Chartres 2006 : « Missionnaires ! »

Chers Pèlerins,

Ce sont la dés­in­car­na­tion et l’au­to­di­vi­ni­sa­tion de l’homme qui ont pré­si­dé aux des­ti­nées des socié­tés modernes depuis plus de deux siècles. Au rejet de l’ordre sur­na­tu­rel s’est trou­vé néces­sai­re­ment asso­ciée une volon­té sys­té­ma­tique de pul­vé­ri­sa­tion des lois de la nature humaine pous­sée jus­qu’à des extré­mi­tés inédites. Il est cepen­dant impos­sible de vio­len­ter indé­fi­ni­ment une nature sans qu’elle se cabre, qu’elle exprime son angoisse et tente d’ul­times sur­sauts pour échap­per à ses bourreaux.

C’est ain­si que les psy­chiatres sont aujourd’­hui contraints de recon­naître ce mal-​être obsé­dant qui ne cesse plus de tarau­der l’exis­tence des mères ayant avor­té, ou qu’ils avouent leur impuis­sance à restruc­tu­rer des enfants dont les années ont été livrées à la folie des couples contre-​nature. N’est-​ce pas, par exemple encore, l’in­fla­tion déme­su­rée des désordres et des per­tur­ba­tions psy­cho­lo­giques, l’aug­men­ta­tion spec­ta­cu­laire du nombre des sui­cides, qui viennent éga­le­ment illus­trer le désar­roi d’une huma­ni­té bru­ta­li­sée jus­qu’à la dislocation ?

Il est cer­tain que si l’Eglise catho­lique ne se trou­vait elle-​même mas­si­ve­ment sté­ri­li­sée par les injec­tions dans ses veines d’une idéo­lo­gie étran­gère, à l’oc­ca­sion du Concile Vatican II, elle occu­pe­rait la posi­tion la plus favo­rable, par les tré­sors de véri­té et de cha­ri­té dont elle dis­pose en son sein, pour venir au secours des socié­tés désem­pa­rées. Hélas ! Tant qu’elle demeure, par ses chefs, inféo­dée au poi­son du moder­nisme, son rôle bien­fai­sant d’in­fluence en reste lamen­ta­ble­ment réduit.

C’est une rai­son sup­plé­men­taire pour que les évêques, les prêtres, les fidèles, qui n’ont pas dépla­cé la borne ancienne que leurs pères avaient posée (Pr. XXII, 28), qui sont demeu­rés fermes et ont gar­dé les tra­di­tions (2 Th. I,15), doivent bien se rendre compte de la mis­sion déter­mi­nante qui leur est confiée. La garde du dépôt (I Tim. VI, 20) les désigne immé­dia­te­ment comme les meilleurs mis­sion­naires sur les­quels l’Eglise est en droit de miser. Elle les veut tel­le­ment com­pa­tis­sants à ces misères spi­ri­tuelles et morales qui abreuvent leurs sem­blables, tel­le­ment débor­dants des tré­sors reçus, qu’ils n’en­vi­sagent de plus belle exis­tence qu’à la pas­ser dans les fos­sés de la moder­ni­té pour y pan­ser ses moribonds.

« . Voici les âges sombres où d’é­le­ver une famille, d’ai­mer son métier, de véné­rer sa patrie, est une tâche sur­hu­maine. L’homme d’é­lite est seul, cer­né de bar­bares, accou­rus non comme au Moyen-​Age du fond de l’Orient, mais sur­gis à ses côtés du bouillon­ne­ment de la socié­té maté­ria­liste. Sur ses épaules affais­sées, Dieu lui-​même s’ap­puie de tout son poids. Tous les sou­cis de la terre et des cieux déferlent en son cour. Il est écra­sé par ce qu’il est, par ces richesses qu’il détient à lui seul, et qui sont sa vie. Voici naître le temps bien­heu­reux où don­ner en abon­dance sera se déli­vrer d’un far­deau insup­por­table » (Marcel de Corte – Philosophie des mours contem­po­raines, p. 490).

Chers Pèlerins, que Notre-​Dame, Reine des apôtres, Reine des mar­tyrs, Reine des confes­seurs nous obtienne la grâce, quelle que soit la situa­tion où la Providence nous a pla­cés, d’être de fidèles témoins de l’Espérance qui est en nous et qui a déjà vain­cu le monde.

Abbé Régis de Cacqueray-Valménier †
Supérieur du dis­trict de France 

Capucin de Morgon

Le Père Joseph fut ancien­ne­ment l’ab­bé Régis de Cacqueray-​Valménier, FSSPX. Il a été ordon­né dans la FSSPX en 1992 et a exer­cé la charge de Supérieur du District de France durant deux fois six années de 2002 à 2014. Il quitte son poste avec l’ac­cord de ses supé­rieurs le 15 août 2014 pour prendre le che­min du cloître au Couvent Saint François de Morgon.