Lettre n° 04 du Père Directeur de la Milice de l’Immaculée. L’« Auguste Mère de Dieu », « Mère de Miséricorde » – 6 décembre 2016

Très chers Chevaliers de l’Immaculée !

Dès son enfance, saint Maximilien Kolbe reçut un pro­fond amour et une véné­ra­tion pour Notre-​Dame. Il gran­dit avec les dévo­tions polo­naises de l’« Auguste Mère de Dieu », « Mère de Miséricorde », « La Très Sainte et Bienheureuse Vierge » et de nom­breux autres titres bien connus de chaque catho­lique de ce pays. L’Immaculée Conception était spé­cia­le­ment célé­brée pour sou­li­gner la véri­té catho­lique contre les schis­ma­tiques russes ortho­doxes qui n’ac­cep­taient pas ce pri­vi­lège comme dogme de foi. Mais l’ap­pel­la­tion « l’Immaculata » comme nom propre fut for­gée par lui : il vou­lait rendre popu­laire le grand mys­tère de l’Immaculée Conception qui était plus pour lui que le conte­nu du dogme pro­cla­mé en 1854 (à savoir que, par un pri­vi­lège unique, Notre-​Dame avait été conçue, exempte de la tâche du péché ori­gi­nel). Saint Maximilien par­lait sou­vent de la dimen­sion pra­tique de cette véri­té de foi, qui devint la source de toute sa vie spi­ri­tuelle et de son immense action apos­to­lique. Le plus beau fruit de sa dévo­tion fut cer­tai­ne­ment la Militia Immaculatae (M.I.), qui ras­sem­blait autour d’ELLE un nombre tou­jours plus grand d’âmes éga­le­ment enthou­siastes et impres­sion­nées par ELLE, l’Immaculée.

L’idée prin­ci­pale der­rière la fon­da­tion de la M.I. était de for­mer une armée autour de Notre-​Dame, un esca­dron d’é­lite plein d’i­déal. C’est pour­quoi saint Maximilien les appe­la « che­va­liers » et non pas simples sol­dats. Il avait à l’es­prit la grande règle divine : Dieu, dans son action sur terre, uti­lise tou­jours des ins­tru­ments créés, et géné­ra­le­ment sans eux il n’a­gi­rait pas dans le monde. Son Royaume sur terre est une Eglise sacer­do­tale et chaque chré­tien doit col­la­bo­rer avec la grâce de Dieu au salut des âmes pour accom­plir le plus grand com­man­de­ment ‑l’a­mour de Dieu, l’a­mour du prochain.

La M.I. est deve­nue un moyen impor­tant de réveiller les fidèles sou­vent endor­mis et de les sen­si­bi­li­ser à leur rôle vital dans l’Église mili­tante : com­battre au côté de la femme de l’Apocalypse contre les enne­mis de notre salut. Quelle grâce pour nous de redé­cou­vrir notre noble, immor­telle et éter­nelle voca­tion ! ELLE nous appelle, dans sa misé­ri­corde infi­nie, à tra­vailler au triomphe de Son Cœur Immaculé ; Elle nous per­met de deve­nir « chas­seurs d’âmes » et nous fait pro­duire « des fruits éter­nels » d’une éter­nelle récom­pense, parce que « ce que nous avons fait pour les autres, nous le fai­sons deux fois, trois fois et plus pour notre propre bien ».

Saint Maximilien nous enseigne que tout cela est impor­tant ; cepen­dant, ce n’est pas le plus impor­tant ! En fait, le concept cen­tral dans la MILITIA IMMACULATAE n’est pas le « che­va­lier », mais l’Immaculata. Dans le cer­ti­fi­cat des che­va­liers (mały dyplo­mik), les pre­miers mots employés sont les cita­tions que nous trou­vons aus­si dans l’acte de consé­cra­tion : « Elle écra­se­ra la tête de Satan » et « Vous seule avez vain­cu toutes les héré­sies dans le monde entier ». Si vous vous trou­vez dans l’a­te­lier d’un grand artiste et que vous admi­rez ses mer­veilleux chefs-​d’œuvre, vous serez plein d’é­loges pour l’ar­tiste, vous admi­re­rez ses talents et ses remar­quables réa­li­sa­tions ; vous ne pen­se­rez pas à ses outils, à ses sty­los et crayons. Si vous entrez dans une mai­son si propre qu’elle brille, vous serez plein d’é­loges pour la maî­tresse de mai­son et ne serez pas inté­res­sé par les balais et les chif­fons qu’elle a uti­li­sés pour nettoyer.

Dans la M.I. presque rien ne se rap­porte à nous, mais TOUT se rap­porte à ELLE ! ELLE est tout dans la M.I., ELLE est tout dans notre vie, ELLE est « notre vie, notre dou­ceur et notre espoir ». La M.I. se rap­porte à la décou­verte la plus éton­nante et la plus excep­tion­nelle ; une décou­verte qui apporte tant de lumière dans nos ténèbres, tant d’é­ter­ni­té dans notre néant, tant de joie dans notre triste vie, tant de sen­sa­tions pal­pi­tantes dans notre train-​train banal et morose, tant d’AMOUR dans notre âme froide et sans cœur.

