Sermon de Mgr Lefebvre – Jeudi-​Saint – Messe chrismale – 3 avril 1980

Mes bien cher amis,
Mes bien chers frères,

Nous voi­ci réunis à nou­veau, cette année, pour cette céré­mo­nie si émou­vante de la consé­cra­tion des saintes Huiles.

Comment ne pas remer­cier le Bon Dieu d’avoir choi­si ces créa­tures et les avoir ins­ti­tuées pour nous com­mu­ni­quer la grâce, pour nous com­mu­ni­quer sa propre vie.

En effet, c’est bien Notre Seigneur Lui-​même qui a choi­si ces élé­ments maté­riels, afin de nous com­mu­ni­quer sa grâce. Et la tra­di­tion rap­porte que c’est Notre Seigneur Lui-​même qui a indi­qué à ses apôtres qu’il fal­lait opé­rer ce mélange d’huile et de baume pour consti­tuer le Saint Chrême qui ser­vi­ra ensuite à la sanc­ti­fi­ca­tion des âmes.

Et vous l’entendiez ces jours-​ci, c’est bien le caté­chisme du concile de Trente qui insiste pour dire qu’il ne s’agit pas de n’importe quelle huile, mais qu’il s’agit bien de l’huile d’olives. Et vous enten­drez dans les orai­sons et par­ti­cu­liè­re­ment dans la magni­fique pré­face qui est d’usage dans la sainte Église pour la consé­cra­tion de ces saintes Huiles, vous enten­drez tout ce que sym­bo­lise cette huile d’olives et com­bien elle a été choi­sie à juste titre pour sanc­ti­fier nos âmes.

Vous remar­que­rez aus­si d’une façon par­ti­cu­lière, qu’il est fait sou­vent appel dans ces prières à la pré­sence du Saint-​Esprit. L’Église prie le Saint-​Esprit de venir, d’une cer­taine manière, habi­ter dans ces saintes Huiles, afin de com­mu­ni­quer l’amour, la cha­ri­té et la vie divine aux âmes qui seront ointes par ces huiles.

Les prières indiquent aus­si que la ver­tu de ces saintes Huiles et la grâce qui sera com­mu­ni­quée par elles, nous viennent éga­le­ment de la Croix de Notre Seigneur Jésus-​Christ et que même le Saint Chrême a emprun­té son nom, au nom même de Notre Seigneur Jésus-​Christ – Christos – le Christ, c’est l’Oint. C’est Celui pré­ci­sé­ment qui signi­fie cette onc­tion qu’il a reçue par l’union de sa nature divine avec son huma­ni­té sainte. C’est la divi­ni­té qui a sanc­ti­fié, qui a oint pro­fon­dé­ment toute l’humanité de Notre Seigneur Jésus-​Christ. C’est pour­quoi le Christ est l’Oint et le Chrême est pré­ci­sé­ment l’onction que nous allons rece­voir, que nous rece­vons dans les sacre­ments dans les­quels ces onc­tions sont employées et qui com­mu­niquent la grâce de Notre Seigneur Jésus-​Christ, dont la source – nous le savons bien – vient du cœur de Notre Seigneur Jésus-​Christ. Il est le Christ ; Il est l’Oint ; Il est Celui qui nous com­mu­nique sa grâce par la ver­tu de son Sang, par la ver­tu de sa Passion.

Et c’est pour­quoi, c’est encore un usage dans la Sainte Église, de signer de la croix ceux qui reçoivent le Saint Chrême ; ceux qui reçoivent les saintes Huiles, afin de bien mon­trer que c’est de la ver­tu de Notre Seigneur, de la ver­tu de sa Croix, qu’empruntent ces saintes Huiles, la grâce qu’elles communiquent.

Et avec quelle oppor­tu­ni­té, avec quelle sagesse, la Providence a vou­lu choi­sir l’huile pour nous com­mu­ni­quer ses grâces. En effet l’huile se répand par elle-​même – en quelque sorte – dans l’objet qu’elle touche, qu’elle oint. De même la grâce qui nous est com­mu­ni­quée par ces onc­tions, se répand dans nos âmes par elles-​mêmes. Et ain­si elles sanc­ti­fient non seule­ment nos âmes, mais toutes les facul­tés de nos âmes et nous com­mu­niquent les ver­tus, les dons, les béa­ti­tudes qui sont atta­chées à la grâce sanctifiante.

