Des historiens se sont disputés quant à l’année et au lieu de ce baptême : 496 à Reims, 498 ou 499 à Reims ou 508 à Tours. Des historiens du XIXème siècle, en particulier les historicistes luthériens allemands, malheureusement suivis par Philippe de Villiers dans son dernier livre, ont tenu pour un baptême à Tours en 508.
Contre l’hypothèse de Tours, il faut considérer que saint Grégoire, évêque de Tours, qui rédige son « Histoire des Francs » vers 575, aurait été bien placé pour rapporter des traditions locales s’il en existait ; il n’en est rien alors que sainte Clotilde finit ses jours en Touraine en 545, et qu’en 556 saint Euphrone devint évêque de Tours, prédécesseur de saint Grégoire et son cousin issu de germain. Ensuite, la tradition rémoise de la sainte Ampoule qui servit au baptême exclut un baptême à Tours.
Saint Grégoire écrit donc qu’en la quinzième année du règne de Clovis, soit en 496, ce roi remporta une victoire contre les Alamans attribuée au Dieu de son épouse Clotilde. Que Clotilde le fit catéchiser en secret par saint Rémi, par crainte de révolter l’armée païenne franque. Que Clovis brava son peuple, lequel prévint son chef qu’il était déjà disposé à rejeter ses idoles pour suivre son roi au baptême chrétien. Que sa sœur Alboflède reçut le baptême en même temps que Clovis et ses trois mille hommes, mais qu’elle mourut peu après.
Grégoire aborde ensuite l’implication de Clovis dans la guerre fratricide des rois burgondes. Marius, évêque d’Avenches (évêché helvète de Burgondie), contemporain de Grégoire, précise dans sa Chronique que ces combats se passèrent sous les consulats de Patricius et Hypatius (Consuls à Rome), c’est-à-dire exactement en l’an 500. Grégoire raconte que Clovis poursuit Gondebaud jusqu’à Avignon. Or justement, il y a non loin de là dans les Alpilles, à une vingtaine de kilomètres au sud d’Avignon, la cité de Saint-Rémy-de-Provence qui doit son nom à l’évêque de Reims qui accompagnait le roi des Francs dans cette incursion en pays burgonde ; en effet, la tradition locale rapporte que le saint pontife, accompagné de Clovis, y ressuscita une jeune fille du pays. Que l’on n’aille pas nous dire, après tout cela, que Clovis devait attendre l’an 508 pour être témoin de miracles, au tombeau de saint Martin à Tours, pour se convaincre enfin à recevoir le baptême !
Enfin, Grégoire rapporte les propos de Clovis en réaction aux agissements des wisigoths, ariens, contre les catholiques : « Je supporte avec grand peine que ces ariens occupent une partie des Gaules ; marchons avec l’aide de Dieu, et après les avoir vaincus, réduisons le pays en notre pouvoir ». Aussi, avant de vaincre Alaric en 507, Clovis prie Dieu et fait prier des émissaires…
En 1896, le cardinal-archevêque de Reims, Benoît Langénieux, célèbre les 1400 ans du baptême de Clovis.
Abbé Laurent Serres-Ponthieu, prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X
Nota Bene. : Pour les férus d’Histoire, on lira avec profit l’analyse de cette ancienne controverse dans « Clovis ou le combat de gloire » de Francis Dallais, PSR éditions, 1996, préfacé par Jean-Pierre Brancourt, 382 pages, en vente à « ». L’auteur est membre de la Société des Antiquaires de l’Ouest.
Source : La Porte Latine du 18 décembre 2018