Le dilemme du pape François

Pape François. Crédit photo : Antoine Mekary / Godong

Le livre que le car­di­nal Robert Sarah vient de faire paraître – « avec la contri­bu­tion de Benoît XVI » –, Des pro­fon­deurs de nos cœurs (Fayard), pour le main­tien du céli­bat ecclé­sias­tique, place le pape François dans une posi­tion délicate.

L’actuel sou­ve­rain pon­tife qui, après le synode sur l’Amazonie, doit rendre publique son exhor­ta­tion apos­to­lique, accèdera-​t-​il aux demandes des pères syno­daux en faveur de l’ordination d’hommes mariés, et ignorera-​t-​il les rap­pels du pré­fet de la Congrégation du culte divin et de la dis­ci­pline des sacre­ments, sou­te­nu par son pré­dé­ces­seur sur le trône de saint Pierre ? Il est vrai qu’il n’a tenu aucun compte des Dubia for­mu­lés, en 2016, par les car­di­naux Brandmüller, Burke, Caffarra et Meisner, au sujet de l’exhortation Amoris læti­tia auto­ri­sant la com­mu­nion des divor­cés « rema­riés », après le synode sur la famille. Agira-​t-​il de même à pro­pos du céli­bat ecclésiastique ?

De plus, si – par hypo­thèse – le car­di­nal Gerhard Ludwig Müller s’associait à la démarche du car­di­nal Sarah qui lance un appel « à tous les évêques, prêtres et laïcs », pour qu’ils « ne se laissent plus impres­sion­ner par les mau­vais plai­doyers, les mises en scène théâ­trales, les men­songes dia­bo­liques, les erreurs à la mode qui veulent déva­lo­ri­ser le céli­bat sacer­do­tal », – si le pré­lat alle­mand sou­te­nait cet appel, François pourrait-​il dire qu’il pré­fère suivre, lui, le « che­min syno­dal » alle­mand qui pré­co­nise une « Eglise à visage ama­zo­nien », c’est-à-dire dotée d’un cler­gé marié ?

Un évêque pro­gres­siste comme Mgr Erwin Kraütler, par­ti­san très mili­tant de l’ordination d’hommes mariés, a indi­qué dans son livre Le renou­veau c’est main­te­nant. Les impul­sions du synode sur l’Amazonie pour la réforme de l’Eglise (Tyrolia, 2019), com­ment François par­vien­drait à s’en sor­tir subrep­ti­ce­ment : « le pape pour­rait, comme il l’a fait au synode sur la famille, ouvrir une porte en disant : « main­te­nant, vous les évêques, vous avez la pos­si­bi­li­té de faire ce que vous esti­mez bon ». »

C’est la « pas­to­rale de la cha­tière » : la porte doc­tri­nale est fer­mée, le céli­bat sacer­do­tal est main­te­nu par­tout, mais une ouver­ture « misé­ri­cor­dieuse » est pra­ti­quée en bas, loca­le­ment. Le risque est que le chat soit trop gros et qu’il reste coincé.

Le car­di­nal Sarah dénonce pré­ci­sé­ment cette mani­gance trop grosse. Il appelle un chat un chat et l’ordination d’hommes mariés non « pas une excep­tion, mais une brèche, une bles­sure dans la cohé­rence du sacer­doce. Parler d’exception serait un abus de lan­gage ou un mensonge. »

Abbé Alain Lorans

Source : DICI – FSSPX Actualités – 28/​01/​2020