Paul VI

262e pape ; de 1963 à 1978

18 juin 1968

Constitution Apostolique Pontificalis Romani

Promulgation des nouveaux rites d'ordination

Table des matières

Donné à Rome près de Saint-​Pierre, le 18 juin de l’an­née 1968

Paul, Évêque,
Serviteur des ser­vi­teurs de Dieu.

En per­pé­tuelle mémoire de cet acte.

La révi­sion du Pontifical romain n’est pas seule­ment pres­crite d’une manière géné­rale par le IIe Concile œcu­mé­nique du Vatican1 ; elle est régie en outre par les règles par­ti­cu­lières selon les­quelles le Concile a ordon­né de modi­fier les rites des ordi­na­tions, « soit quant aux céré­mo­nies, soit quant aux textes2 ».

Mais par­mi les rites des ordi­na­tions, il faut consi­dé­rer en pre­mier lieu ceux par les­quels, grâce au sacre­ment de l’Ordre, confé­ré en dif­fé­rents degrés, se consti­tue la Hiérarchie sacrée : « C’est ain­si que le minis­tère ecclé­sias­tique, ins­ti­tué par Dieu, est exer­cé dans la diver­si­té des ordres par ceux que, déjà depuis l’an­ti­qui­té, on appelle évêques, prêtres, diacres3. »

Or, dans la révi­sion des rites des ordi­na­tions, outre les prin­cipes géné­raux qui doivent régir la com­plète res­tau­ra­tion de la litur­gie, selon les pres­crip­tions du IIe Concile du Vatican, il faut por­ter la plus grande atten­tion à cette magni­fique doc­trine, sur la nature et les effets du sacre­ment de l’ordre, qui a été pro­fes­sée par le Concile dans la Constitution sur l’Eglise ; c’est jus­te­ment cette doc­trine que la litur­gie doit expri­mer à sa manière, car « il faut orga­ni­ser les textes et les rites de telle façon qu’ils expriment avec plus de clar­té les réa­li­tés saintes qu’ils signi­fient et que le peuple chré­tien, autant qu’il est pos­sible, puisse faci­le­ment les sai­sir et y par­ti­ci­per par une célé­bra­tion pleine, active et com­mu­nau­taire ».4

Les évêques

En outre, le Concile enseigne que « par la consé­cra­tion épis­co­pale, est confé­rée la plé­ni­tude du sacre­ment de l’Ordre, que la cou­tume litur­gique de l’Eglise et la voix des Saints Pères appellent en effet le sacer­doce suprême, le som­met du minis­tère sacré. La consé­cra­tion épis­co­pale, en même temps que la charge de sanc­ti­fi­ca­tion, confère aus­si les charges d’en­sei­gner et de gou­ver­ner, les­quelles cepen­dant, de par leur nature, ne peuvent s’exer­cer que dans la com­mu­nion hié­rar­chique avec le chef du col­lège et ses membres. En effet, la Tradition, qui s’ex­prime sur­tout par les rites litur­giques et par l’u­sage de l’Eglise, tant orien­tale qu’oc­ci­den­tale, montre à l’é­vi­dence que, par l’im­po­si­tion des mains et les paroles consé­cra­toires, la grâce de l’Esprit-​Saint est don­née, et le carac­tère sacré impri­mé de telle sorte que les évêques, d’une façon émi­nente et visible, tiennent la place et jouent le rôle du Christ lui-​même, Maître, Pasteur et Pontife5 ».

A ces paroles il faut ajou­ter plu­sieurs points impor­tants de doc­trine sur la suc­ces­sion apos­to­lique des évêques, ain­si que sur leurs fonc­tions et leurs devoirs, qui se trouvent inclus déjà dans le rite de la consé­cra­tion épis­co­pale, mais dont il semble sou­hai­table d’a­mé­lio­rer et de pré­ci­ser l’ex­pres­sion. Pour y par­ve­nir de façon cor­recte, on a jugé bon de recou­rir, par­mi les sources anciennes, à la prière consé­cra­toire qu’on trouve dans la Tradition apos­to­lique d’Hippolyte de Rome, écrit au début du troi­sième siècle, et qui, pour une grande par­tie, est encore obser­vée dans la litur­gie de l’or­di­na­tion chez les Coptes et les Syriens occi­den­taux. De la sorte, on rend témoi­gnage, dans l’acte même de l’or­di­na­tion, à l’ac­cord entre les tra­di­tions orien­tale et occi­den­tale sur la charge apos­to­lique des évêques.

