Entretien de Mgr Fellay au Der Spiegel – 2 mars 2009

Monseigneur, il y a quelques semaines, vous avez don­né à votre votre col­lègue Richard Williamson, un livre pour qu’il puisse en lire plus sur l’Holocauste. La semaine der­nière, il a publié des excuses mais qui reste en deçà de la demande du Vatican qu’il se rétracte de sa néga­tion de l’Holocauste. Cette décla­ra­tion de Mgr Williamson est-​elle suf­fi­sante pour vous ?

C’est, en tout état de cause, une pre­mière demande de par­don, ain­si qu’un pas impor­tant dans la bonne direc­tion. On peut tou­jours espé­rer une meilleure for­mu­la­tion. Toujours est-​il que cette demande de par­don est sin­cère et que le fait qu’il ait reti­ré ses pro­pos est réel.

Cet espoir semble infon­dé. Après son arri­vée à Londres, Mgr Williamson s’est lui-​même entou­ré de per­sonnes qui ont ouver­te­ment nié l’Holocauste, comme l’his­to­rien David Irving. Savez-​vous pourquoi ?

J’ai l’im­pres­sion que Mgr Williamson est uti­li­sé par ces per­sonnes. Les médias ont été déli­bé­ré­ment ali­men­tés par cette infor­ma­tion. Nous tra­vaillons contre cela autant que nous le pou­vons. Je suis tota­le­ment contre ces relations.

Mais votre influence sur Mgr Williamson semble être faible.

Nous sommes en contact, il est actuel­le­ment dans un prieu­ré de la Fraternité à Londres. Mais c” est aus­si un homme libre. Il a bien sûr un supé­rieur, mais il est libre de ses déci­sions. Mais il aura à sup­por­ter les consé­quences de cela.

Va-​t-​il réin­té­grer ses fonctions ?

C’est impos­sible dans les cir­cons­tances actuelles. Il nous a fait du mal et a sali notre répu­ta­tion. Nous avons nous-​mêmes pris très clai­re­ment nos dis­tances avec lui. Il n’a pas été ordon­né évêque pour pour­suivre ses propres buts, mais pour le bien com­mun de l’Église, pour répandre la véri­té révélée.

Alors pour­quoi n’excluez-​vous pas Mgr Williamson de la Fraternité ?

C’est ce qui se pas­se­ra s’il nie l’Holocauste à nou­veau. C’est pro­ba­ble­ment mieux pour tout le monde qu’il se taise et reste quelque part dans son coin. Je sou­haite qu’il dis­pa­raisse de la scène publique pour un bon moment.

Le Vatican pourrait-​il le réex­com­mu­nier s’il ne se rétracte pas ?

J’en doute. La néga­tion de l’Holocauste, aus­si grave soit-​elle, n’ap­pa­raît pas dans le droit cano­nique. Une excom­mu­ni­ca­tion n’est pas pos­sible. Ce n’est pas seule­ment nous qui disons cela, mais des cano­nistes, des experts du droit. Le pro­blème, c’est que ses com­men­taires ont été liés à son office.

L’évêque de Ratisbonne, Mgr Gerhard Ludwig Müller a refu­sé à votre sémi­naire alle­mand de Zaitzkofen per­mis­sion d’or­don­ner de nou­veaux prêtres. Allez-​vous obéir à cette interdiction ?

Cela était inutile et inap­pro­priée. Tous ces évé­ne­ments sont cer­tai­ne­ment un échec pour nous et nous ramène dix ans en arrière. Mais nous conti­nue­ront les ordinations.

En Allemagne, les hommes poli­tiques craignent que des écoles gérées par la Fraternité ne par­tagent pas les valeurs de la consti­tu­tion alle­mande. Êtes-​vous pré­oc­cu­pé par le fait que il y aura des inspections ?

Je ne suis pas non plus inquiet à ce sujet. Nous sommes des gens nor­maux. Nous obser­vons les règles, y com­pris celle de l’ordre éta­tique. Même si une seule voix dit quelque chose de mal, il est expres­sé­ment écrit dans les épîtres de saint Paul que nous devons hono­rer les auto­ri­tés et prier pour elles.

Alors, Mgr Williamson s’est éga­ré et les cri­tiques contre la Fraternité sont un grand malentendu ?

Nous sommes dans un monde de boucs émis­saires, et tous les faux pas se trans­forment immé­dia­te­ment en scan­dale. Mais des erreurs qui doivent être cor­ri­gés sont com­mises tout le temps et partout.

Pourquoi avoir répon­du si tar­di­ve­ment aux thèses si gros­sières de Mgr Williamson ?

Je dois vous avouer que je n’ai pas pris assez au sérieux la situation.

Propos recueillis par Stefan Winter (Traduction de lacri­sein­te­griste)

FSSPX Premier conseiller général

De natio­na­li­té Suisse, il est né le 12 avril 1958 et a été sacré évêque par Mgr Lefebvre le 30 juin 1988. Mgr Bernard Fellay a exer­cé deux man­dats comme Supérieur Général de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X pour un total de 24 ans de supé­rio­rat de 1994 à 2018. Il est actuel­le­ment Premier Conseiller Général de la FSSPX.