons ensuite été pré­sents à cet exa­men : Nous y avons appe­lé plu­sieurs autres Cardinaux pour avoir leurs avis. Et après avoir confron­té pen­dant tout le temps et avec toute l’at­ten­tion néces­saire cha­cune des pro­po­si­tions avec le texte du livre, Nous avons ordon­né qu’elles fussent exa­mi­nées, et dis­cu­tées très soi­gneu­se­ment, dans plu­sieurs Congrégations, qui se sont tenues à cet effet. Les pro­po­si­tions dont il s’a­git, sont celles qui suivent.

  1. Que reste-​t-​il à une âme, qui a per­du Dieu et sa grâce, sinon le péché et ses suites, une orgueilleuse pau­vre­té et une indi­gence pares­seuse, c’est-​à-​dire, une impuis­sance géné­rale au tra­vail, à la prière, et à tout bien ? Luc 16, 3 (édi­tions 1693, 1699) 
  2. La grâce de Jésus-​Christ, prin­cipe effi­cace de toute sorte de bien, est néces­saire pour toute bonne action, grande ou petite, facile ou dif­fi­cile, pour la com­men­cer, la conti­nuer et l’a­che­ver. Sans elle, non seule­ment on ne fait rien, mais on ne peut rien faire. Jean 15, 5 (édi­tion 1693) 
  3. En vain vous com­man­dez, Seigneur, si vous ne don­nez vous-​même ce que vous com­man­dez. Actes des Apôtres 16,10 (édi­tions 1693, 1699) 
  4. Oui, Seigneur, tout est pos­sible à celui à qui vous ren­dez tout pos­sible, en le fai­sant en lui. Marc 9, 22 (édi­tions 1693, 1699) 
  5. Quand Dieu n’a­mol­lit pas le cœur par l’onc­tion inté­rieure de sa grâce, les exhor­ta­tions et les grâces exté­rieures ne servent qu’à l’en­dur­cir davan­tage. Romains 9, 18 (édi­tion 1693) 
  6. Quelle dif­fé­rence, ô mon Dieu, entre l’al­liance Judaïque et l’al­liance Chrétienne ! L’une et l’autre a pour condi­tion le renon­ce­ment au péché et l’ac­com­plis­se­ment de votre Loi : mais là, vous l’exi­gez du pécheur en le lais­sant dans son impuis­sance ; ici vous lui don­nez ce que vous lui com­man­dez en le puri­fiant par votre grâce. Romains, 11, 27 (édi­tions 1693, 1699) 
  7. Quel avan­tage y a‑t-​il pour l’homme dans une alliance, où Dieu le laisse à sa propre fai­blesse, en lui impo­sant sa Loi ? Mais quel bon­heur n’y a‑t-​il point d’en­trer dans une alliance où Dieu nous donne ce qu’il demande de nous ? Hébreux 8, 7 (édi­tions 1693, 1699) 
  8. Nous n’ap­par­te­nons à la nou­velle alliance, qu’au­tant que nous avons part à cette nou­velle grâce qui opère en nous ce que Dieu nous com­mande. Hébreux 8, 10 (édi­tions 1693, 1699) 
  9. Ce n’est que par la grâce de Jésus-​Christ que nous sommes à Dieu ; Grâce sou­ve­raine sans laquelle on ne peut jamais confes­ser Jésus-​Christ, et avec laquelle on ne le renie jamais. 1 Corinthiens 12, 3 (édi­tion 1693) 
  10. La com­pas­sion de Dieu sur nos péchés, c’est son amour pour le pécheur ; cet amour la source de la grâce, cette grâce une opé­ra­tion de la main toute-​puissante de Dieu, que rien ne peut empê­cher ni retar­der. Matthieu 20, 34 (édi­tions 1693, 1699) 
  11. La grâce peut tout répa­rer en un moment, parce que ce n’est autre chose que la volon­té toute puis­sante de Dieu, qui com­mande et qui fait tout ce qu’il com­mande. Marc 2, 11 (édi­tions 1693, 1699) 
  12. Quand Dieu veut sau­ver l’âme, en tout temps, en tout lieu, l’in­du­bi­table effet suit le vou­loir d’un Dieu. Marc 2, 11 (édi­tions 1693, 1699) 
  13. Quand Dieu veut sau­ver une âme, et qu’il la touche de la main inté­rieure de sa grâce, nulle volon­té humaine ne lui résiste. Luc 5, 13 (édi­tion 1693) 
  14. Quelque éloi­gné que soit du salut un pécheur obs­ti­né, quand Jésus se fait voir à lui par la lumière salu­taire de sa grâce, il faut qu’il se rende, qu’il accoure, qu’il s’hu­mi­lie, et qu’il adore son Sauveur. Marc 5, 6–7 (édi­tion 1693) 