Les prêtres

En ce qui concerne les prêtres, il faut rap­pe­ler sur­tout ceci, dans les Actes du IIe Concile du Vatican : « Tout en n’ayant pas la charge suprême du pon­ti­fi­cat et tout en dépen­dant des évêques dans l’exer­cice de leur pou­voir, les prêtres leur sont cepen­dant unis dans la digni­té sacer­do­tale ; et par la ver­tu du sacre­ment de l’Ordre, à l’i­mage du Christ prêtre suprême et éter­nel (cf. Hébr., 5, 1–10 ; 7, 24 ; 9, 11–28), ils sont consa­crés pour prê­cher l’Evangile et pour être les pas­teurs des fidèles et célé­brer le culte divin en vrais prêtres du Nouveau Testament6. » Et on lit ailleurs : « Par l’or­di­na­tion et la mis­sion reçue des évêques, les prêtres sont mis au ser­vice du Christ Docteur, Prêtre et Roi ; ils par­ti­cipent à son minis­tère qui, de jour en jour, construit ici-​bas l’Eglise pour qu’elle soit Peuple de Dieu, Corps du Christ, Temple du Saint-​Esprit7. »

Dans l’or­di­na­tion au pres­by­té­rat, telle qu’elle était dans le Pontifical romain, la mis­sion et la grâce du prêtre comme col­la­bo­ra­teur de l’ordre épis­co­pal étaient décrites très clai­re­ment. Toutefois, il a paru néces­saire de rame­ner à une plus grande uni­té tout le rite qui, aupa­ra­vant, était dis­tri­bué en plu­sieurs par­ties, et de mettre plus vive­ment en lumière la par­tie cen­trale de l’or­di­na­tion, c’est-​à-​dire l’im­po­si­tion des mains et la prière consécratoire.

Les diacres

Pour ce qui regarde les diacres, outre ce qu’on trouve dans notre lettre apos­to­lique Sacrum Diaconatus Ordinem que nous avons pro­mul­guée Motu pro­prio le 18 juin 1967, on doit se rap­pe­ler sur­tout les paroles sui­vantes : « Au degré infé­rieur de la hié­rar­chie se trouvent les diacres aux­quels on a impo­sé les mains « non pas en vue du sacer­doce mais en vue du ser­vice ». (Constitutions de l’Eglise d’Egypte, III, 2.)

La grâce sacra­men­telle, en effet, leur donne la force néces­saire pour ser­vir le Peuple de Dieu dans la dia­co­nie de la litur­gie, en com­mu­nion avec l’é­vêque et son pres­by­te­rium8. » Dans l’or­di­na­tion dia­co­nale, il y avait peu de choses à chan­ger, en tenant compte soit des règles récem­ment éta­blies au sujet du dia­co­nat comme degré propre et per­ma­nent de la hié­rar­chie, soit d’un pro­grès dans la sim­pli­ci­té et la clar­té des rites.

Matière et forme

D’autre part, entre les autres docu­ments du magis­tère suprême rela­tifs aux ordres sacrés, nous esti­mons digne d’une men­tion par­ti­cu­lière la Constitution apos­to­lique Sacramentum Ordinis pro­mul­guée par Notre Prédécesseur Pie XII, le 30 novembre 1947, qui déclare : « Les ordres du dia­co­nat, du pres­by­té­rat et de l’é­pis­co­pat ont pour matière, et pour matière unique, l’im­po­si­tion des mains : quant à la forme, éga­le­ment unique, ce sont les paroles déter­mi­nant l’ap­pli­ca­tion de cette matière, paroles qui signi­fient sans équi­voque les effets du sacre­ment — à savoir le pou­voir d’Ordre et la grâce du saint-​Esprit — et qui sont reçues et employées comme telles par l’Eglise9. » Après quoi, le docu­ment en ques­tion décide quelle est l’im­po­si­tion des mains et quelles sont les paroles qui, dans la col­la­tion de cha­cun des ordres, consti­tuent la matière et la forme.

Dans la révi­sion du rite, il a fal­lu pro­cé­der à des addi­tions, à des sup­pres­sions et à des modi­fi­ca­tions, soit pour res­ti­tuer les paroles confor­mé­ment aux textes anciens, soit pour rendre les expres­sions plus claires, soit pour mieux expo­ser les effets du sacre­ment. Aussi jugeons-​nous néces­saire, pour sup­pri­mer toute contro­verse et pré­ve­nir les inquié­tudes de conscience, de décla­rer ce qui, dans le rite révi­sé, doit être dési­gné comme appar­te­nant à sa nature essen­tielle. Donc, au sujet de la matière et de la forme dans la col­la­tion de cha­cun des Ordres, nous déci­dons et sta­tuons ce qui suit.

