Supplique au Saint-​Père, Mgr Bernard Fellay


Mgr Bernard Fellay – 15 septembre 2015

Accès au dos­sier com­plet sur le synode sur la famille

Très Saint Père,

C’est avec la plus vive inquié­tude que nous consta­tons autour de nous la dégra­da­tion pro­gres­sive du mariage et de la famille, ori­gine et fon­de­ment de toute la socié­té humaine. Cette déli­ques­cence est en train de s’accélérer for­te­ment, notam­ment par la pro­mo­tion légale des com­por­te­ments les plus immo­raux et les plus dépra­vés. La loi de Dieu, même sim­ple­ment natu­relle, est aujourd’hui publi­que­ment fou­lée aux pieds, les péchés les plus graves se mul­ti­plient de façon dra­ma­tique et crient ven­geance au Ciel.

Très Saint Père,

Nous ne pou­vons vous cacher que la pre­mière par­tie du Synode consa­cré aux « Défis pas­to­raux de la famille dans le contexte de l’évangélisation » nous a très vive­ment alar­més. Nous avons enten­du et lu, venant de per­sonnes consti­tuées en digni­té ecclé­sias­tique – qui s’autorisent de votre sou­tien, sans être démen­ties -, des affir­ma­tions si contraires à la véri­té, si oppo­sées à la doc­trine claire et constante de l’Église concer­nant la sain­te­té du mariage, que notre âme en a été pro­fon­dé­ment trou­blée. Ce qui nous inquiète encore plus, ce sont cer­taines de vos paroles lais­sant entendre qu’il pour­rait y avoir une évo­lu­tion de la doc­trine pour répondre aux néces­si­tés nou­velles du peuple chré­tien. Notre inquié­tude vient de ce que saint Pie X a condam­né, dans l’encyclique Pascendi, un tel ali­gne­ment du dogme sur de pré­ten­dues exi­gences contem­po­raines. Pie X et vous, Très Saint Père, avez reçu la plé­ni­tude du pou­voir d’enseigner, de sanc­ti­fier et de gou­ver­ner dans l’obéissance au Christ qui est le chef et le pas­teur du trou­peau en tout temps et en tout lieu, et dont le Pape doit être le fidèle vicaire sur cette terre. L’objet d’une condam­na­tion dog­ma­tique ne sau­rait deve­nir, avec le temps, une pra­tique pas­to­rale autorisée.

Dieu auteur de la nature a éta­bli l’union stable de l’homme et de la femme en vue de per­pé­tuer l’espèce humaine. La Révélation de l’Ancien Testament nous apprend, de la façon la plus évi­dente, que le mariage, unique et indis­so­luble, entre un homme et une femme, a été éta­bli direc­te­ment par Dieu, et que ses carac­té­ris­tiques essen­tielles ont été sous­traites par lui au libre choix des hommes, pour demeu­rer sous une pro­tec­tion divine toute par­ti­cu­lière : « Tu ne convoi­te­ras pas la femme de ton pro­chain » (Ex 20, 17).

L’Évangile nous enseigne que Jésus lui-​même, en ver­tu de son auto­ri­té suprême, a réta­bli défi­ni­ti­ve­ment le mariage, alté­ré par la cor­rup­tion des hommes, dans sa pure­té pri­mi­tive : « Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas » (Mt 19, 6).

C’est la gloire de l’Église catho­lique, tout au long des siècles, d’avoir défen­du contre vents et marées, mal­gré les sol­li­ci­ta­tions, les menaces et les ten­ta­tions, la réa­li­té humaine et divine du mariage. Elle a tou­jours por­té haut – même si des hommes cor­rom­pus l’abandonnaient pour ce seul motif -, l’étendard de la fidé­li­té, de la pure­té et de la fécon­di­té qui carac­té­risent le véri­table amour conju­gal et familial.

Alors qu’approche la deuxième par­tie de ce Synode consa­cré à la famille, nous esti­mons en conscience de notre devoir d’exprimer au Siège apos­to­lique les pro­fondes angoisses qui nous sai­sissent à la pen­sée des « conclu­sions » qui pour­raient être pro­po­sées à cette occa­sion, si par grand mal­heur elles devaient consti­tuer une nou­velle attaque contre la sain­te­té du mariage et de la famille, un nou­vel affai­blis­se­ment du sta­tut des couples et des foyers. Nous espé­rons de tout cœur, au contraire, que le Synode fera œuvre de véri­table misé­ri­corde en rap­pe­lant, pour le bien des âmes, l’intégrale doc­trine salu­taire concer­nant le mariage.

Nous avons plei­ne­ment conscience, dans le contexte actuel, que les per­sonnes qui se trouvent enga­gées dans des situa­tions matri­mo­niales irré­gu­lières doivent être accueillies pas­to­ra­le­ment, avec com­pas­sion, afin de leur mon­trer le visage très misé­ri­cor­dieux du Dieu d’amour que fait connaître l’Église.