  15. Quand Dieu accom­pagne son com­man­de­ment et sa parole exté­rieure de l’onc­tion de son esprit, et de la force inté­rieure de sa grâce, elle opère dans le cœur l’o­béis­sance qu’elle demande. Luc 9, 60 (édi­tions 1693, 1699) 
  16. Il n’y a point de charmes qui ne cèdent à ceux de la grâce, parce que rien ne résiste au Tout- uis­sant. Actes des Apôtres 8, 12 (édi­tions 1693, 1699) 
  17. La grâce est donc cette voix du Père, qui enseigne inté­rieu­re­ment les hommes, et les fait venir à Jésus-​Christ. Quiconque ne vient pas à lui, après avoir enten­du la voix exté­rieure du Fils, n’est point ensei­gné par le Père. Jean 6, 45 (édi­tions 1693, 1699) 
  18. La semence de la parole, que la main de Dieu arrose, porte tou­jours son fruit. Actes des Apôtres 11, 21 (édi­tions 1693, 1699) 
  19. La grâce de Dieu n’est autre chose que sa volon­té toute-​puissante. C’est l’i­dée que Dieu nous en donne lui-​même dans toutes ses Ecritures. Romains 14, 4 (édi­tions 1693, 1699) 
  20. La vraie idée de la grâce est que Dieu veut que nous lui obéis­sions, et il est obéi ; il com­mande, et tout se fait ; il parle en Maître, et tout est sou­mis. Marc 4, 39 (édi­tions 1693, 1699) 
  21. La grâce de Jésus-​Christ est une grâce… divine, comme créée pour être digne du Fils de Dieu, forte, puis­sante, sou­ve­raine, invin­cible, comme étant l’o­pé­ra­tion de la volon­té toute-​puissante, une suite et une imi­ta­tion de l’o­pé­ra­tion de Dieu incar­nant et res­sus­ci­tant son Fils. 2 Corinthiens 5, 21 (édi­tions 1693, 1699) 
  22. L’accord de l’o­pé­ra­tion toute-​puissante de Dieu dans le cœur de l’homme, avec le libre consen­te­ment de sa volon­té, nous est mon­tré d’a­bord dans l’Incarnation, comme dans la source et le modèle de toutes les autres opé­ra­tions de misé­ri­corde et de grâce, toutes aus­si gra­tuites et aus­si dépen­dante de Dieu que cette opé­ra­tion ori­gi­nale. Luc 1, 38 (édi­tions 1693, 1699) 
  23. Dieu, dans la foi d’Abraham à laquelle les pro­messes étaient atta­chées, nous a don­né lui-​même, l’i­dée qu’il veut que nous ayons de l’o­pé­ra­tion toute-​puissante de sa grâce dans nos cœurs, en la figu­rant par celle, qui tire les créa­tures du néant, et qui redonne la vie aux morts. Romains, 4, 17 (édi­tions 1693, 1699) 
  24. L’idée juste qu’a le Centenier de la toute-​puissance de Dieu et de Jésus-​Christ sur les corps, pour les gué­rir par le seul mou­ve­ment de sa volon­té, est l’i­mage de celle qu’on doit avoir de la toute-​puissance de sa grâce, pour gué­rir les âmes de la cupi­di­té. Luc 7, 7 (édi­tions 1693, 1699) 
  25. Dieu éclaire l’âme et la gué­rit, aus­si bien que le corps par sa seule volon­té ; il com­mande, et il est obéi. Luc 18, 42 (édi­tions 1693, 1699) 
  26. Point de grâces que par la Foi. Luc 8, 48 (édi­tions 1693, 1699) 
  27. La Foi est la pre­mière grâce et la source de toutes les autres. 2e Épître de Pierre 1, 3 (édi­tions 1693, 1699) 
  28. La pre­mière grâce que Dieu accorde au pécheur, c’est le par­don de ses péchés. Marc 11, 25 (édi­tions 1693, 1699) 
  29. Hors d’elle, l’Eglise, point de grâce. Luc 10, 35–36 (édi­tions 1693, 1699) 
  30. Tous ceux que Dieu veut sau­ver par Jésus-​Christ ; le sont infailli­ble­ment. Jean 6, 40 (édi­tions 1693, 1699) 
  31. Les sou­haits de Jésus ont tou­jours leur effet : il porte la paix jusque au fonds des cœurs quand il la leur désire. Jean 20, 19 (édi­tions 1693, 1699) 
