Bulletin du Tiers-Ordre séculier pour les pays de langue française
Cher frère, Chère sœur,
Nous voulons vivre de cette vie intérieure qui s’établit sur la prise de conscience que « Dieu est là » véritablement présent, vivant dans notre âme par la grâce sanctifiante d’une part, et par ce grand sacrement de la Sainte Eucharistie d’autre part. « La vie intérieure est la gravitation des âmes autour de l’Eucharistie. » disait st Julien Eymard.
La Sainte Eucharistie est immuable puisqu’elle contient Dieu tout entier. Son efficacité ne change pas : elle remédie aux restes du péché, aux faiblesses de la nature. Cette efficacité est « un rempart » que nous pouvons dresser entre nous et le monde entre nous et toutes les forces de l’enfer et de l’esprit du mal. Si nous avions seulement plus de foi envers ce sacrement où Dieu cache sa réelle toute puissance ! Laissons Dieu agir en nous et par nous en disparaissant en Lui, c’est-à-dire en nous faisant tout petits. Seule la véritable humilité laisse la toute puissance divine agir par nous. Si notre foi était vraie et plus grande ! Prions le Cœur Eucharistique de nous faire vivre « de » et « par » l’Eucharistie, alors notre foi sera une foi vivante et vivifiante parce qu’elle rayonnera l’amour du Christ, comme le soleil en l’absence de nuages.
De même que l’on ne peut fixer le soleil en plein jour mais seulement à son lever et à son coucher ; ainsi, l’âme ne peut contempler directement le Bon Dieu en raison de son Être Infini. Dieu éblouit, aveugle les yeux de notre âme par sa Sainteté infinie. Alors Dieu s’est mis à notre portée. De quel amour Dieu entoure sa créature ! Il nous a donné son Fils, dans la Sainte Eucharistie. De cette façon, l’Eucharistie nous rend Dieu accessible. Nous pouvons Le regarder, et même Le fixer amoureusement, puisqu’Il cache ses rayons divins à travers l’Hostie. Ainsi nous pouvons inlassablement Le contempler sachant qu’une vertu sort de Jésus quand nous Le regardons. Et, plus notre âme s’approchera de Lui par l’Eucharistie, plus le feu de l’amour divin embrasera notre cœur de son amour. L’amour divin est un feu qui ne demande qu’à se répandre et à embraser le cœur de tous les hommes, ses créatures. Si on comprenait « un peu plus » cet amour qui remplit et déborde du Cœur de Dieu ! C’est ce qui explique cette faim et cette soif des âmes amantes de l’Eucharistie : elles ont reçu déjà cette transformation du divin médecin qui. en les éloignant du monde et surtout de l’esprit du monde, appelle l’âme à l’union divine avec son Dieu et cela au plus profond de l’âme. Alors seulement se vérifie la parole de Jésus : « Demeurez en Moi, et Moi en vous. » (St Jean 15, 4)
Que n’a pas fait Jésus pour rester avec nous, pour y demeurer. Il est tout vivant au tabernacle allant jusqu’à habiter sous notre toit ! Quelle admirable condescendance ! On dit qu’Il y est « prisonnier de son amour. » Ce n’est pas tout à fait exact : Il est libre, car l’Amour est libre. C’est notre oubli, nos négligences à Lui rendre amour pour amour, nos distractions, notre refus de communier… qui le rend prisonnier, car le terme de son voyage eucharistique ici bas, c’est bien notre cœur humain, et non le Tabernacle. Il veut faire régner son Amour infini dans nos cœurs si petits et impuissants. Il est le Tout « todo » et nous sommes rien « nada ». Il désire d’un grand désir enflammer ce nada, pour Sa Gloire.
De la foi en la présence réelle découle l’adoration ; nous ne pouvons rien faire de plus saint sur la terre que l’adoration eucharistique : c’est l’exercice parfait de toutes les vertus ; en effet la foi est complète et parfaite quand nous adorons Jésus-Christ caché, voilé, et comme anéanti dans la Sainte Hostie. Alors c’est la soumission, l’adoration par toutes nos facultés, par tous nos sens, avec le seul esprit de la foi.
De la foi en cette présence découle aussi l’amour, car notre réponse amoureuse à l’Amour divin vivifie notre foi. Dieu est là pour nous dans le saint Tabernacle, et Il ne cesse de nous attendre… Dans quelle immense solitude Notre-Seigneur n’est-Il pas laissé à l’heure actuelle. Partout où est Jésus-Christ, Il mérite notre adoration.
« Notre-Seigneur, en effet, nous donne dans l’Eucharistie ses trois abîmes insondables : l’abîme de son Cœur, l’abîme de son Âme, l’abîme de sa Divinité. Le Sacré- Cœur est là, ce Cœur qui a tant aimé et qui aime tant les hommes. L’Âme de Jésus est là, avec tous ses trésors de science, de sagesse, de gloire, de sainteté. La divinité est là, car la personne du Verbe est indissolublement unie au Corps et au Sang ; les Trois Personnes sont là, en vertu de cette loi d’amour qui les enchaîne ineffablement l’une à l’autre.[1]
Ce qui manque le plus aujourd’hui, c’est cette foi vivante en la présence de Dieu dans la Sainte Eucharistie ; Notre-Seigneur est là, seul, et Il nous attend avec un amour et une patience infinis…
Chers Tertiaires, compensons ce vide en adorant, en consolant autant que possible ce Divin Cœur présent dans la Sainte Eucharistie. Visitons-Le réellement quand nous le pouvons, et si la distance nous en empêche, pensons à Lui rendre visite en esprit par la communion spirituelle que Notre Mère Sainte Thérèse nous conseille de faire plusieurs fois par jour ! Le petit François de Fatima voulait passer son temps à consoler le Cœur de Jésus tant outragé… Il avait compris les désirs et la soif du Cœur de Jésus.
Oui, sachons « perdre du temps » aux pieds du tabernacle, comme Marie à Béthanie. Alors nous vivrons « de » et « par » l’Eucharistie.
Je vous bénis
Abbé L.-P. Dubrœucq †
- R.P. Hugon o.p., La sainte Eucharistie, Téqui, 1924, p. 11. [↩]