« A Lille, la Fraternité Saint-Pie X construit une chapelle de 300 places et prépare les cérémonies commémoratives pour le 100e anniversaire de la naissance d’un enfant du pays, Mgr Marcel Lefebvre. Un nouveau souffle pour la Tradition dans le Nord. »
« Août 2004 : l’arcade en plein cintre au-dessus du chœur (derrière se trouve la sacristie). Le chantier vu l’exiguïté des lieux avance…à reculons. »
Stéphane Bellovaque : Un peu partout en France, la Tradition fête ici ses 20 ans, là ses 25 ans ou plus de présence et de combat. Qu’en est-il du Nord ?
Abbé Etienne Beauvais : En métropole lilloise et plus spécialement à Croix, la Tradition a aussi 25 ans de présence et de travail pour le maintien de la Foi et du sacerdoce catholique. En 2004, la chapelle de la Sainte-Famille de Tourcoing a même fêté ses 30 ans.
Par-dessus tout, pour « les Hauts de France », le titre de fierté, et non des moindres, c’est que l’initiateur de cette œuvre de reconstruction aux dimensions de l’Eglise universelle est un enfant du pays : Marcel Lefebvre est né et a grandi à Tourcoing, dans la banlieue lilloise. Dans « ch’Nord », ça ne s’oublie pas ! Les anciens se souviennent également de la « messe à Lille » dans l’été 76, « l’été chaud ». « J’y étais ! » disent-ils pour se présenter aux jeunes abbés d’Ecône, tels des anciens combattants… Ne le sont-ils pas d’ailleurs ces combattants de la première heure ?
Stéphane Bellovaque : Pouvez-vous nous faire l’historique de cette installation et de son développement ?
Abbé Etienne Beauvais : Cela commence au lendemain du Concile par ces « messes clandestines » célébrées de maison en maison, à Lille, Marcq-en-Baroeul, puis Lambersart, grâce à d’admirables figures de prêtres et de fort caractères – les abbés Deroubaix, Salainge (alors curé du sanctuaire marial de La Marlière à Tourcoing), Spender, Romagnoli, parmi d’autres, et grâce également au dévouement de nombreux laïcs au sein de l’association Saint-Pie X du Nord. En 1975, l’abbé Aulagnier alors supérieur du district de France de la jeune Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, sur les conseils de Mgr Lefebvre, achète ce qui reste du couvent des Petites Sueurs des ouvriers à Croix, au Nord-Est de Lille. Cet achat nécessite la création d’une société immobilière qui prend le nom du nouveau prieuré « de la Sainte-Croix ».
« Septembre-octobre 2004 : pose de la charpente »
Les débuts sont pauvres mais la petite chapelle de 150 places est vite remplie. Il faut déjà envisager autre chose. En 1986, une famille de nos fidèles propose les ateliers de tricotage de l’entreprise Devylerre qui vient de cesser ses activités. Le bâtiment situé à la limite des communes de Lille et La Madeleine – un emplacement unique – peut contenir 200 personnes ; certes, il n’a vraiment rien d’une cathédrale… et des problèmes de place, de sécurité et d’insalubrité se posent… En 1996, un groupe de laïcs se constitue sous la houlette de leur prieur l’abbé Duthilleul pour la recherche d’une nouvelle chapelle. Quelques opportunités d’acquisition d’églises se présentent mais ne peuvent se réaliser … Mgr Lefebvre lui-même puis M. l’abbé Laurençon alors supérieur du district invitent de façon pressante les fidèles et leurs pasteurs à « faire quelque chose »…
Enfin la décision de l’extension de la chapelle N.-D. du Rosaire est prise.
Stéphane Bellovaque : Nous sommes en … ?
Abbé Etienne Beauvais : 1998. Un architecte est désigné ; il est patient car aucun de ses premiers projets n’est accepté : architecture trop moderne … Les réunions de réflexion avec les abbés et les fidèles se succèdent … Arrive enfin le bon projet, mais M. Verdonck n’en verra pas la réalisation ; son décès stoppe les avancées, pour peu de temps, il est vrai, car son successeur reprend les plans et va de l’avant, bravant les administrations et l’opposition des voisins…
« Décembre 2004 : pose des 500 m² de la toiture… »
Stéphane Bellovaque : La ténacité serait-elle la vertu des gens du Nord ?