Et quelle est cette décou­verte ? Que DIEU qui nous a créés, qui a déci­dé de nous don­ner le bon­heur éter­nel, qui est venu lui-​même pour nous sau­ver, nous convoque à un endroit où l’Incréé touche le créé et s’est uni lui-​même à une nature humaine. Ce lieu, il l’appelle le « Saint des Saints », le sanc­tuaire qui sera à jamais « sa mai­son créée ». Quelle pen­sée ins­pi­rée d’admiration : être admis dans la MAISON DE DIEU SUR TERRE !

Quel est ou plu­tôt qui est ce lieu, ce lien entre l’é­ter­ni­té et le temps, entre le ciel et la terre ?

Imaginez la majes­té de la très sainte Trinité déci­dant, avant tous les temps, de la créa­tion et du salut du monde. Toutes les créa­tures pos­sibles, il se les repré­sente d’un coup d’œil, comme sur une carte. Il voit tous celles qui seront jamais créés, le nombre presque infi­ni de purs esprits et tous les hommes. Mais ses yeux ne sont fixés que sur ELLE, et ELLE sera la tête de toutes les créa­tures, la « bénie entre toutes ».

ELLE devait deve­nir une MAISON pour le FILS, dont la mai­son éter­nelle est le sein du Père.

« Au com­men­ce­ment, avant toute créa­tion, j’ai été conçue ». Dans l’es­prit éter­nel de Dieu, elle devait être la fille éter­nel­le­ment élue du Père, la mère du Fils et l’Épouse du Saint-Esprit.

L’IDÉE éter­nelle de la Providence divine était de créer le monde, afin que son Fils puisse deve­nir homme, deve­nir JÉSUS, à tra­vers qui, en qui et pour qui, toutes choses ont été créées et toutes auraient à retour­ner à Dieu. Pour réa­li­ser cette IDÉE géniale, Dieu a conçu une autre idée (ou concept), pareille­ment éter­nelle, d’un être humain à par­tir duquel le Fils pour­rait prendre sa nature humaine, son corps et son sang et le très Sacré-​Cœur : et c’est ain­si que fue conçue, dans sa sagesse éter­nelle, MARIE, la Mère de la PAROLE éter­nelle, la mai­son de Dieu sur la terre !

Quand nous par­lons et pen­sons à ELLE, nous le fai­sons avec le pauvre outil de notre rai­son limi­tée : nous médi­tons sa nati­vi­té de sainte Anne et Joachim, l’Annonciation, Noël, la fuite en Egypte et les années cachées à Nazareth. Nous la sui­vons dis­crè­te­ment pen­dant la vie publique de Notre-​Seigneur et la retrou­vons au pied de la Croix. Et après sa résur­rec­tion, nous admi­rons sa glo­rieuse assomp­tion et toute les inter­ven­tions mer­veilleuses de notre Mère céleste pour aider ses enfants en dan­ger permanent.

Mais nous devrions aus­si essayer d’é­le­ver nos esprits autant que faire se peut jus­qu’aux limites où le temps et l’es­pace se ter­minent, et où l’é­ter­ni­té com­mence, où il n’y a plus de pas­sé et d’a­ve­nir, mais un éter­nel MAINTENANT. Et que nous est-​il per­mis d’y voir ?

LA TRINITE INFINIE qui LA choi­sit, la première-​née de toutes les créa­tures dans son esprit éter­nel, plus pré­cieuse et plus grande que les ché­ru­bins et les séra­phins, tant et si bien que par rap­port à elle toutes les autres créa­tures sont ce qu’un petit lac est à un immense océan. Le chef-​d’œuvre de toutes ses œuvres, cepen­dant, sera un être humain, et tous les êtres humains après la chute de leurs pre­miers parents auront besoin de la rédemption.

Ainsi, ELLE aus­si sera rache­tée par ce Précieux Sang qui devait être pris d’elle-​même. Dieu, en pré­voyant le Calvaire, verse le Précieux Sang sur son âme au moment de sa concep­tion : ce Sang bloque en ELLE « l’en­trée » au péché ori­gi­nel : « Quand, à la parole de Dieu, l’âme et le corps de Marie jaillirent du néant, les Divines Personnes péné­trèrent en ce même ins­tant leur créa­ture de choix, et leur accueil et leur tou­cher fut la grâce de l’Immaculée Conception » (P. Faber).

« Voici le taber­nacle, la demeure du Très-​Haut par­mi les fils de l’homme » : entiè­re­ment pur, com­plè­te­ment exempt de la moindre ombre d’im­per­fec­tion, la sain­te­té créée ! Marie est exempte de tout ce qui pour­rait limi­ter l’action de Dieu dans sa créature.