Dans l’or­di­na­tion des diacres, la matière est cette impo­si­tion des mains par l’é­vêque qui se fait en silence sur cha­cun des ordi­nands, avant la prière consé­cra­toire. La forme consiste dans les paroles de cette prière consé­cra­toire ; par­mi elles, voi­ci celles qui appar­tiennent à la nature essen­tielle, si bien qu’elles sont exi­gées pour que l’ac­tion soit valide : « Emitte in eos, Domine, quae­su­mus, Spiritum Sanctum, quo in opus minis­te­rii fide­li­ter exse­quen­di munere sep­ti­for­mis tuae gra­tiae robo­ren­tur10. »

Dans l’or­di­na­tion des prêtres, la matière est aus­si cette impo­si­tion des mains par l’é­vêque qui se fait en silence avant la prière consé­cra­toire. La forme consiste dans les paroles de cette prière consé­cra­toire ; par­mi elles voi­ci celles qui appar­tiennent à la nature essen­tielle, si bien qu’elles sont exi­gées pour que l’ac­tion soit valide : « Da, quae­su­mus, omni­po­tens Pater, his famu­lis tuis Presbyterii digni­ta­tem ; inno­va in vis­ce­ri­bus eorurn Spiritum sanc­ti­ta­tis ; accep­tum a te, Deus, secun­di meri­ti munus obti­neant, cen­su­ramque morum exem­plo suae conver­sa­tio­nis insi­nuent11. »

Enfin, dans l’or­di­na­tion de l’é­vêque, la matière est cette impo­si­tion des mains qui est faite en silence sur la tête de l’Elu, avant la prière consé­cra­toire, par les évêques consa­crants ou au moins par le Consécrateur prin­ci­pal. La forme consiste dans les paroles de cette prière consé­cra­toire ; par­mi elles voi­ci celles qui appar­tiennent à la nature essen­tielle, si bien qu’elles sont exi­gées pour que l’ac­tion soit valide : « Et nunc effunde super hunc Eleclum eam vir­tu­tem, quae a te est, Spiritum prln­ci­pa­lem, quem dedis­ti dilec­to Filio Tuo Iesu Christo, quem Ipse dona­vit sanc­tis Apostolis, qui consti­tue­runt Ecclesiam per sin­gu­la loca, ut sanc­tua­rium tuum, in glo­riam et lau­dem inde­fi­cien­tem nomi­nis tui12. »

Ce rite, donc, pour la col­la­tion des Ordres du dia­co­nat, du pres­by­té­rat et de l’é­pis­co­pat, révi­sé par le Conseil pour la mise en œuvre de la Constitution sur la litur­gie, « en fai­sant appel à des experts et en consul­tant des évêques des diverses régions du globe13 », Nous-​même l’ap­prou­vons de Notre auto­ri­té apos­to­lique, afin que doré­na­vant, à la place du rite (qui se trouve encore dans le Pontifical romain, il soit employé pour confé­rer ces Ordres.

Nous vou­lons que ces déci­sions et pres­crip­tions, dès main­te­nant et à l’a­ve­nir, soient fer­me­ment éta­blies et demeurent en vigueur, non­obs­tant, pour autant que ce soit néces­saire, les Constitutions et Ordinations apos­to­liques pro­mul­guées par Nos pré­dé­ces­seurs, et les autres pres­crip­tions, même dignes de men­tion et de dérogation.

Donné à Rome près de Saint-​Pierre, le 18 juin de l’an­née 1968, la cin­quième de Notre pontificat.

PAUL VI, PAPE.

  1. Constitution sur la litur­gie Sacrosanctum Concilium, n° 25 []
  2. Ibid., n° 76 []
  3. Constitution dog­ma­tique sur l’Eglise Lumen Gentium, n° 28. []
  4. Constitution sur la litur­gie, n° 21. []
  5. Constitution dog­ma­tique sur l’Eglise Lumen Gentium, n° 21. []
  6. Ibid., n° 28. []
  7. Décret sur la vie et le minis­tère des prêtres Presbyterorum Ordinis, n° 1. []
  8. Constitution dog­ma­tique sur l’Eglise Lumen Gentium, n° 29. []
  9. A. A. S., 40 (1948), p. 6. []
  10. « Envoie sur eux, Seigneur, nous t’en prions, le Saint-​Esprit, pour qu’ils soient for­ti­fiés par le don de ta grâce sur­abon­dante dans le fidèle accom­plis­se­ment de leur minis­tère » (tra­duc­tion non offi­cielle). []
  11. « Donne, Père tout-​puissant, à tes ser­vi­teurs que voi­ci la digni­té du pres­by­té­rat. Renouvelle dans leur cœur l’Esprit de sain­te­té ; qu’ils reçoivent de toi, Seigneur, la charge de prêtres du second ordre et qu’ils ins­pirent, par l’exemple de leur vie, la réforme des moeurs » (id.). []
  12. « Envoie main­te­nant sur cet élu la puis­sance qui vient de toi, l’Esprit sou­ve­rain que tu as don­né à Jésus-​Christ, ton Fils bien-​aimé, et que lui-​même a don­né à ses apôtres qui ont fon­dé l’Eglise en tous lieux, comme ton sanc­tuaire, pour qu’on te rende gloire et qu’on loue inces­sam­ment ton nom » (ibid.). []
  13. Const. sur la litur­gie, n° 25. []