Cependant la loi de Dieu, expres­sion de son éter­nelle cha­ri­té pour les hommes, consti­tue par elle-​même la sou­ve­raine misé­ri­corde pour tous les temps, toutes les per­sonnes et toutes les situa­tions. Nous prions donc pour que la véri­té évan­gé­lique du mariage, que devrait pro­cla­mer le Synode, ne soit pas contour­née en pra­tique par de mul­tiples « excep­tions pas­to­rales » qui en déna­tu­re­raient le sens véri­table, ou par une nou­velle légis­la­tion qui en abo­li­rait qua­si infailli­ble­ment la por­tée réelle. Sur ce point, nous ne pou­vons vous dis­si­mu­ler que les récentes dis­po­si­tions cano­niques du Motu pro­prio Mitis iudex Dominus Iesus, faci­li­tant des décla­ra­tions de nul­li­té accé­lé­rées, ouvri­ront la porte de fac­to à une pro­cé­dure de « divorce catho­lique » qui ne dit pas son nom, en dépit des rap­pels sur l’indissolubilité du mariage qui l’accompagnent. Ces dis­po­si­tions suivent l’évolution des mœurs contem­po­raines, sans cher­cher à les rec­ti­fier selon la loi divine ; com­ment, dès lors, ne pas être bou­le­ver­sé par le sort des enfants nés de ces mariages annu­lés de façon expé­di­tive, qui seront les tristes vic­times de la « culture du rebut » ?

Au XVIe siècle, le pape Clément VII refu­sa à Henri VIII d’Angleterre le divorce que celui-​ci récla­mait. Face à la menace du schisme angli­can, le pape main­tint, contre toutes les pres­sions, l’enseignement intan­gible du Christ et de son Église sur l’indissolubilité du mariage. Verra-​t-​on sa déci­sion main­te­nant désa­vouée en une « repen­tance canonique » ?

De nos jours, par­tout dans le monde, de nom­breuses familles se sont mobi­li­sées cou­ra­geu­se­ment contre les lois civiles qui sapent la famille natu­relle et chré­tienne, et encou­ragent publi­que­ment des com­por­te­ments infâmes, contraires à la morale la plus élé­men­taire. L’Église peut-​elle aban­don­ner ceux qui, par­fois à leur propre détri­ment, et tou­jours sous les moque­ries et les quo­li­bets, mènent ce com­bat néces­saire mais dif­fi­cile ? Cela consti­tue­rait un contre-​témoignage désas­treux, et serait source pour ces per­sonnes de dégoût et de décou­ra­ge­ment. Les hommes d’Église, au contraire, de par leur mis­sion même, doivent leur appor­ter un sou­tien clair et motivé.

Très Saint Père,

Pour l’honneur de Notre Seigneur Jésus-​Christ, pour la conso­la­tion de l’Église et de tous les fidèles catho­liques, pour le bien de la socié­té et de l’humanité tout entière, en cette heure cru­ciale, nous vous sup­plions donc de faire reten­tir dans le monde une parole de véri­té, de clar­té et de fer­me­té, en défense du mariage chré­tien et même sim­ple­ment humain, en sou­tien de son fon­de­ment, à savoir la dif­fé­rence et la com­plé­men­ta­ri­té des sexes, en appui de son uni­ci­té et de son indis­so­lu­bi­li­té. Nous vous sup­plions filia­le­ment de faire reten­tir une parole accom­pa­gnée de mesures effi­caces, mon­trant votre sou­tien en acte à la famille catholique.

Nous confions cette humble sup­plique au patro­nage de saint Jean-​Baptiste, qui connut le mar­tyre pour avoir défen­du publi­que­ment, contre une auto­ri­té civile com­pro­mise par un « rema­riage » scan­da­leux, la sain­te­té et l’unicité du mariage ; sup­pliant le Précurseur de don­ner à Votre Sainteté le cou­rage de rap­pe­ler à la face du monde la vraie doc­trine concer­nant le mariage natu­rel et chrétien.

En la fête de Notre-​Dame des Sept Douleurs, le 15 sep­tembre 2015

+Bernard FELLAY, Supérieur géné­ral de la Fraternité Saint-​Pie X

Source : DICI

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FSSPX Premier conseiller général

De natio­na­li­té Suisse, il est né le 12 avril 1958 et a été sacré évêque par Mgr Lefebvre le 30 juin 1988. Mgr Bernard Fellay a exer­cé deux man­dats comme Supérieur Général de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X pour un total de 24 ans de supé­rio­rat de 1994 à 2018. Il est actuel­le­ment Premier Conseiller Général de la FSSPX.