  32. Assujettissement volon­taire, médi­ci­nal et divin de Jésus-​Christ…. De se livrer à la mort, afin de déli­vrer pour jamais par son sang les ainés, c’est-​à-​dire les élus, de la main de l’ange exter­mi­na­teur. Épître aux Galates, 4, 4, 5 et 6,7 (édi­tions 1693, 1699) 
  33. Combien faut-​il avoir renon­cé aux choses de la terre et à soi-​même, pour avoir la confiance de s’ap­pro­prier, pour ain­si dire, Jésus-​Christ son amour, sa mort, et ses Mystères, comme fait saint Paul en disant : il m’a aimé et s’est livré pour moi. Epître au Galates 2, 20 (édi­tions 1693, 1699) 
  34. La grâce d’Adam… ne pro­dui­sait que des mérites humains. 2 Corinthiens, 5, 21 (édi­tion 1693) et Jean 1, 16 (édi­tions 1693, 1699) 
  35. La grâce d’Adam est une suite de la créa­tion et était due à la nature saine et entière. 2 Corinthiens 5, 21 (édi­tions 1693, 1699) 
  36. C’est une dif­fé­rence essen­tielle de la grâce d’Adam et de l’é­tat d’in­no­cence d’a­vec la grâce Chrétienne, que cha­cun aurait reçu la pre­mière en sa propre per­sonne ; au lieu qu’on ne reçoit celle-​ci qu’en la per­sonne de Jésus-​Christ res­sus­ci­té à qui nous sommes unis. Romains 7, 4 (édi­tions 1693, 1699) 
  37. La grâce d’Adam le sanc­ti­fiant en lui-​même, lui était pro­por­tion­née : la grâce Chrétienne nous sanc­ti­fiant en Jésus-​Christ est toute puis­sante et digne du Fils de Dieu. Éphésiens 1, 6 (édi­tions 1693, 1699) 
  38. Le pécheur n’est libre que pour le mal sans la grâce du Libérateur. Luc 8, 29 (édi­tions 1693, 1699) 
  39. La Volonté qu’elle, la grâce, ne pré­vient point, n’a de lumière que pour s’é­ga­rer, d’ar­deur que pour se pré­ci­pi­ter, de force que pour se bles­ser ; capable de tout mal, impuis­sante à tout bien. Matthieu, 20, 3–4 (édi­tions 1693, 1699) 
  40. Sans laquelle, cette grâce de Jésus-​Christ, nous ne pou­vons rien aimer qu’à notre condam­na­tion. 2 Thessaloniciens, 3, 18 (édi­tions 1693, 1699) 
  41. Toute connais­sance de Dieu, même natu­relle, même dans les phi­lo­sophes païens, ne peut venir que de Dieu ; sans la grâce, elle ne pro­duit qu’or­gueil, que vani­té, qu’op­po­si­tion à Dieu même, au lieu des sen­ti­ments d’a­do­ra­tion, de recon­nais­sance et d’a­mour. Romains 1, 19 (édi­tions 1693, 1699) 
  42. Il n’y a que la grâce de Jésus-​Christ qui rende l’homme propre au sacri­fice de la foi ; sans cela, rien qu’im­pu­re­té, rien qu’in­di­gni­té. Actes des Apôtres, 11, 9 (édi­tions 1693, 1699) 
  43. Le pre­mier effet de la grâce, du bap­tême, est de nous faire mou­rir au péché ; en sorte que l’es­prit, le cœur, les sens, n’aient non plus de vie pour le péché, que ceux d’un mort pour les choses du monde. Romains 6, 2 (édi­tion 1699) 
  44. Il n’y a que deux amours d’où naissent toutes nos volon­tés et toutes nos actions ; l’a­mour de Dieu qui fait tout pour Dieu et que Dieu récom­pense ; l’a­mour de nous même et du monde, qui ne rap­porte pas à Dieu ce qui doit lui être rap­por­té, et qui par cette rai­son même devient mau­vais. Jean 5, 29 (édi­tions 1693, 1699) 
  45. Quand l’a­mour de Dieu ne règne plus dans le cœur, du pécheur, il est néces­saire que la cupi­di­té char­nelle y règne, et cor­rompe toutes ses actions. Luc 15, 13 (édi­tion 1693) 
  46. La cupi­di­té ou la cha­ri­té rendent l’u­sage des sens bon ou mau­vais. Matthieu 5, 28 (édi­tions 1693, 1699) 
  47. L’obéissance à la Loi doit cou­ler de source, et cette source c’est la cha­ri­té. Quand l’a­mour de Dieu en est le prin­cipe inté­rieur et sa gloire la fin, le dehors est net ; sans cela ce n’est qu’­hy­po­cri­sie, ou fausse jus­tice. Matthieu 23, 26 (édi­tions 1693, 1699) 
