II me semble très important de bien préciser la solution des problèmes de juridiction du nouvel évêque par rapport aux prêtres et fidèles.
En premier lieu, il faut remarquer que sa situation n’est pas exactement la même que celle de Mgr de Castro Mayer. Celui-ci est désormais Évêque émérite de Campos, après en avoir été l’Évêque résidentiel. D’où l’on pouvait conclure qu’il gardait, sinon un pouvoir juridique, au moins un pouvoir moral, qui, au vu de certaines circonstances, pouvait justifier une action pastorale vis-à-vis de ses anciens prêtres et fidèles.
Ce n’est pas le cas du nouvel évêque, qui n’a d’autre titre de juridiction que celui qui lui vient de l’appel des prêtres et des fidèles de prendre soin de leurs âmes et de celles de leurs enfants, qui lui ont demandé d’accepter l’épiscopat pour leur donner de vrais prêtres catholiques et la grâce du sacrement de confirmation.
Ainsi il apparaît que la juridiction du nouvel évêque n’est pas territoriale, mais personnelle, comme le devient aussi la juridiction des prêtres.
Dans la mesure où les fidèles viennent demander aux prêtres et à l’évêque les sacrements et la doctrine de la foi, ceux-ci ont un devoir de veiller à la bonne réception et au bon usage de la doctrine et de la grâce du Sacrifice de la Messe et des sacrements. Les fidèles ne peuvent pas demander les sacrements et refuser l’autorité vigilante des prêtres et de l’évêque.
Pour veiller au bon ordre de l’apostolat et à son efficacité, l’organisation de la Fraternité du Saint Curé d’Ars semble très heureuse et devrait réunir obligatoirement tous les prêtres désireux de continuer l’apostolat traditionnel.
Il semblerait souhaitable que l’évêque nouvellement consacré soit nommé président à vie du Conseil presbytéral, afin qu’il détienne une autorité indispensable pour les nominations des prêtres, pour les nouvelles fondations, pour les œuvres interparoissiales, pour le séminaire, les sociétés religieuses.
L’autorité juridictionnelle de l’évêque ne lui venant pas d’une nomination romaine, mais de la nécessité du salut des âmes il devra l’exercer avec une délicatesse particulière et tenir compte plus spécialement de son Conseil presbytéral.
D’autre part les fidèles et les prêtres doivent reconnaître la grâce d’avoir un Pasteur successeur des Apôtres et gardien de tradition du dépôt de la foi, du Sacrifice eucharistique, du sacerdoce catholique et de la grâce des sacrements, et par conséquent faciliter l’exercice de son autorité par une généreuse obéissance.
La juridiction de l’Évêque n’étant pas territoriale, mais personnelle et ayant pour source le devoir pour les fidèles de sauver leurs âmes, si un groupe de fidèles dans les diocèses fait appel à l’évêque pour avoir un prêtre, ce groupe donne par le fait même pouvoir à l’évêque de veiller à la transmission de la foi et de la grâce dans ce groupe, par l’intermédiaire du prêtre qu’il envoie.
Ainsi, me semble-t-il, se résolveraient dans l’ordre conforme à l’esprit de l’Église, les délicats problèmes que soulève la consécration épiscopale sans le mandat explicite de Rome, mais avec le mandat implicite de l’Église romaine gardienne de la foi.
Le nouvel évêque demeure le lien ontologique avec l’Église fidèle à sa divine Épouse Notre Seigneur Jésus-Christ.
† Marcel LEFEBVRE, le 20 février 1991