Être « imma­cu­lée » n’est qu’une des­crip­tion néga­tive d’être pleine de grâce, de la plé­ni­tude de la vie de Dieu, de la tota­li­té abso­lue de l’Amour infi­ni de Dieu don­né à toutes les créa­tures. Créée à par­tir de rien, au moment même de son exis­tence, Marie est éle­vée aux sphères de la nature de Dieu comme aucune autre créa­ture. Avec la volon­té la plus libre, elle se donne à Dieu, elle dis­pa­raît de plein gré dans les flots de lumière et de grâce qui sub­mergent son âme, afin que Dieu puisse être « tout en tout ».

La MAISON de Dieu sur la terre est prête : LUI-​MÊME peut venir quand il veut ! Il ne trou­ve­ra aucun obs­tacle, mais un désir infi­ni, une entière pau­vre­té, un vide béant et un cœur imma­cu­lé aux bat­te­ments de l’AMOUR même du Saint-​Esprit qui l’a choi­sie de toute éter­ni­té comme épouse.

IMMACULATA signi­fie : la pré­sence toute sainte de Dieu sur la terre, le plus pur calice rem­pli des eaux vivantes de la plé­ni­tude de la grâce de Dieu, de la vie de Dieu et de l’a­mour de Dieu. Cet être humain est tel­le­ment péné­tré par le Saint-​Esprit, que tout en elle n’est qu’une trans­pa­rence de Sa pré­sence et de Son action : ses pen­sées, ses gestes, ses paroles, son action sont plus les pen­sées, les dési­rs, les paroles et les actions du Saint-​Esprit que les siennes propres.

Immaculata signi­fie le sanc­tuaire sans tâche où le Fils entre­ra à la plé­ni­tude du temps et fera d’ELLE sa propre Mère et Associée dans son œuvre de rédemp­tion. Elle détour­ne­ra la malé­dic­tion de la pre­mière Ève qui per­dit sa beau­té imma­cu­lée pour elle-​même et pour tous ses enfants. La nou­velle Eve sera non seule­ment plus imma­cu­lée que la pre­mière, mais aus­si la « mère des vivants » afin d’anéantir la tâche et la souillure du ser­pent par­tout où ELLE est auto­ri­sée à don­ner la vie surnaturelle.

Immaculée signi­fie la Mère et la Reine de tous ceux qui sont rache­tés par le Sang de Jésus-​Christ, qui les invite tous à se joindre à lui dans sa MAISON sur terre, dans ce sanc­tuaire qui devient pour eux « un refuge sûr et le che­min qui les conduit à Dieu ».

Tous ces mys­tères inson­dables (et beau­coup d’autres) sont conte­nus dans le simple terme inven­té par saint Maximilien Kolbe : IMMACULATA ! Est-​ce que nous com­pre­nons main­te­nant pour­quoi il insiste si sou­vent sur le fait que, au sujet de Ses mys­tères, nous appre­nons plus à genoux, en pro­fonde contem­pla­tion, que dans la lec­ture de nom­breux livres savants ?

NOTRE-​SEIGNEUR nous invite : « Mon enfant bien-​aimé, viens à la mai­son ! » Et ceux qui, avec admi­ra­tion, crainte et joie enthou­siaste, répondent : « Oui, j’arrive ! » sont appe­lés ENFANTS DE L’IMMACULATA ! C’est le plus grand cadeau qu’un homme puisse rece­voir sur la terre, et nous devrions dire avec une immense gra­ti­tude : « Moi, un vaga­bond exi­lé et errant, un men­diant, j’ai trou­vé ma maison ! »

Mais que signi­fie donc CHEVALIER DE L’IMMACULATA ? Simplement d’avoir le désir d’amener autant d’âmes pos­sible “à la mai­son” ! Afin qu’elles trouvent aus­si le sanc­tuaire le plus pur et le plus saint de la terre ! Afin que toutes les âmes puissent trou­ver la force de lut­ter contre tout ce qui est souillé (Satan, le péché et le monde per­vers), que pen­dant cette guerre de toute la vie elles trouvent un abri sûr et une MAISON, où elles peuvent se remettre de leurs blessures.

Mais sur­tout : LE CHEVALIER DE L’IMMACULATA est la pré­sence vivante de l’Immaculée Conception dans le monde : et par­tout où ELLE appa­raît, les ténèbres de l’er­reur et les tâches du péché doivent dis­pa­raître. En lui et par lui, ELLE répète elle-​même ce qu’elle a dit à Sainte Bernadette à Lourdes : JE SUIS L’IMMACULÉE CONCEPTION ! Et au milieu des inter­mi­nables épreuves et tri­bu­la­tions de ces temps apo­ca­lyp­tiques, le CHEVALIER apporte à beau­coup d’âmes un rayon de paix céleste et de bon­heur éter­nel : O IMMACULATA ! 

Abbé Karl Stehlin (1), prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint-​Pie X

En l’hon­neur de la fête de l’Immaculée Conception 2016

Source : La Porte Latine du 6 décembre 2016

Note de la RDLPL

(1) M. l’ab­bé Karl Stehlin est Supérieur du District d’Asie