  48. Que peut-​on être autre chose que ténèbres, qu’é­ga­re­ment, et que péché sans la lumière de la Foi, sans Jésus-​Christ, sans la cha­ri­té ? Ephésiens 5, 8 (édi­tions 1693, 1699) 
  49. Nul péché sans l’a­mour de nous-​mêmes, comme nulle bonne œuvre sans l’a­mour de Dieu. Marc 7, 22–23 (édi­tions 1693, 1699) 
  50. C’est en vain qu’on crie à Dieu, mon père, si ce n’est point l’es­prit de cha­ri­té qui crie. Romains 8, 15 (édi­tions 1693, 1699) 
  51. La foi jus­ti­fie quand elle opère ; mais elle n’o­père que par la cha­ri­té. Actes des Apôtres 13, 39 (édi­tions 1693, 1699) 
  52. Tous les autres moyens de salut sont ren­fer­més dans la foi, comme dans leur germe et leur semence : mais ce n’est pas une foi sans amour et sans confiance. Actes des Apôtres 10, 43 (édi­tions 1693, 1699) 
  53. La seule cha­ri­té les fait, les actions chré­tiennes, chré­tien­ne­ment par rap­port à Dieu et à Jésus-​Christ. Colossiens 3, 14 (édi­tions 1693, 1699) 
  54. C’est elle seule, la cha­ri­té, qui parle à Dieu ; c’est elle seule que Dieu entend. I Corinthiens 13, 1 (édi­tions 1693, 1699) 
  55. Dieu ne cou­ronne que la cha­ri­té ; qui court par un autre mou­ve­ment et un autre motif, court en vain. I Corinthien 9, 24 (édi­tions 1693, 1699) 
  56. Dieu ne récom­pense que la cha­ri­té, parce que la cha­ri­té seule honore Dieu. Matthieu, 25, 36 (édi­tions 1693, 1699) 
  57. Tout manque à un pécheur quand l’es­pé­rance lui manque ; et il n’y a point d’es­pé­rance en Dieu où il n’y a point d’a­mour de Dieu. Matthieu 27, 5 (édi­tions 1693, 1699) 
  58. Il n’y a ni Dieu, ni Religion, où il n’y a point de cha­ri­té. Jean 4, 8 (édi­tions 1693, 1699) 
  59. La prière des impies est un nou­veau péché ; et ce que Dieu leur accorde un nou­veau juge­ment sur eux. Jean, 10, 25 (édi­tions 1693, 1699) 
  60. Si la seule crainte du sup­plice anime le repen­tir, plus ce repen­tir est violent, plus il conduit au déses­poir. Matthieu, 27, 5 (édi­tions 1693, 1699) 
  61. La crainte n’ar­rête que la main ; et le cœur est livré au péché, tant que l’a­mour de la jus­tice ne le conduit point. Luc 26, 19 (édi­tions 1693, 1699) 
  62. Qui ne s’abs­tient du mal que par la crainte du châ­ti­ment, le com­met dans son cœur, et est déjà cou­pable devant Dieu. Matthieu, 21, 46 (édi­tions 1693, 1699) 
  63. Un bap­ti­sé est encore sous la Loi comme un Juif, s’il l’ac­com­plit point la Loi ou s’il l’ac­com­plit par la seule crainte. Romains, 6, 14 (édi­tions 1693, 1699) 
  64. Sous la malé­dic­tion de la Loi, on ne fait jamais le bien, parce qu’on pèche, ou en fai­sant le mal ou ne l’é­vi­tant que par la crainte. Galates, 5, 18 (édi­tions 1693, 1699) 
  65. Moïse et les Prophètes, les Prêtres et les Docteurs de la Loi, sont morts sans don­ner d’en­fants à Dieu, n’ayant fait que des esclaves par la crainte. Marc 12, 19 (édi­tions 1693, 1699) 
  66. Qui veut s’ap­pro­cher de Dieu, ne doit ni venir à lui avec des pas­sions bru­tales, ni se conduire par un ins­tinct natu­rel, ou par la crainte comme les bêtes, mais par la foi et par l’a­mour comme les enfants. Hébreux, 12, 20 (édi­tions 1693, 1699) 
  67. La crainte ser­vile ne se le repré­sente, Dieu, que comme un maître dur, impé­rieux, injuste, intrai­table. Luc, 19, 21 (édi­tion 1693) 
  68. Quelle bon­té de Dieu d’a­voir ain­si abré­gé la voie du salut, en ren­fer­mant tout dans la foi et dans la prière ! Actes des Apôtres, 2, 21 (édi­tions 1693, 1699) 
  69. La foi, l’u­sage, l’ac­crois­se­ment et la récom­pense de la foi, tout est un don de votre pure libé­ra­li­té. Marc 9, 22 (édi­tions 1693, 1699) 
  70. Dieu n’af­flige jamais des inno­cents ; et les afflic­tions servent tou­jours ou à punir le péché ou à puri­fier le pécheur. Jean 9, 3 (édi­tions 1693, 1699) 
