Cérémonie d’abjuration : texte du sermon

Mes bien chers frères,

Aujourd’hui, je prê­che­rai avant la messe puisque nous avons cette occa­sion tout à fait extra­or­di­naire de la conver­sion du pas­teur Sten Sandmark de Suède et de l’un de ses com­pa­gnons, qui veulent entrer dans l’Eglise catho­lique. C’est une grande joie pour l’Eglise en cette fête de Sainte Éline, une mar­tyre sué­doise du XIIème siècle.

Cher Monsieur le Pasteur, je ne vais pas essayer de retra­cer le par­cours de votre conver­sion. J’en dirai sim­ple­ment que ce fut la grâce du Saint Esprit et le fruit de l’in­ter­ces­sion de la très Sainte Vierge Marie, média­trice de toutes grâces. A vrai dire, vous n’é­tiez pas vrai­ment luthé­rien, bien que vous trou­vant dans l’é­glise luthé­rienne sué­doise. Vous n’en par­ta­giez point la doc­trine puisque vous teniez la doc­trine catho­lique sur la jus­ti­fi­ca­tion de nos âmes à la grâce, sur la trans­sub­stan­tia­tion à la Sainte Messe et sur bien d’autres dogmes catho­liques qui sont niés par les pro­tes­tants. Mais il vous man­quait l’u­ni­té, d’être dans l’u­ni­té de la vraie Eglise du Christ.

Vous-​même, Monsieur le Pasteur, vous étiez prêtre. Vous l’a­vez été pen­dant 31 ans à la suite d’une céré­mo­nie d’or­di­na­tion. Il y a évi­dem­ment un doute sur ce sacer­doce puisque l’on ne sait pas si la suc­ces­sion apos­to­lique dans l’é­glise sué­doise est ou non valide. Vous avez célé­bré pen­dant 31 ans ce que vous pen­siez être une messe valide en langue sué­doise, et vous avez vou­lu pen­dant ces 31 ans de minis­tère pour­suivre la mis­sion de rédemp­tion des âmes que Jésus-​Christ a confiées à son Eglise, comme vous le dites dans votre belle décla­ra­tion qui est à la dis­po­si­tion des fidèles.

Vous avez vou­lu pour­suivre la mis­sion de l’Eglise par la pré­di­ca­tion de l’Evangile, selon la parole de Jésus-​Christ à ses apôtres : « Allez dans le monde entier, prê­chez l’Evangile à toute créa­ture » ; éga­le­ment par la célé­bra­tion du Saint Sacrifice de la messe selon cette parole de Jésus à ses apôtres : « Chaque fois que vous ferez cela, vous le ferez en mémoire de moi ». Egalement par l’administration des sept sacre­ments dont vous recon­nais­siez l’existence, sacre­ments ins­ti­tués par notre Seigneur Jésus Christ. Mais hélas à tout cela il vous man­quait l’unité catho­lique et la cer­ti­tude d’un sacer­doce valide.

Quel est, bien chers fidèles, la doc­trine catho­lique sur la véri­table Eglise de notre Seigneur Jésus-​Christ ? C’est un mys­tère d’unité pro­fes­sé par l’apôtre Saint Paul et que nous pro­fes­sons dans le sym­bole des apôtres, dans notre cre­do que nous chan­te­rons tout à l’heure : « Je crois en un seul Dieu, le Père, le Fils et le Saint Esprit ». Le mys­tère cen­tral de la reli­gion chré­tienne : un seul Dieu en trois per­sonnes et nous dirons éga­le­ment : « Je crois en un seul sei­gneur Jésus-​Christ, en un seul sau­veur, unique rédemp­teur des âmes par son pré­cieux sang ver­sé sur la croix ». Un dogme de foi qui est nié actuel­le­ment par cer­tains de ceux qui ont les plus hautes places dans l’Eglise catho­lique. Je crois aus­si en un seul bap­tême (nous le chan­te­rons tout à l’heure) en rémis­sion des péchés. Et enfin, je crois en l’église, une, sainte, catho­lique et apos­to­lique. C’est le corps mys­tique de notre Seigneur Jésus-​Christ, c’est-à-dire le corps dont les membres sont gref­fés sur le Christ pour vivre de la vie même de notre Seigneur Jésus-​Christ qui est notre chef, notre tête.

