Chronique d’un voyage au Caméroun – St Pie n° 178

Le same­di 1er août, c’est un petit coup d’effervescence qui réveille le Juvénat du Sacré-​Cœur. C’est, à 4:30 du matin, le départ en voi­ture des Pères Patrick Duverger et Arnold Trauner vers Yaoundé. Le Père Patrick, Supérieur de la Mission du Gabon, est aus­si res­pon­sable pour l’apostolat dans ce pays – apos­to­lat tou­jours nais­sant mal­gré des contacts de longue date : l’ampleur du tra­vail est trop impor­tante à Libreville pour la poi­gnée de prêtres qui y œuvrent, pour leur lais­ser le temps pour de plus nom­breuses ran­don­nées apostoliques.

Mais ce jour-​là, ça y est. On est par­tis… pour s’arrêter vers 7:00 à Four-​Place où les deux Pères disent la Messe pré­pa­rée par le Père Benoît Martin de Clausonne qui y séjourne, avec deux Sœurs de la Fraternité et une troupe de filles, en camp de vacances.

Sitôt repar­tis, c’est la longue route vers l’inconnu, aucun des deux prêtres n’ayant entre­pris ce voyage par la route aupa­ra­vant. On avale les kilo­mètres, jusqu’à échéance de 920 km avant d’arriver à Yaoundé, capi­tale du Cameroun, à 21:30.

L’accueil cha­leu­reux de Mme Pauline M. qui nous loge dans son « prieu­ré », nous fait un bref ins­tant oublier la fatigue de 14 heures de route. Puis c’est le som­meil qui nous appelle, vu que la jour­née du dimanche s’annonce bien pleine.

Une bonne qua­ran­taine de per­sonnes répond pré­sent à l’appel de la Messe de tou­jours. La cha­pelle à côté de la mai­son, flam­bant neuve puisqu’inaugurée le 24 avril der­nier, résonne du chant gré­go­rien et des can­tiques sous la hou­lette d’une cho­rale louée pour la cir­cons­tance. La pré­sence du Seigneur Eucharistique dans le taber­nacle pen­dant les quelques jour­nées de notre pré­sence, est un encou­ra­ge­ment sans nom pour la bat­tante qu’est Mme Pauline, qui du haut de ses presque huit décen­nies, a éta­bli sur fonds propres cet avant-​poste en une terre encore inex­plo­rée par la Tradition.

Au cours de l’après-midi, nous visi­tons la ville. Nous avons pris notre véhi­cule, fait qui a failli s’avérer fatal dès les pre­miers ins­tants, puisqu’il faut savoir s’adapter aux us et cou­tumes des auto­mo­bi­listes… Sur le mont Fébé, d’où le visi­teur a une vue impre­nable sur cette ville de deux mil­lions d’habitants, nous pous­sons jusqu’au siège de la non­cia­ture apos­to­lique. Il nous est don­né de ren­con­trer le Nonce qui après une cau­se­rie bien fra­ter­nelle, n’hésite pas à mon­ter dans notre voi­ture pour nous faire visi­ter le monas­tère Cistercien fon­dé depuis peu à une courte dis­tance de là. Depuis ce jour, le Père Arnold peut se van­ter du titre de « chauf­feur apostolique » !

De retour à la cha­pelle Notre-​Dame de Fatima, c’est le chant des Vêpres et le Salut du Très Saint Sacrement, et puis on se couche de bonne heure.

Le len­de­main nous conti­nuons la visite en ville – cathé­drale et pro­cure, basi­lique de Mvolyé – puis les pré­pa­ra­tifs pour le départ vers Douala pré­vu pour mar­di. Dans l’après-midi nous nous ren­dons au vil­lage Akono, à une soixan­taine de kilo­mètres de Yaoundé où une ancienne fidèle de Libreville nous accueille. C’est encore une bonne cin­quan­taine de per­sonnes qui assistent à la Messe chan­tée. Pour cer­tains d’entre eux, ce sont des « retrou­vailles » avec la Tradition. Le désir de voir reve­nir ce tré­sor de grâces est brû­lant et authen­tique chez tous. « Seigneur, donnez-​nous des prêtres, beau­coup et beau­coup saints ! »

Mardi voit le Père Patrick conti­nuer l’instruction caté­ché­tique de quelques enfants du voi­si­nage, puis vers midi c’est le départ pour Douala. Les 255 km sont par­cou­rus en 3 ¼ heures (4 ½ heures au retour). Rendez-​vous a été pris avec Mme Veuve Martine T. qui nous accueille dans sa demeure dans un quar­tier popu­laire. Une dou­zaine de per­sonnes assistent à la Messe ce soir-​là. C’est bien peu, car Mme Martine n’a fait la connais­sance de la Tradition que depuis quelques courtes années. Son par­cours pour­ra un jour figu­rer dans un « pal­ma­rès des hauts faits de la Crise » : Feu Monsieur T. avait depuis de longues années renon­cé à ses fonc­tions de caté­chiste dans l’église moderne. Il ins­trui­sait au mieux ses enfants de la doc­trine tra­di­tion­nelle, et puis il est décé­dé avant d’avoir pu nouer contact avec la Mission du Gabon. C’est Mme T. qui à deux reprises déjà s’est ren­due à Libreville avec ses enfants pour leur per­mettre de rece­voir les sacre­ments de la Confirmation et de l’Eucharistie dans le rite catho­lique immuable…

Le mer­cre­di est employé à visi­ter la ville de Douala, et dès jeu­di nous repar­tons vers Yaoundé où nous attend un par­cours du com­bat­tant : les démarches admi­nis­tra­tives qui per­met­tront d’asseoir défi­ni­ti­ve­ment la base légale pour une future ins­tal­la­tion de la Fraternité au Cameroun.

Après l’expérience faite à l’aller, nous déci­dons de répar­tir le retour au Gabon sur deux jours. Nous plions bagages le ven­dre­di matin pour par­tir à 11:30. Arrivés à 17:30 à Oyem nous avons beau­coup de peine à nous y loger, et c’est fina­le­ment à l’hôtellerie de la cathé­drale que nous trou­vons le gîte. Le same­di nous par­tons de bonne heure pour arri­ver à Libreville à 17:55.

La mois­son est immense, comme nous l’a confir­mé un curé à Douala : dès qu’il « met un peu de latin » à la Messe, les fidèles sont contents ! Les âmes sont affa­mées du véri­table pain de vie, beau­coup sont éloi­gnées de l’Eglise par des scan­dales sans nom dans un cler­gé nom­breux mais en déroute intel­lec­tuel­le­ment et spirituellement.

Prions le Seigneur de la mois­son de nous envoyer les ouvriers qui font tant défaut ! Sans Lui, nous ne pou­vons rien faire.

Extrait du Saint Pie n° 178 d’oc­tobre 2009