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Intégristes : « la levée des excommunications montre une volonté de réconciliation »
Le pape Benoît XVI vient de réintégrer dans l’Eglise quatre prélats intégristes, excommuniés en 1988 pour avoir été ordonnés par feu Mgr Lefebvre sans le consentement du Vatican. Mgr Claude Dagens, évêque d’Angoulême et académicien, réagit à cette décision inattendue.
La décision du pape d’annuler l’excommunication de ces quatre évêques intégristes ‑réclamée depuis vingt ans par les Lefebvristes- a pris de court tout le monde, y compris dans l’épiscopat français. Le cardinal Vingt-Trois, président de la Conférence épiscopale de France, a lui-même qualifié ce geste de « secousse » pour les catholiques. Comment analysez-vous ce geste aux contours très polémiques ?
Benoît XVI est fidèle à lui-même. En 1988, avant l’ordination des quatre évêques à Ecône (Suisse) par Monseigneur Lefebvre, c’est le cardinal Joseph Ratzinger qui avait cherché pendant des mois à parvenir à un accord avec le prélat intégriste. Il est vrai que cette levée des excommunications ouvre sur une épreuve de vérité pour l’Eglise catholique et ses fidèles. Nous vivons un certain écartèlement aujourd’hui mais la réconciliation, comme dans les familles, s’obtient toujours à grand prix. L’unité de l’Eglise exige un combat permanent, qui passe par des souffrances profondes. J’espère que cette main tendue permettra à ces fidèles de baisser les armes.
Qu’entendez-vous par là ?
Je connais quelques uns de ces fidèles intégristes. Ils sont très blessés, non seulement par les réformes liturgiques qui ont eu lieu à partir de Vatican II, mais aussi par des ruptures familiales et personnelles. Certaines de ces personnes s’accrochent à l’Eglise comme à une bouée de sauvetage, elle représente leur dernier rempart pour continuer à vivre. J’aimerais que ces croyants tiennent à l’Eglise non pas telle qu’ils la rêvent, mais telle qu’elle est, une Eglise de communion.
Les Lefebvristes se sont félicités de la mesure de Benoît XVI sans pour autant indiquer qu’ils cesseraient de dénoncer le concile Vatican II (1963–1965), leur « bête noire ». A leurs yeux, rappelons-le, ce concile – référence majeure de l’Eglise actuelle- est responsable du déclin du catholicisme, pour avoir véhiculé des idées modernes contraires ‑selon eux- à la tradition. Quel est l’intérêt de réintégrer des fidèles en si complète opposition sur le fond ?
L’enjeu profond de la décision de Benoît XVI réside, en effet, dans la compréhension authentique du concile Vatican II. Il faut rappeler que ce dernier fait partie à part entière de la tradition catholique, contrairement à ce que pensent les intégristes. Les grandes questions théologiques du concile ont été portées par des hommes de tradition : les pères Yves Congar, Henri de Lubac, Jean Daniélou. On ne peut pas rêver de réformer le concile. Il est donc à recevoir dans son intégralité. La levée des excommunications montre une volonté de réconciliation, pour l’instant, il est vrai, unilatérale. Et il n’y aura réciprocité qu’avec une conversion profonde des coeurs. Les déchirures de l’Eglise ne peuvent pas être guéries par des stratégies ecclésiastiques. Il faut aller à l’essentiel : l’unité dans la foi catholique. Espérons que l’Esprit Saint travaille en chacun de nous, intégristes ou pas.