Sauf avis contraire, les articles ou conférences qui n’émanent pas des
membres de la FSSPX ne peuvent être considérés comme reflétant la position officielle de la Fraternité Saint-Pie X |
La Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, par la voie de son Supérieur Général, Mgr Bernard Fellay, demandait à Rome, pour engager des discussions doctrinales, afin de rétablir un climat de confiance, l’octroie de deux préalables :
– la liberté pour tous les prêtres de dire la messe tridentine,
– le retrait du décret d’excommunication.
Ces deux préalables avaient un triple objectif :
– rétablir la justice lésée
– offrir une certaine liberté à la Tradition
– établir un climat de confiance.
Ces préalables ont-ils vraiment été obtenus, et leurs objectifs ont-ils été atteints ?
*
* *
Par le motu proprio Sommorum Pontificum, le pape Benoît XVI affirme que la messe tridentine n’a jamais été abrogée, apportant ainsi un démenti formel au motu proprio Ecclesia Dei Afflicta de son prédécesseur qui en restreignait l’usage au bon vouloir des évêques. Mais surtout, il était enfin affirmé la liberté du rite de saint Pie V après plus de trente années d’interdiction effective.
Il est juste de reconnaître que ce motu proprio, malgré ses défauts et ses insuffisances, rétablit la justice en reconnaissant le droit de la messe de saint Pie V et offre une certaine liberté liturgique à la Tradition en reconnaissant à tout prêtre la faculté libre et entière de la célébrer.
Il est bon de se souvenir de l’opposition farouche des évêques à travers le monde pour ne pas oublier que cet acte fut un acte courageux posé de façon unilatérale. Ce fut le premier pas concret qui permit à une certaine confiance de s’installer dans le cœur des prêtres et des fidèles de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X.
*
* *
Puis, ce 24 janvier 2009, par un décret en date du 21 janvier 2009 de la Congrégation pour les Evêques signé de son président, le Cardinal Giovanni Batista Re, les excommunications prononcées par la même congrégation vingt années plutôt contre Mgr Lefebvre et les quatre évêques sacrés par lui étaient déclarées privées d’effets juridiques.
Afin que justice fut rendue, la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X avait bien demandé le retrait du décret d’excommunication, ce qui signifiait l’inexistence réelle de la sanction, et non pas la levée des excommunications qui aurait été la reconnaissance au moins implicite de celles-ci.
Doit-on parler aujourd’hui de retrait ou de levée ?
Il semble que pour répondre il faille considérer deux éléments que sont les circonstances et ses acteurs, et les termes utilisés dans le décret romain.
La Fraternité Sacerdotale Saint Pie X revendique aujourd’hui, comme en 1988 l’état de nécessité qui a justifié les sacres. Comme en 1988, elle revendique haut et fort cet acte courageux de Mgr Lefebvre. Comme en 1988, elle continue de dénoncer avec vigueur et fermeté les erreurs contenues dans le concile Vatican II. Et comme en 1988, la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X garde précieusement cette foi si difficilement transmise, cet amour indéfectible au Saint Siège et au Vicaire du Christ. Rien n’a varié dans ses positions et sa doctrine, rien dans ce qui avait porté Rome à vouloir infliger la sanction de l’excommunication n’a été modifié ou amenuisé, le décret lui-même le reconnaissant en parlant de « communion imparfaite ». C’est donc bien que le désaccord persiste.
Si malgré cela, Rome a donné sans effet son décret d’il y a vingt ans, c’est que dans les faits il s’agit bien effectivement d’un retrait pur et simple de la sanction, une décision absolument unilatérale sans aucune contre partie.
Cependant, si on regarde les termes employés dans le décret du 21 janvier, on peut y lire que le préfet de la Congrégation pour les Evêques remet la peine d’excommunication. Et s’il y a rémission, c’est qu’il y a eu pardon, ce qui n’est pas le cas. De plus, le décret de condamnation se trouve privé d’effets juridiques en date du nouveau décret. C’est donc que les effets antérieurs à cette date restent reconnus et que le décret de condamnation n’est pas purement et simplement retiré.
Nous sommes donc dans une situation ambigüe : la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, du fait qu’elle n’ait rien concédé, peut affirmer en conséquence et avec plus de force que les excommunications n’avaient pas de valeur ni de raison d’être, et le Saint Siège, par les termes employés, peut de son coté accéder à la demande des évêques concernés de ne plus subir cette opprobre sans pour autant perdre la face et se désavouer.