Cette Eglise catho­lique a été fon­dée sur Pierre, le pre­mier Pape. Selon la parole de Jésus Christ à Saint Pierre : « Bienheureux es-​tu Simon, fils de Jonas, car ce n’est pas toi mais c’est mon Père qui est dans les cieux qui t’a révé­lé cela, à savoir que je suis le Fils de Dieu ; eh bien moi je te dis que tu es Pierre et que sur cette pierre je bâti­rai mon Eglise et les portes de l’enfer ne pré­vau­dront pas contre elle. Et tout ce que tu lie­ras sur terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu délie­ras sur terre sera délié dans les cieux ». C’est en effet Saint Pierre qui est par­ti à Rome, qui y a éta­bli son siège épis­co­pal, et qui a fait que l’Eglise catho­lique c’est l’Eglise romaine, mère et tête de toutes les Eglises du monde. C’est là, à Rome, que Saint Pierre a scel­lé par son sang, par son mar­tyre, sa mis­sion de pre­mier Pape. Et c’est là qu’il a trans­mis à ses suc­ces­seurs le pou­voir de juri­dic­tion suprême sur toute l’Eglise, à la fois sur les bre­bis et sur les pas­teurs, selon la parole de Jésus-​Christ : « Pais mes bre­bis, pais mon trou­peau ».

La vraie Eglise de Jésus-​Christ est donc l’Eglise romaine. Et cette Eglise catho­lique romaine est néces­saire au salut, c’est la troi­sième véri­té de foi, la pre­mière étant l’unique Eglise, sainte, catho­lique et apos­to­lique, la deuxième étant l’Eglise romaine fon­dée sur Pierre, la troi­sième étant l’Eglise romaine néces­saire au salut en dehors de laquelle nul ne peut opé­rer son salut. Ce qui veut dire que quelqu’un qui sau­rait que l’Eglise catho­lique romaine est la vraie Eglise de Jésus-​Christ et qui, néan­moins, demeu­re­rait en dehors de cette Eglise, ne pour­rait pas se sau­ver. Selon cette parole de Jésus-​Christ : « qui vous écoute m’écoute, qui vous méprise me méprise et qui me méprise, méprise Celui qui m’a envoyé, c’est-à-dire Dieu le Père ».

De ces véri­tés, cher Monsieur le Pasteur vous étiez convain­cu et c’est pour­quoi vous brû­liez de rejoindre l’unité catho­lique car vous sen­tiez bien que dans l’église sué­doise luthé­rienne, vous n’étiez point à votre place. En effet, depuis que Martin Luther en 1517 se révol­ta contre l’Eglise et pro­vo­qua le schisme et l’hérésie pro­tes­tante, ces com­mu­nau­tés sépa­rées de l’unité catho­lique se sont mul­ti­pliées en une mul­ti­tude de sectes, toutes dif­fé­rentes selon les dogmes qu’elles acceptent ou rejettent, et dont aucune ne peut se pré­va­loir de remon­ter aux apôtres par une suc­ces­sion épis­co­pale inin­ter­rom­pue et légi­time comme dans l’unité catho­lique, dans la sou­mis­sion au suc­ces­seur de Pierre.

A cela s’ajouta récem­ment dans cette église sué­doise sépa­rée de Rome, l’introduction de l’ordination de « prê­tresses », ce qui est lamen­table, ain­si que la béné­dic­tion nup­tiale accor­dée à ceux que l’on appelle « homo­sexuels », chose abo­mi­nable aux yeux de Dieu et qui est la meilleure preuve que cette église n’est nul­le­ment la vraie Eglise de Notre Seigneur Jésus-​Christ. C’est pour­quoi il vous res­tait à prendre la grande réso­lu­tion de vous convertir.

