« Homosexuels » et « évêques » : voilà les deux mots-clés du scandale qui secoue aujourd’hui l’Église. Mais malgré cela le Pape François n’a pas mentionné une seule fois un seul de ces deux mots dans sa « lettre au Peuple de Dieu » d’il y a quelques jours, à la veille de son voyage en Irlande pour la rencontre mondiale des familles.
Jorge Mario Bergoglio a préférer s’en prendre au « cléricalisme ». C’est en effet l’une des causes qui ont contribué aux abus sexuels perpétrés par ceux qui se sentent investis d’un pouvoir supérieurs et qui s’en servent pour asservir la volonté de leur victimes, qu’il s’agisse d’enfants ou – bien plus souvent – de jeunes ou bien d’adolescents à peine majeurs.
À la suite de scandales similaires, Benoît XVI était allé plus loin dans sa recherche des causes de cette maladie de l’Eglise dans sa lettre aux catholiques irlandais de 2010.
Il avait identifié deux causes en particulier :
– la « tendance déterminante, également de la part de prêtres et de religieux, à adopter des façons de penser et à considérer les réalités séculières sans référence suffisante à l’Evangile »
– et la « tendance, dictée par de justes intentions, mais erronée, une tendance à éviter les approches pénales à l’égard de situations canoniques irrégulières ».
Photo de gauche : la couverture de l’Espresso de juillet 2013 – Lire : Le prélat du lobby gay, par Sandro Magister – 18 juillet 2013
L’une comme l’autre de ces tendances sont visiblement aujourd’hui encore à l’origine de cette nouvelle vague de scandales. Même si l’on continue à les classer – comme par inertie – sous l’étiquette d’abus sexuels sur mineurs alors qu’il est surtout question de la présence répandue dans le clergé et parmi les évêques d’homosexuels qui violent non seulement l’engagement public à la chasteté qu’ils ont pris à leur ordination mais qui, de plus, auto-justifient leurs actions et se soutiennent entre eux, s’entraidant et se promouvant les uns les autres.
Le cas de l’ex-cardinal Theodore McCarrick est emblématique à ce point de vue. La violence sur mineurs ne représente qu’une toute petite partie de son activité sexuelle débridée avec des jeunes du même sexe qui étaient le plus souvent des séminaristes de son diocèse.
Et ce n’est pas tout. McCarrick était l’un des cardinaux américains les plus en vue à promouvoir la « charte de Dallas » de 2002, c’est-à-dire les lignes directrices rédigées après la première vague d’abus sexuels sur mineurs de la part de prêtres qui avaient comme épicentre l’archidiocèse de Boston. Mais cela n’a en rien modifié son attitude personnelle envers des jeunes du même sexe, qui étaient d’ailleurs largement connue et dont les autorités vaticanes avaient été informée, sans que sa carrière n’en souffre le moins du monde.
Comme il avait l’oreille du Pape François, McCarrick a donc continué jusqu’au bout à exercer son influence sur les nominations de ses protégés qui occupent aujourd’hui des fonctions prestigieuses aux États-Unis et au Vatican : des cardinaux Blaise Cupich et Joseph Tobin, respectivement archevêques de Chicago et de Newark, en passant par le cardinal Kevin Farrell, Préfet du dicastère pour les laïcs, la famille et la vie et aujourd’hui organisateur de la rencontre mondiale des familles à Dublin.
Cupich, Tobin et Farrel constituent le fer de lance du renversement des positions que le Pape François a voulu imposer au sein de la hiérarchie des États-Unis. Et tous trois sont de fervents partisans du jésuite James Martin qui milite pour une révision de fond en comble de la doctrine de l’Église catholique sur l’homosexualité et qui a d’ailleurs été invité par Farrell pour prendre la parole à la rencontre de Dublin.
Parmi les cardinaux de la vielle génération les plus appréciés de Bergoglio, on retrouve notamment Donald Wuerl, le successeur de McCarrick à Washington et auparavant évêque de Pittsburgh, où il est cependant accusé par le Grand Jury de Pennsylvanie – dans un rapport rendu public le 14 juillet dernier – d’avoir couvert ses prêtres coupables d’abus.
