Funérailles du Frère Gabriel Le Nhu

Le mar­di 22 décembre 2020, ont eu lieu au Séminaire d’Écône les obsèques du Révérend Frère Gabriel Le Nhu, en l’église du Cœur Immaculée de Marie. 

La messe pon­ti­fi­cale de funé­railles fut célé­brée par S.E. Mgr Tissier de Mallerais, puis une pro­ces­sion de prêtres et de sémi­na­ristes mèna la dépouille du pre­mier frère de la Fraternité Saint-​Pie X jusqu’au caveau. Le Frère Gabriel occupe désor­mais l’emplacement même ou repo­sa le corps de Mgr Lefebvre jusqu’en sep­tembre 2020.

Photos des funérailles

Sermon prononcé par Mgr Tissier de Mallerais

Au nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit. Ainsi soit-il.

En ce temps de l’Avent, de notre expec­ta­tion joyeuse et anxieuse de l’avènement de Notre-​Seigneur Jésus-​Christ, notre Sauveur, Rédempteur, nous avons per­du notre cher frère Gabriel Le Nhu et nous espé­rons, nous vou­drions, qu’il fête les fêtes de Noël au Ciel, mais cela dépend de beau­coup de choses. Nos sen­ti­ments, quand j’ai appris moi-​même le décès du cher frère Gabriel, sont divers et par­ta­gés. Mais peu importe nos sen­ti­ments, ce qui est essen­tiel, ce sont nos sen­ti­ments de foi, d’espérance et de cha­ri­té, c’est-à-dire les sen­ti­ments surnaturels.

Notre foi voit dans le frère Gabriel son âme, elle voit un bap­ti­sé enri­chit de la grâce sanc­ti­fiante, de la vie divine et lavée du péché ori­gi­nel. Deuxièmement, on voit en lui un membre de la Fraternité sacer­do­tale Saint-​Pie X qui a eu le cou­rage de faire le pas et d’entrer dans cette aven­ture, une Fraternité débu­tante, caho­tante, mais voi­là, il est entré et il est res­té. Ensuite nous voyons le reli­gieux qui peu après a fait sa pro­fes­sion reli­gieuse et consa­cra toute sa vie au culte et à l’honneur du bon Dieu, voi­là ce qu’est la pro­fes­sion reli­gieuse, une consé­cra­tion de toute sa vie au ser­vice cultuel, reli­gieux, du bon Dieu. Nous voyons en lui, par la foi, l’homme ver­tueux mais aus­si pécheur, car nous avons tous quelques ver­tus, je sup­pose, et nous avons beau­coup de péchés sur la conscience. Notre espé­rance pour lui voit une âme, non pas à sau­ver, grâce à Dieu, mais à déli­vrer du Purgatoire. Notre cha­ri­té va faire tout ce qu’elle peut pour le déli­vrer de cette pri­son du Purgatoire, par nos œuvres, sacri­fices et prières.

Nos cœurs au diapason de la liturgie

Ceci dit, met­tons nos cœurs au dia­pa­son de la litur­gie des défunts et médi­tons la belle orai­son, col­lecte, de la messe de funé­railles que je vous lis en latin puisque nos sémi­na­ristes sont tous des lati­nistes ou au moins lati­ni­sants : Deus qui pro­prium est mise­re­ri sem­per et par­cere. Dieu, dont le propre est d’avoir pitié et d’épargner tou­jours. Si vous vou­lez, la pitié du bon Dieu envers nous. Cette pitié de Dieu est une misé­ri­corde, le bon Dieu se penche sur la misère de nos âmes affec­tées par le péché, par la conta­gion la plus dan­ge­reuse, qui est celle du péché. Or le propre du bon Dieu face à ses créa­tures péche­resses, c’est de vou­loir par­don­ner et épar­gner. Comme il est bon, le bon Dieu, disait le bon Père Barrielle. Alors, Dieu étant près à par­don­ner, nous allons le sup­plier : De sup­plices exo­ra­mus, pro ani­ma famu­li tui Gabrielis. Nous allons sup­plier le bon Dieu pour l’âme de notre cher frère Gabriel, nous sommes là pour sup­plier le bon Dieu aujourd’hui. Pourquoi ? Parce que le bon Dieu : Hodie de hoc sae­cu­lo migrare jusis­ti, Dieu a com­man­dé aujourd’hui, c’est-à-dire il y a quelques jours, à cette âme de migrer, de quit­ter ce monde de misère. L’ordre du bon Dieu, voi­là, cela vien­dra pour cha­cun de nous, moi en par­ti­cu­lier, c’est-à-dire à un moment où on ne sait pas, où on ne s’y attend pas, parce que c’est le moment du bon Dieu que per­sonne ne peut connaitre. Jusisti, ô mon Dieu vous avez ordon­né que ce jour-​là son âme migre­rait ailleurs, d’où le besoin d’être prêts à l’avance.