  71. L’homme peut se dis­pen­ser pour sa conser­va­tion, d’une loi que Dieu a faite pour son uti­li­té. Marc 2, 28 (édi­tions 1693, 1699) 
  72. Marques et pro­prié­tés de l’Eglise chré­tienne. Elle est… catho­lique, com­pre­nant et tous les Anges du Ciel et tous les élus et les justes de la Terre et de tous les siècles. Hébreux, 12, 22–24 (édi­tions 1693, 1699) 
  73. Qu’est-​ce que l’Eglise, sinon l’as­sem­blée des enfants de Dieu, demeu­rant dans son sein, adop­tés en Jésus-​Christ, sub­sis­tants en sa per­sonne, rache­tés de son sang, vivants de son esprit, agis­sant par sa grâce, et atten­dants la paix du siècle à venir. 2 Thessaloniciens, 1,2 (édi­tions 1693, 1699) 
  74. L’Eglise, ou le Christ entier, qui a pour chef le Verbe Incarné, et pour membres tous les saints. 1 Timothée, 3, 16 (édi­tions 1693, 1699) 
  75. Unité admi­rable de l’Eglise. C’est… un seul homme com­po­sé de plu­sieurs membres dont Jésus-​Christ est la tête, la vie, la sub­sis­tance et la per­sonne… un seul Christ com­po­sé de plu­sieurs saints, dont il est le sanc­ti­fi­ca­teur. Éphésiens, 2, 14–16 (édi­tions 1693, 1699) 
  76. Rien de si spa­cieux, que l’Eglise de Dieu, puisque tous les Elus et les Justes de tous les siècles la com­posent. Éphésiens, 2, 22 (édi­tions 1693, 1699) 
  77. Qui ne mène pas une vie digne d’un enfant de Dieu ou d’un membre de Jésus-​Christ, cesse d’a­voir inté­rieu­re­ment Dieu pour Père, et Jésus-​Christ pour Chef. I Jean, 2, 22 (édi­tion 1693) 
  78. Le peuple juif était la figure du peuple élu dont Jésus-​Christ est le Chef. L’excommunication la plus ter­rible est de n’être point de ce peuple et de n’a­voir point de part à Jésus-​Christ. On s’en retranche aus­si bien en ne vivant pas selon l’Évangile qu’en ne croyant pas à l’Évangile. Actes des Apôtres, 3, 23 (édi­tions 1693, 1699) 
  79. Il est utile et néces­saire en tout temps, en tous lieux et à toutes sortes de per­sonnes, d’en étu­dier, de l’Ecriture, et d’en connaître l’es­prit, la pié­té, et les mys­tères. II Corinthiens, 14, 15 (édi­tions 1693, 1699) 
  80. Celle, la lec­ture, de l’Ecriture sainte, entre les mains même d’un homme d’af­faires et de finances, marque qu’elle, est pour tout le monde. Actes des Apôtres, 8, 28 (édi­tions 1693, 1699) 
  81. L’obscurité sainte de la parole de Dieu, n’est pas aux laïques une rai­son, pour se dis­pen­ser de la lire. Actes des Apôtres, 8, 31 (édi­tions 1693, 1699) 
  82. Le Dimanche, qui a suc­cé­dé au Sabbat, doit être sanc­ti­fié par des lec­tures de pié­té et sur­tout des saintes écri­tures. C’est le lait du chré­tien et que Dieu même qui connaît son œuvre lui a don­né. Il est dan­ge­reux de l’en vou­loir sevrer. Actes des Apôtres, 15, 21 (édi­tions 1693, 1699) 
  83. C’est une illu­sion de s’i­ma­gi­ner que la connais­sance des mys­tères de la reli­gion ne doivent pas être com­mu­ni­quée à ce sexe par la lec­ture des Livres Saints, après cet exemple de la confiance, avec laquelle, la Samaritaine, Jésus-​Christ se mani­feste à cette femme. Ce n’est pas de la sim­pli­ci­té des femmes, mais de la science orgueilleuse des hommes qu’est venue l’a­bus des Écritures, et que sont nées les héré­sies. Jean, 4, 26 (édi­tions 1693, 1699) 
  84. C’est la fer­mer aux Chrétiens, la bouche de Jésus-​Christ, que de leur arra­cher des mains ce Livre saint, ou de leur tenir fer­mé, en leur ôtant le moyen de l’en­tendre. Matthieu 5, 2 (édi­tions 1693, 1699) 
