Mgr Bernard Fellay – Supérieur Général de la FSSPX
Brian Mershon : Monseigneur, quelle est votre réaction devant ce résultat de plus de 19 millions de chapelets, alors que la Fraternité Saint-Pie X en avait demandé 12 millions ?
Mgr Fellay : Tout d’abord, je suis très, très heureux de voir autant d’enthousiasme et une telle réponse à notre appel. Je suis certain que ce résultat ne provient pas seulement de nos fidèles. Je suis persuadé que beaucoup, beaucoup d’autres se sont joints à cette croisade, mais nous en ignorons le nombre. C’est la première chose. Deuxièmement, cet enthousiasme manifesté veut dire que les fidèles ont pris conscience de l’importance de ce sujet. Et je m’en réjouis car ce sujet est très, très important.
Brian Mershon : Les deux précédentes croisades du rosaire ont donné lieu à des réponses rapides et historiques – la libération de la messe traditionnelle pour tous les prêtres dans le monde entier et la levée des excommunications des évêques de la Fraternité, ce qui a permis notamment d’entamer des discussions doctrinales avec le Saint-Siège. Envisagez-vous une réponse aussi spectaculaire à cette troisième Croisade du rosaire ?
Mgr Fellay : Je la laisse entièrement entre les mains de Dieu et de la T.S. Vierge Marie. Mais probablement, non. On ne sait jamais, mais je serais très étonné de voir le pape consacrer la Russie. Ce serait une très grande surprise. Mais d’un autre côté, nous avons déjà été surpris, aussi je ne serai pas étonné que cela arrive rapidement. Cette fois-ci, ce que nous demandons est tellement important, si grand et directement impliqué dans tous les événements de l’histoire des temps modernes.
Brian Mershon : Depuis que Benoît XVI a été élu et que le nouveau patriarche orthodoxe de Russie a été choisi, il y a eu un changement manifeste dans les relations, et, me semble-t-il, pour le mieux. Le Patriarche orthodoxe russe a même publié un livre sur les écrits du Pape destiné à être distribué parmi ses fidèles ! Comment comprenez-vous cela ? Y a‑t-il également un lien avec le Troisième secret de Fatima ?
Mgr Fellay : Personnellement je crois qu’il y a du mouvement dans l’air en Russie. Il y a assurément quelque chose qui semble bouger en Russie. Jusqu’où et à quel point ? Je ne sais pas. Mais il y a beaucoup d’indices qui manifestent une renaissance de la religion en Russie.
Brian Mershon : Avez-vous déjà envoyé le bouquet de chapelets ?
Mgr Fellay : Cela ne saurait tarder.
Brian Mershon : Quelle est l’attitude de la Fraternité Saint-Pie X à l’égard des attaques contre le Saint-Père et l’Eglise de la part des medias du monde entier ?
Mgr Fellay : Je pense que nous avons une bonne preuve que l’Eglise a toujours des ennemis. Et que ces ennemis portent des noms réels. Vous pouvez le constater à travers la campagne en cours. C’est très révélateur. D’un côté nous avons les vieux ennemis américains et de l’autre les gauchistes européens, les deux travaillant ensemble.
Brian Mershon : Pensez-vous que ces attaques soient liées aux châtiments prédits par sœur Lucie dans le Troisième Secret ?
Mgr Fellay : C’est trop difficile à dire. Mais il y a une citation de Fatima qui s’applique et que j’aimerais citer : « Le Pape va beaucoup souffrir. Le Pape va beaucoup souffrir. » C’est ce qui se passe.
Brian Mershon : Les discussions en cours avec le Saint-Siège se déroulent hors des projecteurs des médias pour des raisons évidentes. A quoi pensez-vous que cela va aboutir ? Qu’est-ce qui ferait que la Fraternité Saint-Pie X accepte une structure canonique ? Est-ce que les discussions ont un lien avec une éventuelle solution canonique ?
Mgr Fellay : C’est impossible à dire. Absolument impossible. Cela dépend de trop de facteurs pour l’instant. Je n’ai pas la réponse.
Brian Mershon : Certaines critiques disent que le rejet d’une solution canonique ou pratique est un signe d’obstination ou de mauvaise volonté. Que répondez-vous à cela ?
Mgr Fellay : C’est très simple. Le Saint Siège a accepté que les discussions doctrinales aient lieu… Ce fait devrait répondre à votre question sans qu’on nous intente de procès d’intention. Mais au-delà, il est très clair qu’une solution éventuelle sans fondement doctrinal serait désastreuse. Nous ne voulons pas de cela. Nous voulons et nous avons besoin de la sécurité d’une solution fondée sur la doctrine pour avancer. Alors prétendre qu’il y a quelque chose de définitif avant même d’engager les discussions doctrinales…
Nous avons sous les yeux tous ces exemples antérieurs : la Fraternité Saint-Pierre, l’Institut du Christ-Roi et tous les autres sont complètement bloqués sur le plan doctrinal car ils ont d’abord accepté un accord pratique.
Brian Mershon : Croyez-vous que le pape personnellement désire sincèrement aboutir à une solution canonique avec la Fraternité Saint-Pie X ?
Mgr Fellay : Oui, je le pense. Je pense que c’est ce que le pape désire. Il veut que la situation de l’Eglise s’améliore et il veut résoudre avec la Fraternité la question de la consécration de ses évêques.
Brian Mershon : Lors de précédents entretiens, vous avez dit que la Fraternité avait de bonnes relations et mêmes des amis parmi les évêques et cardinaux – même au sein de la curie romaine. Quels conseils vous donnent-ils sur les discussions doctrinales en cours ?
Mgr Fellay : Aucun. Ils sont très discrets en ce moment. Je pense que les discussions que nous avons sont très bonnes et se passent en toute discrétion. La prochaine aura lieu en mai.
Brian Mershon : Avez-vous connaissance d’un groupe de prêtres ou de fidèles, ou de diocèses qui aurait, dans l’histoire récente de l’Eglise, offert un si grand bouquet de chapelets au pape, comme vous l’avez fait trois fois ?
Mgr Fellay : Pas à ma connaissance. Il y a peut-être un précédent mais je ne suis pas au courant. Il est évident qu’une telle croisade est unique. Je crois savoir que le P. Gruner va faire la même chose.
Brian Mershon : Quel conseil donnez-vous aux catholiques qui désirent ouvrir une chapelle près de chez eux ? Est-ce que la Fraternité met un frein à l’expansion du nombre de chapelles en raison des discussions doctrinales ?
Mgr Fellay : Il faudrait d’abord que les fidèles nous contactent et ensuite nous essaierons de faire quelque chose pour eux. En ce moment, nous avons tellement de demandes que nous pouvons difficilement les satisfaire toutes. Cette année a été une bonne année pour les ordinations. Néanmoins, nous sommes toujours en manque de prêtre (pour satisfaire toutes les demandes). Nous avons même du mal à y répondre. Mais nous continuons notre vie comme avant. Ce serait absolument contre-productif de penser que nous devons arrêter de grandir en raison des discussions avec Rome. C’est le contraire qu’il faut.
Brian Mershon : Monseigneur, avez-vous une dernière chose à ajouter ?
Mgr Fellay : Les prières à la Très Sainte Vierge Marie doivent continuer. Certains penseront que maintenant que nous avons accompli notre Croisade du rosaire, tout va bien. Non, non et non. Il est désormais clair que nous sommes engagés dans une bataille avec les vrais ennemis de l’Eglise. Alors, Catholiques, soyez prêts ! Remportez la victoire avec le rosaire !
Interview publié le 11 mai 2010 par The Remnant