Bien cher Monseigneur Antonio de Castro Mayer,
Des échos me parviennent du Brésil au sujet de votre santé, qui décline ! L’appel de Dieu serait-il proche ? Rien que cette pensée me remplit d’une douleur profonde. Dans quelle solitude vais-je me trouver sans mon frère aîné dans l’épiscopat, sans le combattant exemplaire pour l’honneur de Jésus-Christ, sans l’ami fidèle et unique dans le désert effroyable de l’Église conciliaire ?
Mais d’autre part, retentissent à mes oreilles tous les chants de la liturgie traditionnelle de l’office des Confesseurs Pontifes ! C’est l’accueil céleste pour le bon et fidèle serviteur ! Si telle est la volonté du Seigneur.
En ces circonstances, je suis plus que jamais à votre chevet près de vous et mes prières ne cessent de monter vers Dieu à votre intention, vous confiant à Marie et Joseph.
Je voudrais profiter de cette occasion pour mettre par écrit, pour vous et pour vos chers prêtres, mon opinion, car ce n’est qu’une opinion, au sujet d’une consécration épiscopale éventuelle pour vous succéder dans la transmission de la foi catholique et dans la collation des sacrements réservés aux évêques.
Pourquoi envisager une telle succession en dehors des normes canoniques habituelles ?
1 – Parce que les prêtres et les fidèles ont un droit strict d’avoir des pasteurs qui professent dans son intégrité la foi catholique, essentielle pour le salut de leurs âmes, et des prêtres qui sont de vrais pasteurs catholiques.
2 – Parce que « l’Église conciliaire » étant désormais répandue universellement, diffuse des erreurs contraires à la foi catholique et, en raison de ces erreurs, a corrompu les sources de la grâce que sont le saint sacrifice de la messe et les sacrements. Cette fausse Église est en rupture toujours plus profonde avec l’Église catholique.
Il résulte de ces principes et de ces faits la nécessité absolue de continuer l’épiscopat catholique pour continuer l’Église catholique.
Le cas de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X se présente d’une manière différente du cas du diocèse de Campos.
Il me semble que le cas du diocèse de Campos est plus simple, plus classique, car il s’agit de la majorité des prêtres diocésains et des fidèles qui, avec le conseil de l’ancien évêque, désignent le successeur et demandent à des évêques catholiques de le consacrer.
C’est bien de cette manière que la succession des évêques s’est réalisée pendant les premiers siècles, en union avec Rome, comme nous le sommes nous aussi, en union avec la Rome catholique et non la Rome moderniste.
C’est pourquoi, à mon sens, il ne faut pas lier le cas de Campos à la Fraternité. L’appel aux évêques de la Fraternité pour la consécration éventuelle n’est pas fait en tant qu’évêques de la Fraternité, mais en tant qu’évêques catholiques.
Les cas doivent être bien séparés. Ce n’est pas sans importance pour l’opinion publique et pour la Rome actuelle. La Fraternité ne doit pas être en cause et remet toute la responsabilité, légitime d’ailleurs, aux prêtres et aux fidèles de Campos.
Pour que cette distinction soit bien claire, il serait bien préférable que la cérémonie ait lieu à Campos, au moins dans le diocèse. C’est le clergé et le peuple fidèle de Campos qui se donnent un successeur des Apôtres, un évêque catholique et romain, puisqu’ils ne peuvent plus en avoir par la Rome moderniste.
Voilà mon opinion, je pense qu’elle s’appuie sur les lois fondamentales du Droit ecclésiastique et sur la Tradition.
Bien cher Monseigneur, je vous soumets bien simplement mes pensées, mais c’est vous qui jugez et je m’en remets à votre jugement.
Daigne Dieu vous rendre une santé assez robuste pour accomplir cette consécration épiscopale !
Croyez, bien cher Monseigneur, à ma profonde et respectueuse amitié en Jésus et Marie.
† Marcel LEFEBVRE