  85. En inter­dire la lec­ture, de l’Ecriture et par­ti­cu­liè­re­ment de l’Evangile, aux Chrétiens, c’est inter­dire l’u­sage de la lumière aux enfants de lumière et leur faire souf­frir une espèce d’ex­com­mu­ni­ca­tion. Luc, 11, 33 (édi­tions 1693, 1699) 
  86. Lui ravir, au simple peuple, cette conso­la­tion d’u­nir sa voix à celle de toute l’Eglise, c’est un usage contraire à la pra­tique apos­to­lique et aux des­seins de Dieu. I Corinthiens, 14, 16 (édi­tions 1693, 1699) 
  87. C’est une conduite pleine de sagesse, de lumière et de cha­ri­té, de don­ner aux âmes le temps de por­ter avec humi­li­té et de sen­tir l’é­tat du péché ; de deman­der l’es­prit de péni­tence et de contri­tion ; et de com­men­cer au moins à satis­faire à la jus­tice de Dieu, avant que de les récon­ci­lier. Actes des Apôtres 9, 9 (édi­tions 1693, 1699) 
  88. On ne sait ce que c’est que le péché et la vraie péni­tence quand on veut être réta­bli d’a­bord dans la pos­ses­sion des biens, dont le péché nous a dépouillés et qu’on ne veut point por­ter la confu­sion de cette sépa­ra­tion. Luc, 17, 11–12 (édi­tions 1693, 1699) 
  89. Le qua­tor­zième degré de la conver­sion du pécheur, est qu’é­tant récon­ci­lier, il a droit d’as­sis­ter au sacri­fice de l’Eglise. Luc 15, 23 (édi­tions 1693, 1699) 
  90. C’est l’Eglise qui en a l’au­to­ri­té, de l’ex­com­mu­ni­ca­tion, pour l’exer­cer par les pre­miers Pasteurs, du consen­te­ment au moins pré­su­mé de tout le Corps. Matthieu, 18, 17 (édi­tions 1693, 1694) 
  91. La crainte même d’une excom­mu­ni­ca­tion injuste ne nous doit jamais empê­cher de faire notre devoir… On ne sort jamais de l’Eglise lors même qu’il semble qu’on en soit ban­ni par la méchan­ce­té des hommes, quand on est atta­ché à Dieu, à Jésus-​Christ, et à l’Eglise même par la cha­ri­té. Jean, 9, 22–23 (édi­tions 1693, 1699) 
  92. C’est imi­té saint Paul, que de souf­frir en paix l’ex­com­mu­ni­ca­tion et l’a­na­thème injuste, plu­tôt que de tra­hir la véri­té, loin de s’é­le­ver contre l’au­to­ri­té ou de rompre l’u­ni­té. Romains, 9, 3 (édi­tions 1693, 1699) 
  93. Jésus gué­rit quel­que­fois les bles­sures que la pré­ci­pi­ta­tion des pre­miers Pasteurs fait sans son ordre ; il réta­blit ce qu’ils retranchent par un zèle incon­si­dé­ré. Jean 18, 11 (édi­tions 1693, 1699) 
  94. Rien ne donne une plus mau­vaise opi­nion de l’Eglise à ses enne­mis, que d’y voir domi­ner sur la foi des fidèles, et y entre­te­nir des divi­sions pour des choses qui ne blessent ni la foi ni les mœurs. Romains, 14, 16 (édi­tions 1693, 1699) 
  95. Les véri­tés sont deve­nus comme une langue étran­gère à la plu­part des chré­tiens et la manière de les pré­cher est comme un lan­gage incon­nu ; tant elle est éloi­gnée de la sim­pli­ci­té des Apôtres et au des­sus de la por­ter du com­mun des Fidèles ; et on ne fait pas réflexion que ce déchet est une des marques les plus sen­sibles de la vieillesse de l’Eglise et de la colère de Dieu sur ses enfants. I Corinthiens, 14, 21 (édi­tions 1693, 1699) 
  96. Dieu per­met que toutes les Puissances soient contraires aux pré­di­ca­teurs de la Vérité, afin que sa vic­toire ne puisse être attri­buée qu’à sa Grâce. Actes des Apôtres, 17, 8 (édi­tions 1693, 1699) 
  97. Il n’ar­rive que trop sou­vent que les membres le plus sain­te­ment et le plus étroi­te­ment unis à l’Eglise sont regar­dés et trai­tés comme indignes d’y être ou comme en étant déjà sépa­rés ; mais le juste vit de la foi de Dieu, et non pas de l’o­pi­nion des hommes. Actes des Apôtres, 4, 11 (édi­tions 1693, 1699) 