C’est il y a dix ans que vous avez appro­ché l’évêque catho­lique de Suède, lui deman­dant : – « Monseigneur, je vou­drais deve­nir catho­lique ». Et cet évêque indi­gne­ment vous répon­dit : – « Non, res­tez comme vous êtes, cela est bon pour l’œcuménisme ». Voilà ce que la nou­velle Eglise du Concile, que nous appe­lons l’Eglise conci­liaire, fait ! Elle empêche la conver­sion de ceux qui veulent reve­nir à l’unité catho­lique. Restez comme vous êtes, c’est bon pour l’œcuménisme ! Quelle grave erreur…

Et donc, depuis dix ans vous étiez impa­tient quand, l’an der­nier, pro­vi­den­tiel­le­ment, notre pèle­ri­nage en Suède sur le tom­beau de Sainte Brigitte pas­sa non loin de chez vous. Et vous avez accueilli nos pèle­rins pour la célé­bra­tion de la messe parce qu’on leur refu­sait les églises. C’est alors que vous avez fait connais­sance de ce que nous appe­lons la Tradition catho­lique, c’est-à-dire ce noyau, cette élite de catho­liques fidèles, fidèles à la foi de toujours.

Vous avez donc déci­dé de reve­nir à l’unique ber­cail de Notre Seigneur Jésus-​Christ, même si cette Eglise est actuel­le­ment ébran­lée par une crise gra­vis­sime, par le « culte de l’homme » éta­bli à la place du culte de Dieu, la « table à repas­ser » rem­pla­çant l’autel du sacri­fice, le « dia­logue » rem­pla­çant le sacri­fice offert à Dieu. Et cela est si vrai qu’en Suède, on m’a dit qu’un jour cer­tains catho­liques ont deman­dé la per­mis­sion d’emprunter une église luthé­rienne pour pou­voir célé­brer la messe, la « nou­velle messe ». Or, dans vos églises luthé­riennes, vous avez un autel et une table de com­mu­nion ; eh bien ces catho­liques ont trou­vé le moyen de mettre une table pour célé­brer leur eucha­ris­tie, au lieu d’utiliser l’autel qui existe encore même chez les luthé­riens. Voilà des choses que nous décou­vrons, chers fidèles, et qui font honte à l’Eglise conciliaire.

Vous vous êtes donc, Monsieur le Pasteur, rap­pro­ché de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X fon­dée par Mgr Lefebvre spé­cia­le­ment pour la per­pé­tua­tion du Saint sacri­fice de la messe, c’est-à-dire du sacri­fice de la croix, repro­duit, réac­tua­li­sé sur l’autel de façon non san­glante, selon la pro­messe de Notre Seigneur Jésus-​Christ à ses apôtres : « vous ferez cela en mémoire de moi ». Et c’est dans le but, s’il plaît à Dieu, de pou­voir un jour accé­der au sacer­doce catho­lique (de même que votre com­pa­gnon) que vous dési­rez rejoindre la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, tout en sachant par­fai­te­ment la situa­tion pénible qui lui est faite dans l’Eglise catho­lique. Vous vou­lez ain­si Monsieur le Pasteur (je regrette de vous appe­ler de ce titre car vous êtes main­te­nant catho­lique) entrer dans ce com­bat de la foi qui est la rai­son d’être actuel­le­ment de la Fraternité Saint Pie X.

Dieu aidant, et par l’intercession de la Très Sainte Vierge Marie, que nous sup­plions aujourd’hui pour vous, ain­si que pour votre com­pa­gnon, vous allez faire l’abjuration solen­nelle de toute héré­sie et la pro­fes­sion solen­nelle de la foi catho­lique, et, s’il plaît à Dieu, pour­suivre les études jusqu’au sacer­doce catho­lique afin de renou­ve­ler et de pro­lon­ger le sacri­fice unique de Notre Seigneur Jésus Christ sur nos autels.

Ainsi soit-​il.

FSSPX Évêque auxliaire

Mgr Bernard Tissier de Mallerais, né en 1945, titu­laire d’une maî­trise de bio­lo­gie, a rejoint Mgr Marcel Lefebvre dès octobre 1969 à Fribourg et a par­ti­ci­pé à la fon­da­tion de la Fraternité Saint-​Pie X. Il a assu­mé d’im­por­tantes res­pon­sa­bi­li­tés, notam­ment comme direc­teur du sémi­naire d’Ecône. Sacré le 30 juin 1988, il est évêque auxi­liaire et fut char­gé de pré­pa­rer l’ou­vrage Marcel Lefebvre, une vie, bio­gra­phie de réfé­rence du fon­da­teur de la Fraternité.