Nous sup­plions le bon Dieu pre­miè­re­ment de ne pas livrer à son enne­mi cruel, le diable, et deuxiè­me­ment de ne pas l’oublier pour tou­jours dans le Purgatoire. Au contraire, que le bon Dieu com­mande à ses saints anges de le prendre, vous voyez le rôle de nos saints anges après la mort pour nous aider à entrer dans le ciel, pour nous prendre quand le Purgatoire est ter­mi­né. Et de nous conduire à la porte de la patrie du para­dis, la patrie du para­dis, notre vraie patrie, pour tou­jours. Demandons aux saints anges pour Gabriel, qu’ils le conduisent jusqu’à la porte de notre vraie patrie, le para­dis céleste, là où habitent le bon Dieu et les saints. Afin que celui qui a cru et espé­ré en vous, mon Dieu : la foi et l’espérance, la foi dans la vie éter­nelle, l’espérance de l’acquérir, cette vie éter­nelle. Afin que celui qui a cru et espé­ré en vous ne souffre pas les peines de l’enfer mais jouisse des joies éter­nelles, voi­là l’alternative à laquelle nul n’échappe et cela se décide ici-​bas et main­te­nant. Afin que cette âme ne souffre pas les peines de l’enfer pour tou­jours, mais qu’elle jouisse des joies éter­nelles, non poe­nas infer­ni sus­ti­neat, sed gau­dia aeter­na pos­si­deat, per Christum Dominum nos­trum. Nous prions par l’intercession de Notre-​Seigneur Jésus-​Christ, notre Sauveur.

Quelques petites assurances

Biens chers fidèles, cette alter­na­tive est ter­ri­fiante quand on n’est pas dans un état très clair par rap­port au bon Dieu, mais pour notre cher frère Gabriel, nous avons quelques petites assu­rances, qu’il me par­donne. Cela me semble évident qu’il n’est pas en enfer mais enfin, nous n’en savons rien car Dieu seul peut juger. Nous avons deux motifs sur­na­tu­rels d’espérer qu’il est dans la bonne voie, mais peut-​être encore au Purgatoire.

Premier motif : sa fidé­li­té à sa pro­fes­sion reli­gieuse. Nous avons admi­ré la fidé­li­té à ses trois vœux de pau­vre­té, chas­te­té, obéis­sance. La pau­vre­té, un exemple, à deux jours je lui demande : Mon frère, est-​ce que vous avez gar­dé quelques lettres de Pontcallec ? On pour­rait faire des recherches dans ces cour­riers pour connaître un peu la vie des reli­gieuses et la vôtre. Il me dit : Non, je n’ai rien gar­dé parce que j’ai fait le vœu de pau­vre­té. La chas­te­té, je n’ai rien, nous n’avons jamais rien noté de mal et d’équivoque en ce domaine en lui. L’obéissance, c’est cette régu­la­ri­té ponc­tuelle avec laquelle il a rem­pli pen­dant qua­rante années ou plus son office de cui­si­nier assis­tant. Il était exi­geant pour lui et par consé­quent, il était aus­si exi­geant pour les sémi­na­ristes, je vous livre ce sou­ve­nir que l’abbé Wegner m’a dit aux Etats-​Unis : je venais d’arriver à Ecône – c’était un sémi­na­riste, un membre de la Fraternité, il est prêtre – et aus­si­tôt le frère Gabriel se pré­ci­pite sur moi et me dit « vous, vous êtes l’allemand – parce que l’abbé Wegner est alle­mand – qu’on nous envoie, bien, alors vous res­tez avec moi à la cui­sine ». Il choi­si l’abbé Wegner à la cui­sine pour l’aider comme sémi­na­riste parce qu’il savait que les alle­mands ce sont des tra­vailleurs, pas de com­men­taires pour les autres ! Vous voyez, il avait l’œil, il était exi­geant, c’est vrai, les sémi­na­ristes ont pu souf­frir un peu sous ses ordres, mais parce qu’il était exi­geant pour lui, lors il pou­vait se le per­mettre. Voilà si vous vou­lez, un petit signe pour nous ras­su­rer sur son sort.