L’huile donne aus­si la force, aux corps qui sont oints par l’huile. De même la grâce sanc­ti­fiante aus­si, for­ti­fie nos âmes pour lut­ter dans le com­bat spi­ri­tuel qu’elles doivent mener contre les puis­sances infer­nales pour arri­ver à la béa­ti­tude éternelle.

L’huile encore éclaire et réchauffe. De même la grâce sanc­ti­fiante éclaire nos âmes et non seule­ment nos âmes, mais toutes les per­sonnes qui ont l’occasion de pro­fi­ter de notre minis­tère, sont éclai­rées, sont illu­mi­nées par la grâce que nous a com­mu­ni­quée l’Huile sainte, par­ti­cu­liè­re­ment dans la sainte Ordination du sacer­doce et de l’épiscopat.

Voilà le sym­bole que repré­sentent ces saintes Huiles.

Et pour­quoi l’Église et pour­quoi Notre Seigneur a‑t-​il choi­si le baume pour l’union des saintes Huiles ? Pour leur don­ner une ver­tu d’incorruptibilité. On embaume les corps pour les rendre incor­rup­tibles. De même le baume rend nos âmes aus­si, incor­rup­tibles, agit de telle manière que nos âmes gardent cette vie pré­cieuse, cette vie divine, qui nous est don­née par la grâce sanc­ti­fiante. Ainsi nos âmes deviennent vrai­ment incor­rup­tibles et immor­telles, prêtes à jouir dans l’éternité de la gloire de Dieu et de la béa­ti­tude éternelle.

Comme nous devons remer­cier le Bon Dieu, d’avoir aidé l’infirmité de notre nature qui a besoin des choses sen­sibles pour signi­fier les choses spi­ri­tuelles, les réa­li­tés spi­ri­tuelles. Combien le Bon Dieu a été bon de nous don­ner ain­si ces Huiles saintes pour signi­fier en nous, la grâce et la vie qu’il veut nous donner.

Et à cette occa­sion nous prie­rons pour tous ceux qui vont être oints par les huiles qui vont être consa­crées dans quelques ins­tants et aux­quelles, vous, prêtres, diacres, sous-​diacres, vous allez participer.

Nous deman­de­rons au Bon Dieu de faire que ces Huiles saintes leur com­mu­niquent vrai­ment la grâce ; qu’ils gardent cette grâce en eux.

Et tous ceux qui seront bap­ti­sés, qui seront confir­més ; ceux qui seront ordon­nés prêtre ; ceux qui rece­vront l’huile des infirmes à l’occasion du sacre­ment d’extrême-onction, que toutes ces per­sonnes reçoivent vrai­ment la grâce sanc­ti­fiante dans leur âme et rendent grâce à Dieu, d’avoir ain­si par sa Croix, com­mu­ni­qué sa propre vie à leur âme.

Quant à vous prêtres et vous qui avez la charge des saintes Huiles, l’Église recom­mande dans le Pontifical, à l’évêque, de deman­der à ceux qui emploient ces saintes Huiles et à ceux qui les gardent, de les gar­der avec vigi­lance, avec res­pect, avec véné­ra­tion. De ne pas les mettre dans n’importe quel lieu, dans n’importe quel récep­tacle, mais de les gar­der avec véné­ra­tion et de ne les employer qu’avec beau­coup de dévotion.

Voilà ce que nous rap­pelle le Pontifical.

Et nous deman­de­rons à la Vierge Marie de nous aider dans notre minis­tère, elle qui a par­ti­ci­pé sans doute à l’onction qui a été don­née à Notre Seigneur lorsqu’il était mort, afin de l’embaumer et de le dépo­ser dans le sépulcre. Demandons à la très Sainte Vierge Marie de nous don­ner sa foi, de nous don­ner son espé­rance, de nous don­ner sa cha­ri­té, lorsque nous exer­ce­rons notre minis­tère en oignant les corps des bap­ti­sés, des confir­més, des futurs prêtres, des prêtres et de ceux qui rece­vront l’extrême-onction.

Au nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit. Ainsi soit-il.

Fondateur de la FSSPX

Mgr Marcel Lefebvre (1905–1991) a occu­pé des postes majeurs dans l’Église en tant que Délégué apos­to­lique pour l’Afrique fran­co­phone puis Supérieur géné­ral de la Congrégation du Saint-​Esprit. Défenseur de la Tradition catho­lique lors du concile Vatican II, il fonde en 1970 la Fraternité Saint-​Pie X et le sémi­naire d’Écône. Il sacre pour la Fraternité quatre évêques en 1988 avant de rendre son âme à Dieu trois ans plus tard. Voir sa bio­gra­phie.