  98. Celui, l’Etat, d’être per­sé­cu­té et de souf­frir comme un héré­tique, un méchant, un impie, est ordi­nai­re­ment la der­nière et la plus méri­toire, comme celle qui donne plus de confor­mi­té à Jésus-​Christ. Luc, 22, 37 (édi­tions 1693, 1699) 
  99. L’entêtement, la pré­ven­tion, l’obs­ti­na­tion à ne vou­loir ni rien exa­mi­ner, ni recon­naître qu’on s’est trom­pé, changent tous les jours en odeur de morts, à l’é­gard de bien des gens, ce que Dieu, a mis dans son Eglise pour y être une odeur de vie ; comme les bons Livres, les ins­truc­tions, les saints exemples, etc… 2 Corinthiens, 2, 16 (édi­tions 1693, 1699) 
  100. Tant déplo­rable, où on croit hono­rer Dieu en per­sé­cu­tant la Vérité et ses dis­ciples. Ce temps est venu… Etre regar­dé et trai­té par ceux qui en sont les ministres, de la Religion, comme un impie, indigne de tout com­merce avec Dieu, comme un membre pour­ri, capable de tout cor­rompre dans la socié­té des saints ; c’est pour les per­sonnes pieuses une mort plus ter­rible que celle du corps. En vain, on se flatte de la pure­té de ses inten­tions, et d’un zèle de reli­gion, en pour­sui­vant des gens de bien à feu et à sang, si on est ou aveu­glé par sa propre pas­sion, ou empor­té par celle des autres, faute de vou­loir rien exa­mi­ner. On croit sou­vent sacri­fier à Dieu un impie, et on sacri­fie au Diable un ser­vi­teur de Dieu. Jean, 16, 2 (édi­tions 1693, 1699) 
  101. Rien n’est plus contraire à l’es­prit de Dieu et à la doc­trine de Jésus-​Christ que de rendre com­muns les ser­ments dans l’Eglise ; parce que c’est mul­ti­plier les occa­sions des par­jures, dres­ser des pièges aux faibles et aux igno­rants : et faire quel­que­fois ser­vir le nom et la véri­té de Dieu aux des­seins des méchants. Matthieu, 5, 37 (édi­tions 1693, 1699) 

A CES CAUSES, après avoir reçu tant de vive voix que par écrit, les suf­frages des sus-​dits car­di­naux, et de plu­sieurs autres Théologiens, et après avoir ardem­ment implo­ré le secours du Ciel, par des prières par­ti­cu­lières, que nous avons faites, et par des prières publiques, que nous avons ordon­nées à cette inten­tion, nous décla­rons par la pré­sente consti­tu­tion, qui doit avoir son effet à per­pé­tui­té, que nous condam­nons et réprou­vons, toutes et cha­cune les pro­po­si­tions ci-​dessus rap­por­tées, comme étant res­pec­ti­ve­ment fausses, cap­tieuses, mal­son­nantes, capables de bles­ser des oreilles pieuses, scan­da­leuses, per­ni­cieuses, témé­raires, inju­rieuses à l’Eglise et ses usages, outra­geantes, non seule­ment pour elle, mais pour les puis­sances sécu­lières ; sédi­tieuses, impies, blas­phé­ma­toires, sus­pectes d’hé­ré­sie, sen­tant l’hé­ré­sie, favo­rables aux héré­tiques, aux héré­sies, et au schisme, erro­nées, appro­chantes de l’hé­ré­sie et sou­vent condam­nées ; enfin comme héré­tiques, et comme renou­vel­le­ment diverses héré­sies, prin­ci­pa­le­ment, celles qui sont conte­nues dans les fameuses Propositions de Jansénius, prises dans le sens, auquel elles ont été condamnées.

Nous défen­dons à tous les Fidèles de l’un et de l’autre sexe, de pen­ser, d’en­sei­gner, ou de par­ler sur les­dites Propositions autre­ment qu’il n’est por­té dans cette Constitution ; en sorte que qui­conque ensei­gne­rait, sou­tien­drait, ou met­trait ou jour ces Propositions, ou quelques unes d’entre elles, soit conjoin­te­ment, soit sépa­ré­ment, ou qui en trai­te­rait même par manière de dis­pute, en public ou en par­ti­cu­lier, si ce n’est peut être pour les com­battre, encoure, ipso fac­to, et sans qu’il soit besoin d’autre décla­ra­tion, les Censures Ecclésiastiques et les autres peines por­taient de droit contre ceux, qui font de sem­blables choses.