Un deuxième signe, que je vous livre aus­si, c’est ce qu’il a dit à l’hôpital de Sion, à l’un de nos frères qui le visi­tait, et il l’a dit trois fois, donc avec insis­tance et cela venait de lui. Il a dit : « Mon frère, j’offre mes souf­frances pour les sémi­na­ristes » il avait bien le droit de la faire, en pas­sant par la Sainte Vierge, parce que je crois qu’il était consa­cré à la Sainte Vierge selon saint Louis-​Marie de Montfort. Tout cela passe par la Sainte Vierge. Quand vous êtes consa­crés à la Sainte Vierge, vos bonnes actions, les mérites, les satis­fac­tions, l’exaucement des prières, tout cela passe par la Sainte Vierge. La Sainte Vierge pré­sent tout cela au bon Dieu, à son Fils, Notre-​Seigneur Jésus-​Christ, avec son auto­ri­té de Mère de Dieu, s’il vous plaît, elle pré­sente cela et les rends très agréables au bon Dieu et y joint même, elle, ses propres mérites et satis­fac­tions, enri­chis de ses propres mérites et de ses propres prières. D’où l’avantage de se consa­crer à la Sainte Vierge, c’est comme un contrat bila­té­ral, on aban­donne tous ses mérites et satis­fac­tions à la Vierge Marie, acte héroïque, et la Sainte Vierge, en revanche, se charge de notre âme. Je vous explique en quoi consiste la consé­cra­tion mont­for­taine à la Sainte Vierge, qui est toute à notre avan­tage, être entre les mains de la Vierge Marie, c’est tout à fait satis­fai­sant pour notre salut. Par la Sainte Vierge il a offert ses souf­frances pour les sémi­na­ristes, non pas pour lui, il aurait pu dire, il l’a fait sans doute, parce que cela vaut aus­si, « j’offre mes souf­frances pour expier mes péchés », c’est clair, mais d’abord pour les sémi­na­ristes, c’est un acte de cha­ri­té par­faite d’offrir ses souf­frances pour les autres. Acte de cha­ri­té par­faite qui mérite en soi la rémis­sion des péchés. Il n’y a pas de plus bel acte de cha­ri­té que d’offrir quelque chose pour les autres, sur­tout les souf­frances qui pré­cèdent notre mort, avec l’angoisse et en même temps bien sûr l’espérance.

Voilà, biens chers fidèles, quelques indi­ca­tions qui nous invitent à suivre cer­tains exemples de notre cher frère Gabriel et nous invitent sur­tout à prier pour lui, à joindre à cette offrande qu’il a faite de lui pour les sémi­na­ristes notre offrande, l’offrande de nos sacri­fices, de nos prières pour le repos éter­nel et même pour que le bon Dieu daigne avan­cer, si pos­sible, l’accès de l’âme du cher frère Gabriel à la béa­ti­tude céleste des élus.

Au nom du Père et du Fils et du Saint-​Esprit. Ainsi soit-il.

Vidéo du sermon

Source : Séminaire d’Ecône