En conséquence, Wuerl a dû renoncer à se rendre à Dublin où il devait lui aussi prendre la parole. Pareil pour l’archevêque de Boston, le cardinal Sean Patrick O’Malley, mis en cause après la découverte au grand jour de pratique homosexuelles dans son propre séminaire –naturellement passé à travers les mailles du filet du nettoyage entrepris par ce même O’Malley après 2002 dans ce diocèse qui devenu aujourd’hui le symbole des abus sexuels sur mineurs – et pour ne pas avoir pris au sérieux en 2015 une lettre de dénonciation des méfaits du cardinal McCarrick qui lui avait été envoyée par Boniface Ramsey, le même prêtre qui avait déjà informé les autorités vaticanes en 2000.
La forte présence d’homosexuels dans de nombreux séminaires à travers le monde est un phénomène bien connu. En 2005, alors que Joseph Ratzinger était pape depuis quelques mois, les autorités vaticanes avaient décrété que « l’Eglise, tout en respectant profondément les personnes concernées, ne peut pas admettre au Séminaire et aux Ordres sacrés ceux qui pratiquent l’homosexualité, présentent des tendances homosexuelles profondément enracinées ou soutiennent ce qu’on appelle la culture gay ».
Mais cette directive est restée largement lettre morte. En mai dernier, à l’occasion d’une rencontre à huis clos avec les évêques italiens, le Pape François leur a demandé de l’appliquer parce que – avait-il dit – « nous avons trop d’homosexuels ».
Il est pourtant de notoriété publique que le phénomène est bien présent jusqu’à Rome, avec ses excès, et qu’il implique des supérieurs de séminaires. L’Almo Collegio Capranica, le prestigieux internat dans lequel les diocèses italiens envoient leurs pupilles est très loin d’être à l’abri.Tout comme l’Athénée pontifical Saint-Anselme, la faculté théologique romaine de l’ordre bénédictin.
Parmi les diocèses voisins de Rome, celui d’Albano organise aujourd’hui un forum des « chrétiens LGBT italiens » dans lequel interviendra prochainement, du 5 au 7 octobre, le jésuite Martin dont il était question ci-dessus. L’évêque d’Albano est Marcello Semeraro, très proche de François et secrétaire du « C9 », le conseil des neuf cardinaux appelés par le pape pour l’aider à gouverner l’Église universelle.
Le coordinateur du « C9 » est le cardinal hondurien Óscar Andrés Rodriguez Maradiaga, lui aussi intervenant à Dublin mais dont l’évêque auxiliaire et dauphin, Juan José Pineda Fasquelle vient d’être limogé le 20 juillet dernier pour des pratiques homosexuelles répétées avec des séminaristes de son diocèse, ce qui a d’ailleurs été confirmé par une visite apostolique.
Maradiaga reste cependant inexplicablement à son poste. Le 15 août dernier, le Pape François a nommé au poste clé de substitut du secrétariat d’État le vénézuélien Edgar Peña Parra, ex-conseiller de nonciature au Honduras entre 2002 et 2005 qui est très lié à Pineda, dont il a notamment soutenu la nomination comme évêque auxiliaire de Tegucigalpa.
Des séminaires aux cardinaux en passant par les évêques et le clergé, les homosexuels sont présents par milliers à tous les niveaux. C’est le jésuite Martin, qu’on ne peut soupçonner d’homophobie, qui l’a déclaré il y a quelques jours à « Crux », le premier portail d’information catholique des États-Unis et peut-être du monde entier.
« L’idée d’une épuration des prêtres gays est aussi ridicule que dangereuse. Une telle épuration viderait les paroisses et les ordres religieux de milliers de prêtres et d’évêques qui mènent une vie saines de service et qui restent fidèles à leur célibat ».
C’est tout à fait exact. Mais il y a aussi des prêtres et des évêques homosexuels qui ne sont ni « sains » ni « fidèles ». Beaucoup. Trop.
Sandro Magister
Sources : diakonos.be