Les objectifs n’ont donc été, en ce domaine, que partiellement atteints :
– la justice est rétablie de façon partielle seulement, car n’étant pas dans les termes utilisés, un retrait pur, Mgr Lefebvre n’est pas réhabilité explicitement.
– le cordon sanitaire des sanctions, qui permettaient aux ennemis de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X de la conspuer, n’existe plus désormais. Ses détracteurs se trouvent dorénavant sans arguments solides afin de dissuader les fidèles de se confier à l’apostolat de la Fraternité. Cette nouvelle situation redonne une grande liberté à la Tradition.
Considérant ces deux actes pontificaux, avec le regard que porte sur eux le Supérieur de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, il apparait aujourd’hui que Benoit XVI a bien rempli les deux préalables demandés et que ceux-ci ont, dans la globalité, atteint l’objectif qui leur étaient assignés.
*
* *
Et maintenant, quel déroulement attendre de part et d’autre ?
« Dans ce nouveau climat, nous avons la ferme espérance d’arriver bientôt à la reconnaissance des droits de la Tradition catholique. » Mgr Fellay.
« […]paternellement sensible au malaise spirituel manifesté par les intéressés à cause de la sanction d’excommunication et confiant dans l’engagement qu’ils ont exprimé dans la lettre citée auparavant de ne pas ménager leurs efforts pour approfondir les questions encore ouvertes, dans les échanges nécessaires avec les autorités du Saint-Siège, afin de pouvoir atteindre bientôt une solution pleine et satisfaisante au problème qui s’est posé aux origines […] » Cardinal Giovanni Battista Re.
Il est clair que dorénavant, les problèmes à l’origine du désaccord, à savoir les nouveautés introduites à l’occasion du Concile, vont être pleinement posés sur la table. Il y a une volonté de part et d’autre de résoudre le problème.
Naturellement, le Vatican et la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X n’ont pas le même point de vu. Mais un élément est très important : le constat commun de la ruine de l’Eglise. Le cardinal Ratzinger le constatait avec effarement quelques mois seulement avant son élection au souverain pontificat.
D’une part, Rome reste très attachée au concile Vatican II et considère que les effets désastreux proviennent de sa mauvaise interprétation ou de sa mauvaise application. C’est toute la thèse de l’herméneutique de la continuité.
D’autre part, la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X considère le deuxième concile du Vatican, comme les pères de ce Concile l’ont défini eux-mêmes, sans aucune autorité dogmatique et à portée purement pastorale. C’est ainsi qu’elle refuse avec droit les doctrines nouvelles introduites par ce Concile et qui manifestement, et à plusieurs endroits, que sont notamment l’œcuménisme, la liberté religieuse et la collégialité, vont contre la doctrine traditionnelle de l’Eglise.
*
* *
Aujourd’hui les lignes se sont déplacées : il y a vingt ans, la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X était prête à accepter le concile Vatican II à la lumière de la tradition, Rome en faisant le symbole d’un bouleversement, de « l’aggiornamento ». Aujourd’hui, c’est Rome qui cherche à sauver le Concile en essayant de prouver qu’il peut être vu à la lumière de la tradition, qu’il n’est pas en rupture avec le passé de l’Eglise, tandis que la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X veut le remettre en cause directement, veut en dénoncer les nouveautés comme étant incompatibles avec le magistère infaillible de l’Eglise.
Les rapports qui s’engagent aujourd’hui entre Rome et la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X partent sur des bases solides, de confiance et de liberté pour la Tradition. Le problème de fond va être posé, avec une volonté sérieuse et affirmée de chaque coté de résoudre le problème.
Rome, en réalisant les deux gestes forts et courageux, a montré sa volonté de résoudre vraiment le problème et un profond souci du bien de l’Eglise.
La Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, en acceptant les opprobres et en montrant indéfectiblement son attachement au souverain pontife, a montré que son action était commandée par amour de l’Eglise.
Le champ est défriché. Reste aujourd’hui à poser des fondations solides sur lesquelles l’Eglise pourra se reconstruire. Ces fondations ne sont autres que sa tradition dogmatique et liturgique, exclusivement.
Austremoine de