Abbé Etienne Beauvais : Je le crois, oui ; mais il faut y ajouter une certaine lenteur… Un permis de démolir est délivré en novembre 2001 (le parti de démolir pour reconstruire à neuf avait été adopté); il est valable un an et renouvelable une fois. Le permis de construire est obtenu quant à lui en janvier 2002, d’ailleurs aussitôt contesté devant le Tribunal Administratif de Lille… La procédure promet d’être lente. Il faut attendre le verdict, mais combien de temps ? Que va devenir le permis de démolir qui expire en novembre 2003 ?
Le jeune prieur qui succède à l’abbé Laffite connaît là ses premières sueurs froides ! Il n’est pas le seul : la décision d’entreprendre les travaux au plus vite étant prise grâce à quelque fidèle vigilant, l’architecte Benoît Deryckere dépose notre dossier en mairie de Lille quelques jours avant l’expiration du délai et s’entend dire par la responsable : « c’est un peu tard… mais recevable » ! Ténacité, avez-vous dit ? La Providence aidant.
« Décembre 2004 : charpente intérieure apparente »
Stéphane Bellovaque : Comment se présente cette nouvelle chapelle ?
Abbé Etienne Beauvais : D’architecture relativement moderne, elle est sobre et d’un volume « agréable ». Il a fallu tenir compte de certaines contraintes d’implantation : la chapelle est prise dans un goulot de 12 mètres de large sur 25 de long, entre deux murs mitoyens sur lesquels on ne peut s’appuyer. Elle utilise le matériau traditionnel du Nord, la brique, d’un coloris rouge-orangé. La charpente apparente contribue à lui donner un aspect intérieur chaleureux et priant. Grâce à deux longues baies vitrées, non visibles de la nef, le chœur, seul, est toujours baigné d’une lumière naturelle. En entrant le premier « coup d’œil » est pour l’autel de pierre et la grande croix qui le domine. La nef est dans une semi-pénombre que viendront égayer quelques œuvres d’artistes aux couleurs chaudes…
« Février 2005 : La façade de briques vient d’être terminée. Le chantier entre dans sa phase de finition. Le pignon attend une grande croix de fer forgée à son sommet et les grandes portes de bois. »
Stéphane Bellovaque : Trouve-t-on encore quelques artistes catholiques ?
Abbé Etienne Beauvais : C’est peut-être l’autre originalité de cette chapelle. En effet nous voudrions faire travailler quelques artistes issus à la fois du Nord et de la Tradition… et prouver s’il est possible que l’art catholique ne s’arrête pas au Baroque ou … au Sulpicien. L’autel de pierre – blanche pour les massifs, bleue dite « de Tournai » pour la table (le tout fait un poids de plus d’une tonne et demi) – sera sculpté ; Notre-Dame du Rosaire, en pierre polychrome, trouvera sa place à l’entrée du chœur ; un saint Joseph, de facture récente également, nous est offert par de généreux donateurs ; enfin un chemin de croix en terre cuite polychrome s’insérera avec bonheur entre les piliers de briques.
Plus tard des fonds baptismaux sculptés dans les mêmes pierres que l’autel trouveront place au fond de l’édifice. Tradition et modernité donc mais aussi beauté et sobriété.
Stéphane Bellovaque : Voilà donc une intéressante entreprise. A quand l’inauguration ?
Abbé Etienne Beauvais : M. l’abbé de Cacqueray procédera à la bénédiction de la chapelle Notre-Dame du Rosaire à Lille le samedi 9 avril 2005 à 10h00. L’autel sera consacré en octobre prochain, nous l’espérons, pour la fête de Notre-Dame du Rosaire.
Stéphane Bellovaque : Nous y serons, M. l’abbé ! Mais, brièvement, n’avez-vous pas d’autres projets pour « Lille 2005 – Capitale de la Tradition »… ?
Abbé Etienne Beauvais : Si ! Nous vous invitons tous très chaleureusement à venir célébrer le centenaire de la naissance de notre fondateur Mgr Marcel Lefebvre les 12 et 13 novembre 2005 sur le thème « Mgr Marcel Lefebvre, homme de Foi, homme d’Eglise » : conférences, exposition retraçant sa vie, visite de Tourcoing (sa ville natale) sur les pas de la famille Lefebvre et messe pontificale d’action de grâce pour notre Fraternité ! Un hommage à notre fondateur qui lui est bien dû.
Entretien avec l’abbé Etienne Beauvais†
Réalisé par notre correspondant Stéphane Bellovaque.