Nos infirmiers ont rapidement du travail car la file des patients grossit vite
Grosse journée pour tout le monde. Les volontaires sont partagés en deux groupes : une partie reste sur place pour accueillir tout un groupe d’handicapés, et les autres partent à l’extérieur pour une mission éclair au baranguay Tagansule, à une bonne heure de route.
Asmah, que nous avons déjà évoquée précédemment, s’occupe depuis quelques années des handicapés de la région. Ils sont nombreux, et leurs parents les cachent chez eux par peur du regard des autres. Du coup, ils ne sont pas soignés, et leur mal s’aggrave ; certains n’ont même pas de vrai fauteuil roulant : une chaise en plastic montée sur roues en tient lieu. Asmah a donc créé le Department Organisation Health, et organise des journées dans des sites publics où sont conviés tous les parents qui ont des enfants à fort handicap ; des professionnels de la santé sont là pour leur donner des conseils médicaux et psychologiques.
Comme ils sont très nombreux à la réunion prévue ce jour, Asmah a eu l’idée de nous en amener quelques-uns. Ils faisaient vraiment pitié à voir, nous n’avons pas osé trop les photographier tant leur handicap dépasse l’imagination : parfois privés de deux membres, des bras d’à peine 3cm de diamètre à six ans, six doigts à chaque main, deux yeux minuscules au-dessus d’un nez difforme, pas de nez et des yeux énormes exorbités, un corps disproportionné, etc. Beaucoup de gens qui viennent arrivent des bidonvilles à plusieurs kilomètres de là, ils mettent tout leur espoir dans cette réunion. Une femme n’a pu écrire que la première lettre de son nom pour signer la feuille de soin, et une autre ne savait même pas écrire. C’est vous dire le niveau de vie de ces pauvres parents.
Il y a eu deux cas graves à gérer : un enfant a fait une longue crise d’épilepsie, impressionnante pour tous ceux qui étaient autour ; et une petite fille a perdu connaissance, les battements de son cœur se ralentissaient de façon inquiétante, il a fallu un long massage cardiaque du docteur Viray pour la tirer d’affaire. Pendant ce temps, les religieuses faisaient prier tout le monde autour.
Avant la messe en fin d’après-midi, une quarantaine de nouveaux enfants handicapés arrivent encore pour consulter. Dure journée pour les médecins et les pharmaciennes pédiatres. Au moins huit médicaments pour chaque enfant. A la fin de la journée, Dr Viray confie qu’elle offre le labeur de cette journée dans le cadre de la Croisade du Rosaire. Cette femme n’a pas fini de nous étonner par sa grande générosité !
Rendez-vous fixé à 5h du matin. Les Philippins sont matinaux …et fantaisistes ! Parfois, ils sont là en avance, et parfois très en retard. En fait, ils fixent un horaire, puis se rendent compte que le temps de trajet sera moins long que prévu, alors ils viennent plus tard sans prévenir personne. Tout cela pour dire que nous partons vers 6h30 dans les véhicules de l’armée. Difficile de finir sa nuit, en rang d’oignon sur des bancs raides, ballottés sur les routes sinueuses de montagne. Mais tellement plus exotique que les wagons nauséabonds du métro !
Nous arrivons bien à l’heure pour installer les tables de médecins et pharmaciens. Nos infirmiers ont rapidement du travail car la file des patients grossit vite. Avant de commencer, monsieur l’abbé fait une courte procession pour mettre cette journée sous le signe de la Vierge : il est important que les gens comprennent le sens de cette mission ; les soins que nous procurons à leur corps ne sont qu’un reflet de la charité qui nous fait souhaiter le salut de leur âme.
Docteur Dichard constate les maladies habituelles : diabète, hypertension, asthme, bronchite. Elles viennent de la mauvaise hygiène de vie ; il ne faudrait pas grand-chose pour les éviter, mais les bonnes habitudes sont difficiles à prendre. Côté pédiatrie, docteur Loan Phan, notre vietnamienne si fidèle, soigne quelques enfants très faibles, toute une famille infestée par la gale, et prescrit beaucoup de vitamines qui font trop souvent défaut dans l’alimentation.
Un enfant de 13 ans se présente dans l’après-midi : il en paraît 7 ou 8, a un œil fermé dont la crispation lui déforme le visage, et ne tient pas sur ses deux jambes. Quand le docteur commence à lui parler et à tâter les muscles de ses cuisses, son visage s’anime, sourit, il se met à parler. Bien sûr qu’il veut marcher : accroché à la taille du médecin, il se déplace tant bien que mal et saute presque de joie face aux applaudissements des spectateurs attendris ! Quand vient le moment de lui essayer des lunettes, c’est à nouveau l’excitation : il reconnaît son papa à plusieurs mètres !
Dans le même temps, à l’autre bout du gymnase, monsieur l’abbé Péron donne l’Extrême-onction à un vieil homme malade, dont la tension est tellement faible qu’on ne peut le conduire à l’hôpital : il ne survivrait pas aux secousses du voyage. C’est un moment émouvant pour tous ceux qui y assistent. L’homme est assis, très recueilli, il joint les mains de lui-même et semble concentrer toute son énergie pour faire un signe de croix. Ainsi, la vie et la mort se côtoient, dans une atmosphère sereine et religieuse.
Nous quittons la place vers 18h, après d’innombrables photos pour se rappeler du passage des missionnaires. La joie d’avoir été secouru, et d’avoir secouru, se lit sur tous les visages.
Deo gratias !
Jeanne de Vençay, envoyée spéciale de La Porte Latine aux Philippines
Suite des reportages de la Mission Acim Asia 2017
11° Opération Rosa Mystica sur l’île de Mindanao – N° 08, fin de la mission 2017
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