Au reste, par la condam­na­tion expresse et par­ti­cu­lière que nous fai­sons des sus­dites Propositions, Nous ne pré­ten­dons nul­le­ment approu­ver ce qui est conte­nu dans le reste du même Livre, d’au­tant plus que dans le cours de l’exa­men que nous en avons fait, Nous y avons remar­qué plu­sieurs autres pro­po­si­tions, qui ont beau­coup de res­sem­blance et d’af­fi­ni­té avec celles que nous venons de condam­ner, et qui sont toute rem­plies des mêmes erreurs : De plus, Nous y en avons trou­vé beau­coup d’autres, qui sont propres d’en­tre­te­nir la déso­béis­sance et la rébel­lion qu’elles veulent insi­nuer insen­si­ble­ment sous le faux nom de patience chré­tienne par l’i­dée chi­mé­rique qu’elles donnent au Lecteur d’une per­sé­cu­tion qui règne aujourd’­hui : Mais nous avons cru qu’il serait inutile de rendre cette Constitution plus longue, par un détail par­ti­cu­lier de ces Propositions : Enfin, ce qui est plus into­lé­rable. Nous y avons vu le texte sacré au Nouveau Testament alté­ré d’une manière, qui ne peut être trop condam­née ; et conforme en beau­coup d’en­droit à une tra­duc­tion dite de Mons, qui a été cen­su­rée depuis long­temps ; il y est dif­fé­rent, et s’é­loigne en diverses façons de la ver­sion vul­gate, qui est en usage dans l’Eglise depuis tant de siècles, et qui doit être regar­dée comme authen­tique, par toutes les per­sonnes ortho­doxes ; et l’on a por­té la mau­vaise foi jus­qu’au point de détour­ner le sens natu­rel du texte, pour y sub­sti­tuer un sens étran­ger, et sou­vent dangereux.

Pour toutes ces rai­sons, en ver­tu de l’Autorité Apostolique, Nous défen­dons de nou­veau par ces pré­sentes et condam­nons dere­chef ledit Livre, sous quelque titre et en quelque langue qu’il ait été impri­mé : de quelque édi­tion, et en quelque ver­sion qu’il ait paru, ou qu’il puisse paraître dans la suite (ce qu’à Dieu ne plaise) Nous le condam­nons comme étant très capable de séduire les âmes simples par des paroles pleines de dou­ceur et par des béné­dic­tions, ain­si que s’ex­prime l’Apôtre, c’est-​à-​dire, par les appa­rences d’une ins­truc­tion rem­plie de pié­té. Condamnons pareille­ment, tous les autres Livres ou libelles, soit manus­crits soit impri­més, ou (ce qu’à Dieu ne plaise) qui pour­raient s’im­pri­mer dans la suite, pour la défense dudit Livre ; Nous défen­dons à tous les Fidèles de les lire, de les copier, de les rete­nir, et d’en faire usage, sous peine d’ex­com­mu­ni­ca­tion, qui sera encou­rue ipso fac­to, par les contrevenants.

Nous ordon­nons de plus à Nos Vénérables Frères, les Patriarches, les Archevêques et Évêques et autres Ordinaires des lieux, comme aus­si aux Inquisiteurs de l’hé­ré­sie, de répri­mer et de contraindre par les cen­sures, par les peines sus­dites, et par tous les autres remèdes de droit et de fait, ceux qui ne vou­draient obéir ; et même d’im­plo­rer pour cela, s’il en est besoin, le secours du bras séculier.

Voulons aus­si que même foi soit ajou­tée aux copies des pré­sentes, même impri­mées, pour­vue qu’elles soient signées, de la main d’un Notaire publique, et scel­lées du sceau de quelque per­sonne consti­tuée en digni­té Ecclésiastique, que celle que l’on aurait à l’Original s’il était mon­tré et représenté.

Que per­sonne donc ne se donne la licence d’en­freindre en aucune manière les Déclarations, Condamnations, Ordonnances, et Défenses que des­sus, et n’ait la témé­ri­té de s’y oppo­ser : Que si quel­qu’un ose com­mettre cet atten­tat, qu’il sache qu’il encour­ra l’in­di­gna­tion du Dieu Tout puis­sant, et des bien­heu­reux Apôtres saint Pierre et saint Paul.

Donné à Rome, à Sainte-​Marie Majeure, l’an de l’Incarnation de Notre Seigneur 1713, le 8 sep­tembre et de notre Pontificat le treizième.

I. Cardinal Prodataire
F. Olivieri
Visa de la Cour L. Sergardi
La place † du sceau

Registré dans la Secrétairerie des Brefs

L. Martinetti.

L’an de la Nativité de N. Seigneur Jésus-​Christ 1713, Indiction 6, le 10 du mois de sep­tembre et la 13e année du Pontificat de Notre Très Saint Père en Jésus-​Christ, Clément, par la Providence de Dieu, Pape XI du Nom ; Ces Lettres apos­to­liques ont été affi­chées et publiées aux portes de l’é­glise de Saint-​Jean de Latran et de la Basilique de Saint-​Pierre, Prince des Apôtres, de la Chancellerie Apostolique, de la Cour géné­ral au Mont Cittorio, dans le Champ de Flore, et aux autres lieux ordi­naires et accou­tu­més de Rome, par Moi, Pierre Romulatio, Curseur Apostolique. Ant. Piacentino, Maître des Curseurs.